CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Rejetant l’image d’une institution qui contraint, la médecine cherche aujourd’hui de nouvelles voies pour agir sur les comportements des individus qu’elle prend en charge. Depuis une dizaine d’années, on assiste à la formalisation croissante de pratiques éducatives nichées au cœur même du soin (Perrier & Perrin, 2018). Celles-ci doivent permettre aux personnes atteintes d’une pathologie chronique de gérer seules une partie ou la totalité de leur traitement, s’inscrivant dans un processus historique de délégation des soins aux malades (Pinell, 1996). En organisant la façon dont les malades acquièrent des connaissances et des compétences pour faire face à la pathologie dont ils sont atteints, les programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP) cherchent à modifier en profondeur les habitudes corporelles des malades chroniques. Cet article propose d’étudier les effets sociaux de tels programmes sur les personnes atteintes de diabète (voir encadré 1). Plus précisément, on se focalise ici sur la façon dont des normes nutritionnelles sont transmises aux participants, d’une part, et sur la façon dont ces derniers se les approprient, d’autre part.
Quand bien même ces programmes visent à s’adapter aux personnes qui y participent à travers une personnalisation des parcours éducatifs, la plupart des séances ayant trait à l’alimentation se font de manière collective et leur contenu reste déterminé en amont. Or, les participants ne sont pas égaux face au contenu des apprentissages dispensés lors des programmes d’éducation thérapeutique, étant donné la stratification sociale des pratiques alimentaires (Cardo…

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En organisant la façon dont les malades acquièrent des connaissances et des compétences pour faire face à la pathologie dont ils sont atteints, les programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP) cherchent à modifier en profondeur les habitudes corporelles des personnes atteintes de maladie chronique. Si les normes véhiculées pendant les ateliers éducatifs viennent encadrer les pratiques quotidiennes de l’ensemble des malades, ces derniers ne sont pas égaux face au contenu des apprentissages dispensés. En se focalisant sur les programmes destinés aux personnes diabétiques, et plus spécifiquement sur les changements alimentaires qui leur sont demandés, l’article montre que l’appropriation des normes nutritionnelles suppose un travail de transformation de soi, travail dont l’ampleur n’est pas la même selon les propriétés et la trajectoire sociales du participant. En particulier, les programmes éducatifs peuvent être vus comme une entreprise de conversion des classes populaires, dont le succès dépend de la réunion de certaines conditions sociales de possibilité.

  • socialisation
  • maladies chroniques
  • alimentation
  • corps
  • dispositions
Vincent Schlegel
Docteur en sociologie de l’Ehess, post-doctorant au sein de l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), chercheur associé au Cresppa-CSU
Irdes, 117bis rue Manin, 75019 Paris, France
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Mis en ligne sur Cairn.info le 07/11/2022
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