CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 L’importance de l’immigration dans la constitution des populations n’est plus à démontrer. La prise de conscience de ce phénomène par l’opinion publique a été favorisée par la construction européenne, le vieillissement de la population et l’accroissement des flux migratoires. La question des migrations et de ses conséquences est désormais au cœur de l’actualité en France et en Europe. Elle suscite des travaux de plus en plus nombreux qui apportent de nouveaux éclairages sur l’histoire et la diversité des populations. Cet article a pour ambition d’y contribuer quelque peu, en décrivant sous un nouveau jour la population immigrée vivant et vieillissant en France [1]. Il s’appuie pour cela sur l’analyse des données d’une enquête récente sur le passage à la retraite et le vieillissement des immigrés (enquête PRI, voir encadré), aspect encore peu étudié des migrations. L’intérêt d’une recherche sur les immigrés à l’âge de la maturité et de la vieillesse est multiple. Ce choix permet non seulement d’observer le déroulement des étapes importantes de cette période de la vie (les fins de carrière, les choix relatifs à la retraite [2] ), mais aussi de bénéficier du recul du temps pour mettre en relief le caractère évolutif des phénomènes migratoires et repérer la variation des types de migrations au cours du cycle de vie. L’échantillon de l’enquête étant circonscrit aux personnes âgées de 45 à 70 ans, il comprend surtout des immigrés de longue date, ce qui favorise une mise en perspective temporelle de l’expérience migratoire.

2L’objet de cet article est donc de décrire ces générations d’immigrés dans leurs diverses composantes, tout en recherchant des éléments susceptibles de caractériser d’éventuels profils migratoires propres aux différentes phases de vie. Il est structuré de la façon suivante. Après la description du champ et de la méthode de l’enquête PRI, ses résultats sont présentés en cinq parties : la structure par âge et sexe des groupes d’immigrés distingués selon les pays d’origine, reflétant des vagues successives d’immigration; la diversité des histoires migratoires; la composition socioprofessionnelle, la mobilité professionnelle et le niveau d’éducation en fonction du pays d’origine; les croyances et les pratiques religieuses ; la conjugalité et la vie familiale.

Présentation de l’enquête « Passage à la retraite des immigrés »

L’enquête sur le vieillissement et le passage à la retraite des immigrés en France (PRI) [3], a été menée entre novembre 2002 et février 2003 sur une population immigrée de 45 à 70 ans, résidant en France, définie par le lieu de naissance (hors de France) et la nationalité de naissance (non française), ce qui n’exclut pas les Français par acquisition de la nationalité mais exclut les Français nés à l’étranger [4]. Cette enquête qui avait pour objectif principal d’étudier les processus de passage de la vie active à la retraite des immigrés, en reconstitue aussi les parcours de vie, migratoire, professionnel et familial, et traite de leurs projets de retraite et de leur vie pendant la retraite.
L’enquête a été réalisée dans les douze régions de la France métropolitaine qui regroupent 90 % de la totalité de la population cible. L’échantillon a été obtenu par sondage aléatoire réalisé par l’Insee à partir du recensement de la population de 1999,12000 « fiches adresses » ayant été tirées. La collecte a été réalisée par les enquêteurs de l’Insee, en entretien face-à-face d’une durée moyenne d’une heure et demie, avec un questionnaire sur un micro-ordinateur portable (Capi). L’échantillon final est constitué de 6 211 personnes vivant en ménage ordinaire.
L’enquête apporte des informations sur les caractéristiques sociodémographiques et économiques de l’enquêté, son histoire migratoire, son entourage familial et son réseau social ainsi que sur les aides et les transferts économiques dont il est le centre. Sont également traités le passage à la retraite et les projets de retraite qui incluent les intentions de maintien, de retour ou de « va-et-vient » entre la France et le pays d’origine. Enfin, sont étudiés les attitudes et opinions sur la retraite, le rapport à la famille, à la religion, à la société d’accueil et au pays d’origine.
Le choix d’interroger les immigrés venant de tous pays pose la question de la pertinence de la notion d’« immigré ». Prise dans son sens strictement démographique, elle recouvre une grande diversité de situations, selon les pays d’origine, la catégorie sociale et le niveau d’éducation, du plus bas au plus élevé. Les immigrés représentent une grande partie de la planète et une pluralité de métiers. Que recouvre donc ce vocable qui justifie de les englober dans un même ensemble à étudier ? C’est sans doute cette diversité même qu’il convient de prendre en compte pour en restituer la richesse, masquée par la représentation uniformisante, fréquemment associée au terme d’immigré. Les immigrés ont cependant en commun la rupture introduite dans le cours de la vie par la migration et ses aléas. Signe de notre époque, la mobilité internationale se fait dans une temporalité nouvelle, les technologies modernes de communication et d’information raccourcissant l’espace et le temps des migrations.
En ce qui concerne l’origine des migrants, seuls les pays les plus représentés pourront faire l’objet d’une étude spécifique, ce que nous permet la taille de l’échantillon des immigrés originaires des trois pays du sud de l’Europe (Espagne, Italie et Portugal) et du nord de l’Afrique (Algérie, Maroc et Tunisie). La Turquie peut également être distinguée pour certains traitements globaux. Les autres pays sont quant à eux regroupés par grandes zones géographiques. Les migrants originaires d’Europe, qui sont encore les plus nombreux dans les tranches d’âges considérées par l’enquête, seront différenciés selon qu’ils sont originaires du Nord (ex-Union des Quinze) ou des autres pays européens (majoritairement ceux de l’Est).
Le choix des 45-70 ans cible la phase de vie de la maturité et du passage à la retraite. Il permet d’étudier des cohortes issues de vagues migratoires avec des profils et des provenances spécifiques à une période précise de l’histoire récente des migrations. Pour concentrer dans l’échantillon un nombre optimal de migrants correspondant aux flux les plus significatifs, il a fallu tenir compte des structures par âge des différents groupes de pays. L’âge de 45 ans permet d’inclure des ressortissants d’Afrique noire et du Maghreb, dont la structure d’âge est plus jeune que celle des Européens de migration plus ancienne. Au niveau supérieur de la tranche d’âges, celui de 70 ans est un seuil au-delà duquel un échantillon d’immigrés aurait été très déséquilibré, avec une très faible minorité de représentants de pays d’Afrique et d’Asie et une très grande majorité d’Italiens et d’Espagnols. Le nombre de personnes de plus de 70 ans parmi la plupart des différents groupes d’immigrés est en effet encore faible.

? Structure par âge et sexe des immigrés

3En comparant l’ensemble des personnes immigrées à l’ensemble de la population française, on observe une différence radicale de la structure d’âge. Cette différence provient d’abord de la définition statistique de la notion d’immigré qui exclut les enfants d’immigrés nés en France. Il est bien évident que le nombre très réduit des moins de 20 ans que l’on constate alors ne rend pas compte de la réalité démographique des familles immigrées. Ce n’est que par l’artifice du jeu des définitions qu’ils disparaissent en grande partie de la structure démographique, celle-ci comptabilisant seulement les hommes et les femmes qui ont traversé eux-mêmes les frontières pour s’installer en France.

4La pyramide des âges de la population (cf. graphique 1) révèle que le groupe le plus important d’immigrés a entre 35 et 49 ans. En comparant les cohortes sélectionnées dans l’enquête PRI à l’ensemble des âges, on observe d’une part un plus faible nombre de femmes que d’hommes dans les âges plus jeunes, d’autre part une sensible diminution continue des effectifs avec l’âge, particulièrement à partir de 62 ans.

5Cette distribution résulte à la fois des courants migratoires qui se sont succédé au cours de ce siècle, de l’hétérogénéité des flux d’arrivée et de départ et du vieillissement des immigrés. Il n’entre pas dans notre propos de détailler ces aspects historiques, fort bien étudiés par ailleurs (voir notamment Noiriel, 1988). L’objectif de cette première approche est de repérer les spécificités des groupes d’âges étudiés dans notre enquête.

6Nous considérerons tout d’abord la répartition numérique des immigrés âgés de 45 à 70 ans, selon les pays ou groupes de pays d’origine, représentée dans le tableau 1 et le graphique 2 (p. 120).

Tableau 1

Effectifs* des immigrés âgés de 45 à 70 ans selon le lieu de naissance (en milliers)

Tableau 1
Tableau 1 Effectifs* des immigrés âgés de 45 à 70 ans selon le lieu de naissance (en milliers) EnsembleHommes Femmes Espagne 153,570,0 83,5 Italie 185,899,2 86,6 Portugal 260,5136,7 123,8 Autre UE 133,156,8 76,3 Turquie 51,031,3 19,7 Autre Europe 90,238,0 52,2 Algérie 246,0142,5 103,5 Maroc 187,0116,5 70,5 Tunisie 87,353,8 33,5 Autre Afrique 80,449,7 30,7 Asie 99,251,1 48,1 Amérique, Océanie 31,113,5 17,6 Total 1 605,1859,1 746,0 Source : Enquête PRI, Cnav, 2003. * Pondérés.

Effectifs* des immigrés âgés de 45 à 70 ans selon le lieu de naissance (en milliers)

Enquête PRI, Cnav, 2003.
Graphique 2

Répartition des immigrés selon le sexe et le lieu de naissance

Graphique 2
Graphique 2 Répartition des immigrés selon le sexe et le lieu de naissance Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Répartition des immigrés selon le sexe et le lieu de naissance

Enquête PRI, Cnav, 2003.
Graphique 1

Répartition proportionnelle* des immigrés et des autochtones dans la population française

Graphique 1
Graphique 1 Répartition proportionnelle* des immigrés et des autochtones dans la population française Source : Insee, Recensement général de la population, 1999. * Pour 100 000 personnes.

Répartition proportionnelle* des immigrés et des autochtones dans la population française

Insee, Recensement général de la population, 1999.

7Ceux-ci sont regroupés de la manière suivante : on distingue isolément les trois pays du sud de l’Europe (Italie, Espagne et Portugal) ainsi que les trois pays du nord de l’Afrique (Algérie, Tunisie et Maroc), qui sont numériquement les plus représentés. Selon les cas et les possibilités de traitements statistiques, on peut également isoler la Turquie.

8Les autres pays, trop faiblement représentés pour être étudiés séparément, sont réunis par grandes régions et continents : Afrique subsaharienne, autres pays de l’Union européenne, autres pays d’Europe, Asie, Amérique et Océanie. Les pays d’Afrique subsaharienne représentés appartiennent aux ex-colonies françaises de l’Afrique de l’Ouest, ce qui légitime leur regroupement. Les autres pays d’Europe sont principalement des pays de l’Est. L’Asie est représentée majoritairement par le Viêtnam, mais aussi par la Corée et par un nombre plus faible de personnes originaires de différents pays comme l’Inde. Enfin, le dernier ensemble est le plus hétérogène, composé de personnes originaires d’Amérique du Nord (USA et Canada), d’Amérique du Sud, des Caraïbes, des Îles d’Océanie et d’Australie. Ils sont classés sous la rubrique « autres pays ».

9Dans un premier temps, nous décrivons les particularités des immigrés de 45-70 ans, par rapport à l’ensemble des immigrés. Ils sont ensuite comparés aux personnes de même âge non immigrées, c’est-à-dire nées en France ou françaises de naissance, désignées ici par les termes « autochtones » ou « natifs ». Cette comparaison a pu être menée à bien grâce à la mise à disposition de l’enquête EHF 1999 [5] qui a porté sur un échantillon de 386000 personnes de 18 ans et plus incluant, entre autres variables, le pays de naissance et la nationalité. Les cohortes de 45 à 70 ans représentent au total 45 % des immigrés de 18 ans et plus et 37 % des non-immigrés de même âge.

10La structure par âge des immigrés selon leur pays d’origine reflète très clairement les phases de l’histoire de l’immigration en France. Ses différentes vagues vieillissent à des rythmes différents. La plus ancienne, qui présente la proportion la plus importante de personnes âgées, provient d’Italie (Milza, 1993). Les Italiens ont en effet constitué le premier groupe étranger en France de 1901 à 1968, période au cours de laquelle ils ont représenté de façon assez constante environ 30 % des immigrés (Blanc-Chaléard, 2002). Depuis, l’immigration italienne s’est tarie. C’est donc naturellement parmi les ressortissants de ce pays qu’on trouve le plus fort pourcentage de personnes de plus de 60 ans et aussi de plus de 70 ans, comme le plus faible taux de moins de 45 ans (16 %). À l’opposé, les trois quarts des immigrés venant de l’Afrique subsaharienne ont moins de 45 ans, et seulement 2 % plus de 70 ans (à titre de comparaison, 22 % des Italiens ont plus de 70 ans).

11Le tableau 2 et le graphique 3 (p. 122) indiquent la répartition par groupes d’âge des plus de 18 ans en fonction du pays d’origine. En comparant les proportions relatives des représentations des plus de 18ans d’une part et des 45-70 ans d’autre part, on constate une inversion de leur poids respectif dans les nouvelles immigrations d’Afrique, d’Asie et d’Europe de l’Est par rapport à celles, plus anciennes, de l’Europe du Sud et même, mais à un moindre degré, par rapport à celles du Maghreb (à l’exception du Maroc).

12La représentation des structures d’âge des immigrés de 20 ans et plus, regroupés selon le pays de départ (cf. graphiques 4, p. 123) complète cette observation. Les pyramides des âges sont extrêmement contrastées : on en remarque en forme de toupie élargie au sommet (Italie), à la base (Portugal), renflée au centre (Espagne), en forme de pyramide (Turquie et Afrique) ou de « tuyau de poêle » (Europe). On note également que les décalages et dissymétries entre les structures d’âge des hommes et des femmes sont les plus accentués parmi les originaires d’Algérie et surtout du Maroc.

Tableau 2

Répartition par groupes d’âges des 18 ans et plus en fonction du pays d’origine

Tableau 2
Tableau 2 Répartition par groupes d’âges des 18 ans et plus en fonction du pays d’origine 71 ans Effectifs 18-44 ans Total 45-70 ans et plus (en milliers) 52,5 %Espagne 23,2 % 24,3 % 100,0 % 308,7 51,4 %Italie 15,5 % 33,0 % 100,0 % 403,2 46,6 %Portugal 50,4 % 3,0 % 100,0 % 511,0 40,2 %Autre UE 40,7 % 19,1 % 100,0 % 310,8 23,9 %Turquie 72,6 % 3,5 % 100,0 % 139,1 36,5 %Autre Europe 35,9 % 27,5 % 100,0 % 241,4 46,8 %Algérie 47,3 % 5,9 % 100,0 % 512,4 38,2 %Maroc 59,3 % 2,5 % 100,0 % 445,7 47,5 %Tunisie 42,3 % 10,1 % 100,0 % 159,7 25,2 %Autre Afrique 73,2 % 1,5 % 100,0 % 301,2 29,2 %Asie 67,2 % 3,5 % 100,0 % 313,5 29,7 %Amérique, Océanie 66,2 % 4,0 % 100,0 % 110,8 40,9 %Total immigrés 47,7 % 11,4 % 100,0 % 3 854,8 37,6 %France entière 49,5 % 12,9 % 100,0 % 44 067,1 Source : Enquête EHF, Insee, 1999.

Répartition par groupes d’âges des 18 ans et plus en fonction du pays d’origine

Enquête EHF, Insee, 1999.
Graphique 3

Répartition des immigrés selon la catégorie d’âge et le lieu de naissance

Graphique 3
Graphique 3 Répartition des immigrés selon la catégorie d’âge et le lieu de naissance Source : Enquête PRI, Cnav, 2003 ; enquête EHF, Insee, 1999. Lecture : près de 9 % des immigrés de 18 ans et plus sont originaires d’Afrique subsaharienne ; plus de 16 % de ceux qui ont entre 45 et 70 ans sont du Portugal

Répartition des immigrés selon la catégorie d’âge et le lieu de naissance

Enquête PRI, Cnav, 2003 ; enquête EHF, Insee, 1999.
Graphiques 4

Répartition proprotionnelle pour 100 000 personnes résidant en France en 1999 selon les lieux de naissance

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Graphiques 4 Répartition proprotionnelle pour 100 000 personnes résidant en France en 1999 selon les lieux de naissance Source : Enquête EHF, Insee, 1999.

Répartition proprotionnelle pour 100 000 personnes résidant en France en 1999 selon les lieux de naissance

Enquête EHF, Insee, 1999.

13Quelle que soit la diversité des structures par âges selon les pays d’origine, les immigrés de plus de 60 ans ont une moyenne d’âge moins élevée que les autochtones. Ils représentent 23 % de l’ensemble des immigrés de plus de 18 ans, alors que dans l’ensemble de la population résidant en France, les plus de 60 ans représentent 26 % des plus de 18 ans.

14Le taux habituel de vieillissement de la population, à savoir le rapport des plus de 60 ans à l’ensemble, n’a pas de sens pour l’étude des immigrés puisque, comme nous l’avons déjà souligné, les plus jeunes en sont exclus, ce qui vieillit artificiellement le groupe. On utilisera donc d’autres paramètres, dont l’âge moyen et l’âge médian, en ne considérant que les tranches d’âges étudiées dans notre enquête (45-70 ans).

15La comparaison des moyennes d’âges selon les pays de naissance dans la population considérée (de 45 à 70 ans) fait apparaître une certaine diversité. Les femmes sont en moyenne plus âgées que les hommes dans certains des pays les plus « vieillis » : l’Italie, l’Espagne et les autres pays de l’Union européenne, mais non l’Algérie où les hommes sont en moyenne bien plus âgés (l’âge médian étant de 58 ans pour les hommes et de 53 ans pour les femmes). Les hommes et les femmes originaires du Portugal ont en moyenne le même âge, tout comme ceux de Turquie. Pour toutes les autres zones géographiques, les femmes sont en moyenne plus jeunes que les hommes.

? L’histoire migratoire

16Les immigrés faisant l’objet de cette enquête sont arrivés en France à des âges variables, à des périodes qui vont des années trente à la date de l’enquête (2002-2003). En réalité, compte tenu de la sélection d’âge de l’échantillon, la plus grande partie est venue entre la fin des années cinquante et le début des années quatre-vingt. Seule une minorité est arrivée avant ou après cette période qui correspond à la plus grande vague d’immigration de l’histoire de France. Celle-ci marque aussi la fin de l’exception française, « pays d’immigrants dans un continent d’émigrants » (Blanc-Chaléard, 2001) depuis le XVIIIe siècle. Les autres pays européens attirent en effet à leur tour des immigrants venant de différents continents et fournissent de moins en moins d’émigrants à la France. Cette tendance se poursuit, comme le montrent les données du recensement de 2004 : « Alors que les immigrés venant des pays [d’Europe] du Sud (Espagne, Grèce, Italie et Portugal) sont moins nombreux, l’immigration issue du reste de l’Union européenne, et principalement du Royaume-Uni, progresse. […] Le nombre de personnes venues des pays de l’Europe orientale croît aussi fortement, mais les effectifs concernés sont plus faibles. L’immigration venue d’Asie s’accroît : 14 % des immigrés majeurs viennent de ce continent, contre 12 % en 1999. La part de la population immigrée venue d’Afrique s’établit à 42 % en 2004, contre 39 % en 1999. Ceci est dû à la progression du nombre d’immigrés venus du Maghreb (+ 15 %) ou du reste de l’Afrique (+ 39 %) » (Borrel, Durr, 2005).

17Pour compléter la description des profils d’immigration, dont on a vu précédemment les contours par pays d’origine (âge et sexe), nous allons maintenant nous intéresser aux motifs d’émigration et aux conditions dans lesquelles elle s’est déroulée.

? Motifs de la migration

18Les motifs d’immigration sont très différents pour les hommes et les femmes comme le montre le graphique 5 (p. 126), où l’on observe que le regroupement familial est de loin la raison prépondérante pour les femmes, tandis que la recherche d’un emploi l’emporte largement pour les hommes. Pour toutes les autres causes, les hommes sont plus représentés que les femmes, que ce soit la fuite devant l’insécurité (deuxième motif par ordre d’importance pour les hommes) ou les opportunités professionnelles attractives et souvent de haut niveau. Celles-ci sont distinguées de la recherche de travail qui s’explique souvent par la misère ou le sous-emploi. Elles correspondent à la distinction classique entre pull et push, à savoir les facteurs d’attraction vers le lieu d’immigration (pull) ou ceux de répulsion hors du lieu d’émigration (push) (Slotnik, 2003). Le désir d’indépendance est cité par une assez forte minorité ; il comprend aussi l’appel au voyage, à l’aventure, à l’imaginaire de l’ailleurs ou encore le désir de se soustraire à la dépendance familiale, à un « père-patron » autoritaire, ou à un mariage arrangé, par exemple, selon des témoignages d’enquêtés. Les autres motifs regroupent des situations diverses dans lesquelles le hasard ou des circonstances personnelles jouent un rôle important (rejoindre des amis, se faire soigner, passer sa retraite, jouir du climat…).

19Les différentes causes sont inégalement réparties selon les pays d’origine. Les immigrés qui ont fui l’insécurité viennent principalement d’Asie et d’Algérie. D’autres, moins nombreux, ont aussi voulu échapper à la répression ou à la guerre. C’est le cas d’Africains, d’Européens de l’Est et aussi de Portugais qui ont quitté leur pays sous Salazar ou au moment des guerres coloniales. La recherche de travail est le plus souvent invoquée par les femmes de l’Europe du Sud (davantage que par les hommes) et aussi par les hommes du Maghreb. Les autres raisons professionnelles (mutations, opportunités...) sont surtout données par les Européens du Nord qui sont aussi parmi les plus nombreux à être venus pour faire des études (également à invoquer les « autres motifs »). Les migrations pour études sont fréquentes parmi les Africains et les Asiatiques.

Graphique 5

Répartition des immigrés selon le sexe et le motif de la migration

Graphique 5
Graphique 5 Répartition des immigrés selon le sexe et le motif de la migration Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Répartition des immigrés selon le sexe et le motif de la migration

Enquête PRI, Cnav, 2003.

20En ce qui concerne le regroupement familial, il est souvent cité par les Italiens et les Portugais, qui semblent avoir plus fréquemment rejoint une conjointe en France que l’inverse.

?? Âge à la migration

21La très grande majorité des immigrés (plus de 77 %) sont arrivés en France avant l’âge de 30 ans, une partie (16 %) étant venue à l’âge scolaire, avant 15 ans. Il y a néanmoins de grandes différences selon les pays d’origine, comme le montre le tableau 3. Ce sont surtout les Italiens et Espagnols qui sont partis dans leur enfance, avec leurs parents. Cette situation s’observe moins fréquemment parmi les autres Européens et chez les Algériens ; elle est très rare parmi les Africains et les Turcs qui sont plus souvent venus assez tard, après 30 ans (38 % des Africains et 35 % des Turcs sont dans ce cas). Les Marocains ont émigré un peu plus tôt et à des âges assez concentrés (plus de 40 % entre 20 et 26 ans), phénomène encore plus marqué parmi les Tunisiens, dont plus de la moitié est venue entre 20 et 26 ans.

22Quant aux migrations tardives, au-delà de 45 ans, elles ne concernent qu’une petite minorité de toutes provenances [6], mais un peu plus les Algériens et les Européens du Nord. Ces migrations d’âge mûr concernent principalement des parents d’immigrés et des personnes qui viennent dans le cadre d’échanges professionnels, généralement de haut niveau, ou encore qui veulent vivre leur retraite en France.

Tableau 3

Répartition des immigrés selon l’âge à la migration et le le lieu de naissance

Tableau 3
Tableau 3 Répartition des immigrés selon l’âge à la migration et le le lieu de naissance 15-29 30-4415 ans 45-59 60 ans Total ans anset moins ans et plus 42,8 % 26,4 %Europe du Nord et continentale 10,1 % 16,5 % 4,2 % 100,0 % 47,8 % 5,6 %Italie 44,9 % 1,7 % 0,0 % 100,0 % 71,9 % 14,2 %Portugal 12,7 % 1,2 % 0,0 % 100,0 % 52,9 % 7,5 %Espagne 38,4 % 1,3 % 0,0 % 100,0 % 57,3 % 22,9 %Europe de l’Est 13,5 % 5,1 % 1,3 % 100,0 % 61,7 % 31,9 %Turquie, Proche-Orient 3,2 % 2,7 % 0,5 % 100,0 % 69,0 % 23,6 %Maroc 4,9 % 2,2 % 0,2 % 100,0 % 67,0 % 15,6 %Algérie 14,3 % 3,1 % 0,1 % 100,0 % 74,6 % 12,4 %Tunisie 11,7 % 1,1 % 0,0 % 100,0 % 60,7 % 31,6 %Autre Afrique 1,7 % 5,2 % 0,9 % 100,0 % 50,5 % 38,4 %Autres pays 5,3 % 5,3 % 0,5 % 100,0 % 52,1 % 37,2 %Asie 3,6 % 6,7 % 0,5 % 100,0 % 60,7 % 18,5 %Ensemble 16,4 % 3,8 % 0,6 % 100,0 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Répartition des immigrés selon l’âge à la migration et le le lieu de naissance

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Migrations de retraite

23Un certain nombre de « jeunes retraités » de nations étrangères s’installent dans notre pays, principalement pour y passer leur retraite. Ces migrations de retraite sont sans doute sous-estimées dans cette enquête (et aussi dans le recensement de la population) en raison de la plus grande difficulté à localiser ces retraités qui habitent souvent de petites villes et s’absentent fréquemment de France.

24Parmi les immigrés de plus de 60 ans résidant en France, 5 % sont venus après l’âge de 50 ans, certains pour rejoindre leur famille ou pour affaires, d’autres simplement attirés par le pays et le climat. Ces arrivées tardives (et installations durables) proviennent essentiellement de l’Europe du Nord et sont le fait de personnes vivant en couple, appartenant aux catégories professionnelles élevées et d’un niveau d’éducation supérieur. Les études menées en Grande-Bretagne ont montré que les Britanniques pratiquent depuis longtemps des migrations de retraite de longue distance, internationales, et que cette tendance s’accentue. Certains se fixent en Normandie, en Bretagne, ou dans des régions méridionales plus ensoleillées comme la Dordogne. En 1997, 763000 citoyens britanniques recevaient leurs pensions de retraite outre-mer (King, Warnes, William, 2000). Par comparaison, seulement 63 396 retraités français (du régime général) résidaient hors de France (d’après les données de 2002 des fichiers administratifs). Les accords en matière de protection sociale facilitent ce type de migrations, ce qui pourrait conduire à une spécialisation des pays européens entre ceux du Nord fournissant des retraités et ceux du Sud les accueillant, comme c’est le cas de l’Espagne depuis quelques décennies. Ces migrations de retraite entraînent d’autres types de migrations parmi les jeunes, celles de personnels de service chargés de prendre soin de personnes âgées ou de nursering. Cette immigration plutôt féminine, en provenance de pays en développement, tend à se développer de façon légale ou clandestine (Mozère, 2004).

? Statut professionnel au départ du pays natal

25Au moment d’émigrer, les situations étaient très variables selon les sexes. Les hommes étaient plus souvent scolarisés que les femmes (23,4% contre 18,7) et surtout beaucoup plus nombreux à travailler (54,2% contre 34,4). Au moment de l’émigration, près d’un homme sur dix (mais seulement 2 % des femmes) connaissait le chômage. Ce taux variait sensiblement selon les pays. Ainsi 16 % des Marocains, 14,5 % des Algériens et 11,4 % des Tunisiens étaient au chômage avant de partir, de même que 12 % des Asiatiques et 10 % des Africains. À l’inverse, parmi les femmes, la proportion était à peu près la même dans tous les pays et ne dépassait pas 4 %, taux de chômage des femmes asiatiques avant leur départ.

26Exactement 3 % des hommes étaient enrôlés dans l’armée au moment d’émigrer, pourcentage qui s’élevait à près de 7 chez les Portugais (la période de grande migration coïncidant avec les guerres coloniales). Si le statut d’inactivité concernait surtout des femmes, il intéressait également un certain nombre d’hommes, surtout en Algérie où 9 % d’hommes et 72,6 % de femmes étaient dans cette situation avant de quitter le pays. Ces taux restent importants pour les femmes de la plupart des pays, variant de 68 % au Maroc à 58 % en Turquie et en Orient et à 33 % dans les pays d’Afrique subsaharienne. Dans les pays européens, ils vont de 31 % au Portugal à 15 % en Europe de l’Est. À l’exception des Algériens, les hommes inactifs représentent entre 0,5 % en Europe du Nord et 4,9 % en Italie ou en Tunisie.

27Enfin, les personnes qui se trouvaient en préretraite ou en retraite au moment d’émigrer constituent 1 % de l’ensemble des immigrés de 45 à 70 ans. Venant essentiellement (à 90 %) de l’Europe du Nord, ces migrants représentent 13 % de leurs ressortissants résidant en France.

Tableau 4

Statut au moment de la migration selon le sexe et le lieu de naissance

Tableau 4
Tableau 4 Statut au moment de la migration selon le sexe et le lieu de naissance Total 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% Autreinactif0,5%4,9%1,4%3,7%1,1%0,9%3,3%9,6%4,9%4,2%1,9%2,0% 3,9% 23,4% 31,0% 31,7% 25,8% 15,2% 57,8% 68,2% 72,6% 48,7% 33,5% 17,3% 24,1% 39,2% Autreet sansstatut*8,2% 13,9%0,9% 10,2%9,0%1,8%0,3%3,1%0,7%0,7%3,6%4,5%4,5%3,2% 15,4%0,6%9,1%3,6%1,3%0,7%4,0%1,1% <0,1%1,0%1,9%4,3% Arrêtlongue maladie <0,1% <0,1%0,1% <0,1%0,9% <0,1% <0,1%2,0% <0,1% <0,1% <0,1% <0,1% 0,4% <0,1% <0,1%0,4% <0,1% <0,1% <0,1% <0,1%0,7% <0,1%0,8% <0,1% <0,1% 0,2% Dans l’armée <0,1%2,1%6,9%2,5%1,3%1,8%1,9%4,9%1,6%0,8%1,4%1,0%3,0% <0,1% <0,1%0,3% <0,1% <0,1% <0,1% <0,1%0,9% <0,1% <0,1% <0,1% <0,1%0,2% Retraite ou préretraite 13,1% <0,1% <0,1% <0,1%0,2% <0,1% <0,1%0,2% <0,1%0,8%1,2% <0,1%1,0%3,6%0,8% <0,1% <0,1%1,3% <0,1% <0,1% <0,1% <0,1%1,0% <0,1% <0,1%0,6% Scolaireou étudiant 12,1% 35,2% 16,1% 36,6% 26,5% 14,7% 16,6% 17,6% 38,2% 31,6% 23,1% 29,7% 23,4% 17,3% 34,3% 13,6% 29,6% 18,7% 10,1% 10,9%9,5% 18,9% 24,0% 23,0% 19,2% 18,7% Au chômage1,6%7,5%5,5%5,7%6,3%7,9% 16,2% 14,5% 11,4% 10,0%9,4%12,2v9,6%2,2%2,2%2,0%3,4%2,0%1,3%3,0%1,8%0,9%2,6%3,3%4,1%2,4% Au travail 64,5% 36,5% 69,1% 41,2% 54,6% 73,1% 61,6% 48,3% 43,3% 52,0% 59,4% 50,7% 54,2% 50,4% 16,4% 51,4% 32,1% 59,3% 29,5% 17,2% 10,5% 30,4% 38,2% 55,4% 50,7% 34,4% Hommesimmigrés EuropeduNordetcontinentaleItaliePortugalEspagneEuropedel’EstTurquie,Proche-OrientMarocAlgérieTunisieAutreAfriqueAutrespaysAsieEnsembleFemmesimmigrées EuropeduNordetcontinentaleItaliePortugalEspagneEuropedel’EstTurquie,Proche-OrientMarocAlgérieTunisieAutreAfriqueAutrespaysAsieEnsemble Source : Enquête PRI, Cnav, 2003. *Enfants non scolarisés.

Statut au moment de la migration selon le sexe et le lieu de naissance

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Lieu de l’habitat au moment de l’émigration

28Dans l’ensemble, plus d’un tiers des immigrés sont issus d’un milieu rural, avec des différences considérables selon les pays d’origine (cf. tableau 5). Les plus nombreux à venir de la campagne sont, par ordre décroissant, les Portugais (55%), les Italiens (49%), les Algériens (45%), les Espagnols (42 %), les Turcs (40 %) et les Marocains (36 %). Les immigrations des autres pays présentent un caractère nettement moins rural, allant de 32 % en Europe de l’Est à 18 % en Asie et 9 % pour le continent américain ou l’Océanie. Ceux qui sont venus d’une grande ville sont le plus souvent originaires d’Asie (68 %) ou encore des pays d’Europe du Nord et de l’Est. Remarquons aussi l’importance de l’immigration citadine des Tunisiens qui se distinguent à cet égard des autres pays du Maghreb (47 % habitaient une grande ville contre 39 % des Marocains et 28 % des Algériens), ainsi que des Africains du sud du Sahara.

29Ce caractère rural ou urbain détermine fortement le type d’immigration tant du point de vue du niveau d’éducation que du statut socioprofessionnel, comme l’attestent les données présentées dans la section suivante.

Tableau 5

Lieu d’habitation au moment de la migration

Tableau 5
Tableau 5 Lieu d’habitation au moment de la migration Grande Petite Campagne ville ville ou village Total Europe du Nord et continentale 46 % 31 % 23 % 100 % Italie 23 % 28 % 49 % 100 % Portugal 18 % 27 % 55 % 100 % Espagne 32 % 26 % 42 % 100 % Europe de l’Est 47 % 21 % 32 % 100 % Turquie, Proche-Orient 44 % 16 % 40 % 100 % Maroc 39 % 25 % 36 % 100 % Algérie 28 % 27 % 45 % 100 % Tunisie 47 % 31 % 22 % 100 % Autre Afrique 68 % 13 % 19 % 100 % Autres pays 68 % 23 % 9 % 100 % Asie 68 % 14 % 18 % 100 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Lieu d’habitation au moment de la migration

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Composition socioprofessionnelle, mobilité professionnelle et niveau d’éducation

? L’activité des immigrés de 45 à 70 ans

30À la suite de la grande vague d’immigration de 1960 à 1973, une politique très restrictive a été mise en œuvre. Les nouveaux arrivants ont été autorisés à s’installer principalement dans le cadre du regroupement familial. Il s’agissait surtout des femmes non professionnalisées. C’est pourquoi les femmes inactives sont plus largement représentées dans la tranche d’âge étudiée que dans les cohortes plus jeunes, constituée d’une immigration de travail à dominante masculine et ouvrière.

? Actifs et inactifs par sexe

31Globalement, les hommes et les femmes immigrés de la tranche d’âges des 55 à 70 ans sont plus souvent en activité et moins souvent retraités que les non-immigrés (cf. tableau 6, p. 132). Les écarts sont importants jusqu’à 65 ans et le rattrapage a tendance à s’effectuer entre 65 et 70 ans. Alors que seuls 12 % des hommes non immigrés sont encore actifs après 60 ans, cette proportion est de 29 % chez les immigrés. La population immigrée accède donc tardivement à la retraite, dans la plupart des cas pour combler les trimestres de cotisations manquants et obtenir ainsi une pension à taux plein.

32Les immigrés sont également plus souvent que les non-immigrés dans une situation d’inactivité autre que la retraite. Parmi les immigrés inactifs, 80 % sont des femmes qui, dans neuf cas sur dix, n’ont jamais travaillé. Pour les hommes, cette inactivité est liée dans près de deux tiers des cas (61 %) à un handicap ou une invalidité les rendant inaptes au travail.

Tableau 6

Statut d’activité des immigrés et de l’ensemble de la population

Tableau 6
Tableau 6 Statut d’activité des immigrés et de l’ensemble de la population de 55 à 70 ans Hommes immigrés Hommes non immigrés Autres Autres RetraitésActifs Actifs Retraités inactifs inactifs 13,9 % 14,5 %55-59 ans 71,6 % 58,6 % 30,3 % 11,1 % 66,3 % 9,9 %60-64 ans 23,8 % 10,1 % 87,4 % 2,5 % 91,2 % 3,5 %65-70 ans 5,3 % 2,3 % 96,4 % 1,3 % Ensemble des hommes 58,7 % 10,0 %de 55-70 ans 31,3 % 20,3 % 75,3 % 4,4 % Femmes immigrées Femmes non immigrées Autres Autres RetraitéesActives Actives Retraitées inactives inactives 6,0 % 48,2 %55-59 ans 45,8 % 46,2 % 20,7 % 33,1 % 36,2 % 44,6 %60-64 ans 19,2 % 11,0 % 64,7 % 24,3 % 54,2 % 41,2 %65-70 ans 4,6 % 1,8 % 79,8 % 18,4 % Ensemble des femmes 32,4 % 45,0 %de 55-70 ans 22,6 % 15,9 % 60,1 % 24,0 % Source : Enquête EHF, Insee, 1999.

Statut d’activité des immigrés et de l’ensemble de la population

Enquête EHF, Insee, 1999.

? Catégories socioprofessionnelles des actifs par pays et par sexe

Une spécialisation par genre

33Le lien entre migration, travail et genre est étroit. L’ensemble de la population immigrée compte proportionnellement beaucoup plus d’ouvriers que la population active pour la France entière, surtout chez les hommes (58,9 % contre 32,4) et à un moindre degré chez les femmes (17,7 % contre 11,8, cf. tableau 7). Ces dernières connaissent un taux important d’inactives, atteignant en moyenne 23,6 % alors que cette proportion n’est que de 1,5 % parmi les hommes immigrés.

34Sur-représentées parmi la catégorie des ouvriers, les femmes immigrées sont avant tout employées (41,4%), et souvent « personnels de service » : 24,8 % des femmes immigrées contre 5,6 % des femmes non immigrées. Il s’agit de métiers de services directs aux particuliers comme le gardiennage, la domesticité, la garde et les soins aux enfants et aux personnes âgées.

Tableau 7

Catégories socioprofessionnelles [7] des immigrés de 45 à 70 ans selon leur sexe et leur lieu de naissance

Tableau 7
Tableau 7 Catégories socioprofessionnelles7 des immigrés de 45 à 70 ans selon leur sexe et leur lieu de naissance Cadres Employés Hommes Inactifs professions Intermédiaires Employés Ouvriers TotalIndépendants de service libérales Espagne 2,1 % 1,9 % 13,2 % 6,5% 17,1% 4,0% 55,2 % 100 % Italie 1,4% 0,5 % 16,9 % 8,8 % 16,4 % 4,4 % 51,5 % 100 % Portugal 0,4 % 2,6 % 7,2 % 0,8 % 13,4 % 3,3 % 72,3 % 100 % Europe du Nord et continentale 0,6 % 2,6 % 14,4 % 43,0 % 17,3 % 7,0 % 15,1 % 100 % Europe de l’Est 0,0 % 0,0 % 9,6 % 14,5 % 17,2 % 6,9 % 51,8 % 100 % Algérie 2,8 % 1,9 % 9,4 % 4,5 % 7,5 % 4,8 % 69,2 % 100 % Maroc 2,8 % 2,1 % 6,8 % 2,6 % 7,2 % 4,8 % 73,7 % 100 % Tunisie 0,7 % 1,6 % 22,1 % 5,4 % 10,0 % 5,9 % 54,3 % 100 % Autre Afrique 2,0 % 3,9 % 7,5 % 12,8 % 11,4 % 12,4 % 50,1 % 100 % Turquie 0,7 % 0,0 % 5,3 % 0,0 % 3,5 % 0,6 % 89,9 % 100 % Asie 0,0 % 2,1 % 14,5 % 17,7 % 16,6 % 10,3 % 38,8 % 100 % Autres pays 2,7 % 2,8 % 3,3 % 41,3 % 23,0 % 4,7 % 22,3 % 100 % Hommes non immigrés 4,8 % 0,5 % 10,9 % 17,3 % 21,0 % 13,1 % 32,4 % 100 % Total 1,5% 1,9 % 11,0% 9,0 % 12,3 % 5,4% 58,9% 100% Cadres Employées Inactives professions Intermédiaires Employées Ouvrières TotalIndépendantesFemmes de service libérales Espagne 10,3 % 32,9 % 7,1 % 1,1 % 5,0 % 22,9 % 20,5 % 100 % Italie 20,2 % 16,8 % 5,3 % 3,8 % 9,4 % 20,8 % 23,8 % 100 % Portugal 8,2 % 53,6 % 1,8 % 0,3 % 2,2 % 8,9 % 25,0 % 100 % Europe du Nord et continente 11,3 % 13,9 % 10,4 % 5,3 % 31,9 % 23,0 % 4,3 % 100 % Europe de l’Est 10,2 % 18,2 % 2,6 % 5,5 % 16,6 % 23,5 % 23,3 % 100 % Algérie 53,1 % 16,8 % 0,6 % 0,1 % 5,6 % 13,0 % 10,9 % 100 % Maroc 48,8 % 17,7 % 1,3 % 2,4 % 3,9 % 10,0 % 16,0 % 100 % Tunisie 32,3 % 18,5 % 3,4 % 0,6 % 7,5 % 16,3 % 21,3 % 100 % Autre Afrique 9,6 % 33,9 % 4,5 % 5,3 % 18,8 % 19,7 % 8,4 % 100 % Turquie 59,5 % 2,8 % 0,0 % 2,0 % 4,8 % 3,4 % 27,6 % 100 % Asie 19,6 % 11,2 % 7,0 % 8,7 % 14,1 % 19,8 % 19,7 % 100 % Autres pays 11,0 % 24,5 % 2,1 % 7,9 % 27,1 % 20,8 % 6,6 % 100 % Femmes non immigrées 23,4 % 5,6 % 4,7 % 6,0 % 16,0 % 32,5 % 11,8 % 100 % Total 23,6% 24,8% 4,0% 2,8% 10,4% 16,6% 17,7% 100% Source: Enquête EHF, Insee, 1999.

Catégories socioprofessionnelles [7] des immigrés de 45 à 70 ans selon leur sexe et leur lieu de naissance

Enquête EHF, Insee, 1999.

35Les professions intermédiaires et les cadres, professions libérales et intellectuelles supérieures forment les catégories les plus sous-représentées au sein de la population immigrée. Les cadres sont deux fois moins nombreux parmi les immigrés (hommes ou femmes), tandis que cette sous-représentation est moins marquée pour les professions intermédiaires (12,3 % contre 21 pour les hommes et 10,4 % contre 16 pour les femmes).

Une spécialisation selon l’origine

36Le tableau 7 (p. 133) révèle qu’on trouve la plus forte représentation d’hommes ouvriers parmi les Turcs (89,9 %), les Marocains (73,7 %), les Portugais (72,3 %), les Algériens (69,2 %), les Espagnols (55,2 %) et les Tunisiens (54,3 %). Au sein des ressortissants des autres pays (à l’exception des ressortissants d’Europe du Nord, d’Amérique et d’Océanie), la proportion d’ouvriers est moindre, tout en étant supérieure à celle qu’on constate dans l’ensemble de la population française.

37Les hommes originaires d’Italie sont davantage indépendants (artisans, commerçants, chefs d’entreprise, 16,9 %) et appartiennent plus souvent que les autres aux professions intermédiaires (16,4 %). Les hommes émigrés d’Europe du Nord sont peu fréquemment ouvriers (15,1 %) et exercent principalement des métiers de cadres (43 %), d’artisans, de commerçants, de chefs d’entreprise (14,4 %) et des professions intermédiaires (17,3 %). Ceux d’Europe de l’Est se partagent entre ouvriers (51,8 %) et cadres et professions intermédiaires (respectivement 14,5 % et 17,2 %). Les ressortissants des pays d’Afrique subsaharienne sont ouvriers à 50,1 % et présents parmi l’ensemble des professions, hormis les artisans, commerçants et chefs d’entreprise (7,5 %). Ils sont légèrement sur-représentés parmi les cadres (12,8 %). Les hommes asiatiques sont plus souvent cadres, artisans commerçants, et professions intermédiaires que la moyenne des hommes immigrés.

38Le taux d’inactivité des femmes varie fortement selon les pays d’origine : il atteint des niveaux bien plus élevés pour les femmes immigrées en provenance de Turquie (59,5 %) et des pays du Maghreb (53,1 % d’Algérie, 48,8 % du Maroc et 32,3 % de Tunisie). Il est le plus faible pour le Portugal (8,2 %), l’Afrique subsaharienne (9,6 %), l’Espagne (10,3 %) et les autres pays d’Europe, de l’Est (10,2 %) et du Nord (11,3 %).

39C’est parmi les femmes originaires du Portugal (53,6 %), d’Afrique subsaharienne (33,9 %) et d’Espagne (32,9 %) qu’on retrouve le plus d’employées de service. Les ouvrières recrutent davantage parmi les Turques (27,6 %), les Portugaises (25 %), les Italiennes (23,8 %) et les Européennes de l’Est (23,3 %).

40Les Africaines sont moyennement représentées dans l’ensemble des professions alors que les Asiatiques sont sur-représentées parmi les professions indépendantes, les artisans, commerçants et cadres (7 % et 8,7 %). Enfin, quand elles viennent d’Europe de l’Est, les femmes exercent davantage une profession intermédiaire ou d’employée (16,6% et 23,5%); quand elles viennent d’Europe du Nord et continentale, elles appartiennent avant tout aux professions intermédiaires (31,9 %) ou à la catégorie des employées, hors personnel de service (23 %).

? Mobilité professionnelle intragénérationnelle

41L’interrogation des immigrés sur le sens qu’ils donnent à leur parcours professionnel fournit une indication complémentaire à celle de la position professionnelle occupée au moment de l’enquête. Un peu moins de la moitié des immigrés (45 %) estiment que l’ensemble de leur cursus est synonyme d’ascension, 32 % de stabilité, 16 % d’irrégularité, 7 % de régression. Les hommes pensent davantage avoir progressé que les femmes : 54 % contre 32 %. Pour ces dernières, c’est l’impression de stabilité qui l’emporte (39 %), ainsi que celle d’irrégularité (20 %). L’idée de progression domine également pour certains ressortissants d’Europe du Nord (53 %), d’Italie (51 %), de Turquie et du Proche-Orient (51 %) ainsi que de Tunisie (50 %).

42En outre, la perception d’une mobilité professionnelle ascendante est corrélée avec le niveau d’instruction. Près de 60 % de ceux qui ont obtenu le baccalauréat (ou équivalent) ou bien qui ont accompli des études supérieures ont le sentiment d’avoir progressé alors que cette proportion n’est que de 37 % pour ceux qui n’ont jamais été scolarisés ou qui n’ont fréquenté que l’école primaire. Ceux-ci sont à l’inverse deux fois plus nombreux que les individus qui ont au moins le niveau du baccalauréat (respectivement 39 % et 20 %) à juger stable leur parcours professionnel.

43Mieux formées et plus diplômées, les personnes qui ont connu un parcours professionnel ascendant sont sur-représentées parmi les cadres (79 %) et les professions intermédiaires. À l’autre extrémité de l’échelle, seules 21 % des personnes employées dans le secteur des services (essentiellement des femmes, nous l’avons vu) expriment ce point de vue. Pour les autres, l’image de leur cursus est celle de l’irrégularité (27 %) et, au mieux, de la stabilité (45 %).

? Le niveau d’éducation

44Comparés à la moyenne nationale, les migrants qui se signalent par un plus faible niveau d’éducation sont, à divers degrés, ceux des principaux pays d’Europe du Sud et d’Afrique du Nord qui ont produit les fortes vagues d’immigration de travail peu qualifié. Il existe cependant des exceptions : elles concernent une partie des ressortissants d’Afrique du Nord venus faire des études en France et qui y sont restés (cf. tableau 8).

45C’est pourquoi les immigrés maghrébins, bien qu’ayant dans l’ensemble un niveau d’études peu élevé, comprennent également une proportion d’individus ayant effectué des études supérieures plus forte que ceux d’Europe du Sud et en particulier du Portugal (les originaires d’Afrique subsaharienne ont un profil différent). En d’autres termes, comparés à la moyenne, ils sont à la fois proportionnellement plus nombreux à n’avoir pas dépassé le niveau d’études primaires et à avoir poursuivi des études supérieures, et moins nombreux à être représentés aux niveaux intermédiaires.

46La différence de niveaux d’éducation selon l’âge est frappante parmi les immigrés de tous pays et plus particulièrement parmi les femmes. Cela reflète un phénomène bien connu : le degré d’instruction tend à augmenter d’une génération à l’autre. Cette différence est accrue par le changement des profils migratoires, les jeunes appartenant à des nouvelles vagues de migration plus orientées vers les études ou les emplois qualifiés.

47L’immigration africaine est plus récente que celle des Maghrébins et se caractérise davantage par un niveau d’études élevé. Elle correspond à une période de fort développement de l’éducation et d’ouverture des possibilités offertes aux Africains d’étudier en France.

48La migration internationale pour études s’est développée depuis les années soixante. Elle a été favorisée par une résolution des Nations unies de 1956 facilitant la libre circulation des professionnels et la diffusion des savoirs et des connaissances. Encouragés à poursuivre leurs études en France, de nombreux Africains ne retournent pas dans leur pays d’origine après leur formation.

49Plusieurs processus participent à ce phénomène (Blaud, 2001) : l’insuffisance des bourses d’études et des moyens financiers les oblige à accepter des emplois à temps partiel pour subvenir à leurs besoins, ce qui prolonge la durée de leur scolarité et le temps de leur séjour, et favorise donc l’ancrage dans le pays d’arrivée, parfois le mariage. Il peut aussi arriver que l’échec scolaire dissuade du retour.

Tableau 8

Niveau d’études des hommes et des femmes de 45 à 70 ans selon leur lieu de naissance

Tableau 8
Tableau 8 Niveau d’études des hommes et des femmes de 45 à 70 ans selon leur lieu de naissance EffectifsPrimaire Collège, (en milliers) TotalSupérieurLycéeau plusHommes CAP, BEP Espagne 62,2 % 25,7 % 6,5 % 5,6 % 100,0 % 61,7 Italie 52,7 % 33,0 % 7,5 % 6,8 % 100,0 % 94,2 Portugal 80,0 % 16,2 % 2,5 % 1,3 % 100,0 % 100,7 Autre UE 14,3 % 18,6 % 15,7 % 51,3 % 100,0 % 47,2 Turquie 75,7 % 14,5 % 4,2 % 5,5 % 100,0 % 13,4 Autre Europe 22,2 % 26,0 % 19,8 % 32,1 % 100,0 % 36,3 Algérie 63,0 % 20,2 % 7,0 % 9,8 % 100,0 % 79,5 Maroc 46,8 % 33,7 % 10,9 % 8,7 % 100,0 % 72,4 Tunisie 35,2 % 30,3 % 20,7 % 13,8 % 100,0 % 30,2 Autre Afrique 24,4 % 21,6 % 9,5 % 44,5 % 100,0 % 35,1 Asie 10,6 % 24,0 % 20,6 % 44,8 % 100,0 % 41,4 Amérique et Océanie 11,1 % 4,4 % 11,4 % 73,2 % 100,0 % 13,5 Ensemble 48,4 % 24,1 % 9,9 % 17,6 % 100,0 % 625,8 France entière 34,9 % 33,8 % 13,5 % 17,8 % 100,0 % 7277,8 EffectifsPrimaire Collège, (en milliers) TotalSupérieurLycéeau plusFemmes CAP, BEP Espagne 66,2 % 23,2 % 4,6 % 6,0 % 100,0 % 72,4 Italie 64,4 % 25,2 % 6,0 % 4,3 % 100,0 % 93,2 Portugal 84,0 % 12,8 % 2,2 % 1,0 % 100,0 % 92,5 Autre UE 15,7 % 22,8 % 24,9 % 36,6 % 100,0 % 68,6 Turquie 84,1 % 4,7 % 6,0 % 5,2 % 100,0 % 9,3 Autre Europe 24,9 % 23,7 % 20,0 % 31,4 % 100,0 % 41,9 Algérie 57,4 % 29,9 % 6,0 % 6,6 % 100,0 % 44,7 Maroc 45,8 % 35,9 % 11,1 % 7,2 % 100,0 % 28,2 Tunisie 43,4 % 26,9 % 14,7 % 14,9 % 100,0 % 26,5 Autre Afrique 33,2 % 28,2 % 13,7 % 24,9 % 100,0 % 23,0 Asie 20,1 % 18,1 % 22,8 % 39,0 % 100,0 % 35,1 Amérique et Océanie 10,9 % 12,9 % 18,3 % 57,9 % 100,0 % 18,0 Ensemble 50,9 % 22,4 % 11,1 % 15,7 % 100,0 % 553,4 France entière 40,3 % 31,4 % 15,6 % 12,7 % 100,0 % 7658,0 Source: Enquête EHF, Insee, 1999.

Niveau d’études des hommes et des femmes de 45 à 70 ans selon leur lieu de naissance

Enquête EHF, Insee, 1999.

50Dans notre enquête, un peu moins de 3 % bénéficiaient d’une bourse en arrivant en France. Comme on pouvait s’y attendre, il s’agit essentiellement de personnes au niveau d’instruction élevé, neuf personnes sur dix ayant atteint les études supérieures. Les hommes en sont les principaux bénéficiaires (71% des cas) et trois sur quatre appartiennent aux catégories de cadres, professions libérales et intellectuelles supérieures ou intermédiaires. Parmi les boursiers, les ressortissants les plus représentés sont originaires de pays d’Amérique latine, d’Asie, d’Afrique subsaharienne et, dans une moindre mesure, du Maroc et de la Tunisie.

51Les autres courants d’immigration caractérisés par un haut niveau d’études supérieures correspondent à des migrations de nature différente, quelquefois dues à des opportunités professionnelles particulièrement attractives pouvant s’offrir en milieu ou en fin de carrière, comme celles en provenance de certains pays de l’Union européenne, d’Amérique ou d’Océanie.

52Les réfugiés politiques ont aussi un niveau d’études élevé (46 % d’entre eux ont le niveau du baccalauréat, contre 26 % en moyenne). Cela résulte d’un effet de sélection. Dans les situations de troubles, de guerres ou de persécutions, ceux qui ont le plus de ressources ont aussi plus de chances de fuir leur pays pour se réfugier ailleurs. Près de 9 % de la population des immigrés âgés de 45 à 70 ans interrogés en 2003 sont entrés en France avec le statut de demandeur d’asile politique. Les hommes sont un peu plus nombreux à revêtir ce statut (59 %), et la plupart sont arrivés à des âges plus avancés que la moyenne (48 % après 27 ans alors que seuls 29 % des immigrés ont migré aussi tardivement).

53On notera que près de 40 % des personnes réfugiées en France sont asiatiques, principalement vietnamiennes, cambodgiennes, laotiennes et sri-lankaises, arrivées entre 1975 et 1984. Bien évidemment, les dates des migrations politiques obéissent à la chronologie des événements ou des situations qui les ont déclenchées. Ainsi, 70 % des Espagnols (11 % des demandeurs d’asile au total) se sont installés entre la fin des années soixante et la fin des années soixante-dix, fuyant le régime franquiste. Les Turcs (5 % des réfugiés) sont arrivés, pour 84 % d’entre eux, entre 1970 et 1984. Près de 60 % des demandeurs d’asile polonais sont entrés en France au cours des années quatre-vingt, par crainte de la guerre civile. 70 % des ressortissants d’Afrique noire qui ont obtenu le statut de réfugiés politiques sont venus entre 1975 et 1984. Enfin, les Latino-Américains, notamment des Chiliens, ont obtenu le bénéfice du droit d’asile au cours de la seconde moitié des années soixante-dix.

Les détenteurs d’un contrat de travail à leur arrivée en France

54Plus d’un quart des immigrés sont arrivés en France avec un contrat « en poche » (26,4 %). Il s’agit d’hommes dans 81 % des cas, ouvriers en majorité (62 %), mais également cadres ou professions intermédiaires (18 %). Les personnes originaires du Maroc sont le plus fréquemment dans cette situation : plus d’un ressortissant sur deux avait signé un contrat. Un tiers environ des Turcs (37 %), des Italiens (33 %) et des Européens (31 %) sont dans ce cas.

? Croyances et pratiques religieuses

55L’enquête PRI comportait quelques questions sur la religion et demandait en même temps aux enquêtés un accord explicite pour y faire figurer leur réponse [8]. La répartition des confessions les plus répandues selon les origines géographiques est présentée dans le tableau 9 (p. 140).

56Les ressortissants des trois pays d’Europe du Sud expriment très majoritairement leur appartenance au catholicisme : 92,3 % pour les Portugais, 87,8 % pour les Italiens et 85,5 % pour les Espagnols. Ailleurs en Europe, les proportions de catholiques sont moins importantes (un peu moins de 44 % en Europe du Nord et continentale et 50 % en Europe de l’Est). En revanche, y sont implantées d’autres Églises chrétiennes (plus de 28 % de protestants et 5 % d’autres confessions chrétiennes en Europe du Nord, près de 11 % de protestants et 26 % d’autres confessions chrétiennes dont les orthodoxes en Europe de l’Est). Les personnes originaires des trois pays du Maghreb et, dans une moindre mesure, de Turquie et des pays du Proche-Orient, déclarent appartenir à la religion musulmane (plus de 86 % en Algérie, près de 82 % au Maroc, 70 % en Tunisie et 67 % pour la Turquie et le Proche-Orient). Notons pour la Tunisie la présence de catholiques (12,6 %) et de juifs (10,5 %) et, pour la Turquie et les pays du Proche-Orient, des catholiques (8,6 %) et d’autres confessions chrétiennes (10,6 %).

57Comme l’on s’y attendait, le bouddhisme est la religion la mieux représentée parmi les personnes originaires d’Asie (plus de 55 %) ; on remarque cependant plus de 20 % de fidèles du catholicisme. Les Africains se répartissent principalement entre catholiques (40,6 %), musulmans (29,7 %) et protestants (12,9 %), les autres religions étant rares parmi eux.

Tableau 9

Les religions des immigrés de 45 à 70 ans selon leur lieu de naissance

Tableau 9
Tableau 9 Les religions des immigrés de 45 à 70 ans selon leur lieu de naissance Catholiques EuropeduNordetcontinentale43,9%28,3%5,0%<0,1%0,9%1,1%0,9%2,9%17,1%100% Italie87,8%1,0%3,8%0,1%<0,1%<0,1%2,1%1,9%3,4%100% Portugal92,3%0,5%3,6%<0,1%<0,1%<0,1%1,0%1,0%1,7%100% Espagne85,5%0,5%4,3%0,1%0,1%<0,1%1,0%1,0%7,6%100% Europedel’Est50,0%10,8%25,7%4,4%1,2%1,0%0,4%1,0%5,5%100% TurquieetProche-Orient8,6%1,2%10,6%67,1%3,7%<0,1%1,3%3,4%4,1%100% Maroc4,4%0,1%0,1%81,8%6,7%<0,1%0,3%2,7%3,9%100% Algérie2,5%<0,1%0,3%86,2%0,4%<0,1%0,2%2,1%8,4%100% Tunisie12,6%<0,1%0,8%70,0%10,5%<0,1%0,2%3,2%2,7%100% AutreAfrique40,6%12,9%6,8%29,7%0,6%2,3%0,9%1,9%4,4%100% Autrespays55,6%14,5%5,8%<0,1%3,4%2,0%3,7%0,9%14,2%100% Asie20,6%1,5%1,6%3,8%<0,1%55,3%1,8%4,6%10,7%100% Ensemble45,9%4,3%4,4%31,5%1,8%3,0%0,9%2,0%6,2%100% Total Sans religion Neveulent pas répondre Autres Bouddhistes autres religions d'Asie MusulmansJuifs Autres confessions chrétiennes Protestants Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Les religions des immigrés de 45 à 70 ans selon leur lieu de naissance

Enquête PRI, Cnav, 2003.

58Plusieurs religions minoritaires ont été regroupées (cf. tableau 10), faute d’effectifs suffisants permettant de les examiner séparément. Ainsi les témoins de Jéhovah, bahaistes et animistes sont classés parmi les « autres », les alévistes et aghakanistes figurent avec les musulmans, les grégoriens et les maronites avec les autres tendances chrétiennes.

59Notons enfin que la proportion la plus importante de « sans religion » est enregistrée chez les personnes originaires d’Europe du Nord (17,1 %), puis auprès des personnes des autres pays (14,2 %) et d’Asie (10,7 %).

60La fréquence des pratiques n’est pas la même selon les religions. Les musulmans se déclarent largement les plus assidus, puisque six sur dix pratiquent régulièrement, soit deux ou trois fois plus que la plupart des adeptes des autres religions. Les croyants des religions minoritaires (classées dans la catégorie « autres ») pratiquent plus régulièrement que la moyenne (48 %). Les juifs sont proches de cette moyenne dans leur taux de pratique régulière (35,4 %), et ont une plus forte tendance à avoir une pratique occasionnelle. Les catholiques, les protestants et autres confessions chrétiennes ainsi que les bouddhistes revendiquent, davantage que la moyenne, un sentiment d’appartenance à la religion plus qu’une pratique réelle.

Tableau 10

La fréquence des pratiques religieuses des immigrés de 45 à 70 ans

Tableau 10
Tableau 10 La fréquence des pratiques religieuses des immigrés de 45 à 70 ans Pratique Ni pratique,Pas de pratiquePratique ni sentimentmais sentiment occasionnellerégulière d’appartenanced’appartenance Catholiques 22,7 % 30,1 % 40,0 % 7,1 % Protestants 22,1 % 24,6 % 35,6 % 17,8 % Autres confessions chrétiennes 23,4 % 26,4 % 39,0 % 10,9 % Musulmans 60,1 % 16,9 % 19,3 % 3,7 % Juifs 35,4 % 34,6 % 24,9 % 5,1 % Bouddhistes, autres relig° d'Asie 25,0 % 29,6 % 38,0 % 7,4 % Autres 48,0 % 6,3 % 26,3 % 19,3 % Ne veulent pas répondre 27,5 % 13,1 % 22,4 % 27,5 % Ensemble 33,8 % 23,3 % 30,3 % 12,0 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

La fréquence des pratiques religieuses des immigrés de 45 à 70 ans

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Famille et conjugalité

61Cette section décrit plusieurs aspects de la vie familiale et conjugale des immigrés. De ce point de vue, ceux-ci se distinguent à plusieurs égards de la population autochtone, tout en faisant preuve d’une grande hétérogénéité qui tient à la diversité de leurs cultures familiales et religieuses. La vie familiale des immigrés, tout comme leur parcours professionnel, se révèle d’une importance majeure dans la façon dont se déroule l’expérience migratoire. Nous présentons ici les principales caractéristiques des ménages et des couples, dont certaines sont étroitement liées à l’histoire migratoire, ainsi que quelques données sur la famille élargie, les parents et la fratrie.

62Comparés à l’ensemble de la population française de même âge et de même sexe, les hommes immigrés de 45 à 70 ans présentent un taux inférieur de divorce et de veuvage, et les femmes sont moins souvent célibataires (cf. tableau 11). Les migrants vivent donc plus souvent en couple que les natifs.

Tableau 11

Statut matrimonial des hommes et des femmes de 45 à 70 ans

Tableau 11
Tableau 11 Statut matrimonial des hommes et des femmes de 45 à 70 ans immigrés et autochtones AutochtonesImmigrés Hommes Femmes Hommes Femmes Celibataire 12,8 % 8,7 % 12,9 % 10,9 % Marié(e) 79,7 % 71,3 % 76,1 % 67,3 % Veuf(ve) 1,4 % 9,3 % 2,2 % 9,9 % Divorcé(e) 6,2 % 10,6 % 8,8 % 11,9 % Total 100,0 % 100,0 % 100,0 % 100,0 % Source : Enquête EHF, Insee, 1999.

Statut matrimonial des hommes et des femmes de 45 à 70 ans

Enquête EHF, Insee, 1999.

? Nombre d’enfants

63Comme cela a été souvent mis en évidence (cf.notamment Borrel, Tavan, 2003), le nombre d’enfants est plus élevé parmi les immigrés que parmi les autochtones. Chez les premiers, seuls 10 % n’ont pas d’enfant contre 13 % pour les seconds. 34 % des migrants ont quatre enfants et plus, contre 16 % pour la population française (cf. tableau 12). Il faut aussi remarquer que les plus vieux sont encore plus souvent à la tête de familles très nombreuses (40 % des 65-70 ans). Il existe également des différences très prononcées selon les pays d’origine. Près des deux tiers des familles algériennes, marocaines et turques ont quatre enfants et plus, un tiers des familles asiatiques, environ 40 % des familles africaines ou tunisiennes. Mais moins d’un septième de celles venant des différents pays européens sont dans ce cas. La fécondité de ces dernières se situe donc à peu près au même niveau que celle de la population du pays d’accueil.

Tableau 12

Nombre d’enfants selon les lieux de naissance

Tableau 12
Tableau 12 Nombre d’enfants selon les lieux de naissance Pas 4 enfants 1 enfant 2 enfants 3 enfants d’enfant et + Espagne 9 % 15 % 32 % 23 % 20 % Italie 8 % 14 % 32 % 22 % 23 % Portugal 4 % 12 % 37 % 23 % 24 % Europe du Nord et continentale 16 % 16 % 35 % 19 % 14 % Europe de l’Est 15 % 25 % 30 % 16 % 14 % Algérie 9 % 6 % 11 % 12 % 62 % Maroc 7 % 5 % 11 % 15 % 62 % Tunisie 9 % 7 % 20 % 24 % 39 % Autre Afrique 8 % 9 % 21 % 19 % 44 % Turquie 5 % 3 % 12 % 17 % 62 % Asie 16 % 11 % 24 % 18 % 31 % Autres pays 24 % 17 % 31 % 17 % 11 % Ensemble 10 % 12 % 26 % 19 % 34 % Non-immigrés (45-70 ans) 13 % 18 % 34 % 20 % 14 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Nombre d’enfants selon les lieux de naissance

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Taille du ménage

64Les ménages à une seule personne sont un peu moins nombreux que dans l’ensemble de la population. Comme le montre le tableau 13, ils représentent 12,1 % des foyers immigrés au lieu de 15,5 % pour la population générale. Parmi les immigrés, 11,4 % d’hommes et 13,0 % de femmes sont isolés. Ces taux sont respectivement de 12,6 % et 18,2 % pour l’ensemble de la population. 60 % des personnes sans conjoint vivent seules, 20,8 % vivent dans un ménage de deux personnes, environ 16 % dans un ménage de trois à cinq personnes et 2,7 % dans un ménage de six personnes ou plus. Quant aux hommes dont la conjointe est restée au pays, ils sont très peu nombreux (1,6 % des couples) et ils vivent seuls pour les deux tiers d’entre eux.

65Les configurations des ménages sont très différentes selon les pays d’origine. Les personnes qui vivent seules sont plus rares parmi les femmes originaires d’Afrique, d’Afrique du Nord, de Turquie et du Portugal. Leur nombre est plus important chez les Italiennes, les Espagnoles et celles des autres pays européens. Quant aux hommes, ils sont plus souvent isolés quand ils viennent d’Europe ou d’Algérie, et plus rarement des autres pays. Les Asiatiques vivent rarement seuls, quel que soit le sexe.

66Les différences entre pays sont encore plus sensibles si l’on considère les ménages nombreux, composés de six personnes ou plus. De 22 % à 35 % des personnes originaires des pays d’Afrique, d’Orient et d’Asie vivent dans des ménages de ce type tandis que pour les autres pays d’Europe, ces taux varient de 1 à 2 %, atteignant à peine 3 % pour le Portugal.

Tableau 13

Taille des ménages selon le statut matrimonial et le sexe

Tableau 13
Tableau 13 Taille des ménages selon le statut matrimonial et le sexe PersonnesNombre de personnes Personnes en Femmes sans conjointEnsembledans le ménage couple Hommes 1 personne 12,1 % 60,6 % 1,0 % 13,0 % 11,4 % 2 personnes 32,1 % 20,8 % 34,7 % 36,4 % 28,3 % 3 à 5 personnes 42,7 % 15,8 % 48,8 % 40,2 % 44,9 % 6 personnes et plus 13,1 % 2,7 % 15,4 % 10,3 % 15,5 % Total 100 % 100 % 100 % 100 % 100 % Nombre observé 1 605 082 299 165 1 305 917 745 973 859 109 Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Taille des ménages selon le statut matrimonial et le sexe

Enquête PRI, Cnav, 2003.
Tableau 14

Taille des ménages par pays

Tableau 14
Tableau 14 Taille des ménages par pays 21 3 à 5 6 personnes Total personnespersonne personnes et plus Europe du Nord et continentale 19,8 % 49,7 % 28,9 % 1,6 % 100 % Italie 16,3 % 49,3 % 32,5 % 1,9 % 100 % Portugal 7,1 % 38,0 % 52,2 % 2,7 % 100 % Espagne 16,3 % 44,1 % 38,7 % 0,9 % 100 % Europe de l’Est 17,0 % 48,0 % 33,0 % 2,0 % 100 % Turquie et Proche-Orient 9,4 % 19,7 % 49,2 % 21,8 % 100 % Maroc 8,5 % 14,6 % 41,7 % 35,2 % 100 % Algérie 12,7 % 17,1 % 46,9 % 23,3 % 100 % Tunisie 7,8 % 23,3 % 42,9 % 26,1 % 100 % Autre Afrique 10,3 % 16,3 % 43,7 % 29,7 % 100 % Autres pays 15,8 % 27,9 % 53,4 % 3,0 % 100 % Asie 7,4 % 27,8 % 55,2 % 9,6 % 100 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Taille des ménages par pays

Enquête PRI, Cnav, 2003.

67Si, dans les tranches d’âges considérées, le nombre de personnes mariées ne vivant pas avec leur conjoint est faible, une minorité un peu plus importante a connu cette situation avant que s’opère le « regroupement » des conjoints en France. Au total, 7 % des personnes interrogées ont vécu une période de « conjugalité à distance », ou encore de « faux célibat », qui se traduit dans les données par une date de mariage antérieure à celle de la vie commune.

Tableau 15

Regroupement des conjoints

Tableau 15
Tableau 15 Regroupement des conjoints Proportion de « regroupés »* (n = 4947)** Ensemble 6,7 Selon l'origine Italie 0,9 Espagne 0,2 Portugal 2,3 Algérie 13,8 Maroc 16,2 Tunisie 9,2 Turquie 11,2 Selon la religion Chrétiens 1,9 Musulmans 15,3 Bouddhisme - autres religions asiatiques 4,6 Juifs 0,0 Sans et croyants 4,5 Autres 2,8 Ne veulent pas répondre 1,8 Selon la taille du ménage 1 personne 0,0 2 personnes 2,9 3 à 5 personnes 7,1 6 à 10 personnes 15,2 Plus de 10 personnes 18,7 Arrivé en France Seul 9,7 Accompagné 4,1 Source : enquête PRI, Cnav, 2003 * Le terme «regroupés» désigne ici les personnes qui habitent en France avec leur conjoint depuis une date postérieure à celle de leur mariage, ce qui signifie qu’il y a eu un regroupement familial. Les migrants qui se marient avec des personnes nées dans le pays d’accueil, en l’occurrence la France, ne sont pas comptabilisés dans ce tableau. Les chiffres ne permettent cependant pas de connaître le sens du regroupement, c’est-à-dire quel est le conjoint qui est arrivé le dernier en France. ** Les statistiques établies ici ne portent que sur les personnes mariées, d’où la taille de l’échantillon, inférieur au nombre total de personnes enquêtées.

Regroupement des conjoints

enquête PRI, Cnav, 2003

68Le tableau 15 (p. 145) fait apparaître que le regroupement conjugal est négligeable parmi les ressortissants des pays européens, nonobstant une légère exception pour les Portugais (2,3 %). Il intéresse en premier lieu les Marocains (16,2 %), les Algériens (13,8 %) et les Turcs (11,2 %) et un peu moins les Tunisiens (9,2 %). Il est surtout le fait des musulmans (15,3 %), beaucoup moins fréquemment des bouddhistes et des fidèles des autres religions asiatiques (4,5 %). Il concerne enfin une plus forte proportion de personnes vivant dans les ménages les plus peuplés (18,7 % des ménages de plus de dix personnes et 15,2 % de ceux comportant de six à dix membres). Les « regroupés » migrent le plus souvent seuls, qu’ils soient les premiers à venir ou qu’ils rejoignent le conjoint déjà installé.

69C’est aussi parmi les ménages à forte densité que se comptent les rares cas de polygamie notés par les enquêteurs (il n’y avait pas de question directe sur ce sujet). On en dénombre 7,3 % dans les ménages de plus de dix personnes et 1,5 % dans l’ensemble. Parmi les musulmans, ce taux s’élève à 2,45 %, mais il existe aussi des ménages polygames chrétiens (1,1 %), notamment parmi les Européens du Nord (1,9 %).

70La notion de polygamie se réfère ici plus à une pratique qu’à la notion juridique, si l’on en juge par sa fréquence dans les pays européens où elle n’est pas autorisée légalement. Il reste que c’est parmi les ressortissants d’Afrique subsaharienne que le taux de polygamie, estimé par les enquêteurs, est le plus élevé (5,1 %).

? Chronologie du mariage et de la migration

71L’ordre séquentiel du mariage et de la migration est différent selon le sexe. D’une façon générale, les femmes se marient plus souvent que les hommes avant la migration (cf. tableau 16). Dans les groupes d’âges considérés, les migrations étant plutôt masculines, beaucoup de femmes quittent leur pays pour suivre leur conjoint. La séquence de ces deux événements dépend aussi, bien entendu, de l’âge à la migration. Les groupes les plus anciennement installés, et dont une partie est venue dans l’enfance avec les parents, se sont mariés bien après leur arrivée en France. C’est le cas de plus de 71% des Italiens et de 67% des Espagnols. Au contraire, les migrations plus récentes, telle la marocaine, comptent un plus grand nombre de mariages avant la migration (38 %). Mais le taux le plus élevé des mariages précédant la migration est celui des Turcs qui atteint le niveau exceptionnel de 70 %, ce qui renvoie à une spécificité de la vie familiale et communautaire parmi les migrants turcs, marquée par le respect de l’autorité parentale et de la tradition, notamment dans le choix du conjoint (Petek-Salom, 2001 ; Tribalat, 1996).

Tableau 16

Chronologie du mariage et de la migration*

Tableau 16
Tableau 16 Chronologie du mariage et de la migration* Mariage MariageMariage Mariage après lapeu après la et migrationavant simultanés migrationmigration migration (3 ans et plus)(moins de 3 ans) Sexe Hommes 28,1 % 4,8 % 8,3 % 58,8 % Femmes 35,9 % 13,6 % 5,4 % 45,0 % Origine Italie 13,2 % 8,9 % 6,5 % 71,4 % Espagne 18,1 % 7,8 % 7,0 % 67,2 % Portugal 31,1 % 11,5 % 8,3 % 49,1 % Algérie 34,9 % 7,3 % 3,8 % 53,9 % Maroc 38,1 % 6,0 % 9,0 % 46,9 % Tunisie 25,0 % 9,6 % 5,5 % 59,9 % Turquie 70,0 % 8,8 % 5,3 % 15,9 % Âge 45-49 ans 28,5 % 10,2 % 5,6 % 55,6 % 50-54 ans 29,4 % 10,4 % 7,9 % 52,2 % 55-59 ans 32,4 % 7,9 % 7,4 % 52,2 % 60-64 ans 34,9 % 7,3 % 7,1 % 50,7 % 65-70 ans 36,0 % 7,2 % 7,2 % 49,6 % Origine du conjoint** France 9,0 % 20,3 % 17,7 % 35,2 % Identique 77,6 % 73,1 % 70,6 % 54,7 % Autre 13,4 % 6,5 % 11,7 % 10,1 % Total 100,0 % 100,0 % 100,0 % 100,0 % Ensemble 31,7 % 8,9 % 7,0 % 52,4 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003. * Le total des proportions se fait en ligne. ** Les chiffres indiquent si le conjoint est né en France, dans le même pays que l'enquêté ou dans un autre pays. Le total se fait ici en colonne.

Chronologie du mariage et de la migration*

Enquête PRI, Cnav, 2003.

72Enfin, la simultanéité du mariage et de la migration ou la durée qui les sépare détermine fortement la proximité ethnique des conjoints : si le mariage a été contracté avant ou à un moment proche de la migration, le conjoint est très largement de même origine (77,6 % et 73,1 %), et à peine moins pour les mariages contractés dans les deux ans qui suivent la migration (70,6 %). Mais lorsque les unions interviennent plus de trois ans après l’installation en France, elles ne sont plus que 54,7 % à s’établir avec un partenaire de même origine et plus du tiers avec un Français natif. Cela souligne à quel point le moment de la migration, dans la succession des événements de vie, détermine la façon dont va se dérouler l’expérience migratoire.

73Le tableau 17 révèle que le choix d’un conjoint de même origine est bien plus fréquent dans les unions légales classiques (67,4 % au sein de couples mariés ou 72 % parmi les personnes veuves), que dans les couples qui se sont formés (et défaits) hors mariage (42,4 %) ou qui se sont terminés par un divorce (56,3 %), ces deux derniers cas impliquant davantage des conjoints français natifs et ceux ayant une autre origine.

Tableau 17

Origine du conjoint selon le statut matrimonial

Tableau 17
Tableau 17 Origine du conjoint selon le statut matrimonial Conjoint né dansConjoint né dans un autre paysConjoint né le même pays à l’étrangeren France à l’étranger Couples mariés ou non 24,8 % 67,4 % 7,7 % Célibataire seul(e) 39,0 % 42,4 % 18,6 % Divorcé(e) seul(e) 32,1 % 56,3 % 11,7 % Veuf(ve) seul(e) 18,6 % 72,0 % 9,3 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Origine du conjoint selon le statut matrimonial

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Homogamie

74Le tableau 18 met en relation les caractéristiques des deux conjoints. Il permet d’observer qu’il existe une homogamie, principalement au regard de la religion et de l’origine ethnique. Le graphique 6 illustre bien la mesure de l’homogamie selon la religion. Les unions interreligieuses sont rares dans les deux confessions majoritaires, chez les musulmans et les catholiques (à hauteur de 6 et 7 %), tandis qu’elles sont fréquentes parmi les minorités protestantes (50 %), juives (24 %) et bouddhistes (20 %).

75L’homogamie ne se limite pas à ces deux caractéristiques, bien qu’en ce qui concerne l’âge, le niveau d’éducation et le niveau social, l’hétérogamie soit un peu plus répandue : les hommes, très souvent plus âgés, ont plutôt un niveau d’éducation égal (dans 51 % des couples) ou plus élevé que leurs conjointes. Quant au niveau social, il est équivalent entre les deux conjoints dans moins de la moitié des couples. Pour les autres, il est à peu près aussi souvent supérieur chez l’homme que chez la femme. L’âge de l’enquêté n’est guère déterminant à cet égard.

Tableau 18

Caractéristiques comparées des conjoints au sein des couples (n = 5126)

Tableau 18
Tableau 18 Caractéristiques comparées des conjoints au sein des couples (n = 5126) Ensemble Âge Homme plus jeune 14,2 % Homme et femme de même âge 8,8 % Homme plus âgé 77,0 % Instruction Homme de niveau plus faible 19,6 % Homme et femme de même niveau d’éducation 51,0 % Homme de niveau plus élevé 29,4 % Niveau social d'origine Homme plus aisé 30,0 % Homme et femme de même niveau 47,2 % Homme moins aisé 22,8 % Même pays de naissance 67,4 % Même religion 87,4 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Caractéristiques comparées des conjoints au sein des couples (n = 5126)

Enquête PRI, Cnav, 2003.
Graphique 6

Proportion des immigrés de 45 à 70 ans ayant (ou ayant eu) un conjoint de même religion qu’eux

Graphique 6
Graphique 6 Proportion des immigrés de 45 à 70 ans ayant (ou ayant eu) un conjoint de même religion qu’eux Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Proportion des immigrés de 45 à 70 ans ayant (ou ayant eu) un conjoint de même religion qu’eux

Enquête PRI, Cnav, 2003.

76La situation conjugale a des incidences bien connues sur la situation économique. Les données de l’enquête PRI confirment que les personnes vivant en couple ont un meilleur niveau de vie que celles qui vivent seules, ce que traduit leurs perceptions (cf. tableau 19). Elles sont bien plus souvent propriétaires (cf. tableau 20).

Tableau 19

Niveau de vie subjectif selon la situation matrimoniale actuelle

Tableau 19
Tableau 19 Niveau de vie subjectif selon la situation matrimoniale actuelle Pauvre ou trèsTrès à l’aise ou Moyen pauvre*Très justeà l'aise* En couple 25,9 % 46,9 % 21,7 % 5,5 % Célibataire vivant seul(e) 22,0 % 35,6 % 25,4 % 16,9 % Divorcé(e) seul(e) 13,0 % 38,6 % 30,5 % 17,9 % Veufs(ve) seul(e) 16,1 % 38,8 % 33,5 % 11,6 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003. * Ces catégories constituent initialement deux catégories distinctes dans l’enquête. Elles ont été regroupées afin de faciliter la présentation des résultats.

Niveau de vie subjectif selon la situation matrimoniale actuelle

Enquête PRI, Cnav, 2003.
Tableau 20

Locataires et propriétaires selon le statut matrimonial

Tableau 20
Tableau 20 Locataires et propriétaires selon le statut matrimonial Locataires Autres*Propriétaires Couples 54,0 % 42,1 % 3,9 % Célibataire seul(e) 30,5 % 64,4 % 5,1 % Divorcé(e) seul(e) 33,2 % 61,4 % 5,4 % Veuf(ve) seul(e) 38,3 % 53,4 % 8,3 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003. * Sous-locataire, logé gratuitement ou usufruitier total.

Locataires et propriétaires selon le statut matrimonial

Enquête PRI, Cnav, 2003.

?? La famille élargie

77Il n’est pas rare de constater la présence de parents ou de frères et sœurs en France, ce qui révèle l’existence d’une immigration familiale, allant au-delà de la famille restreinte aux seuls conjoint et enfants. Ainsi, 27,9 % des immigrés ont au moins un parent, père ou mère, vivant en France. Pour une vision plus complète de ce phénomène, il convient de tenir compte de ceux dont les parents ont vécu et fini leurs jours en France, ce qui élève ce taux à plus d’un tiers des immigrés. Une grande partie de la famille élargie demeure néanmoins à l’étranger, comme le montre le tableau 21. L’âge n’influence pas la probabilité de la présence des parents en France ou à l’étranger.

Tableau 21

Probabilité de présence de membres de la famille à l’étranger

Tableau 21
Tableau 21 Probabilité de présence de membres de la famille à l’étranger Au moins Conjoint à un enfant àParents à l’étranger* l’étranger*l’étranger* 45-49 ans 68,9 % 0,9 % 5,5 % 50-54 ans 74,2 % 0,9 % 12,7 % 55-59 ans 75,5 % 2,3 % 21,6 % 60-64 ans 74,5 % 1,1 % 24,5 % 65-70 ans 66,7 % 1,6 % 24,3 % Ensemble 72,1 % 1,3 % 16,5 % Source : Enquête PRI, Cnav, 2003. * Les fréquences sont calculées sur les populations concernées, c’est-à-dire pour les personnes dont les parents sont en vie ou les personnes vivant en couple, etc.

Probabilité de présence de membres de la famille à l’étranger

Enquête PRI, Cnav, 2003.

78Ces migrations « multigénérationnelles » suivent souvent l’installation définitive des premiers arrivants et forment une part importante du regroupement familial. Elles peuvent se réaliser de deux façons : soit les parents viennent à la suite de leurs descendants, déjà établis, soit les enfants rejoignent leurs parents après l’installation de ceux-ci. Cependant, il existe aussi des situations où parents et enfants arrivent ensemble. Elles sont fréquentes, car si presque 48 % des immigrés sont partis seuls, les autres étaient accompagnés de leur famille, à l’exception d’une minorité d’environ 4 % venus avec des amis, des connaissances, ou d’autres personnes (groupe d’immigrants, recruteurs, etc.). Ceux qui sont venus accompagnés l’ont été par le conjoint et/ou les enfants et souvent par les parents. Parmi eux, plus de 40 % sont venus avec leur père ou leur mère.

79Ces migrations regroupant la lignée sont plus fréquentes parmi les Algériens et les Européens du Sud, les Espagnols et les Italiens et à un moindre degré les Portugais. En revanche, elles se rencontrent rarement chez les Africains du sud du Sahara, les Turcs et les autres Européens. Elles sont également plus nombreuses parmi les moins de 50 ans. On peut alors supposer qu’elles tendent à s’accentuer dans les nouvelles vagues d’immigration et qu’elles sont appelées à s’accroître dans l’avenir.

80Les migrants arrivés avec leurs parents, ou les ayant fait venir, se différencient des autres par quelques caractéristiques : ils ont plus souvent un assez bon niveau de formation, en général secondaire. Leur niveau de vie est plus souvent moyen, voire assez bon, alors qu’au cours de leur enfance leurs parents se trouvaient fréquemment dans une situation assez difficile (« très juste »). Ce ne sont donc ni les plus pauvres, ni les plus riches, mais des personnes qui ont vécu en France une certaine amélioration de leur niveau de vie par rapport à celui de leurs parents. Ils sont en effet près de 48 % à estimer que leur parcours professionnel a progressé (contre 43 % de ceux qui n’ont pas connu la présence de leurs parents en France). Les raisons de leur migration sont un peu plus souvent liées à l’insécurité dans le pays d’origine (18,4% contre 11,2), à la pauvreté et au manque de travail (41,3 % contre 36,7) ainsi qu’au regroupement familial (37,4 % contre 33,7).

81Quant aux frères et sœurs, ils ont tendance, pour la majorité, à quitter eux aussi le pays natal. Dans un quart des familles seulement, ils sont tous restés au pays. Le tableau 22 révèle l’importance de la présence en France des frères et sœurs des immigrés : 45,4% des personnes interrogées y ont une petite partie de leur fratrie, 15,6 % la majorité et 16,3 % la totalité, ce qui signifie que 77,4 % ont au moins un frère ou une sœur en France. Cette présence est un élément capital dans la formation des réseaux de sociabilité et d’entraide. Elle montre aussi le rôle essentiel de la famille dans les processus d’immigration et d’intégration à la société.

Tableau 22

Lieux de vie des frères et sœurs

Tableau 22
Tableau 22 Lieux de vie des frères et sœurs Une minorité TousLa majoritéAucun Frères et sœurs demeurés au pays 21,9 % 26,6 % 26,9 % 24,5 % (n observé = 5250) Frères et sœurs en France 22,6 % 45,4 % 15,6 % 16,3 % (n observé = 3684) Source : Enquête PRI, Cnav, 2003.

Lieux de vie des frères et sœurs

Enquête PRI, Cnav, 2003.

? Conclusion

82Les immigrés de longue date en France restent fortement marqués par les conditions de leur émigration, par la situation qui a précédé leur arrivée ainsi que par les traditions culturelles qui façonnent profondément leur vie de famille. L’enquête PRI, en embrassant l’ensemble de la population immigrée de toutes provenances, en révèle la grande hétérogénéité tout en faisant apparaître les spécificités de chaque groupe ethnique, dans une démarche systématiquement comparative. Ces groupes se distinguent notamment par leur histoire migratoire en interaction avec le milieu social et culturel. Ils ont néanmoins en commun le fait migratoire, qui constitue en lui-même un événement majeur dans tout parcours de vie. La signification de cet « événement de vie » varie selon la phase de vie au cours de laquelle il survient. L’âge au moment de la migration est un élément important du profil migratoire et influence le déroulement ultérieur de la vie des migrants. Quand la migration intervient dans l’enfance, c’est dans le cadre d’une migration familiale, ou d’un regroupement familial. À la fin de l’adolescence et au cours de la jeunesse, on rencontre les migrations pour études et formations. Le début de l’âge adulte est celui des migrations de travail qui représentent la grande majorité de l’ensemble des migrations. Le mariage ou la mise en couple peuvent aussi motiver la migration, en particulier des femmes, dans les générations étudiées. Mais, on l’a vu, elles concernent aussi les hommes, notamment des Portugais et des Italiens. Du reste, l’âge au moment de la migration a une incidence sur la formation des couples. Le partenaire sera plus souvent d’une origine différente pour ceux qui migrent jeunes ou encore célibataires et de la même origine quand migration et mariage coïncident dans le temps ou se suivent de peu. Aux différentes étapes de la vie, correspondent ainsi des raisons de partir et des formes migratoires spécifiques et, tout au long de l’existence, des membres de la famille dispersée (un conjoint, un enfant, un père, une mère, etc.) se regroupent. Les parents qui émigrent après leurs enfants sont généralement à l’âge du milieu de la vie ou de la vieillesse et font partie de ces migrations tardives qui, bien que minoritaires, n’en représentent pas moins un flux substantiel. On trouve aussi des migrations professionnelles ou des migrations d’affaires, qui interviennent en fin de carrière, impliquant un haut niveau de compétence ou d’expérience. Enfin, le passage à la retraite, propice aux changements de résidence, occasionne des migrations d’un tout autre type, les migrations de retraite, qui sont principalement le fait des Européens du Nord, en particulier des Britanniques.

83Il reste que la majorité des migrations tardives résulte du regroupement familial, quand ce sont les parents qui viennent rejoindre les enfants. Nous avons évalué à plus d’un tiers le nombre de migrants dont au moins un parent vit ou a vécu en France. On serait tenté de conclure qu’un migrant sur trois s’inscrit dans le cadre d’une migration multigénérationnelle, c’est-à-dire qu’il est à la fois enfant d’immigré et immigré lui-même.

84Ce survol des profils migratoires nous a permis de distinguer les types de migration selon la phase de vie où ils se situent. Dans la même perspective, une approche complémentaire consisterait à suivre les effets de l’expérience migratoire sur le parcours de vie et ses transformations au cours du temps, ce qui fait l’objet d’autres analyses à partir de l’enquête PRI qui se prête bien à une telle démarche.

85Nous remercions Philippe Daveau et Alain Rozenkier pour leur relecture attentive de ce texte.

Notes

  • [1]
    Cet article reprend en partie la conférence prononcée au colloque de l’Association internationale de la Sécurité sociale qui s’est tenu à Oslo en avril 2004 sur le thème « Migrants et protection sociale ».
  • [2]
    Voir le no 44 de Retraite et Société (janvier 2005) où sont publiés les résultats de l’étude sur ces questions.
  • [3]
    Cette enquête, initiée par la Cnav et réalisée en collaboration avec l’Insee, sous la direction de Claudine Attias-Donfut, avec Rémi Gallou et Alain Rozenkier, a reçu le soutien du Fasild, de l’Arrco-Agirc, de la MSA et de la Caisse des Mines.
  • [4]
    Les Algériens nés français et ayant opté après l’indépendance pour la citoyenneté algérienne sont inclus dans l’échantillon, tandis que les Français nés en Algérie, dits « pieds-noirs », n’ont pas fait l’objet de l’enquête.
  • [5]
    Nous remercions l’Ined d’avoir aimablement mis ce fichier à notre disposition. L’enquête « Étude de l’histoire familiale » (EHF) consistait en un bulletin complémentaire au recensement de la population de 1999. Auto-administrée, elle a porté sur un logement sur cinquante. 380 000 individus en ménage ordinaire et 6 600 personnes vivant en communauté (dont 1 700 détenus) ont répondu à des questions portant sur leur origine, leurs enfants, leur parcours social ainsi que sur les langues d’usage pratiquées au sein de leur famille.
  • [6]
    À partir de 45 ans, seuls 4,4 % ont immigré.
  • [7]
    Les agriculteurs exploitants immigrés représentent moins de 1 % de la population active et ne sont pas présentés ici.
  • [8]
    Seuls 2% des personnes interrogées ont refusé de répondre à ces questions.
Français

La question des migrations et de ses conséquences est désormais au cœur de l’actualité en France et en Europe. Elle suscite des travaux de plus en plus nombreux qui apportent de nouveaux éclairages sur l’histoire et la diversité des populations. L’article décrit sous un nouveau jour la population immigrée, de toute origine, vivant et vieillissant en France, sur la base des données d’une enquête réalisée en 2003 auprès d’un échantillon de 6 211 immigrés âgés de 45 à 70 ans. L’intérêt d’une telle recherche est multiple : observation des fins de carrière des immigrés, choix relatifs à la retraite, évolution des phénomènes migratoires et des types de migrations... La description de générations d’immigrés dans leurs diverses composantes montre que les situations de vie restent fortement marquées par les conditions de l’émigration, par la situation précédant l’arrivée en France ainsi que par les traditions culturelles qui façonnent profondément leur vie familiale. La signification de cet « événement de vie » majeur que représente la migration varie selon le moment du cycle de vie au cours duquel il survient. Aux différentes étapes de la vie correspondent ainsi des raisons de partir et des formes migratoires spécifiques (migration ou regroupement familial, migration pour études et formations, migration de travail, mais aussi mariage ou mise en couple). Tout au long de l’existence, des membres de la famille dispersée (un conjoint, un enfant, un père, une mère...) peuvent également se regrouper. Les parents qui émigrent pour rejoindre leurs enfants sont généralement à l’âge du milieu de la vie ou de la vieillesse. Ces migrations tardives se cumulent aux migrations de retraite vers les régions du Sud qui, bien que minoritaires, n’en représentent pas moins un flux substantiel et certainement croissant.

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Claudine Attias-donfut
Cnav
Rémi GALLOU
Cnav
Philippe TESSIER
Université de Nantes
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/02/2007
https://doi.org/10.3917/rs.045.0115
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