CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 la place donnée à la médecine générale dans le diagnostic de la maladie d’Alzheimer est complexe à plus d’un titre. Une première dimension renvoie aux politiques publiques qui ont fait de cette maladie une priorité de santé publique (Ngatcha-Ribert, 2012). Elles ont construit un dispositif de diagnostic qui fait intervenir une pluralité d’acteurs médicaux : des spécialistes d’abord, neurologues ou gériatres le plus souvent, qui réalisent, annoncent le diagnostic et font la première prescription et des généralistes (voir encadré pour le détail de leurs missions). Ce dispositif suppose donc une coopération et, au-delà même, une certaine cohésion de ces acteurs médicaux autour notamment de conceptions communes de la maladie et de sa prise en charge. Du côté des spécialistes, Aude Béliard a observé qu’une « forte affinité est tout à la fois construite, relayée et retraduite (…), entre une certaine conception de la maladie – comme dégénérescence progressive – et une certaine conception de la bonne prise en charge – tout aussi progressive, sans décisions brutales ou trop rapides : l’attention aux premiers symptômes favoriserait une évolution plus lente de la maladie, un meilleur contrôle de ses effets, ainsi que la mise en place de solutions intermédiaires (aide à domicile, hôpital de jour) » (Béliard, 2008). De même qu’elle s’interroge sur la façon dont ces catégories et ces injonctions médicales sont investies par les patients et leurs familles, nous pouvons aussi nous demander comment elles sont appréhendées par les médecins généralistes. Une première question sera donc de savoir dans quelle mesure ceux-ci peuvent inscrire leurs pratiques dans ce cadre prescriptif et normalisé. Des recherches ont montré de quelle manière l’encadrement des pratiques en médecine générale, développées à partir des années 1990, avait soutenu le développement d’une sensibilité accrue d’une partie des médecins généralistes aux standards de pratiques issus de la médecine fondée sur les preuves. Mais elles ont montré aussi toute la limite de ces processus, la diversité de leur appropriation et le maintien d’une valorisation « de la subtilité de la clinique et de l’ajustement au patient », y compris chez les médecins les plus sensibles à ces procédures (Bloy, Rigal, 2012). Au-delà de la question des dispositions construites par les médecins à s’inscrire dans de tels dispositifs, il faut préciser les ambiguïtés inhérentes au dispositif qui concerne la maladie d’Alzheimer.

2 En effet, on peut dire que la place donnée aux généralistes est à la fois centrale et à la marge. Centrale, si l’on s’en tient aux recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) qui leur attribuent un rôle très important de première évaluation des troubles puis d’organisation du parcours de soin des patients. Mais aussi à la marge du dispositif, si l’on tient compte du fait que ni le diagnostic en tant que tel et son annonce, ni la première prescription ne leur sont attribués. Diagnostic et prescription sont des actes symboliquement forts pour la profession médicale (Freidson, 1984) et s’en trouver dépossédé peut conduire à un désengagement de la part des médecins généralistes. Qu’en est-il ici ? Alors même que des orientations politiques font des généralistes des spécialistes du premier recours, le dispositif de diagnostic de la maladie d’Alzheimer en France peut donner le sentiment de leur mobilisation en seconde intention, après que la question médicale a été construite par d’autres (Ankri, Van Broeckhoven, 2013). Dans le partage du travail qu’il construit entre spécialistes et généralistes, ces derniers peuvent percevoir la part qui leur est confiée comme le volet le moins valorisé de la prise en charge, centré sur une dimension médico-sociale souvent considérée comme l’une des voies de relégation (Fernandez, in Bloy, Schweyer, 2010). Ainsi, alors qu’il suppose une cohésion des acteurs qu’il mobilise, un tel dispositif ne risque-t-il pas de réactiver chez les généralistes des perceptions d’eux-mêmes structurellement déqualifiées, les reconduisant à faire « l’expérience de l’illégitimité » (Arliaud, 1987) ?

3 Cela nous amène à prendre en compte la dimension épistémique inhérente à ce dispositif de diagnostic, et la part de controverse qui entoure l’expertise sur laquelle il s’appuie. Les conceptions même de la maladie et de sa prise en charge ne sont pas totalement homogènes, mais elles composent avec des « formes d’incertitudes, ou des débats encore vifs, aux différents niveaux de la perception, de la définition et du traitement de ces troubles cognitifs » (Mallon, 2014 ; Arfeux-Vaucher, Ploton, 2012). La critique s’est notamment développée sur les médicaments disponibles, dont le service médical rendu a été abaissé à un niveau faible par la HAS en 2011. La revue Prescrire, à diverses reprises au cours des années 2000, avait jugé leur intérêt faible au regard des effets secondaires qu’ils pouvaient provoquer sur le plan cardiaque. Dans ce contexte, le Collège national des médecins généralistes enseignants (CNGE) a demandé à ce que « les recommandations de la HAS sur le diagnostic de la maladie d’Alzheimer et apparentées soient fondées sur des preuves plus robustes » [1]. Avec cet arrière-plan controversé, comment les médecins généralistes peuvent-ils percevoir les recommandations de bonnes pratiques, sachant qu’ils sont souvent spontanément réfractaires à ce type de procédures dont ils contestent précisément la validité (Trépos, Laure, in Bloy, Schweyer, 2010) ?

4 Enfin, la troisième dimension, qui nous semble centrale, est celle de la relation au patient, à sa spécificité en médecine générale, et aux enjeux que le diagnostic fait peser sur elle. Dans de nombreux travaux de recherche sur les professions de soin, les formes d’articulation des dimensions technique et relationnelle sont définies comme un axe central de structuration des identités professionnelles (Véga, 1997). Cet aspect est particulièrement prégnant pour les généralistes qui revendiquent une prise en compte du patient dans ses dimensions multiples et un paradigme biopsychosocial (Bloy, Schweyer, 2010). Là encore, cette dimension nous semble prendre une acuité particulière s’agissant du diagnostic de la maladie d’Alzheimer. En effet, il suppose que soit fait ce qu’Aude Béliard (2008) appelle « une caractérisation sociale du patient » où l’évaluation des aptitudes suppose de prendre en compte le parcours de vie de la personne et ses caractéristiques socioprofessionnelles. À ce sujet, au nom d’une connaissance approfondie de leurs patients, les généralistes peuvent aussi avoir un point de vue à faire valoir, en complémentarité, mais peut-être parfois en rupture avec les définitions de la situation et du patient que les familles et les spécialistes peuvent construire. Une thèse de médecine générale a montré l’intensité des critiques faites aux médecins par les familles, disant que les troubles étaient minimisés et que leur propre point de vue était peu pris en compte (Bornes, 2010). Ces éléments laissent entrevoir des logiques de concurrence entre ces opérateurs dans la phase dite d’incubation sociale du diagnostic (Soun, 2004). Quelle vision peuvent-ils avoir de l’effet de stigmate et de la déqualification encore très présents dans ce diagnostic du point de vue de ceux qui le reçoivent (Le Bihan et al., 2012) ? Quel rapport à la demande de diagnostic quand celle-ci intervient, comme c’est fréquemment le cas avec la maladie d’Alzheimer, à la demande de la famille (Gzil, 2009) pour des médecins encore attachés au colloque singulier, conçu comme le cadre de pratique le plus apte à garantir la qualité de la prise en charge au plan technique et éthique par l’ajustement au plus juste des acteurs autour d’un lien de confiance mutuelle (Membrado, in Pennec et al., 2014) ?

5 C’est dans ce cadre que nous analyserons les positions et les pratiques des médecins généralistes. Notre objectif n’est pas tant d’identifier des positions figées et stables chez les médecins, que de comprendre comment ils peuvent circuler et agir dans des configurations de pratique complexes, à partir de certaines conceptions (plus ou moins affirmées) qui leur sont propres à l’égard du diagnostic de la maladie d’Alzheimer, mais en tenant compte également de la demande des patients et de leur entourage. Il s’agira de voir comment les médecins généralistes se placent dans ces processus de diagnostics en complémentarité et en cohérence ou en rupture et en tension avec les enjeux professionnels et sociofamiliaux qu’ils perçoivent.

Méthodologie

6 Afin de nous donner les moyens de percevoir le plus finement possible les effets des configurations locales au sein desquelles les médecins exercent, notre enquête a consisté à travailler à partir de cas de personnes récemment diagnostiquées (entre un et trois mois avant l’entretien). Nous les avons recrutées au sein d’une consultation mémoire de ressources et de recherche (CMRR) d’un CHRU. Notre population ne comporte donc pas de patients jeunes (avant 65 ans). Après accord de l’ensemble des protagonistes, nous avons contacté le médecin généraliste, son ou sa patiente et le ou les membres de la famille impliqués. Nous avons procédé à une analyse qualitative de 12 situations. Il s’agissait d’obtenir des récits croisés de la trajectoire diagnostique et de reconstituer le contexte au sein duquel le médecin se trouvait au moment de l’orientation vers la consultation mémoire. Nous avons rencontré 39 personnes au total au cours de 30 entretiens, certains étant menés auprès de deux personnes en même temps (souvent le ou la patiente avec un proche). Les entretiens ont été enregistrés (sauf refus de l’un des médecins) et entièrement retranscrits. Notre analyse présente trois types de situations, révélant trois formes d’articulation de ces enjeux professionnels et sociofamiliaux. Chacun de ces types est illustré par deux cas spécifiques choisis parmi les 12 étudiés.

ENCADRÉ 1 Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : diagnostic et prise en charge selon les recommandations de la HAS, décembre 2011

Le médecin traitant est le pivot de l’organisation des soins centrés sur le patient (ceci est repris dans le plan Maladies neurodégénératives 2014-2019 qui vient d’être publié). Le médecin traitant doit être à l’initiation de la démarche diagnostique :
En cas de plainte cognitive ou de modifications du comportement signalées par le patient et/ou un proche, de symptômes pouvant révéler une maladie d’Alzheimer (AVC, confusion, chute) ou à l’entrée et en cours de séjour en structure d’hébergement.
L’évaluation initiale doit comporter un entretien du patient et de son accompagnant (antécédents personnels et familiaux, traitements antérieurs et actuels, mode de vie, niveau d’éducation, histoire des troubles cognitifs), un examen clinique (état général, examen cardio-vasculaire, examen neurologique), des examens paracliniques (hémogramme, natrémie, glycémie, calcémie, créatinine, CRP, albuminémie, TSH), une imagerie cérébrale (IRM ou, à défaut, scanner sans injection), une évaluation fonctionnelle (quatre activités instrumentales de la vie quotidienne : usage du téléphone, gestion des médicaments, du budget, utilisation des transports), une évaluation cognitive globale : MMSE (mini-mental state evaluation de Folstein) [*], test de mémoire : les 5 mots de Dubois (T5M) [**], dessin de l’horloge [***].
Si ce bilan initial est normal, le médecin traitant reverra son patient à 6 et à 12 mois. En cas de déclin cognitif objectivé, il est recommandé au médecin traitant de demander un avis spécialisé et de mettre en œuvre des mesures d’aide si nécessaire.
Lorsque le diagnostic de la maladie d’Alzheimer probable est posé et annoncé par le spécialiste, le médecin traitant reste le pivot de la suite de la prise en charge :
  • évaluation de la bonne compréhension par le patient de l’annonce diagnostique qui lui a été faite par le spécialiste, éventuellement reformulation, explication et réponse aux questions ;
  • présentation et mise en place du plan de soin et d’aide en collaboration avec le médecin spécialiste et les structures de coordination ;
  • suivi standardisé au moins une fois par an ou en cas de modifications de l’état de santé du patient ou de son environnement : évaluation médicale, cognitive, comportementale, fonctionnelle, environnementale, sociale et juridique ;
  • évaluation médicale de l’aidant ;
  • participation à la concertation multidisciplinaire de réévaluation du traitement médicamenteux spécifique à un an.

Des situations où conceptions médicales et dynamiques sociofamiliales convergent

7 Les deux situations étudiées se rapprochent par certains aspects du « modèle de complémentarité » (Rolland, 2007), car ces médecins coopèrent volontiers avec les spécialistes et valorisent les objectifs d’anticipation et de progressivité des accompagnements. En revanche, nos résultats divergent sur le fait que nous n’avons pas affaire à des médecins de famille connaissant de longue date patient et entourage, mais à des médecins récemment arrivés dans les situations dont ils ont une connaissance encore limitée, ce qui semble jouer plutôt en faveur de l’établissement des diagnostics.

Un diagnostic qui concerne des patientes en demande

8 Les cas de Mme A. et Mme D. sont perçus très favorablement par les médecins compte tenu de la grande cohérence des attitudes des différents protagonistes, à commencer par les patients et leur famille. Les patientes apparaissent d’abord au médecin dans un rôle actif de recherche raisonnée du diagnostic face à des problèmes de mémoire qu’elles ont elles-mêmes identifiés de manière assez précoce.

9 Le médecin de Mme A. [patiente de 81 ans qu’il suit depuis 5 ans, veuve d’un officier de l’armée de terre et ayant une fille unique infirmière de formation] nous dit : « C’est une patiente qui m’a tout simplement signalé quelques petits troubles de la mémoire. » [Homme, 40 ans, urbain] et il précise ensuite : « C’est elle qui disait. […] et ça la dérangeait pas plus que ça. » Une sorte d’authenticité et de clarté de la plainte exprimée est le gage que la personne est active, sans pression de l’entourage et sans crainte excessive. Les pertes de mémoire s’étant manifestées juste après le décès du mari de Mme A. (que le médecin a suivi dans ces dernières années), il dit : « J’ai laissé passer un peu de temps pour voir s’il n’y avait pas un syndrome dépressif réactionnel, pour faire la part des choses et effectivement son moral ça allait, il n’y avait pas de dépression, pas de syndrome dépressif mais les troubles de la mémoire, elle me les signalait au fur et à mesure, de la même manière, voire qui s’accentuent petit à petit. Donc consultation géronto programmée. » Le médecin engage sans difficulté la démarche diagnostique, car elle recèle peu d’incertitude sur le plan clinique et elle fait suite à une demande claire et autonome de sa patiente.

10 Le médecin de Mme D. [patiente de 85 ans, ancienne secrétaire de direction, veuve, ayant un fils enseignant chercheur] qu’il suit depuis un an après qu’elle a déménagé de la ville où elle habitait précédemment à plusieurs centaines de kilomètres de son lieu de vie actuel, décrit des circonstances proches quant au rôle tenu par la patiente : « Elle en est très consciente en fait, de ses difficultés cognitives, qui portent exclusivement sur la mémoire de… Elle le dit, enfin voilà : “J’ai ma mémoire qui est défaillante.” Donc c’est vrai qu’il y a des consultations dédiées à ça. Elle était partante et entourée, tout ça. Aucune difficulté à l’amener, à prendre des rendez-vous. Donc c’est vrai que pour moi c’est la patiente idéale dans ce genre de cas. » [Homme, 32 ans, centre urbain] Il décrit une patiente qui, trois ans avant le diagnostic, avait une première fois consulté son médecin généraliste pour des problèmes de mémoire. Il l’avait orientée vers un neurologue qui avait bien constaté des pertes de mémoire, mais sans diagnostic précis. Selon le médecin actuel, c’est parce que ces problèmes se sont aggravés après le déménagement qu’elle est venue consulter à nouveau, en continuité de cette première démarche et soutenue par sa famille.

11 Il faut cependant préciser que certains éléments à la base de ces quêtes diagnostiques échappent aux généralistes qui favorisent paradoxalement cette vision très positive du contexte. Ainsi, contrairement à ce que croit son médecin, Mme A. est venue consulter sur les conseils insistants de sa fille. De son côté, Mme D. avait bien initié une démarche de diagnostic dans sa ville d’origine, mais le non-diagnostic reçu à ce moment-là avait réglé le problème pour elle et c’est à la suite de confusions lors d’une hospitalisation juste après son arrivée qu’elle est revenue vers son médecin généraliste, allant vers un diagnostic à un moment où elle ne cherchait plus à l’avoir réellement.

Un entourage familial très présent, gage de coopération avec le médecin

12 S’il relève l’autonomie de sa patiente, le médecin de Mme A. souligne aussi combien elle est entourée par sa famille, et notamment par sa fille, ce qui est pour lui un élément stabilisateur très important pour la suite : « On est à un stade on va dire précoce de la maladie et, en attendant de voir d’ici quelque temps comment ça va tourner. Mais pour le moment je crains pas trop de difficultés parce que comme je le disais, elle est bien entourée au niveau de la famille. » La fille unique de Mme A. qui n’habite pas près de chez sa mère vient régulièrement la voir et l’héberge parfois quelques semaines au cours de l’année. Le médecin connaît ces liens familiaux. Sans avoir jamais échangé avec la fille de Mme A., il la voit comme une ressource importante, car il l’identifie comme infirmière, ne sachant pas qu’elle n’a jamais exercé : « Je pense que les aides vont se mettre en place au fur et à mesure quand les choses seront un peu plus difficiles. Et les enfants, à mon avis, c’est les premiers qui vont le signaler. »

13 La vision est très proche pour le médecin de Mme D. : « La famille est présente et ils ont fait ce qu’il fallait. Ils l’ont rapatriée ici avant que… C’est impeccable, je veux dire, elle était toute seule à X. » [Homme, 32 ans] Ce rapprochement familial est un acte fondamental et préfigure une démarche de mobilisation sur laquelle il pense pouvoir compter désormais. Le logement de Mme D. se trouve en centre-ville dans l’immeuble même où il a son cabinet ce qui participe à l’insertion du médecin au dispositif de soutien familial, gage de coopération forte avec la famille.

Des médecins qui participent à l’annonce

14 L’étude des pratiques en médecine générale sur la maladie d’Alzheimer montre que les médecins les plus jeunes sont ceux qui ont la plus forte propension à annoncer les diagnostics aux patients (Pin Le Corre et Somme, 2009). On retrouve cette caractéristique ici où, conformément aux recommandations de la HAS, le diagnostic fait par la spécialiste a été réitéré. C’est plus particulièrement le cas pour Mme D. : « J’ai l’impression que c’était intégré, parce qu’elle est venue me voir avec le mot, voilà, le diagnostic : “On m’a dit que c’était une maladie d’Alzheimer. Ça me fait peur. Je vais devenir dépendante.” Je crois qu’elle m’a même dit “démente”, je crois. » Les deux médecins conçoivent ce temps de l’annonce comme un élément important de leur prise en charge en phase, là encore, avec une logique de mobilisation de la famille et en conformité avec une norme de participation de la patiente : « Je lui dis, qu’on sait maintenant, on a mis un mot, et que c’est pas autre chose. ( – Oui.) Parce que, ça peut être aussi… Ça aurait pu être une tumeur ou je sais pas quoi, voilà. J’essaye de trouver des points positifs, pour montrer un peu que, faut pas tout voir… voilà. Alors c’est là qu’après y a une prise en charge qui va être faite. Je lui explique aussi ce que j’attends d’elle… parce que j’essaye quand même de la garder… (sous-entendu active). » [Médecin généraliste de Mme D.] Le médecin de Mme A. nous dit de son côté : « Moi, dans ma pratique, j’ai aucun tabou en ce qui concerne l’annonce des diagnostics, que ça soit des diagnostics (sous-entendu graves)… alors aucun tabou. » [Homme, 40 ans, urbain] Mais c’est cependant moins clair de son côté, car s’il dit, lui aussi, avoir repris et réitéré le diagnostic, il précise également que sa patiente l’a oublié et, lors de l’entretien mené par le chercheur avec Mme A. elle-même et sa fille, jamais l’expression de maladie d’Alzheimer ne sera prononcée.

15 Nous allons voir maintenant comment les médecins appréhendent les controverses auxquelles les traitements ont donné lieu et, plus généralement, le dispositif de diagnostic et les coopérations qu’il induit avec les spécialistes.

Des possibilités d’agir face à la maladie

16 Pour ces deux médecins, des réponses existent tant sur le plan des traitements que sur celui des thérapies dites non médicamenteuses. S’ils sont conscients de leurs limites, ils jugent les médicaments utiles et rejettent les critiques faites quant à leurs effets iatrogènes : « Les effets secondaires, j’en ai pas vu 36 000 sortir tous les jours. Tous ceux qui en prennent en tout cas se portent très bien. Dans mes patients, en tous les cas qui sont traités, et il y en a une bonne flopée, j’ai pas de soucis particuliers à signaler au niveau cardiaque ainsi de suite. Maintenant on prend les précautions nécessaires avant la mise sous traitement, donc généralement ça se passe très bien, quelques troubles digestifs éventuels sur certains traitements, pas d’autres. » Et il ajoute : « On a que ça pour l’instant, on essaie de faire avec, point. […] Allez on va gagner quelques mois, on va gagner une année d’autonomie conservée. » [Médecin généraliste de Mme A.] Les modes de validation des traitements offrent des garanties suffisantes que les médecins généralistes, dans le seul cadre de leurs pratiques, ne peuvent mettre en doute : « Il y a les hautes autorités en tout cas qui font les études et qui vérifient les choses pour nous. Nous, au quotidien, est-ce que ça ralentit la maladie, est-ce que ça ralentit pas la maladie ? »

17 On trouve une posture à peu près identique chez le médecin de Mme D. qui avoue manquer de compétences et d’expérience sur ce plan : « Le traitement, je pense, enfin moi je dis bien aux gens que ça ralentira un petit peu l’évolution, que ça peut stabiliser les choses un certain temps, quoi. Déjà, ça dédramatise un peu les choses. » [Homme, 32 ans] Son propos renvoie à la présence du traitement comme élément structurant la démarche de soin, spécifiée aussi dans les recommandations de la HAS.

18 Enfin, ces deux médecins ont chacun une expérience plutôt positive des relations avec leurs confrères hospitaliers. Elle tient aux coopérations développées dans leur pratique actuelle mais aussi à des expériences antérieures de travail à l’hôpital qui les ont sensibilisés à la continuité d’une filière de soin articulant ville et hôpital. Ils n’ont donc pas de sentiment de marginalisation du généraliste dans le dispositif : « Moi je suis assez pour partager les choses ; il y a des gériatres, ils sont très bien pour ça, ils sont compétents pour ça, j’ai travaillé avec eux à l’hôpital donc je les connais pour la plupart, je trouve que ce côté-là est plutôt bien fait. (…) Et je leur laisse volontiers en tout cas cette partie-là. » [Médecin généraliste de Mme A] À propos du fait que les généralistes ne puissent pas prescrire le premier traitement : « Est-ce qu’on trouve ça normal, moi ? Oui, oui, sinon, je serais gériatre, sinon j’aurais été gériatre. » Le médecin de Mme D. est lui aussi satisfait de la rapidité d’obtention des rendez-vous et du compte rendu reçu rapidement : « Je l’ai orientée vers la consultation mémoire. Donc j’ai appelé. (…) Elle a été prise très rapidement. (…) En moins d’un mois elle était en consultation mémoire auprès du Dr. X. » Le lien très direct qu’il a pu avoir avec la gériatre est aussi un élément très positif de ses relations avec l’hôpital : « Donc d’abord, un, j’ai eu un contact avec Mme X. Déjà je me sens pas seul, dans cette histoire. »

19 Enfin, les expériences de travail à l’hôpital, parce qu’elles peuvent montrer qu’un passage par les urgences peut être très négatif pour des personnes âgées, viennent renforcer les objectifs de maintien à domicile et donc la dimension anticipatrice du suivi à réaliser : « Alors moi, j’ai une expérience à l’hôpital où j’ai vu plein de gens arriver pour différentes raisons, (…) Et on s’en occupe très mal des gens comme ça, parce que, on n’a pas le temps. C’est des services qui sont pas dédiés à ça, hors géronto. Qui sont surchargés. Où on n’a pas de place comme ça, où… Et moi j’essaye beaucoup de faire attention au maintien à domicile, et de prévoir si jamais y a quoi que ce soit, pour éviter absolument qu’ils passent par l’hôpital. Et surtout par la case urgence. » [Médecin généraliste de Mme D.]

20 Par leurs différentes caractéristiques, il apparaît clairement que ces situations créent les conditions d’une complémentarité des conceptions et des attitudes de l’ensemble des acteurs professionnels et familiaux. Mais nous allons maintenant observer comment ces conditions peuvent se fragiliser des deux côtés.

Des médecins critiques et un rôle déterminant des familles pour l’accès au diagnostic

21 Selon des logiques propres à chacun, deux autres médecins de notre corpus se sont montrés particulièrement critiques vis-à-vis des diagnostics de la maladie d’Alzheimer et en rupture à l’égard du dispositif qui leur est proposé, proche ici du « modèle du cloisonnement » (Rolland, 2007).

Une temporisation des médecins face à la demande de leur patient

22 M. P. est un ancien officier de marine devenu ingénieur. Il est âgé de 76 ans, marié et père de deux filles vivant à Paris. Il est suivi depuis 6 ans par un médecin de 38 ans installé en zone rurale côtière, et qui assure des fonctions de maître de stage. M. P. a ressenti des problèmes de mémoire entre deux ans et demi et trois ans avant le diagnostic. Il dit en avoir fait part rapidement à son médecin généraliste qu’il voyait tous les trois mois : « Je me suis dit, il doit y avoir une possibilité de remédier à cette anomalie, en quelque sorte quoi. Et c’est ça qui m’a conduit à consulter, enfin à en parler au Dr X. » [M. P., 76 ans, ancien ingénieur] Le médecin a bien noté cette plainte mais, après un test de MMS normal, elle lui avait semblé plutôt liée à de l’anxiété : « Très tôt en fait on a eu une plainte mnésique. Mais qui ressemblait plus à des troubles anxieux, initialement, en fait, c’était du parasitage lié à une anxiété assez importante. On avait fait une première fois un traitement de son anxiété qui avait bien amélioré. Il avait un MMS à l’époque qui était normal » [Médecin généraliste de M.P., homme, 38 ans] M.P. dit avoir parlé à nouveau de ces mêmes problèmes à son médecin au cours des consultations suivantes. L’épouse de M. P. nuance cependant ses propos, en disant qu’il n’avait probablement pas insisté suffisamment sur l’ampleur de ses difficultés. Alors qu’elle lui proposait de le faire depuis déjà quelque temps, elle a donc décidé, après environ un an et quatre ou cinq consultations, de l’accompagner lors d’une consultation afin de présenter plus précisément les troubles de son mari. C’est ainsi qu’en janvier 2011 (c’est noté très précisément dans le dossier médical par le médecin), de nouveaux tests sont réalisés, notamment le test de l’horloge, qui va s’avérer très mauvais. Mme P. explique : « Ça a été difficile à vivre. Parce que il aurait fait ça, c’était l’horloge donc mettre les heures. Les minutes. Le classique. » M. P. : « Oui, les heures et les minutes. » Mme P. ajoute : « Voilà. Donc il a bloqué, un quart d’heure, il n’a rien fait. » À partir de là, le récit du médecin et celui de Mme P. divergent. Selon le médecin, il a fait un courrier et orienté le couple vers la consultation mémoire et selon Mme P., il a prescrit un scanner et il attendait une nouvelle visite trimestrielle pour faire le point, ce qui ne convenait pas du tout à cette dernière.

23 On peut cependant dire qu’à ce stade, un accord était établi pour aller vers le diagnostic. Mais c’est alors qu’un événement est venu précipiter les choses. Le 15 août 2012 (c’est très précis dans le souvenir de son épouse), M. P. a fait une chute chez lui durant la nuit alors qu’il s’était levé. Sa femme, réveillée par le bruit, le retrouve sans connaissance au sol et appelle le Samu qui va hospitaliser M. P. C’est au cours de cette hospitalisation que le personnel soignant, remarquant des confusions de M. P., décidera de l’orienter vers le service de gériatrie où il subira de nouveaux tests qui aboutiront au diagnostic en mars 2013.

24 Le cas de Mme C. donne à voir une autre forme de temporisation du médecin face à la plainte de la patiente. Mme C. est âgée de 75 ans, elle a eu deux enfants (fille et fils), a été femme au foyer ou occasionnellement femme de ménage. Son mari est ancien cadre ayant bénéficié d’une ascension professionnelle importante, au prix de nombreux déplacements professionnels et de ce qu’il a vécu comme une forte pression de rendement. Ils ont vécu l’essentiel de leur vie en région parisienne et sont revenus vivre en Bretagne en 2001, dont ils sont originaires tous les deux, après le départ en retraite de M. C. qui souhaitait s’éloigner de cet environnement social parisien qu’il trouve stressant. Ce déménagement était donc plutôt un choix de M. C., son épouse regrettant de son côté sa vie en région parisienne où elle avait davantage de relations. Ils sont suivis tous les deux par le même médecin généraliste depuis 12 ans. Là aussi, Mme C. a très tôt fait part de problèmes de mémoire disant qu’elle perdait la tête ou, plus explicitement encore, qu’elle avait la maladie d’Alzheimer. Après l’annonce du diagnostic en janvier 2014, elle dit ainsi : « Je savais que j’avais la maladie d’Alzheimer. Un début. Je le savais. »

25 Le médecin généraliste de Mme C. [Homme, 60 ans, milieu urbain] retrouve également des traces de cette plainte précoce dans son dossier où il avait noté dès 2006 : « consultation neurologue pour des troubles de la mémoire ». Il avait donc bien envisagé une démarche diagnostique, mais il n’a finalement pas pris de rendez-vous argumentant des problèmes d’hypothyroïdie survenus à ce moment-là et auxquels il a donné la priorité, précisant que l’hypothyroïdie « peut ralentir » les personnes, créer de la fatigue et que cela a pu « brouiller le tableau ». Mais son attitude tient aussi au fait qu’il voit sa patiente comme une « femme plaintive » ayant « un train dépressif » et n’étant pas très bien à sa place dans sa nouvelle région. Il connaît donc les difficultés ressenties par sa patiente à son arrivée dans la région. Et c’est en partie cette connaissance même de Mme C. qui l’a amené à ne pas donner trop d’importance à ses plaintes mnésiques. Dans cette situation-là, le médecin ne jouera aucun rôle dans l’orientation de sa patiente vers une consultation mémoire. C’est par l’intermédiaire d’un pneumologue consulté régulièrement pour des problèmes d’asthme que se fera cette orientation, presque huit ans après sa première plainte.

Une forte réserve à l’égard des diagnostics et des traitements

26 Au sujet des premières visites où son patient exprimait une plainte mnésique, le médecin de M. P. nous dit : « Quand les troubles sont quand même modérés ou se tiennent. On fait pas toujours toutes les démarches pour les, enfin je ne fais pas forcément des dépistages… J’attends en général que les troubles soient gênants pour… » Il décrit un changement dans sa pratique par rapport à une première période où il était plus actif dans la recherche et dont il dit désormais qu’il « rendait les gens malades ». Le changement est dû à deux facteurs principaux. Il juge d’abord les traitements inefficaces en référence à des lectures d’articles de la presse indépendante (la revue Prescrire). Mais il dit avoir lui-même constaté des effets secondaires parfois importants chez ses patients (obnubilations, diarrhées). Plus généralement, il pense que la maladie d’Alzheimer donne lieu à des excès de diagnostic. Il prend l’exemple parmi d’autres d’une de ses patientes diagnostiquée depuis sept ans et dont la maladie n’a, selon lui, pas évolué malgré l’arrêt de tout traitement. Au sujet de M. P., il reconnaît avoir attendu des troubles plus manifestes, alors même qu’il commençait à soupçonner une maladie d’Alzheimer possible : « Ça débouche pas sur un traitement qui révolutionne les choses, autant des fois laisser les gens… ( – Un peu tranquille ?) – Un peu tranquille. ( – D’accord. Ça se tient.)

27 – Oui. ( – Et c’est un peu ce que vous avez fait là ?) – Oui, je pense. ( – D’accord.) – Je pense que j’ai tempéré tant que, tant que j’avais pas plus que ça. ( – D’accord. Est-ce que la probabilité peut-être de ça, Alzheimer, vous vous étiez déjà un peu dit : “mais je garde ça sous le coude, on verra plus tard quoi” ?) – Exactement. » Ce comportement consistant à ne pas rendre les gens malades a été identifiée comme un élément très structurant de l’attitude des médecins généralistes à l’égard du diagnostic de la maladie d’Alzheimer (Hansen E.C. et al., 2008).

28 On retrouve des conceptions proches du côté du médecin de Mme C. qui ne voit pas l’intérêt du traitement et dit très clairement qu’il ne l’aurait pas prescrit même s’il ne l’arrêtera pas. Il dit avoir « plein de patients qui pourraient avoir un diagnostic », mais que son rôle n’est pas de les initier, que la plupart du temps, les patients ne les demandent pas, qu’ils représentent une sentence pour les personnes et sont donc très durs à porter. Cette terminologie renvoie à ce qu’on a qualifié de « représentation traditionnelle » de la maladie d’Alzheimer. Elle reste fortement péjorative et peu marquée par les efforts de requalification de la maladie et de renouvellement de ses représentations (Ngatcha-Ribert, 2012). Là aussi, de tels diagnostics ne lui semblent légitimes que lorsque les troubles gênent réellement les personnes dans leur vie quotidienne et qu’on doit envisager des aides à domicile.

Un manque de reconnaissance et des tensions avec les spécialistes

29 Ces deux médecins pensent qu’ils ne jouent qu’un rôle marginal dans la construction des diagnostics et ils évoquent des relations parfois difficiles avec les spécialistes hospitaliers. Le médecin de M. P., maître de stage qui revendique la spécificité des compétences du généraliste, nous dit : « Je pense que ça ne m’arrive pas une fois sur 40 que je sois appelé pour un diagnostic de maladie d’Alzheimer. (…) nous ne sommes pas un élément de leur diagnostic. Et je trouve ça dommage parce que nous connaissons extrêmement bien les gens en général. » Alors même qu’il pense être détenteur d’une compétence pertinente pour l’élaboration de ces diagnostics, celle-ci n’est pas requise par ses confrères hospitaliers : « Globalement en fait oui, je trouve que le monde hospitalier nie le monde libéral. » Cette situation peut conduire, selon lui, à des erreurs de diagnostic : « Des gens qui arrivent et qui sont un peu perdus à l’hôpital, sur un moment donné ils ont un MMS qui est effondré, on dit que c’est Alzheimer, mais ce n’est pas toujours le cas. » Ou encore au sujet d’un de ses patients : « Je trouve que le diagnostic est posé de façon brutale, comme si… Enfin dans certaines circonstances, après c’est pas systématique, voilà mais, je trouve que enfin un coup de fil. On m’aurait envoyé un coup de fil, j’aurais pu dire que le monsieur, on parlait des élections présidentielles (élections de 2012) de façon précise avant l’hospitalisation. Et donc que c’est une confusion et donc pas du tout une démence. »

30 Moins axé sur l’affirmation d’une compétence propre, le médecin de Mme C. dit cependant des choses proches de la place marginale du généraliste. Il voit ces diagnostics comme une affaire de spécialistes, ajoutant de manière ironique : « On fait ce qu’on nous dit. » Ce qui signifie suivre à distance et de façon plus ou moins heureuse ce qui est mis en place par le spécialiste sans peser réellement sur la trajectoire. S’il dit que, dans la plupart des cas, ça se passe plutôt bien, cela signifie que ça se passe sans liens réels avec les spécialistes et avec peu d’échanges. Au-delà de la maladie d’Alzheimer, il décrit des relations parfois mal vécues lorsque les spécialistes « leur disent (aux généralistes) comment faire leur travail ». Il évoque une incompréhension de sa pratique et « un côté donneur de leçons » du spécialiste qui ne connaît pas les contraintes de travail du généraliste.

31 Il faut préciser cependant que le rôle qu’ils entendent jouer dans le suivi de la maladie diverge. Le médecin de M. P. a l’intention d’y prendre une part plus active et il connaît les offres de soin de type « équipes spécialisées Alzheimer » qu’il pense profitables à son patient. Le médecin de Mme C. semble de son côté avoir acté plus radicalement ce clivage, pour lui le diagnostic comme le suivi relèvent du spécialiste et il ne connaît pas les nouvelles offres de soin issues du plan Alzheimer.

Un rôle déterminant des familles pour obtenir ou pas le diagnostic recherché

32 Malgré ces attitudes très critiques, les diagnostics ont été faits et il faut, pour finir, montrer le rôle joué par les familles et la place déterminante des ressources qu’elles peuvent mobiliser pour cela. Dans le cas de M. P., nous avons vu le rôle clé joué par son épouse pour faire entendre les troubles de son mari. Malgré sa position très critique, le médecin a fini par trouver le diagnostic pertinent pour M. P., car dit-il : « Ils sont plutôt dans une attitude, enfin j’ai ressenti une attitude de combat quoi. “On va faire ce qu’il faut, on va faire des mots croisés, enfin on va stimuler enfin.” (…) Donc, du coup, je pense que c’est plutôt positif le diagnostic pour des gens comme ça. Contrairement à la plupart des cas, mais ce sont des gens qui avaient un problème, on leur donne un diagnostic. Donc ils savent contre quoi ils doivent lutter. » En fait cette attitude de combat se retrouve surtout chez Mme P. qui lui semble apte à jouer efficacement son rôle d’aidante et il dit d’ailleurs qu’il sera attentif à son éventuel épuisement. C’est donc au terme d’un travail de persuasion du couple, et notamment de Mme P., que le médecin s’est rangée à l’idée d’un diagnostic utile pour eux. Or on sait que cette capacité à se montrer un gestionnaire crédible de sa propre pathologie ou de celle d’un proche est socialement située (Le Bihan et al, 2012). La situation de Mme C. permet d’ailleurs de l’illustrer, car, de son côté, elle n’a pas le soutien de sa famille. Au contraire, celle-ci a minimisé les troubles, la renvoyant à la stabilité de ses rôles sociaux habituels. Un échange entre nous, Mme C. et son mari est révélateur de ce mode de dénégation de sa plainte et de sa résignation. Mme C : « Je dis : “Oui, mais quand j’aurai perdu la tête ? [elle fait parler ses enfants qui répondent] – Mais, Maman” Alors on vient, on me dit : “Mais tu continues à faire à manger. T’as vu tout ce que tu nous as fait ?” Mais je dis, mais c’est… Et puis après je me tais parce que… ( – Vous, vous en avez parlé finalement assez tôt, et votre entourage vous disait : “Mais non, tu…”) Mme C. : Personne ne voulait l’admettre. M. C : Ben, c’est-à-dire, l’admettre, on voulait. Enfin moi personnellement, c’était le fait que tu t’enlèves ça de la tête, si vous voulez. Si tu veux. C’est tout. ( – Que ça ne soit pas obsessionnel ?) M. C : Voilà. C’est, c’est le seul problème. Bon effectivement elle a… ça fait quoi, ça fait 7-8 ans que t’en parles de ça. »

33 Ce second type de situation montre les effets de positions très critiques à l’égard des diagnostics et des traitements et la prégnance de pratiques professionnelles construites à distance des spécialistes ou dans la revendication des compétences propres des généralistes (Bloy, Schweyer, 2010). Les conséquences pour le patient sont alors sa dépendance à l’égard du soutien familial et des ressources mobilisables de ce côté-là pour contourner les effets de cette distance. Quand la demande de la famille est forte et sans ambiguïté, le diagnostic peut advenir, amenant le médecin à s’y ajuster. Mais quand la famille elle-même ne reçoit pas la plainte, la trajectoire diagnostique peut devenir bien plus longue, passer par des voies détournées et conduire le médecin à prendre de la distance vis-à-vis du suivi de sa patiente.

Des diagnostics entre régulation des tensions et enjeux professionnels

34 Les situations étudiées ici se caractérisent par une incertitude sur les positions à tenir dans des contextes où la relation au patient, à sa famille et une conception de la prise en charge centrée sur la gestion du vieillissement et la préservation de l’autonomie rendent la pathologisation des troubles problématiques. N’ayant pas de position établie a priori, positive ou négative, sur les diagnostics (même si les traitements sont là encore plutôt critiqués), les médecins jugent moins le diagnostic en tant que tel que sa pertinence au sein d’une trajectoire de soin au long cours largement engagée.

Incertitude sur leur origine et pathologisation faible des troubles

35 Si, comme on l’a vu, l’expression des troubles par le patient lui-même contribue à faciliter la trajectoire diagnostique, elle n’est cependant pas toujours claire et définitive. Ainsi, Mme L. [ancienne commerçante en boucherie, 89 ans, veuve, vit en milieu rural dans le village où elle était commerçante] peut alterner l’exposé de ses problèmes de mémoire et la revendication de sa propre autonomie. Son médecin, un homme de 67 ans qui la suit depuis 40 ans, nous dit : « Et devant moi, elle présentait plutôt un profil assez satisfaisant, (la patiente pouvait dire) : “Moi, j’oublie deux, trois trucs mais enfin je suis autonome, je vis toute seule, je me fais à manger.” Et pas de détail pouvant évoquer la piste… à part quelques troubles cognitifs. » Le médecin n’a pas regardé ces troubles cognitifs comme des symptômes. Mais il ne les a pas reçus dans le cadre d’une consultation dont ils auraient été l’objet, et les a perçus comme une forme routinière de présentation de soi. C’est bien plus l’affirmation d’autonomie que le médecin a cherché à préserver et à valoriser : « Donc et voilà, moi, troubles cognitifs, pas plus envie d’approfondir ça… à 87, 87 et même plus, pas plus envie d’approfondir ça. Elle est autonome, elle vit bien […] Je la trouvais vachement autonome, et bien, et j’étais fier de lui dire. »

36 Le cas de Mme G. montre une logique similaire. Cette dame est âgée de 86 ans, elle est veuve et mère de trois filles, elle vit seule chez elle, tout en étant très active (bénévolat en maison de retraite) et intégrée socialement (amis, participation hebdomadaire au club des retraités). Son médecin est une femme de 45 ans qui suit sa patiente depuis 11 ans. Comme on le précisera plus loin, aucun trouble cognitif particulier n’a jamais été présenté au médecin, ni par la patiente, ni par sa famille, le diagnostic a été posé suite à une hospitalisation. Voilà comment le médecin parle de son cas : « À 86 ans, je trouve que tout le monde a légitimement le droit d’avoir des troubles de la mémoire qu’il y ait Alzheimer ou pas, je trouve qu’à 86 ans elle s’en sort pas mal, les troubles de la mémoire ne sont pas flagrants. » Là aussi, le diagnostic est mal perçu, car il met en péril l’important travail d’autonomie qui est réalisé par la patiente avec le soutien de son médecin : « Cette femme met un point d’honneur à être seule dans sa maison ; on l’a installée, elle a vendu sa maison, elle a fait beaucoup d’efforts, elle s’est débarrassée de beaucoup de choses, elle a bien réorganisé sa vie, elle est venue au bourg, elle a redéménagé dans un petit appartement bien plat et du coup, quand on parle d’Alzheimer à cette femme-là, qui a fait beaucoup de choses, je trouve que c’était moche, car, pour moi, Alzheimer c’est quelqu’un de dépendant, qui ne peut plus vivre chez elle, qui ne peut plus vivre chez lui. » De fait, sa patiente est venue la voir très paniquée après l’annonce du diagnostic et elle s’est alors employé à l’édulcorer : « Moi, je suis toujours prête à mettre un nom et à aider quand il y a besoin, mais j’ai un peu minimisé la maladie d’Alzheimer, car elle est tout de même engagée dans une vieillesse qui se passe bien, une fin de vie qui se passe bien. Donc je lui ai dit que ce ne sera pas péjoratif pour la fin ; moi, j’ai vu ça comme ça. »

37 La maladie d’Alzheimer représente une mise en danger des aptitudes à poursuivre le travail d’autonomie entrepris par des médecins centrés sur un accompagnement du parcours de vieillissement de leur patiente. Perçue comme une « maladie qui fait advenir la vieillesse », elle « force l’individu malade et son entourage à renoncer à certaines activités, elle redéfinit certains de leurs rôles sociaux » (Le Bihan, Campéon, Mallon, 2012). Ici, les rôles de médecin et de malade et l’objet même de leur relation seraient profondément redéfinis par le diagnostic. À cette première dimension relationnelle, il faut ajouter le fait que les médecins ont eux-mêmes des relations tendues avec les familles ou ont affaire à des relations familiales en tension.

Des relations familiales en tension et un relais faible dans le travail de redéfinition

38 Dans le cas de Mme L., l’orientation vers la consultation mémoire a été faite par le médecin, mais à la demande de sa fille. Or, les relations que le médecin entretient avec cette personne sont difficiles. Elles s’inscrivent aussi dans l’histoire longue qu’ils partagent : « J’ai connu ses enfants et j’ai connu tout ce qu’elle a traversé. C’est une femme qui a eu une vie assez pénible, parce que sa fille buvait et elle était en couple avec un mec qui buvait lui aussi et qui s’est suicidé. Donc elle a vécu ça. C’est des commerçants bouchers et puis à la mort de son mari, elle s’est retrouvée toute seule avec sa fille qu’elle n’a plus vue pendant quelques années et qui est revenue après et qui, maintenant, a tendance à revenir la voir et à être assez directive. » Concernant la mise en place des aides à domicile et du rôle que joue habituellement la famille pour en assurer l’organisation, il dit : « Il faudrait, j’allais dire et c’est peut-être un peu méchant, que ce soit pas sa fille qui le fasse. » Le diagnostic redéfinit le statut et le rôle de la fille de Mme L., qui devient un partenaire central du médecin ce qui visiblement lui pose problème. La fille de Mme L. n’est pas venue voir le médecin, alors même qu’elle s’inquiétait de plus en plus de l’état de sa mère. Elle a attendu qu’on la retrouve marchant dehors la nuit pour se décider à lui rendre visite, après avoir d’abord appelé l’hôpital, avec un argument suffisant pour éviter d’avoir à s’expliquer. Elle raconte comme suit une de leur entrevue depuis le diagnostic : « J’ai vu (le médecin) la semaine dernière pour lui faire remplir une feuille pour la demande à 100 % et il a commencé par crier et il me dit : “Mais comment j’aurais dû lui supprimer des médicaments et on m’a jamais dit ça et regarde sur mon ordinateur.” Puis c’était pas la dernière visite, c’était la fois d’avant et là, il s’est radouci parce qu’il est assez… , vous avez dû vous rendre compte, et après il s’est radouci et il m’a dit : “Qu’est-ce que tu veux, tu veux faire interner ta mère ?” »

39 Dans la situation de Mme G., les tensions se situent moins entre médecin et famille qu’entre les trois filles de cette dame, l’une, infirmière étant hostile au diagnostic et les autres y étant favorables : « Les enfants sont partagés : il y a une des filles qui est infirmière et qui dit que ce sont juste des petits troubles de la mémoire dus à l’âge et les deux autres qui sont aides-soignantes et qui disent : “maman n’est pas bien”. » Outre que cette situation affaiblit le rôle de la famille dans la définition des troubles, elle dessine là aussi des perspectives de prise en charge nouvelles que le médecin ne perçoit pas très positivement : « J’ai une fille avec qui je m’entends très, très bien, la fille qui est infirmière ; les autres sont arrivées, c’était pour d’autres choses, agressives, pour tout ; elles remettent tout en question, même ma parole. »

40 Liés depuis longtemps aux familles et/ou coopérant avec elles dans des démarches d’accompagnement des parcours de vieillissement de leurs patientes, les médecins généralistes sont pris ici dans des processus de « production de définitions de la situation concurrentes, ouvrant sur des perspectives de prise en charge elles aussi opposées » (Béliard, Eideliman, 2014). Or, face à l’importance pour eux de ces recompositions, les bénéfices perçus au plan médical dans le traitement de la maladie d’Alzheimer leur semblent faibles.

Faiblesse des traitements et manque d’outils de prise en charge

41 Ici encore, les médecins considèrent que les apports des traitements sont faibles : « Je ne pense pas que cela va changer sa vie qu’on ait posé un diagnostic de maladie d’Alzheimer et qu’on lui ait donné un comprimé d’Aricep®. » [Médecin généraliste de Mme L.], ou qu’ils ont une efficacité sans rapport avec les symptômes de leurs patientes ; le médecin de Mme G. explique : « Le médicament va simplement régler certains troubles du comportement qu’elle n’a pas (…) Si elle ne le prend pas pour moi, ça ne va pas changer le cours des choses. On ne sait pas si ça arrange les choses ou pas ; ça permet de calmer les gens qui sont agités dans leur pathologie. » Précisons que Mme G. a arrêté le traitement, avant même d’en parler à son médecin. Par ailleurs, l’absence de services disponibles sur un territoire réduit aussi l’intérêt du diagnostic : « Par la suite, le diagnostic étant fait, le gros problème que l’on a, c’est le maintien à domicile ou le placement et on n’a rien du tout. » [Médecin généraliste de Mme L., zone rurale]

42 Pour autant, précisons que ces deux médecins ne sont pas opposés au diagnostic. Le médecin de Mme L. reconnaît la compétence de la spécialiste gériatre qui l’a posé : « Si c’est X qui le dit, là j’ai confiance. » De son côté, le médecin de Mme G. est préoccupé d’atténuer les discordances médicales qui pourraient alimenter les tensions familiales et dit à propos du diagnostic : « Il faut qu’on soit tous cohérents parce que si quelqu’un le dit une fois, il faut qu’on le dise tous. Pour moi, une équipe soignante doit le dire, je ne vais pas aller contre. Mais on n’était pas obligé de faire des tests, on n’était pas obligé de faire tout ça. » Même si elle en a minimisé les conséquences, elle ne le conteste pas pour ne pas cliver les positions médicales et donc, en écho, les positions des filles de sa patiente.

43 Dans ce troisième type de situations, la longue histoire commune avec les patients et les familles, le grand âge des patientes et les objectifs de préservation de l’autonomie qu’il suppose sont autant de stabilisateurs de la relation de soin que le diagnostic amène à recomposer fortement, alors même que les solutions de prise en charge qu’il apporte apparaissent faibles. Les choses se passent comme si le diagnostic, imposant la maladie d’Alzheimer comme nouvel objet de travail dans une relation ou même une configuration de soin stabilisée, contribuait à l’affaiblir (démobilisation du patient, renouvellement des partenaires familiaux), sans que les outils mobilisables (traitements, services, nouveaux partenaires) ne soient des réponses efficaces.

Conclusion

44 Sans prétendre en retracer toutes les formes, les analyses proposées ici permettent d’éclairer les processus au terme desquels les médecins généralistes prennent position dans ces démarches de diagnostic. Ces positions se construisent bien à la rencontre d’enjeux professionnels et de contextes socio-familiaux selon des schémas d’articulation variables. Le diagnostic peut être une opportunité plutôt constructive quand les médecins adhèrent à cet objectif, s’inscrivent sans tension dans les coopérations qu’il suppose avec les spécialistes, mais aussi quand ils évoluent dans des configurations familiales elles aussi axées sur cet objectif et dépourvues de tensions internes. Dans de telles situations, la maladie d’Alzheimer peut devenir l’objet d’une mobilisation inédite du partenaire familial et tracer des perspectives de coopération positives pour l’avenir. À l’inverse, le diagnostic peut être déstabilisant pour des médecins qui se montrent critiques à l’égard de la médicalisation des troubles, qui sont en tension avec les spécialistes, et qui devront pourtant, qu’ils soient d’accord ou pas, composer avec la volonté des patients et/ou de leur famille d’obtenir ce diagnostic. Les médecins peuvent alors choisir de s’engager, mais sans grande conviction, dans le suivi de la pathologie en gérant des traitements qu’ils jugent inefficaces, ou bien de déléguer complètement ce travail aux spécialistes. Le diagnostic peut enfin représenter une rupture forte du parcours de soin pour ceux qui interviennent depuis longtemps auprès de patients plus âgés, et dont les stratégies de soin sont structurées par un objectif de maintien à domicile qui leur semble relativement maîtrisé et qui reste cadré par la relation à leur patient. La maladie d’Alzheimer vient ici redéfinir en profondeur les finalités techniques du travail comme ses conditions éthiques de réalisation en réévaluant à la baisse le statut du patient et en redessinant conjointement les formes de coopération avec la famille.

45 Pour les généralistes, accepter les recommandations de bonnes pratiques revient à garder la possibilité de ne pas les appliquer « strictement et intégralement (…) ou en tout cas de laisser l’application intégrale être gouvernée par la relation duelle » (Trépos et Laure, in Bloy, Schweyer, 2010). Or, c’est bien une telle question de maîtrise de la pratique et de la relation de soin qui se pose ici. En effet, le diagnostic de la maladie d’Alzheimer vient modéliser ou remodéliser fortement la relation de soin. Pour consentir à réorganiser d’une telle manière les façons de faire et d’être ensemble, les médecins doivent trouver un intérêt au diagnostic. Pourtant, la faible efficacité des traitements ou des solutions de prise en charge ne permet pas toujours de justifier à leurs yeux cette transition forte de la trajectoire de soin. Le problème central nous semble ainsi résider dans les capacités toutes relatives des médecins à maîtriser les nouvelles modalités de travail que le diagnostic fait émerger. Précisons sur ce point que nous ne prétendons pas avoir identifié des logiques médicales stables dans le temps et dans l’espace et qui permettraient de délimiter des frontières précises entre différents sous-groupes de médecins généralistes. Nous présentons des compromis dont l’issue est incertaine et dans lesquels les médecins ne jouent souvent qu’un rôle limité. Ils prennent place au sein de configurations, mais, en retour, ces configurations et les mouvements que leur impose le diagnostic contribuent aussi à les placer ou à les déplacer. C’est précisément cette maîtrise très partielle du processus de diagnostic qui nous semble à retenir et qui peut représenter une difficulté si l’on veut faire des généralistes des acteurs centraux de la prise en charge de la maladie d’Alzheimer.

Français

La prise en charge de la maladie d’Alzheimer est devenue un objectif majeur des politiques de santé publique et un enjeu central s’est porté sur son diagnostic. On considère encore que les diagnostics sont trop peu nombreux et trop tardifs et le rôle des médecins généralistes est questionné sur ce point (Villars et al., 2013). Cet article tente d’analyser leur place et leurs pratiques en les situant dans un double système de contraintes entre des enjeux professionnels et des contextes sociofamiliaux. D’un côté, les recommandations de la HAS leur attribuent des missions précises en amont et en aval sans qu’ils jouent pour autant le premier rôle dans la réalisation du diagnostic ou dans la prescription médicamenteuse initiale. D’un autre côté, la relation avec les familles est ambivalente. Elles sont des partenaires incontournables dans le suivi des pathologies chroniques, mais leur rôle d’initiation des diagnostics modifie le cadre habituel de la relation médecin/patient et peut poser des questions éthiques aux médecins. Comment prennent-ils position dans ces contextes complexes ? Quelles sont les articulations entre participation au dispositif de diagnostic, implication dans le contexte familial et relation au patient ? Lors d’une enquête qualitative par entretiens sur des cas de diagnostics récemment réalisés, nous avons recueilli les points de vue croisés des médecins, des patients et des familles. Notre analyse met en évidence trois formes spécifiques de régulation de ces contraintes et montre la complexité des positions des médecins et les limites de leurs marges de manœuvre sur ces processus de diagnostic.

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Guillaume Fernandez
sociologue
Laboratoire d’études et de recherche en sociologie (Labers EA 3149)
Marine Guyomar
ethnologue
Laboratoire d’études et de recherche en sociologie (Labers EA 3149)
Armelle Gentric
PU-PH gériatrie CHRU de Brest, Éthique, professionnalisme et santé (EPS EA 4686)
Marion Andro
PH gériatrie, Éthique, professionnalisme et santé (EPS EA 4686)
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Mis en ligne sur Cairn.info le 16/04/2015
https://doi.org/10.3917/rs.069.0039
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