CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 La presse filmée est aujourd’hui tombée dans l’oubli ; et l’intérêt que les historiens lui ont porté a toujours été faible. Quelques archives, ponctuellement extraites de banques d’images, témoignent régulièrement de son existence passée. Muette jusqu’en 1927 environ, elle apparaît désormais comme une forme désuète de journalisme. Pourtant, dans les années 1950, le journal télévisé a hérité de ses méthodes de reportage. Le rédacteur, spécialiste de l’interview et du commentaire, est ensuite devenu le personnage central, reléguant cameramen et monteurs à des positions subalternes (Siracusa, 1999a, pp. 16-96, 1999b et 2001, pp. 95-105). L’évolution des techniques d’enregistrement et de montage audiovisuels (sur support vidéo puis numérique), leur intégration comme leur large diffusion, ont brouillé la division traditionnelle du travail propre aux métiers du cinéma. Revenir un siècle en arrière permet de décrire une forme de reportage filmé accordant une place centrale aux spécialistes de l’image.

2 Cette étude cherchait initialement à décrire un fonds filmique en vue de la restructuration du musée Albert Kahn à Boulogne-Billancourt (Siracusa, 2016). Entre 1912 et 1931, le banquier Albert Kahn, assisté du géographe Jean Brunhes, a financé le recueil d’une collection d’images filmées, muettes, en noir et blanc, intitulée : « Les Archives de la planète » (ADPL). La presse filmée me servait alors de point de comparaison : elle était à l’arrière-plan de la recherche, si l’on peut dire. D’un côté, elle avait été, à l’époque, une référence naturelle pour Kahn, qui avait même envisagé une collaboration avec Pathé ou Gaumont, comme pour ses cameramen, formés dans la presse filmée. Elle était donc une ressource légitime pour l’analyste tentant de reconstituer les méthodes de réalisation. De l’autre, ses procédures ayant été relativement standardisées dans les années 1920, elle offrait, par ses traits typiques, un moyen de mettre en relief quelques spécificités du travail des cameramen (opérateurs) de Kahn.

3 Il s’agit ici de remettre au premier plan la presse filmée, puis de décrire des écarts à ce qui constituait une norme ou un ensemble de conventions. Les actualités cinématographiques ont instauré des techniques de tournage de films courts dont les personnages, la scénographie ou le propos sont aisément reconnaissables. Comparer ce média populaire à une autre forme d’actualités filmées, soustraite aux contraintes de distribution et dirigée par un promoteur des sciences sociales, est un moyen de décrire une forme « élitiste » en référence à la norme « commerciale ». Les ADPL, dont l’objectif consistait à enregistrer des images de l’actualité pour les générations futures, ne s’alignaient qu’en partie sur cette norme : on tentera de préciser la nature et la finalité de ces écarts.

4 Pour la collection de Kahn, diverses archives étaient disponibles : les films conservés, les livres de comptes et les répertoires des films positifs et négatifs, le répertoire des développements et la correspondance de Jean Bruhnes. Il n’existe, à ma connaissance, quasiment aucune trace, tant pour les ADPL que pour la presse filmée, des consignes que recevaient les cameramen. Les films de Gaumont ont été choisis pour l’analyse comparative, et préférés à d’autres, en raison de la notoriété des actualités Gaumont à l’époque, mais surtout pour une raison pratique : ce sont les films les mieux conservés pour les années 1920 (contrairement à ceux de Pathé, par exemple). L’histoire de l’entreprise est toutefois mal connue, les archives ayant disparu en 1972 lors de la délocalisation des services administratifs. Je m’appuierai sur des documents traitant de divers journaux filmés, et sur l’hypothèse plausible d’une relative similitude de l’organisation du travail dans les principales entreprises, au moins dans ces années 1920.

Des « plein air » aux « actualités »

5 L’apparition, vers 1895, d’images filmées cherchant à montrer « un simple enregistrement de la réalité », est liée à la naissance même du cinématographe. Deux grands types d’œuvres peuvent être distingués : les « plein air », tournés en extérieur, et les « vues composées », des mises en scène, en général d’intérieur, sur le modèle du théâtre de variétés. Les premiers opérateurs (cameramen) de plein air, qu’on nomme « chasseurs d’images », sont quelques jeunes individus arrivés au cinéma par connaissances et formés au départ à des tâches de projection dans des foires où on vante les mérites du cinématographe (Jeanne et Ford, 1961, p. 176). À cette époque, vers 1898, un opérateur montre sur le lieu même du tournage les images qu’il filme. Son faisceau de tâches englobe donc toute la série des opérations cinématographiques, du recueil de la matière première à sa transformation et à sa commercialisation (Barnouw, 1993, p. 6).

6 Les entrepreneurs cinématographiques (Lumière, Pathé ou Gaumont, en France) envoient leurs projectionnistes-opérateurs à l’étranger ou en province, pour rapporter des images de voyage. Ce sont les récits de leurs premières aventures qui constituent très tôt une grande part de la mythologie professionnelle et des valorisations attachées au métier : emprisonnement, problèmes lors des passages aux frontières, réactions inattendues des spectateurs sur place ou des personnages filmés, etc. Progressivement, l’outil de projection est dissocié de celui de prise de vue. La mission de l’opérateur consiste à rapporter des négatifs que des projectionnistes présenteront. Son mode de rémunération suggère qu’il a intérêt à « tourner » le plus possible sans consigne précise de son employeur quant au contenu des sujets (en 35 mm, il tourne sa manivelle 2 tours par seconde). Parfois en mission pour plusieurs mois, ces cameramen sont relativement autonomes. Il ne s’agit pas à cette date de construire un « récit », mais des albums d’images, de découvrir soi-même de nouveaux lieux et de mêler l’indépendance et l’aventure dans le travail. Loin de leur pays d’origine, ils sont enclins à filmer avant tout ce qui surprendrait le public (Huret, 1984, pp. 32-37 ; Leprohon, 1960, p. 10 et p. 100).

7 Les programmes des débuts du cinématographe sont constitués d’une dizaine de petits sujets, mélangeant plein air et vues composées, dont la projection ne durait pas plus d’une demi-heure (Meusy, 1995). Ils sont réalisés pour un marché forain et vendus par les sociétés cinématographiques aux exploitants ambulants qui les utilisent souvent jusqu’à usure complète de la bande (Baechlin et Muller-Strauss, 1951, p. 10). Vendus à la longueur de pellicule, à un prix fixe, les sujets sont projetés selon une fréquence très irrégulière. Jusqu’aux années 1910, les « sujets actuels » portent sur des événements marquants que les spectateurs sont supposés se remémorer : les cérémonies annuelles, les grands spectacles sportifs, etc. Si les frères Lumière sont les premiers à produire et à vendre, à grande échelle, ce genre de films, des concurrents apparaissent ; et ces films prennent des noms variés : documentaires, actualités, films d’expédition, de voyage, etc. Avant 1907, ces films de « non-fiction » surpassent en nombre ceux de fiction ; après cette date, le rapport s’inverse (Barnouw, 1993, pp. 19-21). Ce moment d’inversion correspond à la fois au développement du cinéma de fiction, rendu possible par la constitution d’un réseau de salles, et aux débuts des actualités cinématographiques dont l’apparition est une sorte d’institutionnalisation progressive des méthodes documentaires (Thévenot, 1950, p. 39 ; Bazin, 1994, pp. 25-34).

8 En 1908, Pathé regroupe les « sujets actuels » dans un journal périodique. D’abord appelé Pathé-faits-divers puis Pathé-Journal, il est présenté comme « un journal filmé d’information et non un organe d’opinion » (Huret, 1984, p. 29). Gaumont crée son journal en 1910 : Gaumont Actualités. Le changement dans la désignation des produits est analogue en Angleterre et aux États-Unis où les premiers sujets sont appelés topical, puis, semble-t-il à la fin des années 1910, newsreel, en référence à la presse écrite (MacKernan, 1992, p. 6). Le caractère fixe du réseau de distribution oblige les responsables de salles à varier plus souvent et régulièrement leurs programmes. Pour les journaux filmés, cette obligation entraîne une planification de la production. Un format spécifique de présentation des sujets se met aussi en place. En France, une dizaine de petits reportages constitue chacune la séance hebdomadaire. Les « actualités » sont louées au mètre de pellicule pour un prix qui dépend du « degré d’actualité ». Leur contenu, auparavant vanté sur les affiches ou dans les journaux, est de moins en moins mentionné. Elles forment désormais un tout, dont on peut parfois mettre en avant une exclusivité. Présentées avant le film à l’affiche, dans une salle bruyante, populaire et enfumée, elles font partie du programme que les spectateurs sont habitués à voir, dans un réseau de salles en plein développement (Lefcourt, 2004). Dans les années 1920, l’activité est relativement standardisée et les entreprises en vive concurrence (Gaumont, Pathé, Éclipse, Éclair et une ou deux entreprises américaines, pour une présentation du « système global » à cette époque, Althaus, 2010).

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La création de journaux filmés est aussi liée à l’existence, dans le pays, de producteurs de film vierge, d’installations de développement et de personnels qualifiés. Ce sont surtout ces raisons qui expliquent les grandes variations internationales des débuts de la presse filmée. Les pays occidentaux, et surtout la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis occuperont une position dominante, voire hégémonique, dans l’économie des échanges internationaux de reportages.
(Baechlin et Muller-Strauss, 1951, p. 18)

10 Les journaux filmés revendiquent leur appartenance à la presse. La proclamation de la mission professionnelle (notamment la neutralité politique) semble le meilleur instrument de promotion. Ils partagent avec les journaux d’autres supports des séquences d’activités typiques : prendre connaissance de l’actualité, sélectionner quelques sujets et réaliser des reportages à partir de cette sélection. Compte tenu du faible nombre d’opérateurs et de caméras, de la distance à accomplir, du coût et des contraintes de tournage, le responsable de la rédaction privilégie des événements prévisibles et en extérieur, souvent pour la simple raison qu’ils peuvent ainsi être filmés sans éclairage supplémentaire et en cours de déroulement. Un des objectifs du rédacteur en chef est de suivre, au plus près, la presse écrite illustrée. Assisté d’un chef monteur, il sélectionne chaque semaine une dizaine de nouvelles à partir d’une lecture de la presse écrite (pour Pathé, voir L’Héritier, 1978). Des opérateurs vont ensuite tourner des images qui les illustrent. Mais le matériel est encombrant, la pellicule peu sensible et le réglage de l’obturateur se fait à l’instinct (sans cellule photoélectrique). Les films étant muets, des « cartons » ajoutés au montage indiquent leur titre et donnent parfois quelques détails jugés indispensables à la compréhension du film.

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Dans les années 1920, Topical Budget, une entreprise de presse filmée (bihebdomadaire) anglaise de taille moyenne, étudiée de manière détaillée par McKernan, regroupait entre 30 et 40 personnes réparties en trois secteurs : éditorial, technique et commercial. L’édition était dirigée par un rédacteur en chef, assisté par un adjoint, et employait environ 6 cameramen et une quinzaine de monteuses, dirigées par un chef monteur, qui coupaient et assemblaient les images conservées pour le journal. L’enchaînement des opérations était la suivante : sélection des sujets par le rédacteur en chef, tournage, développement d’un négatif, sélection des images et rédaction des titres et intertitres, montage et transformation du film en positif (et éventuel ajout d’une couleur). Les cameramen suivaient les instructions des responsables éditoriaux, mais restaient autonomes lors du tournage ; ils perdaient toutefois la main en donnant leurs “rushes” (images tournées) aux monteurs. Les responsables de l’entreprise étaient surtout préoccupés par les aspects commerciaux : la vente de leur journal à des distributeurs soucieux du caractère divertissant des actualités.
(McKernan, 1992, pp. 82-94)

12 Dans les années 1920, le métier d’opérateur d’actualités regroupe peu d’individus et semble être relativement fermé. On y entre assistant (en général, simple porteur de matériel) par connaissance, puis on y apprend quelques techniques de tournage. Leur nombre chez Gaumont est probablement autour de cinq. Ils ne sont pas reconnus officiellement comme journalistes, mais, chez Gaumont par exemple, ils sont membres d’une entreprise réputée : les locaux aux Buttes-Chaumont, la « cité LG », regroupent toutes les activités de production dans d’immenses bâtiments servant tant la fiction que les documentaires ou les actualités. À ce titre, les opérateurs bénéficient d’un laissez-passer, individualisé et signé par la préfecture de police, mentionnant : « Reportage cinématographique. Les agents de l’Autorité et de la force publique sont invités à faciliter dans la mesure du possible la mission du porteur du présent [1]. » Ce document permet d’accéder aux lieux officiels, c’est-à-dire, le plus souvent, à leur cour intérieure ou à la zone protégée par un cordon de sécurité, et d’avoir des places réservées ou tolérées.

13 Les deux principaux opérateurs de Kahn ont eu, et ont sans doute conservé, des liens étroits avec la presse filmée. Lucien Le Saint, opérateur de Kahn entre 1918 et 1922, débute sa carrière chez Gaumont, puis redevient opérateur d’actualités en 1923 chez Pathé. Camille Sauvageot, embauché de 1919 à 1931, débute à la Section cinématographique et photographique de l’Armée où Le Saint et d’autres opérateurs d’actualités travaillent durant la Première Guerre. Lui aussi semble avoir travaillé pour la presse filmée avant cette embauche (Leclerc-Weiss, 2002). Au commencement du projet des ADPL, vers 1912, une collaboration avec Pathé, puis avec Gaumont, a été envisagée par Kahn ou Bruhnes (Perlès, 2015), notamment afin de pallier les problèmes de recrutement des opérateurs. Sans doute en raison de désaccords sur la nature des films à prévoir (par exemple, la nécessité, selon Gaumont, de dresser un programme préalable et précis de « scénarios » [2]) et sur leur mode commercial de mise en circulation, la collaboration est limitée à la formation technique des opérateurs et à l’achat de matériel.

Les films de Kahn

14 Le musée Albert Kahn est surtout connu pour son jardin de quatre hectares situé à Boulogne-Billancourt, le long des quais de la Seine. Ce « parc à scènes » et les Archives de la planète ont été créés selon des utopies communes, comme le furent les voyages d’études à l’étranger, la Société Autour du Monde ou le Comité national d’études sociales et politiques (CNESP), puis le Centre de documentation sociale, situé à l’École normale supérieure, que finançait Kahn pour défendre des coopérations cosmopolites, des idéaux pacifistes et la recherche en sciences sociales (Amad, 2001 et, plus largement, 2010). À partir de 1912, Kahn finance le recueil d’une collection d’images filmées qui formerait un nouveau type d’archives. Ce projet reflète un intérêt, largement diffusé à l’époque, pour l’inventaire (Castro, 2006), mais l’accent est mis ici sur la vie quotidienne, la nature spéciale du matériel visuel, la connaissance directe des phénomènes et le document « brut ». Peu de traces, outre ses films, permettent toutefois aujourd’hui de connaître les modalités de mise en œuvre de ce programme.

15 On trouve, dans les correspondances de Brunhes, un « programme cinématographique » élaboré par Kahn en vue d’une mission, peut-être en Égypte (lettre de Buisson à Bruhnes, 14 mai 1913). Les consignes sont sous la forme d’une liste de termes généraux invitant l’opérateur à filmer les rites, le folklore, les manifestations institutionnelles ou celles du travail, de la vie collective des hommes, des coutumes ou de la culture.

16 Les opérateurs sont dirigés par Brunhes qui est alors un spécialiste reconnu de la géographie humaine (son manuel – Brunhes, 1910 – se différencie de la géographie physique, dominante à l’époque, et sert peut-être de guide aux opérateurs). Son recrutement par Kahn, en 1912, est associé à la création et au financement d’une chaire au Collège de France. Brunhes souhaite mettre la photographie et le film au service de la description géographique : d’une observation directe de l’environnement, de l’habitat ou de scènes de la vie quotidienne (Castro, 2008). Le biologiste Jean Comandon, engagé par Kahn, réalise quant à lui des vues microscopiques qui, projetées en accéléré, offrent un autre type de description visuelle et directe de la nature.

17 Kahn ou Bruhnes veulent distinguer « ce qu’[ils] ambitionnent de constituer » des « documents […] lancés dans la grande circulation, selon les méthodes commerciales ordinaires » [3]. Cette référence négative à la presse filmée est récurrente (Amad, 2010, pp. 174-177). Les films des ADPL sont dès l’origine destinés à être archivés, mais ont parfois un usage privé : Kahn organise des projections pour ses invités, le plus souvent des personnalités influentes du monde de la politique, des sciences, de l’industrie et des arts (Hervé, 1995). Bruhnes utilise aussi certains films dans ses cours. Ces aspects distinguent nettement l’environnement et les finalités du projet de Kahn de ceux des responsables de la presse filmée. Mais tous ont une référence centrale commune : l’actualité. Il est d’ailleurs probable que les films des ADPL ont, comme ceux de Gaumont, une fonction illustrative. Une grande partie de ces films est sans doute un complément illustré aux bulletins du CNESP, que Kahn édite de 1916 à 1931 : une quinzaine de journalistes sont alors embauchés pour réaliser des revues de presse thématiques (Beausoleil, 2002 ; Le Bris, 2002 ; Benoist, 2002 ; Perlès, 2015) [4].

18 Albert Kahn, comme Louis Gaumont, est réputé pour l’attention qu’il porte à la gestion de son entreprise. Sa production filmique relève d’un budget (d’achat de films ou de main-d’œuvre) relativement stable et est soumise à un contrôle plutôt strict (la pellicule est chère), comme le laissent penser la tenue et le contenu des livres de comptes : le volume annuel de négatif consommé par chacun des deux principaux opérateurs, au cours de leurs années de service, est d’ailleurs similaire.

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La production des films de Kahn repose, chaque année, sur le travail de deux ou trois opérateurs qui reçoivent du film négatif, tournent et remettent leur film. Le film négatif est une matière première régulièrement achetée (d’abord à Kodak, puis à Agfa, principal fournisseur à la fin des années 1920). Un livre de comptes global est tenu avec ses « entré » (acheté) et « sorti » (remis à un opérateur), renseigné entre 1918 et 1931. Un livre de comptes individuel est aussi consultable pour les deux principaux opérateurs (Le Saint et Sauvageot). Ces livres servaient avant tout à connaître le stock disponible (ou dû) à un moment de l’année. Entre août 1918 et décembre 1929, environ 200 000 m de pellicule ont été achetés et remis aux opérateurs, soit un peu plus de 123 h de film négatif (27 m de film 35 mm correspondent à 1’). En moyenne, près de 11 h de film négatif sont remis annuellement à l’ensemble des opérateurs. Le Saint, entre 1918 et 1922, et Sauvageot, de 1919 à 1931, ont une consommation moyenne annuelle semblable (environ 12 500 m), soit près de 8 h par année.

20 Les opérateurs ne subissent pas les contraintes de la distribution hebdomadaire et remettent leurs films de manière irrégulière. Mais, le plus souvent, 2 à 4 jours espacent ces remises. La longueur des sujets remis est aussi variable. Deux constats peuvent toutefois être tirés de cette comptabilité. Le Saint comme Sauvageot ont, sur leur période d’embauche, une production mensuelle fréquente de 1 200 m (45’). En 1919 et 1920, deux années de pic de production, Le Saint remet chaque mois environ 25 sujets dont le métrage moyen est entre 50 m et 60 m (près de 2’) et, avec Sauvageot, ils demandent chacun environ 300 développements par an [5]. Ce rendement record de négatifs tournés (environ 1 400 m de rushes par mois) est voisin de celui de l’opérateur de Topical Budget pour lequel une estimation est réalisable (à partir de McKernan, 1992, pp. 158-167). Quelques années plus tard, le nombre mensuel de sujets de Sauvageot baisse, mais le métrage moyen augmente. En somme, si la production de Kahn est moins soutenue et régulière que celle d’un journal cinématographique, le rapport entre le métrage annuel moyen consommé (11 h) par ces deux opérateurs n’est sans doute pas très éloigné de celui caractérisant la presse filmée de l’époque.

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Luke McKernan présente à la fin de son ouvrage une comptabilité partielle des sujets tournés par un même opérateur (Frederick Ling Wilson) entre 17 mai 1920 et 12 mars 1923. Celui-ci produit entre 10 et 20 sujets par mois et environ 165 par an. Le métrage moyen de négatif tourné pour un sujet simple varie de 91 m à 211 m, avec une moyenne, sur l’ensemble des données, de 138 m (5’), soit environ 1 700 m par mois. Un calcul du rapport monté/tourné sur les 73 sujets qui étaient réalisés à partir des seules images de l’opérateur, et dont les métrages étaient renseignés, donne une moyenne de 0,25 ; autrement dit, en moyenne, un quart des images tournées étaient conservées pour le montage du sujet, ce rapport ou des rapports proches étant les plus fréquents.

Comparaisons globales des deux corpus

22 L’étude comparative porte sur l’année 1925 [6]. Les films constituant le premier corpus, et qui servent ici de point de comparaison, sont les 542 sujets d’actualités distribués durant cette année par Gaumont ; l’ensemble dure près de 9 h [7]. Le corpus Kahn a été, quant à lui, construit à partir des films archivés, épurés des doublons et corroborés par les sources comptables disponibles ; l’erreur dans l’identification des tournages de l’année est sans doute de moins de 10 % (voir Siracusa, 2016). Il contient 160 films : 127 sont des productions internes ; 31 ont été achetés à la presse filmée, dont 18 à Gaumont (visibles dans le corpus Gaumont) ; un film est une fiction, un autre d’origine inconnue. L’étude se focalise sur les 127 films (6 h) produits par Kahn (dont 28 montés), les deux tiers (82) étant l’œuvre de Sauvageot (37 de Georges Thibaud, 3 de Roger Dumas et 5 non attribués).

23 Malgré l’attitude critique de Kahn à l’égard des actualités, de nombreux films des deux corpus ont des caractéristiques similaires : les différences sont comme des écarts marginaux à la norme commerciale de l’époque. Par exemple, la durée des films de Gaumont est courte et standardisée : en moyenne 1’ (7/10 des sujets durent entre 30’’ et 1’15’’). Seule une petite vingtaine de sujets (4 %) durent plus de 2’. Beaucoup de sujets de Kahn sont, eux aussi, courts : une moitié dure moins de 1’, ¾ moins de 3’. Sachant qu’une bobine de rushes de 100 m, réduite des ¾ au montage, correspond à un sujet d’environ 1’, et que la plupart des films de Kahn ne sont pas ainsi réduits, les durées très différentes de celles de Gaumont concernent surtout une trentaine de longs films (supérieurs à 4’) réalisés cette année-là dans le cadre de missions à l’étranger.

24 La distribution des lieux de tournage suit une logique voisine : Paris est la norme commune dont Kahn s’écarte marginalement et distinctement. Pour des raisons pratiques évidentes, les tournages de Gaumont en des lieux éloignés de l’entreprise sont coûteux, donc rares et compensés par des achats à d’autres entreprises. Près de la moitié des sujets sont tournés à Paris ou aux abords de la capitale. La distribution géographique, d’autant moins fréquente que le pays est plus éloigné, est concentrée sur la France, puis l’Europe (Angleterre et Allemagne) et les États-Unis. Pour les ADPL, plus de la moitié des films sont tournés à Paris (ou sa région) et les deux tiers sont tournés en France, c’est-à-dire plus encore que chez Gaumont. Les films en province sont à peine plus nombreux que ceux tournés en Europe (Allemagne, Suisse), mais deux fois moins nombreux que les longs sujets tournés hors de l’Europe (Palestine et Égypte) par Sauvageot ; ce qui constitue une différence, certes marginale, mais notable, avec Gaumont. Enfin, plus de la moitié des sujets achetés à la presse filmée concernent des pays non « traités » par Kahn (Angleterre, États-Unis, Italie).

Le centrage des sujets et le découpage des plans

25 Un sujet traite d’objets de diverses natures, mais étant court et devant aborder un thème particulier, il est centré sur certains objets plutôt que d’autres. Dans les films de Kahn, les images d’une foule d’individus sont trois fois plus présentes que chez Gaumont, ce qui témoigne du plus grand intérêt pour la dimension anonyme et collective des phénomènes, notamment lors de la description de manifestations (politiques ou syndicales). Chez Gaumont, davantage de sujets portent sur un personnage particulier, un animal ou un objet technologique (aucun des sujets produits par Kahn ne porte sur un objet physique particulier et, outre ses chiens, aucun animal n’est au cœur d’un film). Dans les ADPL, un lieu peut être l’objet central, alors que chez Gaumont il est avant tout l’endroit où quelque chose de spectaculaire ou d’intéressant s’est déroulé (incendie, accident, construction, etc.) ; il est le contexte et non l’objet.

26 Quelle que soit la longueur du sujet, les films des ADPL ont des plans plus longs et plus mobiles que ceux des films de Gaumont. Ces derniers ont en moyenne 8 plans différents, dont deux plans en caméra mobile (panoramique, plongée, contre-plongée, parfois travelling lorsque l’opérateur est embarqué). Un sujet standard (représentant les deux tiers des films) possède entre 3 et 11 plans, dont 1 à 3 sont pris avec un mouvement de caméra. Un tiers des sujets n’ont toutefois aucun plan mobile. L’usage de la caméra mobile chez Gaumont concerne plus souvent le sport, les manifestations, les spectacles ou les fêtes : l’opérateur suit des individus en action ; ou bien il concerne les catastrophes naturelles ou les incendies pour lesquels l’opérateur, situé dans la zone en question, décrit par ses mouvements de caméra les lieux autour de lui. En revanche, la description d’un objet technologique, d’une exposition, d’une construction immobilière ou d’un phénomène de foire sont moins l’objet de plans mobiles. L’opérateur est comme éloigné, hors de la situation qu’il tourne : il ne décrit pas un environnement, mais un objet ou un spectacle d’un point de vue fixe ou, dit autrement, il décrit une scène organisée pour être vue à partir d’un point fixe et extérieur.

27 Les cérémonies officielles sont d’ailleurs décrites par peu de plans mobiles, chez Kahn comme chez Gaumont. Souvent les seuls plans de ce genre ont pour objet l’arrivée et le départ (en automobile) des personnages officiels. En revanche, de nombreux plans sont fixes parce que les représentants officiels prennent la pose ou passent par un même lieu (parvis, entrée, porte, portière de voiture) qui sera filmé par d’autres opérateurs qui ont aussi posé leur caméra à l’endroit autorisé à la presse et tournent une sorte de spectacle ritualisé, là encore préparé pour être vu à partir d’un point fixe.

28 Le rapport du nombre de plans mobiles sur le nombre de plans est un indicateur de la manière de tourner. Il est, en moyenne, de 30 % chez Kahn contre 20 % chez Gaumont. On peut affiner les comparaisons à partir de ce critère. Chez Gaumont, ce rapport est le plus haut pour des sujets décrivant des manifestations collectives : l’opérateur, au bord de la route, suit le passage d’un cortège, par exemple : il s’agit moins de contextualisation ou d’immersion que de la prise de vue d’un spectacle organisé en mouvement. Ou bien il décrit une foule avec quelques panoramiques ou suit un personnage principal (sortant d’un véhicule, entrant dans un bâtiment, etc.). C’est dans les sujets consacrés au football que les opérateurs de Gaumont sont les plus « immergés » : c’est d’ailleurs le seul type de sujets pour lequel de multiples actions (de jeu) sont suivies en caméra mobile. Pour les ADPL, la description d’une foule entraîne un rapport plus haut, comme le tournage de scènes au milieu desquelles se trouve l’opérateur (qui filme les personnes autour de lui et non seulement celles prenant la pose devant lui). Mais il est au plus haut surtout lorsqu’il s’agit d’organiser des prises de vue de scènes inanimées (les descriptions de lieux). La scène tournée est comme mise en mouvement, voire organisée, par l’action de l’opérateur, sa « méthode », consistant par exemple à décrire des lieux en entrant progressivement vers le cœur des villes. Ces descriptions de type géographique sont ici le pendant des très populaires comptes rendus de matches de football pour les actualités. Le mouvement créé par l’opérateur de Kahn, venant compenser l’absence de point de vue fixe et convenu sur un spectacle organisé, est sans doute un autre signe d’une démarcation vis-à-vis de ce qui constituait le savoir-faire « commercial » de l’époque.

Classer le contenu des sujets

29 Classer les sujets dans des catégories de contenu est une tâche relativement arbitraire. Elle a été élaborée, dans un premier temps, pour décrire la diversité des sujets de Gaumont (pour des détails, Siracusa, 2016). Quels que soient les critères utilisés, un constat peut sembler étonnant, compte tenu de la réputation de frivolité des actualités cinématographiques : presque un tiers des sujets de Gaumont portent sur des cérémonies officielles et non festives : inaugurations, visites officielles, nominations, enterrement d’un responsable politique, etc., c’est-à-dire des événements durant lesquels des représentants de l’État se rendent en un lieu donné, prononcent un discours public ou sortent d’un bâtiment où se sont tenues des discussions, alors même que le contenu de ces discours n’est ni audible ni résumé dans un carton, seul l’objet de la cérémonie est présenté dans le carton. Les sujets « divertissants » (sport, fête, spectacle, phénomène de foire, « people ») représentent aussi environ un tiers des sujets (35 %), un peu plus si on ajoute quelques inventions technologiques pouvant faire sourire (aujourd’hui comme hier). Autrement dit, plus d’un sujet sur deux est « sérieux » ou, au moins, sans appel à l’ironie ou au sourire.

30 Les critères employés pour classer les films de Gaumont ont été appliqués à ceux des ADPL. Il a toutefois fallu ajouter deux catégories plus ajustées aux films de Kahn : « cérémonie ordinaire » et « description de lieu ». Cet ajout permet de reclasser sept sujets (« autres ») de Gaumont. Par ailleurs, la catégorie « people » est désormais hétérogène : elle ne regroupe plus exclusivement les célébrités populaires prisées de Gaumont, mais aussi des membres de l’élite proches de Kahn (voir le tableau 1 en annexe).

31 « Cérémonie officielle » est, comme chez Gaumont, la catégorie de sujets la plus fréquente : près de la moitié des sujets archivés des ADPL sont de ce genre, une part qui est toutefois nettement plus grande que celle chez Gaumont. Les sujets achetés sont aussi, pour près de la moitié, du genre « cérémonie officielle » : l’intérêt que semblait manifester Kahn pour les actualités se portait avant tout sur ce qu’elles avaient en commun avec ses propres productions : une place centrale accordée aux événements officiels. Une autre ressemblance, moins flagrante, est la présence, non négligeable, de sujets portant sur les nouvelles technologies, la construction immobilière (dans Paris) ou des manifestations festives. Ces sujets sont toutefois davantage présents chez Gaumont.

32 En revanche, des différences sont évidentes. Des sujets typiques de la presse filmée sont quasiment absents des ADPL : « sport » et « phénomènes de foire » (des sujets ouvertement divertissants) ou les accidents, incendies, catastrophes naturelles, expositions, « bonnes œuvres », annonces de décès et « spectacles ». À l’inverse, certains genres sont centraux pour les ADPL et quasi exclusifs. La catégorie « description de lieu » est particulièrement fréquente (un cinquième des sujets archivés et un tiers de ceux montés) et quasi absente chez Gaumont. Les films concernés sont, d’un côté, une vingtaine de longs sujets, tournés souvent au Moyen-Orient, présentant des similitudes de construction qu’on retrouve ailleurs dans les ADPL (Castro, 2008). La dimension géographique, impulsée par Bruhnes, trouve probablement ici son expression. De l’autre, de courts films tournés à Paris décrivent, de manière répétée, des flux de véhicules ou d’individus anonymes sur une voie de grand passage. La dimension ethnologique des ADPL se manifeste davantage ici et rapproche ces films de la catégorie « cérémonie ordinaire ». Aucun rédacteur en chef des actualités n’aurait commandé de tels sujets consistant à poser sa caméra dans une rue bien connue de Paris, alors que rien de spectaculaire ne s’y déroulait ; ou encore, à filmer le mariage d’un couple d’anonymes à Saint-Mandé (classé en « cérémonie ordinaire »).

33 Si on regroupe « cérémonie officielle », « description de lieu » et « manifestation » (d’ordre politique en France), on obtient trois quarts des sujets produits par Kahn et près de 9 dixièmes des montages (archivés), ce qui est un signe supplémentaire de l’importance accordée à ces sujets. Enfin, un nouveau genre qui regrouperait grèves et manifestations en France ou congrès syndical, politique et religieux aurait proportionnellement dix fois plus d’éléments chez Kahn que chez Gaumont.

34 On aboutit ainsi à un ensemble de genres centraux, typiques et quasi exclusifs : ceux en gras dans le tableau 2 (en annexe). À l’inverse, parmi les 27 sujets « inaugurations, visites officielles, enterrements… », tournés en France par les opérateurs de Kahn, 17 ont un homologue chez Gaumont. Cet ensemble couvrant les événements officiels les moins partisans ou conflictuels serait celui qui rapproche le plus les ADPL de ce que produisait Gaumont au même moment.

35 Il ne s’agissait pas ici de décrire l’actualité de l’année 1925, mais de comparer un traitement, relativement standardisé, à un autre descriptible en référence au premier. Lorsqu’on ne compare que des traits formels (durée, nombre de plans, plan mobile/fixe, voire le lieu), les critères employés pour la catégorisation comme leur mise en œuvre sont peu problématiques (bien qu’un « plan mobile » soit parfois difficile à distinguer d’un cadre qui bouge involontairement). C’est surtout lorsque ces critères reposent sur les événements rendus visibles que la catégorisation est problématique.

36 Pour la catégorie « cérémonie officielle », par exemple, il est très probable que l’objectif de l’opérateur de Gaumont ait été précisément de rendre cette identification aisée. Deux types de standards gouvernent la construction du film : celui régissant les événements publics organisés par les institutions de l’État et celui régissant les manières de travailler des opérateurs. Programmer publiquement ces événements et accorder un accès à ceux-ci permet un recueil sous contrôle, mais confortable et stéréotypé. Un spectateur habitué à ce genre de cérémonie, et guidé par le carton du sujet, peut juger non problématiques les ellipses ou les enchaînements : il comprend une part de ce qui reste implicite (par exemple, deux plans qui se suivent traitent souvent du même événement à deux moments qui se suivent ; ou bien l’opérateur ne présente qu’un résumé des moments forts, publiquement visibles, etc.). L’événement est rendu visible, sous ses aspects les plus reconnaissables, à la fois par les organisateurs de l’événement et par les opérateurs. Une sorte de « transparence » du document est le produit de cette coproduction.

37

Pour l’analyste, cette « transparence » du compte rendu cinématographique facilite la catégorisation du contenu : un enterrement d’un haut responsable est tourné comme l’est l’enterrement d’un autre haut responsable et est donc classé sans difficulté. De manière analogue, une course cycliste ou à pied, un match de football ou un spectacle de cirque sont organisés de manière stable et tournés selon les termes de cette organisation : à partir des abords réservés, centrés sur les personnages et les actions principaux, sans allusion aux coulisses ou à tout phénomène perturbateur.

38 Les cérémonies publiques et officielles sont, en quelque sorte, l’archétype de l’événement dont un court film muet peut aisément rendre compte selon quelques conventions largement partagées. Les difficultés de catégorisation apparaissent ailleurs : par exemple, lorsque, habitués à tourner ces cérémonies, les opérateurs plaquent leurs mises en forme stéréotypées, adaptées à l’archétype, sur des événements qui en diffèrent ; ou, si en plus d’images convenues de l’événement officiel, apparaissent des images d’un phénomène en marge de cet événement (vues du quartier, du service d’ordre, de personnes anonymes, d’une bagarre, etc.). On est alors conduit à questionner la nature de l’événement central ou bien l’élaboration du sujet, et à raisonner en termes d’écart au standard de représentation ou bien d’intention du réalisateur (ligne éditoriale, choix de méthode, etc.). De nouvelles catégories de contenu sont plus pertinentes pour décrire les ADPL parce que les phénomènes visibles sont plus ordinaires, chaotiques, partisans ou échappent au contrôle des forces de l’ordre (en retour, elles permettent de reclasser quelques sujets marginaux de Gaumont). L’étude de cas précise ces écarts à la norme « commerciale ».

Comparaison de traitements d’événements similaires

39 De nombreux sujets produits par les ADPL, en 1925, sont semblables à ceux que produisait simultanément Gaumont : présents sur le même lieu, les opérateurs se filmaient parfois l’un l’autre. 23 sujets sont de ce type, dont 17 au sein du genre « cérémonie officielle ». Certains sujets produits par Kahn sont même quasiment identiques à leur homologue de chez Gaumont. Les opérateurs se trouvent au même endroit, au même moment, et prennent des images des mêmes scènes. Certains films courts de Kahn, réduits de quelques plans, entreraient dans les standards de la presse filmée. Ces sujets portent sur des événements parisiens et ritualisés dont nombre de photographes et cameramen rendent compte. Leur visionnage en parallèle permet d’imaginer la position respective de chaque opérateur. Parfois, seule une légère différence d’angle (due à un léger écart de position du trépied) distingue ces images.

40 On retrouve toutefois, dans chaque cas, les principales différences évoquées plus haut. Les sujets et les plans de Gaumont sont plus courts et les plans en mouvement plus rares ; les films ont un caractère synthétique et schématique ; les vues sont quasiment toutes réduites à celles des personnages les plus prestigieux ; et la situation ritualisée est résumée à ses moments forts (début/fin, entrée/sortie, etc., les plans d’entrée/sortie de voiture sont légion). Les images sont « nettoyées » des éléments annexes. À l’inverse, on trouve davantage ces éléments dans les sujets de Kahn : panoramiques montrant les alentours, le service d’ordre, la foule et parfois les autres opérateurs présents.

41 Quelquefois ce ne sont que des difficultés d’accès qui semblent à l’origine de ces différences. Par exemple, lors de l’enterrement de Léon Bourgeois, l’opérateur de Kahn est sans doute arrivé trop tard pour filmer l’entrée des personnages prestigieux. Ses images du parvis pendant la messe sont peut-être une sorte de compensation. Ou encore, lorsque le nonce apostolique est reçu à l’Élysée, en décembre, l’opérateur de Gaumont est dans la cour et tourne des images des personnalités arrivant et sortant de leur voiture. Sauvageot est présent au même moment, mais semble ne pas avoir obtenu l’autorisation d’entrer dans cette cour. Il filme, par conséquent, les mêmes événements depuis la rue. On entrevoit d’ailleurs, sur les images de Sauvageot (à 30’’), l’opérateur de Gaumont.

42 D’autres sujets de Kahn affichent une volonté plus nette de montrer les à-côtés. Une cérémonie peut être considérée comme plus ou moins organisée et ouverte, engageant une variété plus ou moins grande de participants. Lorsqu’il s’agit de manifestations, par exemple, l’opérateur de Gaumont, habitué à faire entrer les cérémonies dans une mise en forme convenue, est enclin à rendre la manifestation plus standard qu’elle ne l’est en réalité. L’unité de temps et de lieu est parfois artificiellement créée. Par exemple, une manifestation d’étudiants au Quartier Latin est réduite par Gaumont à un cortège relativement organisé paradant dans une rue du quartier. La manière standardisée de filmer, ou de monter, l’événement consiste à le refermer, pourrait-on dire, sur ses aspects les plus convenus et prévisibles. L’opérateur de Kahn montre, au contraire, de nombreux étudiants déambulant dans les rues, révélant ainsi l’hétérogénéité des événements ou des comportements des participants ou la banalité des scènes accompagnant la cérémonie centrale. Par ailleurs, sur ces images de manifestants ou de passants, on voit fréquemment, et de manière distincte, leur visage, leurs vêtements, leurs mouvements et la réaction de ceux qui posent, se recoiffent, sourient, interpellent leur voisin, se moquent de l’opérateur (en mimant le mouvement de manivelle), etc. Les opérateurs de Gaumont tournaient peut-être moins de scènes de ce genre (« à jeter à la poubelle », Amad soulignait déjà ce point, Amad, 2002) ; quoi qu’il en soit, ces scènes sont absentes des actualités montées.

43 La présentation, certes brève chez Kahn, mais toujours absente chez Gaumont, de l’offre politique (affiche ou tract) est une autre distinction notable. Cette attention à la diversité des opinions, politiques ou religieuses, contraste avec la méthode « commerciale » de la presse filmée dont le choix comme la mise en forme des sujets sont consensuels et unificateurs.

44

Un sujet est symptomatique : les élections municipales à Paris, en mai. Dans le sujet de Gaumont (de 55’’, indiquant qu’une « foule d’électeurs » s’est déplacée), on voit des files d’électeurs se rendant aux urnes, des passants regardant les panneaux électoraux, puis le président Doumergue marchant pour se rendre au bureau de vote, et en sortant. Le sujet de Thibaud (45’’) débute par un plan très similaire à celui de Gaumont, mais montre des personnes entrant et sortant du bâtiment où a lieu le vote, puis des gros plans d’affiches politiques, et de nouveau des entrées/sorties du bureau de vote. Ici, pas de personnage officiel, symbole de l’unité nationale, mais une sorte de description du vote ordinaire et un aperçu de l’offre politique.

45 De manière générale, la présence d’un haut représentant de l’État semble un critère déterminant dans le choix et le centrage des sujets de Gaumont. Même lorsque l’événement ou la situation se prête aisément à une mise en images, ce n’est souvent que la visite d’un officiel qui en justifie le tournage. L’exposition internationale des arts décoratifs est, de ce point de vue, exemplaire. Gaumont y consacre, durant cette année 1925, 22 sujets : c’est le principal thème de l’année. Kahn n’en produit que 3. Alors qu’aucun officiel n’est au centre des sujets de Kahn, c’est le cas pour plus des trois quarts des films de Gaumont (provoqués par l’inauguration d’un pavillon ou une visite d’un représentant étranger). Un sujet qui aurait pu prendre la forme d’une présentation des œuvres a le plus souvent la forme d’un reportage centré sur la présence d’un groupe d’officiels.

46 Dans les sujets de Gaumont, les personnages centraux, ceux dont on voit le visage ou qui se retrouvent « plein cadre », sont des hauts représentants de l’État ou de l’aristocratie, des champions sportifs ou des artistes de music-hall. Une autre catégorie d’individus bénéficie d’un traitement analogue dans les ADPL : des conférenciers, diplomates, experts ou représentants de divers groupes. Kahn connaissait sans doute personnellement certains d’entre eux ; peut-être demandait-il à ses opérateurs d’y être attentifs. Ces responsables, qui restent le plus souvent « anonymes » (non l’objet d’un « plan américain ») dans les sujets de Gaumont, ont ici un visage et des manières de se comporter. Si un objectif de ces films était d’incarner, voire de personnifier, certaines institutions, alors ceux de Kahn incarnaient, davantage que ne le faisait Gaumont, des corps intermédiaires (notamment des partis, syndicats, congrégations religieuses ou maçonniques).

47 C’est à propos d’événements ne relevant pas, au sens employé ici, des cérémonies officielles qu’on repère le plus nettement la familiarité de Kahn avec l’élite de son temps, et le traitement spécial accordé à ses représentants. Certains sujets adoptent un point de vue original, presque inversé par rapport à celui adopté par Gaumont : des événements, comme la chasse à courre, qui, par le traitement des actualités, prennent l’apparence d’une cérémonie ou d’une lointaine tradition, dont on est distant et spectateur, sont présentées par Kahn sous l’angle de moments presque ordinaires ou intimes.

48

Par exemple, Gaumont consacre 5 sujets à la chasse à courre, dont 4 en France. Un sujet (1’03’’) traite de la chasse à courre de la duchesse d’Uzès, à Rambouillet (le lundi de Pâques). On y voit des plans du départ de l’équipage, puis de la sortie du domaine, les images étant centrées sur la duchesse. Le sujet est tourné comme le serait une cérémonie engageant des personnages officiels. Thibaud tourne un sujet (2’36’’) consacré à la chasse de la même duchesse lors de la visite du Prince et de la Princesse Azaka, amis de Kahn. On y voit les personnages principaux en forêt, à cheval ou en calèche, des moments de repos à pieds, la duchesse se mouchant, souriant, puis une scène de chasse : les chiens dévorant un cerf (probablement). Les images de Thibaud témoignent d’une proximité et d’une intimité absentes chez Gaumont.

49 Ce point de vue spécial est aussi notable pour des sujets dont on trouve des homologues inversés dans les actualités. Gaumont traite, par exemple, des « Reines de beauté ». Kahn ne traite pas de ces reines-là, mais Sauvageot tourne un sujet sur le « Concours d’Amazones », jeunes femmes de la haute société paradant à cheval dans le Bois de Boulogne. Le sujet de Gaumont ne montre que l’arrivée des compétitrices (en voiture) puis la gagnante. Il est tourné comme le serait l’arrivée d’un cortège officiel protégé de la foule par un cordon de sécurité. Le film de Kahn montre, au contraire, un défilé, des élégantes, leur monture, des juges évaluant les candidates ; Sauvageot est proche de ces amazones et positionné au milieu des scènes qu’il tourne. C’est un sujet beaucoup plus descriptif du concours que ne l’est celui de Gaumont. Les codes vestimentaires et l’environnement sont certes diamétralement opposés. Mais, si le cérémoniel comme son tournage standard par Gaumont ont pour effet de mettre à distance ces jeunes reines du peuple, le film de Sauvageot produit, par certains aspects, l’effet contraire pour les amazones : un sentiment de proximité avec cet événement mondain.

50 Les sujets les plus symptomatiques de ce point de vue original sont ceux de la catégorie « people ». On y retrouve, rassemblés, les aspects évoqués ci-dessus : des membres de l’élite invités par Kahn à Boulogne ou Cap Martin (évêques, couple Rothschild, ambassadeur du Japon, son fils, des savants étrangers), un point de vue informel sur ces élites, et un thème dont on trouve l’homologue inversé chez Gaumont : les célébrités invitant les journalistes dans leur intimité (Mistinguett pendant sa crémaillère, le couple royal britannique en voyage en France ou reçu à Taormina par le duc de Nelson ou Mussolini en vacances sur le lac de Piana dei Greci). L’intimité des invités de Kahn contraste avec les sujets de Gaumont où le spectacle de l’intimité est orchestré par ces célébrités pour être, plus ou moins stratégiquement, offert au public par le biais des journalistes.

Conclusion

51 Gaumont Actualités, par sa taille, ses contraintes de distribution comme ses objectifs commerciaux, était différent de l’entreprise désintéressée et élitiste de Kahn. Mais le métier des cameramen les rapprochait : la presse filmée était une référence naturelle pour les opérateurs mettant en images l’actualité. De nombreux sujets de Kahn étaient semblables à ceux de Gaumont : notamment les films traitant d’événements officiels pour lesquels une scénographie est instituée et contrôlée. Mais d’autres sujets s’en démarquaient : par leur lieu, leur durée, un centrage plus fréquent sur des personnages anonymes ou des représentants de corps intermédiaires, un intérêt pour le contexte géographique ou les à-côtés des cérémonies, une proximité ou une immersion plus grande, davantage de mouvements de caméra ou une présentation des élites moins distante et convenue.

52 Les intentions de Kahn, quoique difficiles à identifier, reposaient sans doute, au moins en partie, sur une critique des conventions de la presse filmée. Pour un caméraman formé aux actualités à qui Kahn demandait de ne pas suivre ces « méthodes commerciales », les distinctions soulevées ici signifiaient peut-être simplement : effectuer de petits écarts aux pratiques standard de l’époque. Les missions au Moyen-Orient ou les longues descriptions de lieux relevaient presque, quant à elles, d’un autre genre, celui du documentaire, de l’immersion ethnographique ou géographique ; et on y trouve, concentrée, l’expression de tous ces écarts.

53 La presse filmée, par son choix de personnages populaires, consensuels et unificateurs, comme par son attirance pour les spectacles organisés ou son inclination à aligner ses mises en forme sur celles typiques des cérémonies officielles, pouvait difficilement rendre compte de scènes banales de la vie quotidienne ou, à l’inverse, de manifestations, parfois controversées ou chaotiques, contre l’ordre établi. Par exemple, un sujet consacré à la manifestation du parti communiste contre la guerre du Maroc était probablement inconcevable pour un rédacteur en chef de Gaumont ; comme sans doute tous les sujets portant sur un événement conduit par un parti, un syndicat ou une congrégation religieuse. Dans ces cas, c’est l’absence de tels sujets dans la presse filmée qui indique la démarcation des ADPL.

54 La comparaison utilisée dans cette étude, raisonnable au regard du contexte de l’époque, conduit toutefois à des conclusions qui sont en partie le reflet de la méthode de description : l’importance accordée à la presse filmée dans la définition du contenu des ADPL est nécessairement accentuée dans cette approche. L’objectif initial était d’inciter le visiteur du musée Albert Kahn à se référer aux actualités cinématographiques, comme le faisaient les contemporains de Kahn. La référence naturelle et implicite pour un lecteur du présent article sera sans doute le journalisme télévisé. Qu’il fasse alors abstraction des « sonores » et du commentaire des reportages télévisés et qu’il se focalise sur leurs images « muettes », il verra de nombreuses ressemblances tant avec la norme « commerciale » de l’époque qu’avec les efforts de Kahn pour s’en écarter.

Annexes
Tableau 1

Comparaison des sujets de Gaumont et des ADPL (+ films achetés aux actualités) selon leur catégorie de contenu pour l’année 1925 *

Effectif
Gaumont
% Effectif
ADPL
%
Cérémonie officielle 157 29 % 55 (+14) 43 %
Sport 92 17 % 0 (+1)
Technologies (science, invention) 69 13 % 4 (+4) 3 %
Fête 43 8 % 6 (+2) 5 %
Phénomène de foire 29 5 % 0
Construction (immobilière) 19 3 % 5 4 %
Catastrophe (naturelle, climatique) 16 3 % 0 (+1)
Spectacle (représentation) 16 3 % 0 (+1)
« People » (célébrités) 12 2 % 12 (+3) 9 %
Manifestation 11 2 % 9 (+1) 7 %
Exposition 11 2 % 1 1 %
Accident de transport 11 2 % 0 (+1)
Incendie 11 2 % 0 (+1)
Guerre du RIF 9 2 % 1 (+1) 1 %
Bonnes œuvres 8 1 % 0
Police 5 1 % 0
Description de lieu 5 1 % 29 23 %
Annonce de décès 4 1 % 0
Cérémonie ordinaire 2 5 4 %
Autre 11 3 % 0 (+1)*
Non-réponse 1 0
Total 542 100 % 127 (+31) 100 %

Comparaison des sujets de Gaumont et des ADPL (+ films achetés aux actualités) selon leur catégorie de contenu pour l’année 1925 *

*. Il s’agit d’un film consacré à l’éclipse de soleil aux États-Unis.
Source : auteur.
Tableau 2

Les sujets produits par Kahn en 1925 (en gras, sujets quasiment absents chez Gaumont)

Effectif
Description de lieu 29
Inauguration, visite officielle, Enterrement commémoration, etc., en France 27
Congrès et manifestations politico-religieux en France 14
« People » : célébrités invitées par Kahn 12
Visite Lord Balfour en Palestine 10
Conférence internationale 8
Fête 6
Évacuation de la Ruhr 5
Construction (immobilière) 5
Cérémonie ordinaire 5
Technologies (sciences, invention) 4
Exposition 1
Guerre du RIF 1
Total 127

Les sujets produits par Kahn en 1925 (en gras, sujets quasiment absents chez Gaumont)

Source : auteur.

Notes

  • [1]
    Le laissez-passer de Pierre Levent, ancien opérateur de Gaumont, est visible dans le documentaire Sur l’air de Sambre et Meuse, réalisé par Jocelyne Leclerc-Weiss en 1985 (archives du musée Albert Kahn).
  • [2]
    Correspondances de Bruhnes, lettre de mai 1912.
  • [3]
    Correspondances Bruhnes, lettre de Bruhnes à Kahn du 12 avril 1912.
  • [4]
    Voir aussi le film d’Helena Lemanska, Le XVe bulletin, contextualisant les films de 1920 à partir des bulletins.
  • [5]
    Source : répertoire des fiches de développement.
  • [6]
    Le choix de l’année est quelque peu arbitraire, mais devait respecter certaines contraintes : se situer avant le début des films sonores, introduits en 1927, et après les années 1920-1923 étudiées par d’autres chercheurs du comité scientifique. En termes de volume de production, l’année est « normale » pour Gaumont comme les ADPL.
  • [7]
    La source consultée est accessible, sur autorisation, à cette adresse : http://www.gaumontpathearchives.com. Les actualités de Gaumont, archivées de manière quasi exhaustive, sont nettement mieux conservées que celles des autres entreprises de l’époque.
Français

Cette étude compare deux ensembles de courts films muets d’actualités réalisés durant l’année 1925 et issus de contextes de production différents. Ceux de Gaumont Actualités, journal créé par Louis Gaumont en 1910, sont le résultat d’une activité concurrentielle et commerciale, relativement standardisée, visant le public populaire du cinématographe. La collection privée, Les Archives de la planète, financée par le banquier Albert Kahn entre 1912 et 1931, est, quant à elle, constituée à des fins de connaissance et, dès l’origine, destinée à être archivée. L’analyse repose sur l’étude d’environ 700 films et de quelques archives comptables. Elle décrit les inévitables ressemblances entre les deux corpus, mais aussi ce qui constituait des écarts aux méthodes commerciales standards de l’époque.

Mots-clés

  • médias
  • actualités cinématographiques
  • presse filmée
  • Albert Kahn
  • Gaumont
  • reportage
  • caméraman
  • sociologie du travail

Références

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Jacques Siracusa
Université Paris 8 – CRESPPA-GTM
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Mis en ligne sur Cairn.info le 25/05/2018
https://doi.org/10.3917/res.208.0259
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