1 Les associations et la communauté sont souvent considérées comme des solutions de remplacement de la protection sociale assurée par l'État. Ces formes de solidarités sont, dans certains cas, idéalisées. Les solidarités privées fondées sur un altruisme mutuel renforceraient la cohésion sociale tout en préservant les individus de la pauvreté et de l'exclusion. De là à en déduire qu'il faut renforcer ces solidarités et s'appuyer sur elles, il n'y a qu'un pas aisément franchi. La Banque mondiale a d'ailleurs récemment relancé son programme de travail sur cette question sous le vocable de capital social [1]. Cette institution cherche à valoriser cette forme de capital, quitte à en créer là où il n'y en a pas, afin de favoriser le développement et d'assurer la protection sociale des individus.
2 L'objet de cet article est de souligner à quel point une telle perspective est ambiguë. Les solidarités associatives et communautaires ne sont pas des substituts à la protection sociale de l'État dans bien des cas. Elles n'ont pas, par ailleurs, que des effets positifs et, loin de protéger contre la pauvreté et l'exclusion, elles peuvent elles-mêmes s'avérer une source produisant ces maux.
3 L'article présente quatre sections. La première présente le cadre analytique du capital social, dont on distingue différentes formes. La seconde section examine, dans le cas de la Mauritanie, une forme de capital social qualifié de volontaire. Par opposition, la troisième section nous souligne à partir du cas de la Lawha, toujours en Mauritanie, les effets pervers de ce que nous appellerons le capital social contraint. L'article se conclut par une discussion sur le rôle que joue le capital social comme instrument de protection sociale.
LES FORMES DE CAPITAL SOCIAL
4 Le capital social est devenu une thématique extrêmement en vogue [1]. Putnam (1993) a largement contribué à ce phénomène en pointant le rôle que cette forme de capital est susceptible de jouer dans le développement économique. Pour être plus précis, il y voit « une condition préalable au développement économique ainsi qu'à l'efficacité des gouvernements » (p. 37). Il ne s'agit pas ici de discuter cette thèse, qui est par ailleurs largement débattue dans la littérature, mais de prendre acte de l'importance que le concept a pris ces dernières années. À ce titre, il nous suffit de noter que la Banque mondiale s'est emparée de la notion et a lancé un programme de travail intitulé « Social capital initiative », dirigé par C. Grootaert et T. Van Bastelaer, en s'appuyant largement sur les travaux de Putnam. La définition que ce dernier donne au concept est alors un point de repère obligé ; il s'agit des « caractéristiques des organisations sociales, telles que les réseaux, les normes et la confiance, qui facilitent la coordination et la coopération en vue d'un profit mutuel » (p. 36). Cette définition laisse la porte ouverte à plusieurs voies de recherche, tout en posant un problème. Les voies de recherche, s'intéressent aux caractéristiques relativement hétérogènes, contenues dans la définition, que sont les réseaux, les normes et la confiance ; elles sont assez différentes pour donner lieu à diverses recherches micro-économiques et sociales ou macro-économiques et sociales. Le problème fondamental posé par cette définition concerne, quant à lui, le lien établi entre les caractéristiques et ce qu'elles produisent : Putnam semble associer au capital social un « profit mutuel ». Est-ce à dire que les mêmes caractéristiques qui ne produiraient pas ce profit mutuel ne pourraient être considérées comme du capital social ?
5 Ces difficultés n'ont pas empêché l'utilisation du concept par la Banque mondiale. Au contraire, c'est autour de typologies des formes de capital social que le travail a évolué. Deux typologies retiendront particulièrement notre attention. D'abord celle de Collier (1998), entre capital social gouvernemental et capital social civil, ensuite celle de Krishna et Uphoff (1999) entre capital social structurel et capital social culturel. La distinction qu'établit Collier entre capital social gouvernemental et capital social civil illustre bien la position que le capital social est amené à prendre vis-à-vis de la protection sociale. Le capital social gouvernemental est assimilé à l'ensemble des institutions érigées par le gouvernement et qui ont pour vocation de concrétiser des buts que le marché ne permettrait pas de réaliser. Évidemment, cette appellation renvoie très facilement aux dispositifs de protection sociale gouvernementaux. Le capital social civil est, par défaut, ce qui n'est pas gouvernemental et émane des individus ou des communautés. Apparaît ici le rôle associatif ou communautaire dans la protection sociale. La typologie que proposent Krishna et Uphoff complète celle de Collier. Selon ces auteurs, le capital social structurel se réfère aux formes diverses d'organisations sociales tandis que le capital social culturel correspond aux processus mentaux et aux idées qui y sont associées. Cette seconde typologie relève d'un second niveau d'analyse. Autrement dit tout capital social, qu'il soit civil ou gouvernemental, présente des dimensions structurelles et culturelles. Dans ce cadre, la protection sociale prend une dimension assez large. Un troisième niveau d'analyse vient compléter les deux précédents dans la mesure où la construction de toute forme de capital social selon des traits culturels et structurels dépend de l'adhésion, soit volontaire, soit contrainte des individus. Ces deux aspects enrichissent l'analyse.
6 Ces différentes catégorisations du capital social permettent d'envisager des cas multiples. Nous avons par exemple les associations qui correspondent au capital social civil volontaire, tandis que les communautés répondent plus à une forme de capital social civil contraint. Évidemment, des situations mixtes sont susceptibles d'exister, telles que des associations villageoises à base communautaire. Du côté du capital social gouvernemental, on trouve par exemple des dispositifs avec contrainte et, par opposition, certains dispositifs volontaires comme des dispositifs de prévention contre certaines formes de maladie, gratuits et prenant la forme de visites libres.
7 Une telle approche peut certes être contestée. Le capital social recouvre ici un ensemble de dispositions très large, donnant l'impression d'un concept fourre-tout. On peut alors se demander s'il ne serait pas plus opportun de conserver simplement la dénomination de protection sociale étatique par opposition aux autres formes de protection sociale dispensées par les solidarités individuelles. Cependant, il ne s'agit pas ici de contester la définition et l'approche du capital social proposées par la Banque mondiale, mais plutôt, à partir des termes de référence qu'elle utilise, de montrer en quoi cette vision connaît certaines limites. Dans la suite de notre propos, nous nous référerons donc à des formes de capital social civil fondées d'abord sur l'adhésion volontaire, ensuite sur l'adhésion contrainte. Nous illustrerons ces deux formes par des données sur la Mauritanie.
LE CAPITAL SOCIAL CIVIL VOLONTAIRE
8 Cette forme de capital social civil est représentée essentiellement par les associations. Nous incluons également dans cette ligne de présentation les associations villageoises à base communautaire, même si de fait elles sont une forme hybride entre l'adhésion volontaire et la contrainte communautaire. La base de données utilisée est l'enquête permanente sur les conditions de vie des ménages (EPCV), réalisée au niveau national par l'Office national de la statistique (2002). Cette source ne fournit pas de données concernant l'origine des associations. En particulier, il n'est pas possible de définir leur histoire, le contexte dans lequel elles ont été créées, etc. Dès lors, il est possible que ces associations soient une forme ancienne de capital social ou que, au contraire, elles émanent des contraintes imposées par les bailleurs de fonds dans le cadre de leur volonté de faire participer la population à son propre développement ; elles constitueraient de ce fait plutôt une création exogène de capital social [1]. L'ambiguïté du concept de capital social est bien révélée par ce problème. Cependant, dans la mesure où les institutions de développement, telles que la Banque mondiale, semblent promouvoir le développement du capital social même là où il n'existe pas, par des créations ex nihilo, nous conservons le terme pour la suite de l'analyse.
9 En Mauritanie, il semblerait que la participation aux activités des organisations communautaires et des structures associatives soit assez faible (tableau 1). À peine 10% déclarent participer aux activités d'une structure de ce type. En revanche, selon l'enquête permanente sur les conditions de vie des ménages (2002), 46 % d'entre eux ont recours à la solidarité familiale. Et parmi eux, les deux tiers considèrent qu'ils y trouvent l'aide nécessaire. L'analyse des premières demandes d'aide éclaire bien les priorités établies en termes de réponse aux situations de pauvreté. En cas de besoin, 37 % des personnes s'adressent d'abord à leurs parents, 31,6% vendent des biens, 10 % font appel au voisinage, 4,6 % font une demande à l'État, et moins de 1 % ont recours aux associations ou à la municipalité. La famille constitue la première source d'aide, les associations étant au contraire extrêmement peu sollicitées.
10 Les raisons invoquées pour justifier la non-participation à ces associations ou groupes communautaires formels est principalement le non-intérêt qu'ils présentent pour les individus, suivi par le manque de temps et le manque d'argent (tableau 2). Cependant, de manière apparemment paradoxale, les groupes communautaires et les associations sont jugés utiles par la plupart des gens. Plus les individus se trouvent en situation de pauvreté plus ils considèrent ces organisations comme utiles (tableau 3). La participation aux activités de ces groupes et associations est plus importante chez les plus pauvres : parmi les 10 % qui déclarent adhérer à une association, elle est de 86,8 % pour les individus se trouvant en situation d'extrême pauvreté, de 82,3 % pour ceux considérés en situation de pauvreté et de 80,7 % pour les non-pauvres. Ainsi, il existe bien une relation entre l'utilité perçue des associations et la participation. Les groupes les jugeant les plus utiles sont aussi ceux qui y participent le plus.
Groupes |
Nouak chott |
Autres villes |
Rural fleuve |
Rural autre |
En semble |
ONG Association professionnelle GIE Parti politique Organisation de femmes Association villageoise communautaire Association religieuse Association culturelle/sportive Association parents d'élèves Conseil de famille Autres Aucune |
0,25 0,11 0,34 2,51 1,2 1,33 0,16 0,15 0,09 0,3 93,55 |
0,53 0,31 0,44 9,17 0,58 0,99 0,14 0,21 0,21 0,1 0,14 87,17 |
0,29 0,3 1,36 1,22 1,54 0,03 0,67 0,11 0,04 0,03 94,41 |
0,26 0,2 0,48 8,2 1,05 2,69 0,32 0,07 0,17 0,03 0,02 86,5 |
0,31 0,15 0,4 5,48 1,05 1,81 0,19 0,24 0,14 0,04 0,11 90,07 |
Total | 100 | 100 | 100 | 100 | 100 |

Raison de non-participation
Raisons | Proportions |
Pas de temps Pas d'argent Pas intéressé Se sent exclu Pas assez instruit Interdit religieux N'existe pas S'occuper de la famille Autre Total |
23,6 8,7 41,4 0,9 4,8 0,3 11,3 7,2 1,9 100 |

Raison de non-participation
Utilité |
Extrême pauvreté | Pauvre |
Non- pauvre |
En semble |
Très utile Utile Pas utile Pas d'opinion |
61,4 30,6 3,9 4,2 |
57,1 34,2 2,6 6,2 |
52,8 35,8 3,9 7,4 |
55,6 34,3 3,8 6,4 |
Total | 100 | 100 | 100 | 100 |

11 Comment expliquer alors ce faible taux de participation de 10 %, malgré le caractère jugé très utile. Plusieurs réponses complémentaires peuvent aider à comprendre ce paradoxe apparent. Tout d'abord, les personnes peuvent ne pas savoir que des groupes existent ou encore ne pas se sentir concernées. Le tableau 2 suggère que le manque d'argent ou le manque de temps expliquent que les plus pauvres jugent utiles ces groupes mais n'y participent pas, soit en raison de la cotisation monétaire ou des dépenses que cela impliquerait, soit en raison des contraintes d'allocations de temps ; celles-ci sont rigides, liées à l'activité continue de certains d'entre eux, par exemple les petits marchands, ou à la multiplicité des activités pour d'autres ; elles rendent la participation à une association ou un groupe communautaire relativement difficile. Une autre explication, probablement importante, tient au fait que, certaines associations peuvent apporter aide et assistance aux personnes sans que celles-ci aient besoin de participer directement. C'est le cas, en particulier, d'associations qui agissent dans le domaine de l'action sociale ; elles représentent une part importante arrivant en seconde place après celles qui interviennent dans le domaine politique (tableau 4). Il se peut aussi que les associations soient créées par des individus pour répondre aux exigences des bailleurs de fonds, mais qu'en dehors du groupe restreint de personnes qui gèrent et sont actives dans l'association, elles n'arrivent pas à s'adjoindre la participation de personnes supplémentaires (ou ne le souhaitent pas, afin d'éviter de partager pouvoir et/ou manne financière).
12 Cependant, hormis le domaine de l'action sociale, les associations ont pour la plupart une visée utilitaire, au sens de bénéfices que l'on peut en obtenir. Principalement orientés vers la politique ou encore l'agriculture et l'environnement dans les zones rurales, ces groupes et associations ont bel et bien une vocation spécifique dont les individus membres peuvent attendre des bénéfices individuels. Sans renier les explications précédentes, une hypothèse complémentaire peut être suggérée : les individus participent aux associations dans la mesure où ils peuvent en attendre un gain. Or ce gain sera probablement d'autant plus important qu'ils ont un pouvoir de décision dans l'association. De ce fait, si les populations qui considèrent ces associations comme les plus utiles sont aussi celles qui sont le moins en mesure d'en bénéficier, alors elles ont peu de raison d'y participer. Deux indices laissent penser que cette hypothèse pourrait également être une des causes de la faible participation.
Principaux domaines d'activité des associations et groupes communautaires
Domaines |
Nouak chott |
Autres villes |
Rural fleuve |
Rural autre |
En semble |
Action politique Action sociale Santé/Sanitaire Éducation/Alphabétisation Information Construction Agriculture/Environnement Artisanat Loisirs/Rencontres Autres |
46,52 39,15 1,9 1,4 1,02 1,62 0,93 1,44 5,02 |
70,79 13,35 0,42 4,25 1,39 0,51 4,44 1,87 1,55 1,43 |
24,16 40,54 0,86 3,67 2,82 18,76 4,25 4,13 0,8 |
61,88 18,37 0,39 1,54 3,49 0,36 10,39 2,84 0,39 0,34 |
56,85 23,32 0,7 2,36 2,38 0,62 8,61 2,48 1,26 1,41 |
Total | 100 | 100 | 100 | 100 | 100 |

Principaux domaines d'activité des associations et groupes communautaires
- Le premier indice concerne la position des personnes les plus pauvres dans ces associations ou groupes communautaires. Les données montrent que les plus pauvres sont les moins présents dans les organes de décision de ces associations ou groupes. 42,2 % des non-pauvres affirment participer aux organes de décision, tandis que les pauvres ne sont plus que 32,8 % à le faire ; ceux qui sont considérés en situation d'extrême pauvreté ne disent être membres de ces organes de décision que dans 27,4 % des cas. Ce constat amène à deux interprétations distinctes. Une première serait d'admettre que le fait de ne pas être membre des organes de décision diminue l'implication générale des individus et limite l'intérêt qu'ils peuvent trouver à ces associations et groupes : les juger utiles, sans pour autant y participer. Une seconde interprétation consiste à relier la participation à la possibilité d'utiliser l'association ou le groupe pour satisfaire des intérêts personnels. Les plus pauvres sont certes conscients de l'utilité de ces formes de groupement mais n'y participent pas puisqu'ils ne pourront en bénéficier directement. Au contraire, les bénéfices iront principalement aux membres contrôlant l'organisation, essentiellement les moins pauvres et les non-pauvres. Cette interprétation est relativement cohérente avec les principaux domaines d'activité dans lesquels exercent ces groupes, hormis l'action sociale. Le contrôle de ces activités devient alors un enjeu essentiel. À l'inverse, les associations liées aux loisirs et aux rencontres, à la diffusion de l'information, etc., dont le caractère altruiste est plus marqué, ne représentent qu'une part très faible de l'ensemble des activités habituelles. Du fait de l'absence de bénéfices immédiats, les individus ne sont guère tentés de fonder ou de participer à de telles associations.
- Le second indice concerne les raisons évoquées pour expliquer l'absence de participation. La première raison, soit 41,4% des réponses, est le manque d'intérêt. En grande majorité, les individus considèrent ces associations comme utiles mais ne sont pas tentés d'y participer. Or, il n'est pas excessif d'imaginer que ce manque d'intérêt est fortement lié à l'absence de gains que l'on peut obtenir. Le fait que ces associations soient une forme ancienne de capital social ou une création nouvelle exogène imposée par les bailleurs de fonds ne change pas le problème. Ceux qui contrôlent l'activité sont aussi ceux qui disposent de l'utilisation des fonds. Considérer que les dirigeants de ces associations servent les intérêts des autres avant de servir leurs propres intérêts est une hypothèse qui paraît beaucoup plus héroïque que celle visant à supposer le contraire.
14 Les données et l'interprétation que nous en faisons semblent montrer que le capital social civil sur base volontaire est extrêmement faible en Mauritanie. Par ailleurs, le contrôle de ces organisations sociales par les catégories de population les moins pauvres pourrait bien jouer un rôle non négligeable dans cet état de fait. Les populations les plus pauvres sont celles qui jugent le plus ces associations utiles mais sont aussi celles qui en contrôlent le moins les objectifs et le fonctionnement. Étant donnée la visée principalement utilitaire qu'elles recouvrent, la relation entre la participation et la possibilité de satisfaire des fins personnelles paraît probable. Il n'est alors pas étonnant que ces organisations sociales ne soient que faiblement développées puisque ceux qui les jugent les plus utiles sont aussi ceux qui en bénéficieront le moins. Cette forme de capital social n'apparaît, dans ces conditions, que comme un piètre moyen pour servir de base à la fourniture d'une protection sociale en faveur des plus pauvres.
LE CAPITAL SOCIAL CIVIL CONTRAINT, LE CAS DE LA LAWHA
15 Nous entendons ici par capital social civil contraint un ensemble de relations sociales dans lesquelles l'individu est imbriqué et dont la caractéristique essentielle est la contrainte. Le mode de fonctionnement de ces relations dépend de valeurs ou de normes sociales et culturelles auxquelles l'individu ne peut se soustraire sans courir le risque d'une exclusion de la communauté de relations. Cette contrainte ne signifie pas que l'individu ne peut à aucun moment se soustraire aux règles communautaires, mais simplement que cette distanciation avec la communauté risque de provoquer son exclusion alors même qu'il peut être dépendant de celle-ci dans un certain nombre de circonstances économiques et sociales.
16 Il convient de préciser tout de suite la diversité des formes de capital social liée directement aux différences de culture qui caractérisent la société mauritanienne. Plus exactement, en fonction de l'appartenance culturelle, culture maure ou culture négro-africaine, chaque communauté développe ses propres formes de capital social et/ou adapte les formes qui répondent à ses normes et valeurs sociales. La communauté maure a tendance à privilégier les lawhas et la touiza comme forme de solidarité sociale, tandis que la communauté négro-africaine pratique d'autres formes de solidarité sociale telles le piyé et les tontines (dont elle ne détient d'ailleurs plus le monopole depuis quelques années) [1].
17 Nous nous centrerons sur le cas des lawhas [2]. Elles constituent une pratique communautaire qui engage les membres d'un groupe, d'une tribu ou d'un clan à travers une cotisation monétaire à l'occasion de certaines circonstances. Cette cotisation se fait à parts égales pour chaque membre. Elle est destinée à compenser les dégâts que subissent les membres du groupe (incendie par ex.). Les lawhas peuvent aussi servir de compensation dans le cas de meurtre. Après de longues discussions entre les membres du groupe de la victime et ceux du groupe de celui qui a commis le crime, ces derniers s'engagent à verser une somme convenue au tuteur de la victime, la diya. Le montant de la diya peut être très élevé et représente bien souvent plusieurs années de salaires d'un fonctionnaire de base. Elle peut varier de 20 000 à 1 million d'UM [1]. Le seul moyen pour obtenir cet argent est recourir à la lawha [2].
18 Dans le cas d'un crime, le système des lawhas fonctionne comme une sorte d'aveu collectif et vise à présenter les membres du groupe ayant commis le crime comme un corps soudé et solidaire. La conscience collective sous-jacente à ce comportement a aussi pour finalité, en faisant cotiser chaque membre du groupe, de lui faire partager implicitement la responsabilité du crime et de diluer ainsi toute velléité de vengeance de la part du groupe victime à l'égard de l'individu qui a commis le crime.
19 Les lawhas ne sont pas limitées aux crimes et incendies. Elles sont souvent utilisées dans les cas de décès, quelle qu'en soit la cause, et généralement de maladie grave ou durable. Dans le cas des décès, la participation est moins formelle et exigeante. Elle est libre et s'arrête le troisième jour après le décès. En revanche, dans les cas de maladie, la somme est fixe et répartie entre les différents membres. Elle couvre souvent l'hospitalisation, le traitement et le transport du malade. Cette somme peut être très importante quand l'hospitalisation se fait à l'étranger puisqu'elle couvre tous les frais, y compris le billet d'avion si nécessaire. Si le traitement est réalisé par un marabout, ce dernier fixe le prix de sa prestation. Il s'agit bien d'une forme de protection sociale contre les événements imprévus (incendie, décès, maladie, etc.).
20 Cette forme de solidarité a une origine culturelle arabe, la assabiya (Ibn Khaldun). Le paiement de la diya est clairement recommandé par l'islam. C'est donc à travers son fondement culturel et religieux que la lawha, comme forme de solidarité sociale, trouve son ancrage dans la conscience collective. Les relations sociales sont régies par une valeur ou norme collective d'origine religieuse ; les individus qui y sont imbriqués ne peuvent donc pas s'y soustraire aisément. Nous retrouvons la caractéristique du capital social mentionnée : en cas d'événements imprévus, le caractère contraignant de cette forme de capital social s'applique, la cotisation est obligatoire pour les membres d'un même groupe. Cette forme de solidarité sociale traditionnelle a pour effet de maintenir une certaine cohésion sociale au sein des groupes.
21 Cependant avec l'évolution du cadre de vie des populations et avec l'urbanisation de plus en plus poussée, on assiste à une réadaptation des lawhas pour servir et valoir dans de nouveaux contextes. En effet si les lawhas traditionnelles étaient destinées à répondre à une situation catastrophique, les formes qu'elles prennent aujourd'hui couvrent plutôt des situations occasionnelles mais plus fréquentes telles que des mariages, des élections, et souvent des maladies. Elles peuvent même être évoquées en cas de détournement de deniers publics par un membre de la tribu ou du clan ! Dans ce cas, la sanction qui s'abat sur le fraudeur se répand à tous les membres du groupe qui doivent cotiser pour payer le remboursement de la fraude et, partant, offrir au fraudeur une couverture sociale et une « sécurité morale ».
22 En revanche, les modalités de cotisation n'ont, elles, pas évolué. Rien n'a changé dans la façon dont l'argent est ramassé. Traditionnellement, à la suite d'un événement catastrophique ou d'un meurtre, les membres dirigeants du clan ou de la tribu se réunissent et fixent la valeur de la contribution communautaire. Elle sera partagée à parts égales entre tous les hommes en âge de jeûner (soit 18 ans) et physiquement aptes à travailler, membres du clan ou de la tribu. Cependant, dans le cas de décès pour cause naturelle ou accidentelle, la participation est libre et s'applique à tous les membres de la communauté, y compris les femmes. S'il s'agit de maladie, la somme est souvent fixée par le marabout, qui estime ainsi le prix de son intervention ; ce prix dépend de la maladie mais aussi de la personne soignée. La somme demandée représente donc la valeur de la personne.
23 La cotisation individuelle peut augmenter ou diminuer selon le nombre de participants. Il faut souligner aussi que l'échéance de cotisation est souvent très courte (une à deux semaines), voire immédiate dans le cas de maladie. Seules les situations d'infirmité peuvent permettre d'exempter certains membres. Quant à la situation de chômage, elle n'est pas considérée comme motif d'exemption. Aujourd'hui, comme les lawhas ont pris des formes modernes et s'appliquent désormais à l'occasion de mariages, d'élections, voire de détournements de deniers publics, mais aussi de soins à l'étranger dans les cas de maladie sérieuse, leur fréquence s'est considérablement accrue. Qu'elles soient de forme traditionnelle, ou moderne, elles s'appliquent indifféremment à tous, sans égard aux inégalités de revenus des uns et des autres.
24 Cette forme de solidarité sociale communautaire n'est pas sans effets pervers. D'abord, en protégeant contre certaines formes de dangers, elle peut provoquer une plus grande prise de risque de la part de certains individus. L'exemple typique est l'utilisation de la lawha dans le cas de sanction à l'encontre des personnes qui ont détourné des deniers publics. Cette protection incite évidemment les individus à la corruption puisqu'ils n'en subiront pas la sanction, en tout cas sous forme monétaire. Le cas plus traditionnel du crime est tout aussi illustratif. De même, dans le cas des maladies, les personnes sont incitées à partir à l'étranger, où le système de prestation de soins est meilleur, puisque le coût est supporté par l'ensemble de la communauté. Dans tous ces cas, la protection communautaire crée des externalités négatives sur la collectivité dans son ensemble en accroissant le risque que se produise un événement néfaste (crime, corruption, etc.).
25 Ensuite, par son mode de cotisation monétaire, la lawha peut affecter les individus de la communauté même. La conscience collective ajoutée à la crainte de se retrouver en marge du réseau (tribal ou clanique) pousse souvent l'individu à se débrouiller pour cotiser comme les autres. C'est ainsi qu'en se « débrouillant », l'individu peut s'endetter, ou vendre des biens matériels en sa possession (matelas, tapis, animaux, bijoux, etc.) pour sauver son honneur et éviter d'être considéré comme non solidaire du groupe. Le risque de pauvreté de certains individus est d'autant plus grand que plusieurs circonstances se succèdent ou que les inégalités intragroupes sont fortes. En effet, en raison des modalités de fonctionnement de cette forme de capital social, en particulier le fait que la décision soit prise par les chefs du groupe, ou par le marabout en cas de maladie, et le caractère contraignant de la cotisation fixée indépendamment du revenu du contributeur, le poids de celle-ci risque d'affecter d'autant plus les plus pauvres que les inégalités au sein du groupe sont fortes, car elle peut être fixée à partir d'un revenu moyen.
26 Cette forme de solidarité communautaire apparaît à bien des égards très inéquitable. Il est en effet fort probable que la décision des chefs dépende de la hiérarchie sociale de celui qui est en cause dans l'événement qui affecte la communauté. Dans ces circonstances, on peut s'attendre à ce que les plus riches profitent de l'aide des plus pauvres tandis que les plus pauvres non seulement bénéficieront moins de cette aide communautaire, mais de surcroît risquent de s'appauvrir. Un cas typique est celui de maladie d'une personne importante et possédant un certain revenu. Le prix fixé par le marabout étant lié à la personne soignée, et pas seulement à la maladie, les plus pauvres devront payer plus pour la maladie d'un riche qu'un riche pour la même maladie d'un pauvre. Un refus de contribution ne provoque pas seulement une marginalisation de l'individu, mais conduit de plus à une exclusion du groupe dont dépendent parfois certaines autres formes d'aide communautaire.
27 Ainsi, comme pour le capital social à base volontaire, cette forme avec contrainte ne s'avère guère être un meilleur moyen de protection sociale des plus pauvres. Bien au contraire, elle garantit une protection à ceux qui ne le sont pas et risque d'appauvrir les plus démunis.
DISCUSSION
28 La protection sociale associative ou communautaire est souvent idéalisée parce que les associations et les communautés le sont également. Ces dernières permettraient de répondre efficacement aux problèmes économiques, sociaux et environnementaux. Ostrom (1990), par exemple, considère que la surexploitation des ressources naturelles peut être endiguée par le recours à des mécanismes de gestion communautaire. Concernant les dispositions de protection sociale, les associations et la communauté sont, là aussi, considérées comme des éléments essentiels qui viennent combler les défaillances du marché et de l'État. Récemment l'approche communautarienne ou associative s'est enrichie par le rapprochement avec le concept de capital social. Certes les deux concepts sont différents, mais les liaisons sont faciles à établir si une dimension culturelle est donnée au capital social. Plus exactement, le capital social faciliterait la coopération volontaire au sein d'une communauté d'appartenance en garantissant l'émergence de normes de réciprocité et de valeurs communes.
29 L'absence ou la faiblesse de l'État peut parfois laisser croire que les associations ou les mécanismes communautaires vont combler ce vide de manière adéquate. Plusieurs éléments méritent d'être discutés avant de pouvoir confirmer ou infirmer cette thèse.
30 Tout d'abord, le capital social civil est-il substituable au capital social gouvernemental, l'un peut-il remplacer l'autre ? Narayan (1999) étudie les relations de substitution et de complémentarité entre le capital social civil et le capital social gouvernemental. Il propose une typologie générale en quatre configurations. La première est qualifiée de « scénario idéal ». Elle correspond à l'amélioration du bien-être économique et social des populations et se caractérise par un haut niveau de fonctionnement de l'Etat et une bonne gouvernance, associés à des liens entre les différents groupes sociaux. Cette configuration est donc marquée par une complémentarité entre les deux formes de capital social. Il classe dans ce cas les pays scandinaves et les Pays-Bas. La seconde repose toujours sur une complémentarité mais elle engendre de l'exclusion. Dans ce cas de figure, le fonctionnement de l'État est plutôt bon mais ce dernier est essentiellement dirigé par un groupe social dominant. Il y a peu de liens entre les groupes sociaux, ce qui conduit à l'exclusion des groupes dominés. Cette configuration concerne une majorité de pays européens, les États-Unis, mais aussi l'Inde avec son système de castes ou encore certains pays d'Amérique du Sud comme le Pérou ou le Mexique. Elle est parfois relativement instable. Elle peut, en effet, soit tendre vers la configuration précédente si des liens sont construits entre les différents groupes sociaux, soit tendre vers une configuration de conflit entre groupes. La troisième configuration correspond précisément à une situation de conflit. Le capital social civil et le capital social gouvernemental sont des substituts l'un de l'autre. L'État cesse de remplir ses fonctions et certains groupes dominants s'arrogent l'autorité et exercent un pouvoir coercitif sur les autres groupes sociaux. La violence, la coercition, les mouvements de guérilla, dans certains cas, caractérisent parfaitement ce cas de figure. Enfin, dans la quatrième situation, l'absence d'intervention de l'État conduit les individus et groupes sociaux à se substituer à sa charge en se « débrouillant » par le biais de réseaux informels. L'économie est alors marquée par un haut niveau d'activité informelle, aussi bien concernant les domaines économiques que sociaux.
31 Cette typologie fait apparaître que la meilleure des situations est celle de complémentarité. Par ailleurs accroître la dotation en capital social des individus ne signifie pas automatiquement que l'utilisation de ce capital social garantira un rendement suffisant pour les sortir de l'exclusion et la pauvreté. On peut même envisager la situation dans laquelle le rendement se montre négatif et accroît le risque de pauvreté et d'exclusion des individus concernés.
32 On peut en effet se demander si l'existence de ces formes de capital social garantit que les effets qu'elles produisent sont systématiquement positifs. Ceci renvoie à une problématique des externalités, intra et intergénérationnelles. À cet égard, ne percevoir que les effets positifs est une vision extrêmement angélique. À plusieurs reprises des analyses ont relevé les effets négatifs du capital social en termes d'externalités sur le reste de la collectivité (cf. par ex. M. Rubio, 1997 ; C. Browning, R. Dietz, et S.L. Feinberg, 2000). Mais des effets négatifs sont également susceptibles de se produire pour les individus imbriqués dans les relations communautaires. Ce fait a aussi été relevé à plusieurs reprises (J. Ballet, 2001 ; B.O. Hamzetta, 2003). Nous avons appuyé ces deux constats en les illustrant par des formes de capital social dans la société mauritanienne. L'exemple de la lawha montre que des effets négatifs sont fortement susceptibles de se produire. Il peut s'agir d'externalités négatives pour la société dans son ensemble, par exemple l'augmentation des crimes et fraudes liée à la protection des criminels et fraudeurs assurée par la communauté. Il peut aussi s'agir d'effets négatifs sur les individus appartenant à la communauté. Comme nous l'avons suggéré, certaines formes de solidarités communautaires risquent d'appauvrir les plus pauvres de la communauté en protégeant les plus riches d'entre eux.
33 L'ambiguïté des effets semble dépendre fortement de l'importance des logiques individuelles et collectives. L'analyse des réseaux telle que celle de Granovetter (1973, 1974) ou plus récemment celle de Burt (1992) indique clairement que les liens tissés par les réseaux sont susceptibles de produire des avantages mais aussi que la structure du réseau joue un rôle considérable. Ainsi, d'un point de vue collectif, le réseau permet la diffusion de l'information et bénéficie globalement à tout le monde. Mais d'un point de vue individuel, comme le souligne Burt, les individus ont tout intérêt à bénéficier des trous structuraux dans ces réseaux. Un trou structural est l'absence de liaison entre des contacts non redondants. Imaginons deux cas possibles. Dans le premier cas l'individu E a des contacts avec les individus A, B, et C, mais ceux-ci n'ont pas de contacts entre eux. Dans le second cas, E a toujours des relations avec A, B et C, mais A, B et C ont également des contacts entre eux. Il est évident que, dans le premier cas, E possède un avantage en termes d'information sur A, B et C, avantage qu'il ne possède plus dans le second cas. Dans le premier cas il existe des trous structuraux, pas dans le second. Un trou structural donne donc un avantage à certains, ici E, et un désavantage à d'autres, ici A, B et C.
34 Comme toute forme de capital, le capital social permet la réalisation d'un gain. Il peut à cet égard être affecté à plusieurs formes d'objectifs ou d'intentions. La participation à un réseau permet par exemple d'obtenir de l'information, des conseils, un emploi, etc. Ce gain n'est pas nécessairement monétaire, mais il peut le devenir par un processus de conversion. Il peut être converti en avantage (Bourdieu, 1985). Ainsi, la position d'un individu dans un réseau social peut lui procurer un avantage social qu'il pourra convertir en avantage économique.
35 Dans une optique différente, Mahieu (1989) montrait que les relations sociales entre individus impliquent bien souvent une asymétrie de droits et obligations. Certains peuvent se trouver avec plus d'obligations que de droits à un moment donné du temps. Les jeunes urbains en Côte-d'Ivoire sont représentatifs de cette situation. Ils effectuent plus de transferts qu'ils n'en reçoivent. Dans ces circonstances, les relations sociales dans lesquelles sont imbriqués certains individus les pénalisent.
36 Dans les exemples que nous avons utilisés, le capital social produit potentiellement des effets négatifs parce que les individus qui contrôlent ce capital sont les moins pauvres. Les plus pauvres se trouvent alors utilisés par ces premiers pour satisfaire leurs besoins. Qu'il s'agisse du capital social volontaire ou contraint, le pouvoir de décision obtenu par les non-pauvres leur permet d'utiliser les ressources des plus pauvres pour améliorer leur niveau de vie ou se prémunir contre les risques. Dans ces conditions, le capital social volontaire ne peut être qu'un instrument faiblement utilisé par les plus pauvres.
37 Une telle analyse suggère plusieurs pistes de réflexion. Tout d'abord, l'utilisation d'un support communautaire ou du capital social révèle toute l'ambiguïté de certains programmes de protection sociale ou de développement économique. Dans des sociétés où les individus s'avèrent souvent vulnérables aux conditions économiques, le renforcement du capital social pourrait aussi les enfermer dans une trappe à pauvreté dont le seul moyen de sortir serait l'exclusion de la communauté. À ce titre, la lawha en Mauritanie exprime parfaitement ce risque. Le système des lawhas profite d'autant plus à l'individu que celui-ci est riche. En revanche, les plus pauvres de la communauté peuvent rapidement s'appauvrir plus s'ils sont contraints à cotiser pour un riche. La contrainte communautaire pourrait bien maintenir ou renforcer les situations d'inégalités et de pauvreté ; et ce, d'autant plus, que les individus ne veulent pas quitter la communauté pour des raisons culturelles ou un sentiment d'appartenance. Ensuite, favoriser le développement communautaire pourrait bien entraîner dans un certain nombre de cas une fragmentation sociale, voire une recréation ethnique, parfois préjudiciable à la société dans son ensemble. En effet, faire du développement communautaire un axe du développement suppose de s'appuyer sur certains fondements socioculturels dont les principaux supports sont soit la classe sociale, soit l'origine des populations. Dans les deux cas des effets négatifs sont faciles à imaginer. Il n'y a aucune raison pour que les plus riches participent d'un même système communautaire que les plus pauvres, sauf à le justifier par une appartenance commune, par exemple à une ethnie. Ainsi, éviter la décomposition par classe sociale, qui serait probablement très inégalitaire, risque de provoquer une décomposition ethnique. Les deux se recoupent d'ailleurs partiellement dans certains cas. Mais en opposant les systèmes, on oppose aussi facilement les individus y appartenant, créant aisément de la jalousie ou de l'envie, facilitant à cette occasion le sentiment d'appartenance mais aussi les risques de conflits entre groupes. Finalement, vue sous cet angle, la protection sociale communautaire ne fait figure que de piètre substitut à la protection sociale étatique. Elle en serait d'ailleurs davantage un complément à utiliser avec précaution.
Notes
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[*]
Université de Versailles Saint-Quentin, C3ED.
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[**]
École normale supérieure, Nouakchott, et GREPADEM.
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[1]
Pour une présentation de l'intégration de ce concept à l'analyse de la Banque mondiale, voir N. Sirven (2003). Voir aussi le site Internet de la Banque mondiale.
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[1]
Pour une présentation générale du concept en économie, voir D. Requier-Desjardins (2003).
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[1]
Il est fort probable que cette dernière interprétation soit correcte puisque la Mauritanie a défini un cadre stratégique de lutte contre la pauvreté dans lequel la participation de la population est une condition imposée par les bailleurs de fonds. Cependant, cela ne change pas fondamentalement l'analyse que nous formulons. Nous conservons l'expression « capital social » dans ce cas puisque, de fait, l'objectif des bailleurs de fonds ou des institutions comme la Banque mondiale est de créer du capital social perçu comme un facteur de développement. Évidemment cette interprétation peut être contestée. Si les associations sont créées de toute pièce par des institutions afin de servir de support intermédiaire au projet de financement, elles n'émanent pas d'un capital social issu des relations entre les individus. En fait, dans ce cas, il ne s'agirait pas d'une forme de capital social civil, mais plutôt d'une forme hybride entre le capital social gouvernemental et le capital social civil. L'appellation de capital social peut néanmoins être conservée.
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[1]
Depuis les années 1980, le phénomène des tontines n'est plus le fait exclusif des Négro-Africains. Les Maures et particulièrement les Haratines les pratiquent eux aussi. Pour un début d'analyse des autres formes de capital social, voir Hamzetta (2003).
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[2]
L'analyse qui suit est le fruit d'une participation et d'observations de terrain sur le fonctionnement des lawhas depuis plusieurs années, en milieu rural et urbain, par M. Hamzetta. Il ne s'agit donc pas de données d'enquête et nous ne pouvons à ce titre donner de résultats chiffrés. Il s'agit d'observations sur la population de culture maure uniquement.
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[1]
La monnaie mauritanienne est l'Ougiya noté UM. Un euro équivaut environ à 300 UM.
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[2]
Dans des cas très rares, certains individus assez riches procèdent au paiement de la diya sans recourir à la lawha.