CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1L’hépatite B est une maladie hépatique qui est due au virus de l’hépatite B (VHB). Elle peut entraîner une infection chronique et exposer les individus au risque de cirrhose du foie et de cancer du foie. Selon l’OMS, 240 millions de personnes dans le monde vivent avec une hépatite B chronique (HBC, définie par un portage de l’antigène HBs depuis plus de six mois) et 780 000 en meurent chaque année [1, 2]. L’Afrique subsaharienne (ASS) est une zone de haute endémicité pour l’infection chronique par le virus de l’hépatite B où entre 5 et 10 % de la population est chroniquement infectée [1]. En ASS, l’hépatite B est mal connue des populations et des prestataires de soins, et rarement diagnostiquée. L’accès au traitement est très limité et peu intégré dans les programmes nationaux ou internationaux. Les antiviraux comme le ténofovir actifs à la fois sur le VIH et le virus de l’hépatite B, disponibles dans les programmes subventionnés de prise en charge du VIH, ne sont en règle générale pas accessibles aux patients ayant une HBC sans infection par le VIH.

2Les personnes originaires d’ASS vivant en France sont donc particulièrement concernées par ce problème de santé. On estimait en France en 2004 dans un échantillon national représentatif de bénéficiaires de l’assurance maladie que la prévalence de l’HBC était de 5,25 % parmi les personnes nées en Afrique subsaharienne (ASS), soit huit fois plus qu’en population générale [3]. Elles représenteraient ainsi environ 58 000 personnes atteintes d’HBC sur les 280 000 estimées en France. Cette prévalence pourrait être plus élevée si on tenait compte des personnes nées en ASS bénéficiaires de l’Aide Médicale d’État (AME) ou sans couverture maladie qui n’étaient pas incluses dans cette enquête nationale. D’autre part, 54 % des patients nouvellement pris en charge pour une HBC en 2008-2009 étaient nés en ASS [4]. Les rares données cliniques existantes sur ces derniers sont issus des centres experts en hépatologie et de la présente étude [5]. Diagnostiquer précocement l’HBC est important afin de pouvoir proposer un suivi clinico-biologique aux porteurs inactifs du VHB et un traitement aux HBC actives afin de prévenir l’évolution de la maladie vers la fibrose, la cirrhose et le cancer du foie. L’accès aux soins précoce des personnes originaires d’ASS porteuses du VHB est donc un préalable important à l’accès au diagnostic et à la prise en charge de leur maladie. Pourtant, peu de données sont disponibles sur l’accès aux soins dans cette population. Le système français permet en théorie l’accès à un dépistage gratuit dans certaines circonstances, à une couverture maladie, à une prise en charge et à la mise sous traitement lorsqu’il est indiqué pour la majorité des résidents [6, 7]. Cependant, les populations migrantes rapportent fréquemment des difficultés d’accès aux soins [8]. Il a en effet été montré que les défauts de couverture maladie et la précarité sociale peuvent conduire à des renoncements aux soins chez les migrants [9]. En particulier, l’accès à une couverture maladie est un déterminant important de l’accès au dépistage et aux soins, du maintien en soins et de morbi-mortalité [10, 11]. L’accès aux soins des migrants vivant avec une HBC pourrait ainsi dépendre de leur couverture maladie et de leur situation sociale.

3À partir des données de l’enquête biographique ANRS-Parcours réalisée auprès de personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant en Ile-de-France, l’objectif de ce travail est de décrire l’accès aux soins des personnes vivant avec une hépatite B chronique.

Méthodes

4L’étude ANRS-Parcours a été mise en place pour évaluer comment les trajectoires de santé et sociales et les parcours migratoires s’articulaient parmi les migrants originaires d’ASS vivant en Ile-de-France. Cette étude biographique rétrospective a été conduite de février 2012 à mai 2013 dans les services de soins d’Ile-de-France parmi trois groupes de personnes originaires d’ASS : un groupe de personnes suivies pour une infection par le VIH, un groupe de personnes suivies pour une HBC et un groupe recruté en médecine générale. Les données présentées ici concernent le groupe de personnes vivant avec une HBC. Le recrutement a eu lieu dans 20 centres tirés au sort par strates parmi les services spécialisés dans la prise en charge des hépatites en Ile-de-France appartenant à quatre catégories (7/7 services experts en hépatologie, 10/16 services hospitaliers prenant en charge des hépatites virales, 1/1 centre de santé du Comede et 2/2 réseaux ville hôpital impliqués dans le suivi des HBC). Les patients étaient éligibles s’ils étaient nés en ASS, âgés de 18 à 59 ans, diagnostiqués depuis au moins trois mois pour une HBC et non connus pour être co-infectés par le VIH. Les médecins proposaient l’étude et recueillaient le consentement de l’ensemble des patients éligibles, à l’exception de ceux avec des troubles cognitifs importants ou un état de santé ne permettant pas leur participation.

5Un questionnaire standardisé avec une grille biographique était administré en face-à-face à chaque participant par un enquêteur formé. Les informations cliniques et biologiques étaient recueillies par le médecin à partir du dossier médical. Toutes les informations ont été recueillies de manière anonyme. Les participants recevaient une gratification d’une valeur de 15 €. Le CCTIRS et la CNIL ont approuvé cette étude. Le protocole détaillé de cette étude a été enregistré sur le site clinicaltrials.gov sous le numéro NCT02566148. Les résultats concernant les autres volets de l’étude ont été présentés ailleurs [5, 12, 13].

6Les données recueillies concernent plusieurs champs d’information :

  • les caractéristiques sociodémographiques et migratoires de l’échantillon, la couverture maladie des participants au moment de l’enquête, ainsi que son acquisition après l’arrivée en France. Les questions étaient posées de la manière suivante : « Depuis votre (1re) arrivée en France, avez-vous eu une couverture maladie : sécurité́ sociale, ou CMU, ou AME… ? 1. Oui, 2. Non. Si Oui, à partir de quelle année avez-vous eu une couverture maladie ? Par la suite, y a-t-il des périodes d’au moins un an où vous n’avez plus eu de couverture maladie ? Et aujourd’hui quel type de protection maladie avez-vous ? 1. Sécurité́ sociale, 2. CMU (Couverture Maladie Universelle), 3. AME (Aide Médicale d’État), 4. Pas de protection maladie, 5. Autre. Avez-vous aujourd’hui une mutuelle santé/une assurance complémentaire santé ? 1. Oui, 2. Non. Êtes-vous actuellement couvert(e) à 100 % pour une affection de longue durée (ALD) ? 1. Oui, 2. Non. ».
  • le renoncement aux soins et le refus de soins. La question sur le renoncement aux soins était posée de la manière suivante : « Nous allons maintenant parler des problèmes que vous avez pu rencontrer dans les structures de soins : depuis que vous êtes arrivé(e) en France, vous est-il arrivé(e) de ne pas aller consulter un médecin ou un dentiste alors que vous en aviez besoin à ce moment-là ? 1. Oui une fois, 2. Oui plusieurs fois, 3. Non ». Les personnes ayant répondu « Oui » étaient ensuite interrogées sur les raisons du renoncement (plusieurs réponses possibles).

7La question sur le refus de soins était posée de la manière suivante : « Est-il arrivé qu’on refuse de vous soigner ou de vous délivrer des médicaments ? a) chez un médecin 1. Oui, 2. Non, b) à l’hôpital 1. Oui, 2. Non, c) dans une pharmacie 1. Oui, 2. Non ». Les personnes ayant répondu Oui à une des questions étaient ensuite interrogées sur les raisons du refus de soins (plusieurs réponses possibles).

  • le délai à l’entrée en soins après le diagnostic de l’HBC et la survenue d’une éventuelle rupture de suivi. Les questions étaient posées de la manière suivante : « Si un test de dépistage pour l’hépatite B a été positif, en quelle année avez-vous consulté pour la première fois un médecin pour cette maladie ? Avez-vous toujours eu un suivi médical depuis cette consultation, ou est-ce qu’il vous est arrivé de rester sans voir votre médecin plus de 12 mois ? ».

8Le test du Chi deux a été utilisé pour les comparaisons de pourcentage et un test non paramétrique de comparaison des médianes pour les variables quantitatives.

9Les données ont été pondérées en tenant compte de la probabilité d’inclusion dans l’étude pour chaque individu.

10Les analyses ont été réalisées avec l’aide du logiciel Stata 13.1 (Stata Corporation, College Station, TX, USA).

Résultats

Population étudiée

11Dans les services participants, 1 169 personnes répondaient aux critères d’inclusion de la partie de l’étude ANRS-Parcours concernant les personnes vivant avec une HBC, parmi lesquelles 25 n’ont pas participé à l’étude en raison de leur état de santé. Au total, 778 personnes ont été interrogées dans le groupe hépatite B (taux de participation de 68,5 %). Les participants ont été recrutés dans un service expert en hépatologie (54 %), un autre service hospitalier prenant en charge les HBC (39 %), au centre de santé du Comede (5 %) ou au sein d’un réseau ville hôpital (2 %). Après exclusion des personnes arrivées avant 1980, celles arrivées depuis moins d’un an, des personnes mineures à l’arrivée et des personnes ayant des données manquantes, 619 personnes originaires d’Afrique subsaharienne suivies pour une hépatite B chronique ont été incluses dans l’analyse.

12Les caractéristiques des participants sont décrites dans le tableau I. Les femmes représentent 27 % de l’échantillon. L’âge médian à l’arrivée est de 28 ans pour les deux sexes. Les trois quarts des participants sont arrivés après 2000. La plupart des personnes interrogées sont originaires d’Afrique de l’Ouest ou centrale. Les hommes ont plus souvent émigré pour chercher du travail, là où les femmes sont plus souvent venues rejoindre un membre de leur famille. L’absence de titre de séjour, de logement personnel et de ressources propres est fréquente à l’arrivée en France. L’absence de titre de séjour concerne plus d’un participant sur deux la première année.

Tableau I

Caractéristiques sociodémographiques des personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique (n = 619) en fonction du sexe (Île-de-France [France], 2012-2013) – Enquête ANRS Parcoursa

Tableau I
Hommes N = 458 % Femmes N = 161 % p Âge à l’arrivée (années) 0,68 18-24 25,5 25,4 25-29 35,9 39,0 30-60 38,6 35,6 Période d’arrivée 0,07 1980-1999 27,3 19,4 2000-2012 72,7 80,6 Niveau d’étude à l’arrivée < 0,01 Primaire ou moins 38,4 28,3 Secondaire 38,9 54,5 Supérieur 22,7 17,3 Région de naissance 0,21 Afrique de l’Ouest 81,5 74,5 Afrique centrale 17,1 23,2 Afrique de l’Est ou du Sud 0,0 2,3 Durée depuis l’arrivée en France < 0,05 Médiane (IIQa) 9,5 (4–13) 7,0 (3–12) Raison de la venue en France < 0,01 Trouver un travail / tenter sa chance 53,0 28,4 Menacé dans son pays 19,5 17,1 Rejoindre un membre de sa famille 21,5 45,4 Raison médicale 6,1 9,1 Droit au séjour à l’arrivée < 0,05 Aucun 61,9 46,5 Titre de séjour temporaire 32,9 46,0 Carte de résident (10 ans) 2,8 3,6 Nationalité française 2,5 4,0 Conditions de logement à l’arrivée < 0,001 Logement personnel 11,8 22,1 Hébergé par des proches 46,0 44,5 Structures collectives ou associatives 0,6 3,2 Foyer 15,6 0,4 Absence de logement stable 26,2 26,6 Ressources à l’arrivée < 0,001 Activité propre 68,5 37,6 Activité du conjoint ou de la famille 17,8 46,4 Aides sociales 6,9 9,0 Absence de ressources 6,8 7,0

Caractéristiques sociodémographiques des personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique (n = 619) en fonction du sexe (Île-de-France [France], 2012-2013) – Enquête ANRS Parcoursa

Pourcentages pondérés ; p : test du Chi 2.
a. IIQ : intervalle interquartile.

Couverture maladie

13L’obtention d’une couverture maladie s’est faite en médiane dès la première année après l’arrivée en France (Intervalle interquartile (IIQ) [1-2]). La proportion de personnes disposant d’une couverture maladie années après années après l’arrivée en France est présentée dans la 1. La quasi-totalité des participants obtiennent une couverture maladie en six ans.

Figure 1

Proportion de personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique disposant d’une couverture maladie années après années après l’arrivée en France (Île-de-France [France], 2012-2013) – Enquête ANRS Parcours

Figure 1

Proportion de personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique disposant d’une couverture maladie années après années après l’arrivée en France (Île-de-France [France], 2012-2013) – Enquête ANRS Parcours

14Entre l’obtention d’une première couverture maladie et l’enquête, 9,0 % des hommes et 5,6 % des femmes ont eu une rupture de couverture maladie d’au moins une année. Sur les quatre années qui suivent son obtention, cela représente 2,2 ruptures pour 100 personnes années pour les hommes et 2,4 ruptures pour 100 personnes années pour les femmes. Pour ceux qui sont concernés, la première rupture survient dans un délai médian de trois années pour les hommes (IIQ [1-4]) et d’une année pour les femmes (IIQ [1-2]).

15Au moment de l’enquête, réalisée en médiane neuf années après l’arrivée en France, la plupart des participants (96,4 %) ont une couverture maladie de base (tableau II). Les personnes sans couverture maladie sont plus souvent sans droit au séjour (73,3 % sans titre de séjour versus 26,8 % pour celles disposant d’une couverture maladie, p < 0,001). Elles sont également plus représentées parmi les personnes arrivées depuis moins de deux ans et entre trois et cinq ans en comparaison à celles arrivées depuis plus de cinq ans (10,8 %, 4,6 % et 2,6 % sans couverture maladie respectivement, p < 0,01).

Tableau II

Couverture maladie au moment de l’enquête des personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique (n = 619) en fonction du sexe (Ile-de-France [France], 2012-2013) – Enquête ANRS Parcours

Tableau II
Hommes % Femmes % p N = 458 N = 161 Couverture maladie de base AM 54,5 54,1 0,66 CMU 17,7 21,1 AME 24,0 21,9 Aucune 3,8 2,9 N = 240 N = 83 Couverture maladie complémentaire parmi les bénéficiaires de l’AM 69,4 62,0 0,32 Prise en charge à 100 % dans le cadre d’une affection longue durée parmi les bénéficiaires de l’AM 76,5 73,3 0,67 N = 90 N = 35 Prise en charge à 100 % dans le cadre d’une affection longue durée parmi les bénéficiaires de la CMU 77,9 70,6 0,41

Couverture maladie au moment de l’enquête des personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique (n = 619) en fonction du sexe (Ile-de-France [France], 2012-2013) – Enquête ANRS Parcours

Pourcentages pondérés ; p : test du Chi 2 ; AM : Couverture maladie de base de l’Assurance Maladie tous régimes confondus hors CMU ; CMU : Couverture Maladie Universelle ; AME : Aide Médicale d’État.

16Le recours à la Couverture Maladie Universelle dite de base (CMU) et à l’Aide Médicale d’État (AME) est fréquent (18,6 % et 23,4 % respectivement).

17Parmi les bénéficiaires de la couverture maladie de base de l’Assurance Maladie (AM), près d’un tiers ne sont pas couverts par une complémentaire santé.

18Plus des trois quarts des participants suivis pour une hépatite B chronique et bénéficiaires de l’AM sont pris en charge à 100 % dans le cadre d’une Affection Longue Durée (ALD). Ce pourcentage monte à 90,3 % des hommes et 92,2 % des femmes parmi ceux prenant un traitement contre l’hépatite B au moment de l’enquête (38,4 % des hommes et 21,3 % des femmes respectivement). D’autre part, parmi les bénéficiaires de l’AM non couverts par une complémentaire santé, 78/111 (71,3 %) étaient pris en charge à 100 % dans le cadre d’une ALD.

Renoncement aux soins

19Les hommes sont 30,5 % à rapporter à avoir déjà renoncé à des soins chez le médecin ou le dentiste depuis leur arrivée en France (24,5 % plusieurs fois). Les motifs du renoncement aux soins sont des raisons financières (70,5 %), des problèmes de papiers (33,2 %), avoir préféré « attendre que cela passe » (9,0 %), la distance ou les difficultés pratiques pour se rendre en consultation (3,5 %), le manque de temps (3,4 %), la barrière de la langue (2,4 %), ne pas savoir qui aller voir (2,0 %), la peur des soins (1,5 %) ou une autre raison (5,3 %).

20Parmi les femmes, 29,0 % rapportent avoir déjà renoncé à des soins (22,1 % plusieurs fois). Les motifs du renoncement aux soins sont les raisons financières (80,0 %), les problèmes de papier (21,5 %), avoir préféré attendre que cela passe (8,6 %), la distance ou les difficultés pratiques pour se rendre en consultation (5,1 %), la barrière de la langue (1,8 %) ou une autre raison (3,1 %).

21Ainsi 21,5 % des hommes et 23,2 % des femmes rapportent avoir dû renoncer à des soins pour raison financière (p = 0,74). Cette proportion est similaire quelle que soit l’ancienneté de l’arrivée en France (21,5 % et 22,2 % depuis moins ou plus de 5 ans respectivement, p = 0,85). Elle est plus élevée pour les personnes vivant en foyer : 38,0 % vs 20,7 % chez les autres (p < 0,001). Le renoncement aux soins pour raisons financières est rapporté par 31,2 % des participants sans couverture maladie au moment de l’enquête, 18,0 % des bénéficiaires de l’Assurance maladie, 23,8 % de ceux couverts par la CMU et de 28,5 % de ceux bénéficiant de l’AME (p = 0,06).

Refus de soins

22Les hommes sont 8,5 % à rapporter avoir déjà expérimenté un refus de soins depuis leur arrivée en France. Ils étaient 4,6 % à rapporter avoir vécu un refus chez un médecin, 2,3 % à l’hôpital et 4,0 % dans une pharmacie. Les motifs déclarés du refus de soins sont le fait d’être bénéficiaire de la CMU ou de l’AME (53,2 %), leur état de santé (5,8 %), la couleur de leur peau (4,6 %), leur origine (3,5 %), leur quartier de résidence (2,2 %) ou une autre raison (17,5 % : problème d’ordonnance, problème de papiers, problème d’argent, devait passer par son médecin traitant).

23Les femmes sont 13,0 % à rapporter à avoir déjà expérimenté un refus de soins depuis leur arrivée en France (7,9 % chez un médecin, 3,6 % à l’hôpital et 10,3 % dans une pharmacie). Les motifs déclarés du refus de soins sont le fait d’être bénéficiaire de la CMU ou de l’AME (51,7 %), leur origine (3,6 %), leurs difficultés à s’exprimer en français (4,1 %) ou une autre raison (16,6 % : problème d’argent ou problème d’ordonnance).

24L’expérience d’un refus de soins est rapporté par 13,3 % des personnes arrivées depuis cinq ans et moins, contre 8,3 % de celles arrivées depuis plus de cinq ans (p = 0,05). Elle est rapportée par 14,0 % des personnes venues en France car elles sont menacées dans leur pays d’origine contre 8,7 % pour les autres (p = 0,05). Les personnes ayant déjà vécu au moins un an sans titre de séjour depuis leur arrivée en France rapportent une fréquence de refus de soins de 11,0 % contre 6,8 % dans le cas contraire (p = 0,11). Cette proportion est plus élevée pour les personnes ayant vécu au moins une fois dans la rue depuis leur arrivée en France (24,7 % vs 8,6 % chez les autres, p = 0,03). Le refus de soins depuis l’arrivée en France est rapporté par 22,1 % des participants sans couverture maladie au moment de l’enquête, 14,7 % des bénéficiaires de l’Assurance maladie, 11,0 % de ceux couverts par la CMU et 6,4 % de ceux bénéficiant de l’AME (p = 0,01).

Entrée en soins

25Le diagnostic de l’hépatite B chronique a lieu après l’arrivée en France dans 93,5 % des cas (n = 564), en médiane au cours de la 4e année après l’arrivée pour les hommes (IIQ[2-9]) et de la 2e année pour les femmes (IIQ[1-4]).

26Pour les personnes diagnostiquées avant leur arrivée en France (n = 42 ; 6,5 %), seules 43,3 % sont entrées en soins l’année du diagnostic dans leur pays de résidence. Une fois en France, 59,4 % sont entrées en soins l’année d’arrivée en France, 21,4 % l’année suivante et 19,2 % au-delà.

27Parmi les personnes diagnostiquées en France, 93,5 % sont entrées en soins l’année de leur arrivée en France, 2,2 % l’année suivante et 4,3 % au-delà.

28Ainsi, 8,8 % (57/606) des participants sont entrées en soins au moins une année plus tard que l’année du diagnostic ou, pour les personnes diagnostiquées avant l’arrivée, que l’année d’arrivée en France. Cette entrée retardée est plus fréquente parmi les personnes sans couverture maladie l’année du diagnostic ou de l’arrivée en France (20,6 %) que parmi celles en disposant (6,8 %, p < 0,001). Les personnes sans couverture maladie l’année du diagnostic et non entrées en soins cette même année (n = 23), sont finalement entrées en soins en médiane la quatrième année après le diagnostic (IIQ [2-6]).

Maintien en soins

29Parmi les personnes diagnostiquées et entrées en soins avant leur arrivée en France, 29,8 % (5/17) ont eu une rupture de suivi de plus de 12 mois. Toutes ces ruptures ont eu lieu avant leur arrivée en France. Ces participants sont tous entrés à nouveau en soins dans un délai médian de deux ans après leur arrivée en France.

30Parmi les personnes diagnostiquées en France, 4,0 % (n = 20/564) ont eu une rupture de suivi de plus d’une année avant le jour de l’enquête. La rupture est survenue dans un délai médian de deux années après l’entrée en soins (IIQ [0-6]). Ces participants sont entrés à nouveau en soins dans un délai médian de trois années (IIQ [2-6]).

31La proportion de personnes ayant expérimenté une rupture ne varie pas significativement en fonction du sexe, de l’âge ou de l’ancienneté du séjour en France.

Discussion

32L’enquête ANRS-Parcours fournit des données biographiques originales sur l’accès aux soins des personnes originaires d’ASS vivant avec une HBC venant ainsi combler un manque de connaissance souligné ailleurs [4].

33Pour la majorité des participants, l’accès à une couverture maladie survient rapidement dès l’année d’arrivée en France. Ceci illustre le rôle positif exercé par la loi française prévoyant l’universalité de la couverture maladie pour les personnes résidant de manière stable en France [14]. La mise en place de la CMU et de l’AME en 1999 en France a permis l’accès à une couverture maladie pour les personnes en situation de précarité et pour les étrangers en situation irrégulière. Selon les données du Fonds CMU, 2,4 millions de personnes bénéficiaient de la couverture de base de la CMU en 2015, soit environ 3,6 % de la population française. L’AME bénéficiait, quant à elle, à 294 000 personnes en 2014 [15]. Le niveau élevé de couverture par la CMU et l’AME au moment de l’enquête souligne ainsi l’importance de ces dispositifs dans l’accès aux soins des migrants vivant avec une HBC en France. Le recours significatif à ces couvertures maladies avait déjà été souligné dans l’enquête Trajectoires et origines où 9 % des hommes et 21 % des femmes originaires d’Afrique subsaharienne étaient couverts par la CMU ou l’AME [16].

34L’absence de droit au séjour est fréquente parmi les participants sans couverture maladie au moment de l’enquête. Ainsi, malgré l’existence de l’AME pour les migrants en situation irrégulière, il semble persister du non recours pour les personnes en situation de précarité par méconnaissance du dispositif ou en raison de barrières. Dans son rapport 2015 de l’Observatoire de l’accès aux droits et aux soins de la mission France, Médecins du Monde constate que parmi les consultants accueillis qui n’avaient pas de couverture maladie (88 %), plus de trois quarts y avaient droit. Les obstacles à l’accès aux droits rencontrés par Médecins du Monde semblent essentiellement liés à la complexité des démarches, à laquelle s’ajoutent des pratiques abusives (refus d’adresse déclarative, demandes de pièces justificatives non obligatoires, etc.) et/ou des dysfonctionnements administratifs (délais, etc.) [17]. Durant cette période de précarité, la santé n’est probablement pas une priorité [18]. C’est plus probablement à l’occasion d’un besoin de soin entraînant un contact avec le système de soins que les droits à une couverture maladie sont activés. Cet état de fait est d’autant plus inquiétant que la période de précarité vécue par les migrants après leur arrivée en France a tendance à se prolonger dans le temps tel que cela a été décrit auparavant à partir des données de l’enquête ANRS-Parcours [19].

35De façon générale en France, l’absence de couverture maladie complémentaire est un déterminant important de la sous consommation de soins et du renoncement aux soins [9, 20]. Parmi les bénéficiaires de la couverture maladie de base de l’Assurance maladie au moment de l’enquête, nous avons mis en évidence un taux de non recours à une couverture maladie complémentaire élevé, de près d’un participant sur trois. Dans l’enquête sur la santé et la protection sociale réalisée en France en 2012, le taux de non recours à une complémentaire santé en population générale était de 5 % [21]. Dans l’enquête Trajectoires et origines, 24 % des hommes et 23 % des femmes originaires d’ASS affiliées à l’Assurance maladie ne disposaient pas d’une complémentaire santé [16]. Un des motifs connus d’absence de couverture complémentaire est le fait d’être bénéficiaire d’une prise en charge ALD, bien qu’elle ne couvre que les soins directement liés à la pathologie ouvrant le droit à l’ALD [21]. De plus, la prise en charge à 100 % dans le cadre de l’ALD n’est possible que pour les HBC ayant une indication de traitement. Cette dernière explique dans notre étude près des trois quarts du non recours à une complémentaire santé. La part restante est plus probablement liée à des freins financiers.

36Dans ce travail, l’expérience d’un renoncement aux soins depuis l’arrivée en France est fréquente. Les principales raisons sont financières ou administratives. Quelques études ont également fait état d’une déclaration fréquente du renoncement aux soins pour raison financière parmi les immigrés en France, en particulier quand ils étaient originaires d’ASS ou bénéficiaires de l’AME [16, 22].

37L’expérience d’un refus de soins, est quant à lui, rapporté par 9,7 % des participants, le plus souvent en lien avec un refus de la CMU ou de l’AME. La question sur les refus de soins telle que posée ne se limite pas à la prise en charge de l’hépatite B chronique et les refus de soins rapportés ici le sont souvent chez un médecin libéral et ne sont donc pas forcément lié à cette virose chronique. Les refus de soins liés à la CMU et l’AME ont été rapportés par plusieurs travaux en France [22-26]. Dans une enquête par testing réalisée dans le Val de Marne, 5 % des généralistes (2 % en secteur 1 et 17 % en secteur 2), 41 % des spécialistes, et 39 % des dentistes refusaient des soins au titre que la personne était bénéficiaire de la CMU [27]. Dans l’enquête TeO, un refus de soins était rapporté par 15 % des répondants, sans différence entre les immigrés et la population majoritaire, laissant penser que c’est plutôt le statut de bénéficiaire de la CMU que celui d’immigré qui jouait dans ces discriminations [16]. Ces refus de soins semblaient principalement liés aux contraintes administratives pour obtenir le remboursement, notamment en raison de l’absence de Carte Vitale pour les bénéficiaires de l’AME et à l’interdiction pour le praticien de pratiquer des dépassements d’honoraires [28].

38Au-delà du renoncement aux soins et du refus de soins, de multiples autres facteurs peuvent entraver l’accès aux droits et aux soins, parmi eux le manque d’information du bénéficiaire mais aussi des professionnels de santé qui l’accompagnent, la complexité des démarches, la juxtaposition des dispositifs, des délais d’ouverture des droits parfois longs, les difficultés liés à la domiciliation des personnes sans domicile et parfois la barrière de la langue et les difficultés de compréhension [17, 28].

39La fréquence élevée du renoncement et dans une moindre mesure du refus de soins parmi les personnes originaires d’ASS vivant avec une HBC, associée à une couverture complémentaire insuffisante signent ainsi une situation d’accès aux soins insuffisant et un risque de sous-médicalisation des problèmes de santé. Les liens qui sont établis avec la précarité confirment la persistance d’inégalités sociales de santé, laissant présager des conséquences pour la santé de l’individu mais aussi un coût social augmenté en cas de détérioration de l’état de santé.

40Dans notre étude, l’entrée en soins déclarée est rapide après le diagnostic (dans l’année du diagnostic pour la grande majorité des participants), l’absence de couverture maladie semblant être le principal déterminant du retard à l’entrée en soins. D’après les données de surveillance concernant les nouveaux patients pris en charge en 2008-2009 dans les centres experts en hépatologie, le délai entre le dépistage de l’antigène HBs et la prise en charge était de 2,1 ans pour les personnes nées en Afrique subsaharienne contre 5,8 ans pour ceux nés en France [4]. Ainsi, le lien avec le soin semble s’effectuer plutôt rapidement en France pour les migrants originaires d’ASS chez qui est diagnostiquée une HBC. Ceci pourrait en partie être lié à l’existence de structures spécialisées dans la prise en charge des migrants mais aussi de l’existence de l’AME pour les migrants en situation irrégulière. Cependant, l’absence de couverture maladie l’année du diagnostic reste un frein à l’entrée en soins. La situation est ainsi bien meilleure que dans beaucoup d’autres pays d’Europe où ces dispositifs n’existent pas, ce qui se traduit par un accès aux soins plus difficile pour les migrants vivant avec une HBC [29].

41La principale limite de cette étude est que les participants sont recrutés dans les services de soins. Cela expose à une sélection de la population, laissant de côté les personnes non diagnostiquées, non entrées dans le soin ou en rupture de soins sans avoir repris leur suivi au moment de l’enquête. L’enquête Parcours a cependant l’avantage de décrire la situation et le parcours des personnes originaires d’ASS en cours de suivi pour une HBC y compris dans les structures accompagnant les personnes en situation de précarité. La méthodologie de l’enquête permet d’avoir un échantillon représentatif des migrants subsahariens suivis en Ile-de-France pour une HBC dans les services dédiés. Bien que ces données ne puissent pas être extrapolées à l’échelon national, elles renseignent tout de même sur une proportion importante des personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant en France, 60 % de ces dernières résidant en Île-de-France.

42Notre étude ne permet pas d’appréhender l’aspect qualitatif du parcours de soins des migrants vivant avec une HBC. Un volet qualitatif de l’enquête Parcours a été mené à partir de 33 entretiens auprès de patients porteurs du VHB et de 10 soignants et rapporté ailleurs [30]. Elle confirme une méconnaissance importante de l’HBC chez les personnes originaires d’ASS, décrite dans une étude précédente [31]. Cette méconnaissance peut laisser place à la honte et au secret après le diagnostic. Elle souligne également les difficultés de prise en charge et l’insuffisance de la prise en compte des difficultés sociales et personnelles liées à l’infection ou pouvant compliquer l’accès aux soins ou le vécu de la maladie (manque de temps pour l’information et l’accompagnement, insuffisance de l’offre d’accompagnement social, associative, et d’éducation thérapeutique, absence de recours à l’interprétariat professionnel). Enfin, certaines ruptures de soins apparaissent liées à une mauvaise expérience de l’échec d’un traitement par interféron ou à l’inverse à l’incompréhension de l’absence de traitement pour les porteurs inactifs.

Conclusion

43Les personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec une hépatite B chronique accèdent rapidement à une couverture maladie et aux soins en France. Cependant, les barrières à l’accès aux soins persistent pour les personnes sans couverture maladie ou ayant une couverture insuffisante, mais aussi du fait de refus de prise en charge par certains professionnels de santé des bénéficiaires de l’AME ou de la CMU.

44Aucun conflit d’intérêt déclaré

Remerciements

Le groupe ANRS-Parcours est composé de A.D.L., F.L., R.D.-S., N.B., N.L. (coordinateurs scientifiques), J.P., A.R., A.G., N.V., E. Rodary, D. Pourette, J. Situ, P. Revault, P. Sogni, J. Gelly, Y. Le Strat et N. Razafindratsima.
L’étude a été soutenue financièrement par l’Agence Nationale de Recherche sur le SIDA et les hépatites virales (ANRS) et la Direction Générale de la Santé (DGS).
Les auteurs aimeraient remercié tout particulièrement toutes les personnes qui ont participle à la construction de cette étude, le RAAC-Sida, le COMEDE, le FORIM et SOS hépatites pour leur aide à la préparation et à la mise en œuvre de l’enquête, G Vivier, E Lelièvre (INED) et A Gervais (AP-HP) pour leur aide à la préparation du questionnaire, A Guillaume pour les outils de communication, ClinSearch et Ipsos pour le recueil des données, et les équipes de tous les centres participants : Hôpital Beaujon, service d’Hépatologie (A Pumpo, T Asselah, N Guilly, N Boyer, F Mouri, C Castelnaud, M Pouteau) ; Hôpital Pitié-Salpêtrière, service d’Hépato-Gastroentérologie et de Médecine Interne (T Poynard, Y Benhamou, G Bonyhay, P Lebray, J Massard, J Moussali, V Ratziu, M Rudler, D Thabut, R Pais, E Luckina, A Simon, MC Samba, S Pelletier, N Smail) ; Hôpital Paul Brousse, Centre Hépato-Biliaire (JC Duclos Vallée, D Samuel, A Coilly) ; CHU Henri Mondor, service d’Hépatologie (F Roudot-Thoraval, C Hezode, E Lopes) ; Hôpital Jean Verdier, service d’Hépato-Gastroentérologie (V Bourcier, N Ganne, P Nahon, J Cohelo, JC Trinchet, G Gnkontchou, V Grando, S Brulé) ; Hôpital Cochin, unité d’Hépatologie (P Sogni, H Fontaine, V Mallet, S Tripon, A Vallet Pichard, S Pol, M Corouge, M Benazra, A Noble, L Bousquet) ; Hôpital Saint-Antoine, service d’Hépato-Gastroentérologie (D Mohand, L Serfaty, N Carbonell, C Corpechot, M Lequoy, H Mathiex-Fortunet, A Pascale, O Rosmorduc, O Chazouillères, S Mezhoud, T Andreani, H Regnault, A Poujol-Robert, F Benjelloun) ; Hôpital Gouin, service d’Hépato-Gastroentérologie (S Levy) ; Hôpital Avicenne, services de Médecine Interne et de Maladies Infectieuses (D Roulot, U Warzocha, C Cambonie, O Bouchaud, F Mechai, M Goussef, N Vignier, T Kandel, P Honore) ; CH de Lagny Marne La Vallée, service de Gastroentérologie (F Harnois, G Macaigne, K Fernandes) ; Hôpital Lariboisière, services de Médecine Interne et d’Hépato-Gastroentérologie (JF Bergmann, P Sellier, M Bendenoun, JD Magnier, V Ozenne) ; Hôpital Tenon, services d’Hépato-Gastroentérologie et de Maladies Infectieuses (D Ancel, I Popa-Gregoriou, F Amiot, A Garioud, JD Grangé, D Chaslin-Ferbus, S Gil-Diez, P Bonnard, MG Lebrette, H Cordel, FX Lescure, JP Vincensini, A Adda Lievin, P Thibault, N Velazquez) ; Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil, service d’Hépato-Gastroentérologie (S Barge, I Rosa, L Costes, L Richier) ; Réseau ARES 92 (A Seif, C Chandemerle, M Lalande, T Mazars) ; Réseau Paris Nord (JP Aubert, O Taulera) ; Centre de santé du Comede (I Alix, F Fleury, O Lefebvre, P Revault, M Petruzzi, C Menard).
Financement : Agence Nationale de Recherche sur le Sida et les hépatites (ANRS).

Notes

  • [1]
    Sorbonne Universités, UPMC Univ Paris 6, Inserm, Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique – (IPLESP UMRS 1136), Équipe de Recherche en Épidémiologie Sociale (ERES) – Faculté de médecine Saint Antoine – 27 rue de Chaligny – 75012 Paris.
  • [2]
    INSERM, CESP-U1018 – Villejuif – France.
  • [3]
    IRD-UMR 196 CEPED – 45 rue des Saints-Pères – 75006 Paris – France.
  • [4]
    Santé publique France – Saint-Maurice.
  • [5]
    Université Paris 13 – CHU Avicenne – Bobigny – France.
  • [6]
    Le groupe ANRS-Parcours est présenté dans les remerciements en fin d’article.
Français

Objectif : L’objectif de cette étude est d’analyser l’accès aux soins des personnes originaires d’Afrique subsaharienne (ASS) vivant avec une hépatite B chronique (HBC) en France.
Méthodes : L’enquête ANRS-Parcours est une étude biographique réalisée en 2012-2013 auprès de personnes originaires d’ASS recrutées dans des services de prise en charge de l’HBC en Ile-de-France. Les données ont été recueillies en face-à-face à l’aide d’une grille biographique et d’un questionnaire standardisé.
Résultats : Parmi les 619 participants, 96,4 % ont une couverture maladie de base dont 18,6 % la Couverture maladie universelle (CMU) et 23,4 % l’Aide médicale d’état (AME). Un tiers des bénéficiaires de l’Assurance maladie n’ont pas de complémentaire santé et 75,7 % sont couverts au titre d’une Affection longue durée. L’obtention d’une couverture maladie après l’arrivée en France a lieu en médiane la première année. Parmi les participants, 22,0 % rapportent avoir renoncé aux soins pour raisons financières depuis l’arrivée en France et 9,7 % avoir vécu un refus de soins le plus souvent par refus de la CMU ou l’AME. Une fois diagnostiqué, l’entrée en soins a lieu en médiane l’année-même du diagnostic. Le retard à l’entrée en soins est plus fréquent chez les personnes sans couverture maladie l’année du diagnostic. Les ruptures de suivi de plus de 12 mois sont rares.
Conclusion : Les personnes originaires d’ASS vivant avec une HBC accèdent rapidement à une couverture maladie et aux soins. Cependant, des obstacles à l’accès aux soins persistent pour certaines du fait notamment de l’absence ou de l’incomplétude d’une couverture maladie et des refus de soins aux bénéficiaires de l’AME ou de la CMU.

Mots-clés

  • accès aux soins
  • couverture maladie
  • émigrants et immigrants
  • Afrique subsaharienne
  • France
  • hépatite B

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Nicolas Vignier [1]
  • [1]
    Sorbonne Universités, UPMC Univ Paris 6, Inserm, Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique – (IPLESP UMRS 1136), Équipe de Recherche en Épidémiologie Sociale (ERES) – Faculté de médecine Saint Antoine – 27 rue de Chaligny – 75012 Paris.
Rosemary Dray Spira [1]
  • [1]
    Sorbonne Universités, UPMC Univ Paris 6, Inserm, Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique – (IPLESP UMRS 1136), Équipe de Recherche en Épidémiologie Sociale (ERES) – Faculté de médecine Saint Antoine – 27 rue de Chaligny – 75012 Paris.
France Lert [2]
  • [2]
    INSERM, CESP-U1018 – Villejuif – France.
Julie Pannetier [3]
  • [3]
    IRD-UMR 196 CEPED – 45 rue des Saints-Pères – 75006 Paris – France.
Andrainolo Ravalihasy [3]
  • [3]
    IRD-UMR 196 CEPED – 45 rue des Saints-Pères – 75006 Paris – France.
Anne Gosselin [3]
  • [3]
    IRD-UMR 196 CEPED – 45 rue des Saints-Pères – 75006 Paris – France.
Nathalie Lydié [4]
  • [4]
    Santé publique France – Saint-Maurice.
Olivier Bouchaud [5]
  • [5]
    Université Paris 13 – CHU Avicenne – Bobigny – France.
Annabel Desgrées du Loû [3]
  • [3]
    IRD-UMR 196 CEPED – 45 rue des Saints-Pères – 75006 Paris – France.
Le groupe ANRS-Parcours [6]
  • [6]
    Le groupe ANRS-Parcours est présenté dans les remerciements en fin d’article.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 18/07/2017
https://doi.org/10.3917/spub.173.0361
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