CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1La place de l’enfant dans la famille et dans la société et les rapports des parents aux enfants voient leur importance croître régulièrement dans les discours sociaux depuis l’entrée des pays occidentaux dans la seconde modernité. Elle est pointée par des auteurs comme François de Singly, Anthony Giddens ou Ulrich Beck [1] comme advenant à partir de la fin des années 1960 et se traduit par une mutation profonde des rapports sociaux dans la sphère privée, dans le sens d’une « détraditionnalisation ». Cette mutation, que certains n’ont pas hésité à désigner sous le terme de révolution anthropologique [2] ou culturelle [3], en même temps qu’elle illustrait le passage du modèle familial de la femme au foyer à celui du couple à double carrière, donnait aux enfants une importance nouvelle, que la Convention internationale des droits de l’enfant de 1989 allait institutionnaliser, en insistant sur les facteurs conditionnant son bien-être.

2Dans ce contexte de renouvellement des rapports entre les sexes et entre les générations, la notion de parentalité quittait le cercle restreint des spécialistes des sciences humaines et sociales pour être investie par les médias, puis dans la foulée par les politiques, pour insister sur la centralité éducative du lien parents-enfants [4], à une époque où il était désormais reconnu que « le bébé est une personne [5]», selon la leçon que tirait Bernard Martino de l’œuvre de Françoise Dolto.

3En complément de l’émancipation des femmes et de l’affirmation des individus caractérisant cette mutation, la fragilisation du lien conjugal et l’importance accordée à une fonction éducative des parents paraissant menacée favorisèrent l’émergence de multiples innovations associatives destinées à « préserver le lien parental [6]» ainsi qu’à élaborer une coéducation [7] et une cosocialisation [8] plus harmonieuses à l’égard de ceux considérés comme l’avenir de l’espèce humaine.

Les réponses associatives et juridiques aux mutations familiales

4La société civile sensible aux profondes transformations de la société mises en œuvre dans les années 1970 et au-delà, fut alors le cadre d’un foisonnement d’innovations qui se développèrent parallèlement aux efforts faits par le législateur pour encadrer une évolution des mœurs jugée par certains menaçante. Ainsi après la loi du 4 juin 1970 remplaçant dans la famille conjugale la puissance paternelle par l’autorité parentale conjointe, on assiste au développement des ludothèques [9], puis des crèches parentales [10] (sur le modèle de la crèche sauvage de la Sorbonne en mai 1968) qui se fédérèrent dès 1980 dans l’Association des collectifs enfants parents professionnels (Acepp) et, en matière de protection de l’enfance, au parrainage de proximité [11]. Les lois du 17 janvier 1975 sur l’interruption volontaire de grossesse (loi Veil) et celle du 11 juillet de la même année portant réforme du divorce précédèrent de peu les initiatives visant à répondre à la fragilisation de la famille et à sécuriser la place de l’enfant en son sein : la création de la Maison verte par Françoise Dolto et son équipe le 6 janvier 1979 à Paris, inaugurant le développement des lieux d’accueil enfants-parents (Laep). A la même période sont introduits en France aussi bien la médiation familiale [12] que les espaces-rencontre [13] en réponse aux problèmes posés par les séparations conflictuelles, alors que les lois de juillet 1987 et mars 2002 sur l’autorité parentale, instaurent, entre autres, le principe de coparentalité après séparation (autorité parentale conjointe en 1987, résidence alternée en 2002). Dans un tel contexte de mise en avant de la fonction éducative parentale, se développent les groupes de parole de parents [14], puis les universités populaires de parents [15] au début des années 2000. Il s’agit à la fois de mieux impliquer les parents dans les réponses à apporter aux transformations de la société – dont certaines comme la montée des séparations les concerne au premier chef – que de leur permettre de mieux intérioriser les normes de bonne parentalité [16].

5Toutes ces apparitions témoignent de la richesse des transformations qui caractérisent le dernier tiers du XXe siècle et les actions et dispositifs mis en place pour y répondre, à partir de multiples lieux et thématiques concernant la parentalité. Elles ont un impact majeur sur les conceptions de l’intervention auprès des parents, tant au niveau des professions concernées que des pratiques associatives.

Méthode

Cet article sur les rapports entre les positionnements associatifs et institutionnels et les postures d’intervention dans le soutien à la parentalité se nourrit des multiples enquêtes auxquelles j’ai participé depuis le début des années 1990, concernant les Maisons vertes (Fondation de France, 1994), les laep et les structures de soutien aux parents séparés (Fondation de France, 1995, avec Benoît Bastard, Laura Cardia-Vonèche, Bernard Ème, et Le Furet, 2010), les associations de proximité (avec Bernard Ème, DPM, 1997 ; et MiRe, 2001), l’accueil de la petite enfance (Caf13 et ville de Marseille, 1998 ; Cnaf, 1999, et Drees/MiRe, 2006 avec Nathalie Fraïoli), la monoparentalité précaire (DRDFE, 2002 avec Patricia Rossi), la prévention psychique précoce (MiRe, 2003), les mariages forcés (DPM, 2007 avec Abdelhafid Hammouche, Sahra Mekboul), la socialisation sexuée des enfants (avec Christine Mennesson, Ministère de la culture, 2009 et ANR, 2013), les besoins et attentes des parents (réseau parentalité Decazeville-Aubin, 2015 avec Nathalie Fraïoli), les liens en accueil familial (ONPE, 2016 avec Nathalie Chapon, Caroline Siffrein-Blanc). La plupart ont donné lieu à un ouvrage. De nombreux professionnels, intervenants associatifs et parents ont été interviewés dans ce cadre, leurs propos ont nourri la réflexion à la base de cet article.

Le repositionnement de l’État social

6Dans le même temps, l’État social connaît de profondes transformations, qui ne sont pas sans liens aussi bien avec la montée de la précarité depuis le choc pétrolier de 1974-75 qu’avec l’installation du néolibéralisme dans cette même période [17]. En effet, l’augmentation continue du nombre des précaires fait que, comme l’indique Jacques Ion, « le travail social avait à gérer dans le long terme un faible nombre d’exclus à court terme, il doit maintenant gérer dans le court terme une masse considérable d’exclus à long terme » [18]. Il convient dès lors de s’éloigner d’un État providence qui n’a plus les moyens de ses ambitions pour passer à ce que Jacques Donzelot et Philippe Estèbe appellent un « État animateur » [19], qui va tenter à la fois de déléguer à la société civile et aux familles une partie de ses fonctions antérieures de solidarité et d’organiser et structurer l’espace ainsi dégagé.

7C’est dans cette nouvelle dynamique que va être reposée la question de la place des parents dans l’éducation à partir des années 1970. Car, alors que les institutions ont reconnu l’intérêt de soutenir les innovations associatives centrées sur le lien parent-enfant et cherchent à les pérenniser, l’accent est de plus en plus mis dans les discours sociaux sur l’importance des parents dans l’éducation, que ce soit sous l’effet de la psychologisation du regard sur les faits sociaux ou sous celui de la montée d’un sentiment d’insécurité [20] qui amène à dénoncer la « démission » des parents dont les rejetons posent problème par leurs actes incivils ou délinquants. C’est d’ailleurs sous la poussée de ce discours de dénonciation des parents jugés défaillants porté par l’extrême-droite que le gouvernement socialiste de l’époque est amené, sous l’impulsion de son délégué interministériel à la famille, Pierre-Louis Rémy, à créer les réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents (Reaap) en 1999 [21], marquant ainsi symboliquement la cristallisation d’un dispositif de parentalité [22].

La formalisation de la posture de soutien par les REAAP

8Suite à la conférence de la famille de 1998, et en s’appuyant sur l’expertise d’un certain nombre de structures dédiées au soutien à la parentalité, comme l’association brestoise Parentel [23], la création de ces réseaux vient signifier la prise de conscience par l’État de la nécessité de soutenir la capacité reconnue aux parents d’optimiser l’éducation de leurs enfants, tout en promouvant un partenariat des institutions entre elles et avec la société civile, alors que l’école est en crise, que la précarité gagne du terrain, que se diversifient les modes de vie en famille et que les institutions peinent à réguler les troubles sociaux d’une société en pleine mutation. L’utilisation de la notion de parentalité permet alors de mettre l’accent sur ce qui dans le rapport parent-enfant est relationnel tout en insistant sur la mission parentale d’éducation et en incitant les institutions à reconnaître l’importance de la collaboration avec les parents. L’entreprise est complexe car elle laisse une place importante à l’action locale en définissant à l’échelle des départements l’action des réseaux [24]. Ceux-ci se développent de façon très disparate selon les territoires jusqu’à ce que soit donnée pour mission aux caisses d’allocations familiales (caf) dans leur convention d’objectifs et de gestion (cog) 2013-2017 d’être les organisateurs du soutien à la parentalité, en se coordonnant avec les reaap.

9Il est vrai que la mise en place de ce véritable dispositif de parentalité au tournant du XXIe siècle a produit des effets contrastés et parfois contradictoires, comme si, à l’instar de ce que disait Michel Foucault à propos de l’élaboration d’un dispositif de sexualité à la fin du XIXème siècle [25], il s’agissait de « répondre à une urgence » [26] en plaçant la parentalité au centre des préoccupations socio-politiques. De fait, il s’agit bien de formaliser au mieux la gestion de la fonction parentale de socialisation des enfants en favorisant une meilleure intériorisation des normes d’éducation par les parents, grâce à l’appui apporté par des intervenants, eux-mêmes formés à ce nouveau type d’intervention.

10L’importance donnée à l’éducation parentale, à une époque où les autres instances socialisatrices sont en crise – comme l’école – ou quasi-impossibles à réguler comme les médias de masse, est telle que tous les gouvernements de différentes orientations qui se succèderont auront à cœur de poursuivre l’entreprise du soutien à la parentalité et de l’accompagnement des parents, bien qu’avec des nuances importantes dans les façons de concevoir ce soutien.

Modèle « reaap » et conflits d’interprétation de la prévention

11La politique du soutien à la parentalité que formalise la création des reaap ne surgit pas de la seule prise de conscience institutionnelle de l’intérêt de soutenir les parents dans leur fonction éducative pour réguler les problèmes sociaux posés par une fraction de la jeunesse, elle s’appuie sur des années de réflexion sur les pratiques portées par les professionnels à l’initiative des innovations associatives évoquées [27]. Les ludothèques, les maisons vertes, les crèches parentales, les espaces-rencontre et la médiation familiale, tous ont développé une réflexion approfondie dans une visée de transformation sociale sur les situations familiales et la place en leur sein des enfants, qui a enrichi leurs pratiques et leur a conféré une certaine expertise dans le soutien aux parents. L’élaboration de la charte des reaap par un groupe de travail multipartenarial va alors venir symboliser les attendus inhérents au soutien – ou à l’appui – à la parentalité. Celle-ci, en effet, énonce que les actions de soutien ont pour objectif « de mettre à la disposition des familles, des services et moyens leurs permettant d’assurer pleinement, et en premier, leur rôle éducatif ». Pour cela, elle énonce les principes suivants : « 1. Valoriser prioritairement les rôles et les compétences des parents (...) 2. Veiller à la prise en compte de la diversité des structures familiales (...) 3. Favoriser la relation entre les parents (...). » Les autres principes rappellent l’importance de favoriser les initiatives, d’ouvrir à la mixité sociale, d’afficher une neutralité politique et confessionnelle, tout en se situant dans un large partenariat et en prenant appui sur le travail en réseau, dans une démarche éthique s’alimentant sur les savoirs disponibles et une évaluation des actions. Alors que l’aide aux parents concernait surtout ceux, généralement de milieux populaires, les plus en difficulté, le soutien à la parentalité tel que conçu par les reaap s’adresse à tous les parents en sollicitant leur participation. Il va donc essayer de coordonner des actions classiques de soutien aux parents des couches populaires les plus en difficulté avec de nouvelles actions visant l’ensemble des parents (comme les laep par exemple), tout en proposant un nouveau mode d’intervention fondé sur un positionnement des intervenants, en appui à des parents placés au centre du dispositif, pour élaborer eux-mêmes avec l’outil que constituent les professionnels, les réponses aux difficultés éducatives rencontrées, en s’appuyant sur leur expertise parentale [28]. L’accompagnement permet alors de prolonger le soutien dans le temps, tout en s’assurant de la bonne marche des opérations. L’approche ainsi définie se veut « qualifiante » pour les parents, leurs difficultés étant considérées comme « un aléa de la condition humaine de l’être parent (...). Le soutien est alors pensé comme un point d’appui, ordinaire ou spécialisé, qui laisse au parent la charge éducative, c’est-à-dire la responsabilité parentale, étayage auquel la difficulté d’être parent légitime le recours (...). La parentalité est ici envisagée en tant que fonction obligatoirement partagée[29] ».

12Le consensus alors établi permet que dès l’année suivante soient créés les contrats locaux d’accompagnement à la scolarité (clas), dont l’objectif est de constituer « des partenariats de l’école et des structures concourant à la coéducation des enfants, en lien avec les parents[30] » à destination des enfants rencontrant des difficultés dans leur parcours scolaire, notamment du fait de leur environnement familial et social. Le dispositif vise ainsi aussi bien à renforcer la confiance des enfants dans leur capacité de réussite qu’à donner aux parents les outils nécessaires pour suivre la scolarité de leurs enfants.

13De tels dispositifs (reaap, clas…) peuvent d’autant plus rencontrer l’assentiment des professionnels que ceux-ci ont participé à leur élaboration. Leur mise en œuvre dans les années 2000 va cependant engendrer chez ceux-ci un certain malaise lorsque l’accent sera mis plutôt sur le contrôle de la parentalité défaillante que sur son soutien, notamment quand il s’agira d’intervenir auprès des couches populaires [31]. Il faut toutefois remarquer que, quel que soit le type de gouvernance adopté, les positionnements ont pour caractéristique commune de pointer la position éducative des parents comme centrale dans le processus de socialisation de leurs enfants, et ont par là et par devers eux tendance à les sur-responsabiliser. Dans un article précédent de Recherches familiales, j’insistais sur le paradoxe inhérent à un tel positionnement, renvoyant à la tension entre logique citoyenne et logique néolibérale à l’œuvre, où il s’agit de « promouvoir la coéducation en n’agissant centralement que sur les conditions de l’éducation parentale (...). La contradiction s’approfondira lorsque le pouvoir politique, prenant acte de la responsabilisation des parents qui court depuis les années 1980, les renverra directement à une responsabilité causale dans l’origine des éventuels troubles à l’ordre public produits par leurs enfants » [32].

Les tensions liées à la gouvernance du soutien et le malaise des professionnels

14En effet, le changement d’orientation du gouvernement mis en place en 2002 va avoir un impact non négligeable sur les injonctions de suivi parental adressées aux professionnels comme aux intervenants bénévoles. Si une inflexion du dispositif de parentalité vers le contrôle des parents jugés défaillants se fait sentir d’emblée dans la nouvelle gouvernance, c’est la parution en 2005 du rapport Inserm, Troubles des conduites chez l’enfant et l’adolescent[33], qui va exposer au grand public les différences de conception du soutien à la parentalité et leur impact sur les professionnels et intervenants associatifs. Une conclusion très controversée de ce rapport porteur d’une vision bio-médicale de la psychiatrie, selon laquelle il serait possible de prévenir la délinquance chez les enfants de 3 ans trop agressifs en leur administrant des reconditionnements comportementaux ou des médicaments [34] va être mise en lumière par le ministre de l’Intérieur de l’époque – appelé par la suite à devenir président – lorsqu’il propose d’intégrer cette idée à son projet de loi sur la prévention de la délinquance. Ce qui provoque une réaction extrêmement forte et rapide du monde de la clinique, le lancement d’une pétition internet « Pas O de conduite pour les enfants de 3 ans », qui recueille 200 000 signatures, et entraîne le retrait de cette idée de la loi qui sera votée en 2007, en même temps, ironie de l’histoire, que la loi sur la protection de l’enfance…

15Ont été exposés au grand jour les conflits d’interprétation sur ce que peut représenter le soutien aux parents, notamment en matière de prévention [35], à une époque où, comme l’a bien montré Michel Foucault, on est passé d’un « régime de la loi » (plus répressif) à un « régime de la norme » (plus soutenant) [36]. Autrement dit à une époque où il s’agit de gérer le social par intériorisation par les individus des normes, dans une « société des individus » [37] qui peine à réguler les implications d’une telle gouvernance par responsabilisation des individus [38], et fait appel aux techniques anciennes de répression envers ceux qui n’arrivent pas à assimiler efficacement les normes ambiantes. Comme l’analyse Norbert Elias : « Le processus de la civilisation consiste en une modification de la sensibilité et du comportement humains dans un sens bien déterminé... Cette modification, cette ‘civilisation’ n’a pas été conçue, à un moment donné, par certains individus, et réalisée d’une manière ‘rationnelle’ par des mesures arrêtées consciemment à cet effet... Elle s’opère sans aucun plan... Certaines contraintes exercées de différents côtés se transforment en autocontraintes. » [39] En dehors des normes juridiques, qui sont explicitement construites par les représentants de l’État dans un objectif rationnel de gestion sociale, la plupart des normes paraissent résulter d’un consensus social entre diverses influences provenant de sources multiples. Dans notre société, où le discours marchand et les médias ont pris une place grandissante à côté des institutions traditionnelles, on assiste à un certain foisonnement normatif, en particulier en matière de parentalité. Les parents, comme les professionnels sont appelés à se situer parmi ce foisonnement de discours sur la fonction parentale, en opérant un tri selon des logiques les plus diverses. En ce sens on peut parler du passage à un régime particulier de la norme, celui de la self norme, même si certains peinent ou répugnent à s’y soumettre. « Il s’agit, à l’époque du règne de l’individualisme, de la capacité de chacun à produire ses propres normes, ou plutôt à adapter les normes ambiantes et à choisir parmi la profusion des normes existantes, parfois contradictoires, celles qui conviennent à la situation et à l’état d’esprit du moment, quitte à en changer au prochain épisode ». [40] L’illusion de la liberté de choix est alors donnée aux individus dans une société où la logique démocratique a du mal à résister à l’emprise du néolibéralisme, les professionnels et intervenants se trouvant pris au centre des contradictions produites par un tel dispositif social.

16Si les parents sont souvent désemparés face à cette inflation normative parfois contradictoire, les professionnels, pris entre leur insertion institutionnelle, la référence aux savoirs légitimes et leur expérience du terrain, peuvent se retrouver eux aussi dans le doute. La position des institutions fluctue (le changement de paradigme en protection de l’enfance de la substitution parentale vers la suppléance [41] est à cet égard exemplaire), les conflits entre les représentants des savoirs légitimes peuvent être violents et les expériences de terrain divergentes, sans compter les hésitations du pouvoir politique et les injonctions paradoxales ainsi engendrées.

17Le trouble chez les acteurs du thérapeutique, du social et de l’éducatif est alors maximal dans ce contexte de contradiction normative, et les mesures promues dans les années 2000 pour éduquer les parents défaillants (contrats de responsabilité parentale, stages parentaux…) auront d’autant moins d’écho que la plupart des régions ne participent pas de la même orientation politique que le gouvernement. Durant cette période, les professionnels du soutien à la parentalité se retrouvent au centre de multiples tensions : une redéfinition de leur manière d’agir avec le passage de la problématique classique du travail social de l’aide de parents en difficultés vers un soutien à visée plus large, une opposition entre des conceptions divergentes de la prévention appuyée sur des conflits de référentiels, une fragilisation de la professionnalité par la coopération instaurée avec les intervenants bénévoles, une tendance à une gestion néolibérale de type managérial insistant sur une évaluation quantitative des actions qui ne les satisfait pas. Le malaise est patent à la fin des années 2000 et interpelle les pouvoirs publics, notamment au regard des positionnements éthiques [42].

Réorientation de la gouvernance et recentrage du soutien sur les caf

18Le gouvernement, conscient de l’importance de ces tensions mais soucieux d’intégrer la prévention de la délinquance dans le dispositif de soutien, crée alors en 2010 le Comité national de soutien à la parentalité (CNSP) et ses antennes départementales dans le but de coordonner les différents acteurs des reaap avec, non seulement la médiation familiale, les laep et le soutien scolaire, mais surtout les différents intervenants en prévention de la délinquance [43]. Cette initiative, assez mal vécue par les institutions parties prenantes des reaap comme la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) ou l’Union nationale des associations familiales (Unaf), qui craignent un dévoiement des objectifs initiaux et peut-être surtout des modalités d’intervention, sera rapidement remise en question avec le changement de gouvernement de 2012.

19Est alors donnée mission par l’État à la Cnaf et aux caf départementales de se positionner en leader du soutien à la parentalité, dans le cadre de la mise en œuvre des schémas départementaux des services aux familles, en se coordonnant avec les reaap. Il s’agit aussi d’uniformiser la logique de soutien sur l’ensemble du territoire français, pour lequel l’implantation et l’activité des reaap étaient très variables d’un département à l’autre. A la convention d’objectifs et de gestion 2013-2017 déjà évoquée succède la convention d’objectifs et de gestion actuelle 2018-2022, qui accentue le mouvement en liant la politique de soutien à la parentalité à celle de la petite enfance (dont le budget est beaucoup plus conséquent eu égard aux modes d’accueil). Cette institutionnalisation croissante ne manque pas de poser question aux professionnels, pris entre le modèle citoyen de l’empowerment (ou l’encapacitation) des parents et le modèle néolibéral de leur responsabilisation.

20Ce d’autant plus que si la volonté de l’État apparaît manifeste et que l’institutionnalisation du dispositif de soutien se développe cela ne se fait pas sans un certain flottement, qui peut donner l’impression d’une politique qui n’a guère les moyens (financiers) de ses ambitions. Certes, le mot d’ordre est désormais généralisé d’une ouverture des structures aux parents, que ce soit dans les crèches, à l’école ou dans les lieux de soin, mais aucun espace ni aucun moment ne sont véritablement prévus pour cela, renvoyant aux structures elles-mêmes déjà surchargées le soin d’organiser une telle possibilité. Les préoccupations à l’égard de l’enfance et la nécessité du soutien à la parentalité s’affirment cependant au niveau institutionnel avec la création, sous la mandature François Hollande, du Conseil de l’enfance et de l’adolescence le 25 octobre 2016, dont la présidence est confiée à Sylviane Giampino (co-fondatrice du mouvement Pas de 0 de conduite) à la suite de son rapport sur le développement du jeune enfant [44]. Intégré au Haut conseil à la famille, à l’enfance et à l’âge (HCFEA), il a pour mission « d’animer le débat public et d’apporter aux pouvoirs publics une expertise prospective et transversale sur les questions liées à l’enfance » [45]. Participe d’une dynamique voisine, la nomination sous la mandature d’Emmanuel Macron, le 25 janvier 2019, d’Adrien Taquet au poste de secrétaire d’État aux droits fondamentaux de l’enfant, le soutien à la parentalité et la lutte contre les maltraitances, poste transformé le 26 juillet 2020 en secrétaire d’État chargé de l’Enfance et des Familles. L’effet le plus emblématique de l’affirmation de cette préoccupation pour l’enfance et la parentalité est sans conteste la création de la Commission des 1000 premiers jours, présidée par le célèbre neuropsychiatre Boris Cyrulnik [46], sans pour autant qu’y soit intégrée la perspective sociologique, laissant ainsi craindre la prévalence d’une approche bio-psycho-individualiste… Nous sommes alors dans un contexte de reprise en main par l’État du soutien à la parentalité alors que la société civile a multiplié les initiatives privées en ce domaine, notamment avec le développement du coaching parental et de ce qu’on a appelé la parentalité positive, signes à la fois de l’investissement du secteur par la logique marchande et des divergences de conception du soutien. Les demandes affluent alors, tant du côté des parents que de celui des professionnels, pour que soit mieux défini cet « art de faire » qu’est censé mettre en jeu la fonction parentale, et qu’un consensus normatif se réalise enfin. Ce qui, bien sûr, ne sera pas possible tant les contradictions de perspectives et de postures sont fortes.

Le foisonnement parentaliste et la volonté scientifico-politique d’orientation du dispositif

21Si beaucoup attendent une formalisation plus explicite du soutien et de l’accompagnement des parents, l’entreprise se révèle des plus délicates et semble avoir peu de chances d’aboutir, tant les façons de la concevoir peuvent être multiples et divergentes. Si on peut considérer que la politique de soutien à la parentalité est un nouveau modèle d’action publique appuyé sur la Convention internationale des droits de l’enfant de 1989 qui met en avant les capacités des parents, « l’appel à l’autonomie et à l’implication signifie que ces derniers sont enjoints à ne compter que sur eux-mêmes » nous rappelle Martine Sas-Barondeau [47]. Le principe de coparentalité avancé a tendance à renvoyer aux parents la responsabilité de leur situation en évacuant les déterminations sociales de cette situation, que ce soit en termes de milieu social ou de genre [48]. Ce qui, du point de vue du soutien, ne manque pas de déboucher sur la valorisation de compétences parentales qu’il s’agira de développer, avec la participation active des parents, sans que toute l’attention nécessaire soit portée sur ce qui conditionne la mise en œuvre de ces compétences [49]. Dès lors, on peut comprendre qu’une institution européenne aille dans le sens d’une telle approche en mettant en avant un mot d’ordre de « parentalité positive » pour le moins ambigu. En effet, le 16-17 mai 2006 à Lisbonne, la Conférence des ministres européens des affaires familiales du Conseil de l’Europe s’intitule « La parentalité positive dans l’Europe contemporaine » cette expression étant reprise dans un rapport de Mary Daly pour le Conseil de l’Europe, qui promeut la positive parenting [50], puis dans une multitude d’écrits. Ce qui « d’une part, traduit l’inscription dans le champ familial d’une logique sociale générale qui s’affirme comme néolibérale ; d’autre part, va justifier le développement de pratiques d’intervention auprès des parents que l’on peut légitimement interroger, surtout lorsqu’elles sont systématisées en programmes d’intervention proposés en modèles aux politiques gestionnaires, dont le plus emblématique, le triple P : Positive Parenting Program » [51]. La question est d’importance puisque à la fois, elle illustre l’emprise du néolibéralisme dans les sociétés démocratiques et elle interroge les fondements du soutien à la parentalité comme nouvelle politique de gestion des familles [52].

22Avec beaucoup d’autres [53], j’ai à plusieurs reprises insisté sur les risques liés au développement du soutien à la parentalité et au parentalisme qu’il produit. Cette logique de responsabilisation hors contexte impacte non seulement la pratique mais aussi la conscience des professionnels et intervenants. La position parentaliste s’appuie sur l’importance de la fonction éducative des parents, en tendant à réduire le soutien à la parentalité à un soutien à l’éducation parentale. Ce qui peut facilement déboucher sur l’idée qu’il convient d’éduquer les parents à être de bons parents, et les charge alors d’une énorme responsabilité dans le devenir de leurs enfants, en dédouanant les autres instances et institutions intervenant dans cette éducation. Sont alors quelque peu contredits les principes d’empowerment des parents et de coéducation et de coparentalité partagées, dans une sur-responsabilisation qui s’appuie sur une promotion parentale qui gomme les différences de situation sociale autant qu’elle reproduit les assignations de sexe [54]. Or, le processus d’institutionnalisation du soutien reste indexé à une perspective de rentabilité, qui passe par la production de normes de ce que doit être une action de soutien (en témoigne le dossier à remplir pour bénéficier d’une subvention reaap), et la mise en place d’évaluations de type managérial. Il peut amener (à l’instar de nombreux pays) à se laisser séduire par les propositions de programmes d’interventions clé en main censés promouvoir une parentalité positive pour tous [55]. Car le dernier risque réside dans le développement inconsidéré d’un marché du soutien à la parentalité, qui s’abreuve à la volonté affichée de bientraitance des enfants – et plus accessoirement des parents – et voit dans la rhétorique du soutien à la parentalité le support de son développement. La question de la coéducation, et plus encore de la cosocialisation prend alors tout son sens…

Notes

  • [1]
    François de SINGLY, Sociologie de la famille contemporaine, Nathan, 1993 ; Anthony GIDDENS, Les conséquences de la modernité, L’Harmattan, 1994 (Cambridge, 1990) ; Ulrich BECK, « Le conflit des deux modernités et la question de la disparition des solidarités », Lien social et Politique, n° 39, 1998.
  • [2]
    Marcel GAUCHET, « Essai de psychologie contemporaine », Le Débat, n° 99, 1998 ; Irène THÉRY, « Mixité et maternité », in Yvonne KNIBIEHLER (dir.), Maternité, affaire privée, affaire publique, Bayard, 2001.
  • [3]
    Éric J. HOBSBAWM, L’âge des extrêmes - Histoire du court XXe siècle, Editions Complexe/Le Monde diplomatique, 1999 (1994).
  • [4]
    Michel MESSU, « Le « noyau dur » de la politique familiale : l’enfant. Analyse du cas français », in Gilles SÉRAPHIN, Nathalie ST-AMOUR, Enfances Familles Générations : Comprendre les politiques familiales d’aujourd’hui : Évolutions et enjeux, n° 35, 2020.
  • [5]
    Bernard MARTINO, Le bébé est une personne. La fantastique histoire du nouveau-né, TF1 & Balland, 1985.
  • [6]
    Gérard NEYRAND (avec la collaboration de Michel Dugnat, Georgette Revest, Jean-Noël Trouvé), Préserver le lien parental. Pour une prévention psychique précoce, Puf, 2004.
  • [7]
    Sylvie RAYNA, Marie-Nicole RUBIO, Henriette SCHEU (dir.), Parents-professionnels : la coéducation en question, érès, 2010 ; Marie-Pierre MACKIEWICZ, « Coéducation à l’école maternelle et engagement parental en Réseau d’Education Prioritaire » La Revue internationale d’éducation familiale, n° 28, 2010.
  • [8]
    Gérard NEYRAND, « La reconfiguration de la socialisation précoce. De la coéducation à la cosocialisation », Dialogue, n° 200, 2013.
  • [9]
    Annie CHIAROTTO, Les ludothèques, Cercle de la librairie, 1991 ; Luce DUPRAZ, La place des ludothèques dans le soutien à la fonction parentale, Association des Ludothèques, 2005.
  • [10]
    Marie-Laure CADART, Des parents dans les crèches, utopie ou réalité ? Accueillir la diversité des enfants et des familles dans le réseau des crèches parentales, érès, 2006.
  • [11]
    Simone VEIL, ministre de la Santé et de la famille, Circulaire nº 38 du 30 juin 1978 relative au parrainage des enfants relevant de l’aide sociale à l’enfance ; Catherine SELLENET, « Parentèle, tiers dignes de confiance et parrains : des solidarités autour de l’enfant en protection de l’enfance », Informations sociales, vol. 188, n° 2, 2015, pp. 88-95.
  • [12]
    Benoît BASTARD, Laura CARDIA-VONÈCHE, « L’irrésistible diffusion de la médiation familiale », Annales de Vaucresson, n° 29, 1988 ; Jocelyne DAHAN, La médiation familiale, Morisset, 1997.
  • [13]
    Benoît BASTARD, Jean GRÉCHEZ, Des lieux d’accueil pour le maintien des relations enfants-parents. Propositions pour la reconnaissance des « Espaces-Rencontres », Rapport à la ministre déléguée à la Famille et à l’Enfance, Paris, 2002;Serge BEDERE, Madie LAJUS, Benoît SOUROU, Rencontrer l’autre parent. Les droits de visite en souffrance, érès, 2011 ; Yasmine DEBARGE, « Contenir et gérer les émotions : le dispositif “Espace de rencontre” », Recherches familiales, n° 13, 2013, pp. 7-15.
  • [12]
    Benoît BASTARD, Laura CARDIA-VONÈCHE, « L’irrésistible diffusion de la médiation familiale », Annales de Vaucresson, n° 29, 1988 ; Jocelyne DAHAN, La médiation familiale, Morisset, 1997.
  • [13]
    Benoît BASTARD, Jean GRÉCHEZ, Des lieux d’accueil pour le maintien des relations enfants-parents. Propositions pour la reconnaissance des « Espaces-Rencontres », Rapport à la ministre déléguée à la Famille et à l’Enfance, Paris 2002 ; Serge BEDERE, Madie LAJUS, Benoît SOUROU, Rencontrer l’autre parent. Les droits de visite en souffrance, érès, 2011 ; Yasmine DEBARGE, « Contenir et gérer les émotions : le dispositif “Espace de rencontre” », Recherches familiales, n° 13, 2013, pp. 7-15.
  • [14]
    Christine BARRAS, Les groupes de parole pour les parents. Comment développer ses compétences parentales sans le recours à un expert, De Boeck, 2009.
  • [15]
    Michelle CLAUSIER, Emmanuelle MURCIER (dir.), Universités populaires de parents. Des parents acteurs, chercheurs, citoyens, Paris, Acepp-Chronique sociale, 2010.
  • [16]
    Claude MARTIN (dir.), « Être un bon parent », une injonction contemporaine, Presses de l’EHESP, 2014.
  • [17]
    Michel FOUCAULT, « Naissance de la biopolitique » (1979), in Dits et écrits, tome II, Gallimard, 1994 ; Thomas PIKETTY, Le Capital au XXIe siècle, Seuil, 2013.
  • [18]
    Jacques ION, « L’animation, le social et le territoire », Actes des Rencontres de Nantes, Accord-Ville de Nantes, avril 1992, p. 101.
  • [19]
    Jacques DONZELOT, Philippe ESTÈBE, L’État animateur. Essai sur la politique de la ville, Esprit, 1994.
  • [20]
    Robert CASTEL, L’insécurité sociale, Seuil, 2003.
  • [21]
    Circulaire DIF/DGAS/DIV/DPM n° 1999/153 du 9 mars 1999.
  • [22]
    Gérard NEYRAND, Soutenir et contrôler les parents. Le dispositif de parentalité, érès, 2011 (4e éd. 2019).
  • [23]
    Daniel COUM, « De la difficulté d’être parent à l’aide à la parentalité : un enjeu éthique ? », dans Gérard NEYRAND, Daniel COUM, Marie-Dominique WILPERT, Malaise dans le soutien à la parentalité. Pour une éthique d’intervention, érès, 2018, pp. 89-132.
  • [24]
    Benoit BASTARD « Les REAAP, l’accompagnement des parents au plan local. Institutions, professionnels et parents : partenaires », Informations sociales, vol. 139, no 3, 2007, pp. 94-105.
  • [25]
    Michel FOUCAULT, Histoire de la sexualité. I. La volonté de savoir, nrf Gallimard, 1976.
  • [26]
    Michel FOUCAULT, « Le jeu de Michel Foucault », Ornicar ? Bulletin périodique du champ freudien, n° 10, 1977 ; repris dans FOUCAULT, Dits et écrits II, Gallimard, 1994, pp. 298-329.
  • [27]
    Benoît BASTARD, Laura CARDIA-VONÈCHE, Bernard ÈME, Gérard NEYRAND, Reconstruire les liens familiaux. Nouvelles pratiques sociales, Syros-Fondation de France, 1996.
  • [28]
    Jean-Marie MIRON, « La difficile reconnaissance de “l’expertise parentale” », Recherche et formation, n° 47, 2004, pp. 55-68.
  • [29]
    Nathalie HOUZELLE (dir.), Promouvoir la santé dès la petite enfance. Accompagner la parentalité, Inpes éditions, 2013, p. 69.
  • [30]
    Charte nationale de l’accompagnement à la scolarité, 2001.
  • [31]
    Manuel BOUCHER, Gouverner les familles. Les classes populaires à l’épreuve de la parentalité, L’Harmattan, 2011.
  • [32]
    Gérard NEYRAND, « Le soutien aux parents entre citoyenneté démocratique et individualisme néolibéral », Recherches familiales, n° 10, 2013, p. 53.
  • [33]
    Inserm, Troubles des conduites chez l’enfant et l’adolescent, expertise collective, Paris, 2005.
  • [34]
    Philippe PIGNARRE, « Ritaline, Concerta… : la vogue dangereuse des « pilules de l’obéissance », dans Gérard NEYRAND (dir.), Faut-il avoir peur de nos enfants ? Politiques sécuritaires et enfance, La Découverte, 2006.
  • [35]
    Le mouvement Pas O de conduite organisera 3 colloques suivis de 3 ouvrages sur la prévention : Le collectif, Pas de 0 de conduite pour les enfants de 3 ans !, érès, 2006 ; Enfants turbulents : l’enfer est-il pavé de bonnes préventions ? érès, 2008 ; Les enfants au carré ? Une prévention qui ne tourne pas rond, érès, 2011.
  • [36]
    Michel FOUCAULT, Histoire de la sexualité. I. La volonté de savoir, nrf Gallimard, 1976.
  • [37]
    Norbert ELIAS, La Société des individus, Fayard, 1991 (éd. Allemande, 1987).
  • [38]
    Danilo MARTUCCELLI, La société singulariste, Armand Colin, 2010.
  • [39]
    Norbert ELIAS, La dynamique de l’occident, Calmann-Lévy, 1975 (éd. allemande 1939), p. 181 ; cité par Claude MARTIN (dir.), Accompagner les parents dans leur travail éducatif et de soins. Un état de la question, la Documentation française, 2018.
  • [40]
    Gérard NEYRAND, L’amour individualiste. Comment le couple peut-il survivre ?, érès, 2018, p. 102.
  • [41]
    Paul DURNING, Education familiale, acteurs, processus et enjeux, Puf, 1995 ; Dominique FABLET, De la suppléance familiale au soutien à la parentalité, L’Harmattan, 2010 ; Nathalie CHAPON, Gérard NEYRAND, Caroline SIFFREIN-BLANC, Les liens affectifs en familles d’accueil, érès, 2018.
  • [42]
    Martine SAS-BARONDEAU, La face cachée de la parentalité. Une approche sociologique de l’accompagnement de la fonction parentale, L’Harmattan, 2015 ; Gérard NEYRAND, Daniel COUM, Marie-Dominique WILPERT, Malaise dans le soutien à la parentalité. Pour une éthique d’intervention, érès, 2018.
  • [43]
    Jessica POTHET, « Le Comité national de soutien à la parentalité : ethnographie de l’élaboration d’une politique publique », in Claude MARTIN (dir.), « Être un bon parent », une injonction contemporaine, Presses de l’EHESP, 2014.
  • [44]
    Sylviane GIAMPINO, Développement du jeune enfant. Modes d’accueil Formation des professionnels, Rapport remis à la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des Femmes, Paris, 2016 ; suivi d’un ouvrage : Refonder l’accueil des jeunes enfants, érès, 2017.
  • [45]
  • [46]
    https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2019/09/19/faire-des-1000-premiers-jours-de-lenfant-une-priorite-de-laction-pu-blique ; Boris CYRULNIK (dir.), Rapport de la Commission des 1000 premiers jours, remis le 8 septembre 2020 au secrétaire d’État en charge de l’Enfance et des Familles auprès du ministre des Solidarités et de la Santé.
  • [47]
    Martine SAS-BARONDEAU, « Les malentendus de la parentalité », in Claude MARTIN (dir.), « Être un bon parent », une injonction contemporaine, Presses de l’EHESP, 2014, p. 197.
  • [48]
    Sandrine GARCIA, Mères sous influence : de la cause des femmes à la cause des enfants, La Découverte, 2011 ; Sandrine DAUPHIN, « La politique familiale et l’égalité femmes-hommes : les ambiguïtés du “libre choix” en matière de conciliation vie familiale et vie professionnelle », Regards, vol. 2, n° 50, 2016, pp. 85-98.
  • [49]
    Catherine SELLENET, « Approche critique de la notion de « compétences parentales »», La revue internationale de l’éducation familiale, n° 26, 2009, pp. 95-116.
  • [50]
    Mary DALY, Parenting in Contemporary Europe. A Positive Approach, Strasbourg, Council of Europe publishing, 2007.
  • [51]
    Gérard NEYRAND, « La parentalité positive l’est-elle autant qu’on le croit ? », Spirale : La parentalité positive, n° 91, 2019. Pour la critique du triple P voir : Matthew R., MT SANDERS TURNER K., MARKIE-DADDA C. : « The Development and dissemination of the Triple P-Positive Parenting Program : A Multilevel, Evidence-Based System of Parenting and Family Support », Prevention science, n° 3, 2002, pp. 173-189 ; Michel VANDENBROECK, Naomi ROETS, Griet GEENS, « Les politiques parentales à la flamande », in Claude MARTIN (dir.), « Etre un bon parent », une injonction contemporaine, Presses de l’EHESP, 2014.
  • [52]
    Voir les contributions aux Annales de l’Université de Bucarest, vol. 17, n° 1, juin 2015 : Gilles SÉRAPHIN, « L’universalité en débat : retour sur un ‘‘fondement’’ de la politique familiale française », pp. 55-72 ; Gérard NEYRAND, « D’une politique de la famille à une politique de la parentalité. L’exemple de la France », pp. 19-34.
  • [53]
    Saül KARSZ, Mythe de la parentalité, réalité des familles, Dunod, 2014.
  • [54]
    Coline CARDI, « Les habits neufs du familialisme. Ordre social, ordre familial et ordre du genre dans les dispositifs de soutien à la parentalité », Mouvements, vol. 82, n° 2, 2015, pp. 11-19 ; Bertrand GEAY, Pierig HUMEAU, Émilie SPRUYT, « Soigner, éveiller ou réguler le nourrisson. Les pratiques parentales précoces à partir de la cohorte Elfe », dans Anne DUPUY (dir.), Socialisation familiale des jeunes enfants, érès, 2021.
  • [55]
    Qu’il s’agisse des Pays-Bas, de la Belgique flamande ou des pays anglo-saxons, et de la problématique de « l’intensive parenting » ou des « helicopter parents », ces approches, qui s’appuient sur un certain détournement des neuro-sciences, ont progressivement montré leurs limites. Voir à ce sujet, comme sur la plupart des sujets abordés, l’étude collective réalisée à la demande de la Cnaf : Claude MARTIN, Abdelhafid HAMMOUCHE, Marianne MODAK, Gérard NEYRAND, Catherine SELLENET, Michel VANDENBROECk, Chantal ZAOUCHE GAUDRON, Sandrine DAUPHIN, Jeanne MOENECLAEY, Accompagner les parents dans leur travail éducatif et de soin. État de la question en vue d’identifier le rôle de l’action publique, 2017, publiée sous Claude MARTIN (dir.), Accompagner les parents dans leur travail éducatif et de soins. Un état de la question, op. cit.
Français

Appuyé sur une expérience de 30 années de recherche de l’auteur sur les questions de l’enfance et de la parentalité, l’article vise à rendre compte des difficultés de mise en œuvre d’un dispositif de soutien de la parentalité qui est le lieu de multiples tensions, tant au niveau des conceptions de l’action que de la place donnée aux parents et aux professionnels et des formes de gouvernance qui lui sont données. Afficher un objectif d’accompagnement des parents au sein d’une logique néolibérale pose de multiples questions. La production d’injonctions paradoxales à l’égard des professionnels et intervenants associatifs ne manque pas d’engendrer un certain malaise, que la réorientation de la gouvernance et l’institutionnalisation du soutien ne peuvent parvenir à dissiper. L’élaboration d’une perspective coéducative/cosocialisatrice s’en retrouve d’autant plus à l’ordre du jour.

Gérard Neyrand
sociologue, est professeur émérite à l’Université de Toulouse III, membre du Cresco (EA 7419). Il est aussi directeur du laboratoire associatif Cimerss (Bouc-Bel-Air). Il a abordé à de multiples reprises les effets des mutations sociales sur la sphère privée et sur les familles, tant au niveau du couple et des rapports de genre, de la parentalité et de la petite enfance, de l’adolescence et de la jeunesse, des relations interculturelles et des processus de précarisation, ainsi que des positionnements de la société civile, de la vie associative et des institutions à cet égard. Depuis une quinzaine d’années il met plus particulièrement en relief les liens étroits entre les fonctionnements privés et la dimension politique. À dominante sociologique, ses derniers travaux se situent dans une perspective pluridisciplinaire : Faire couple, une entreprise incertaine (dir.), érès, 2020 ; La mère n’est pas tout ! Reconfiguration des rôles et perspectives de cosocialisation, érès, 2019 ; L’amour individualiste. Comment le couple peut-il survivre ?, érès, 2018 ; Malaise dans le soutien à la parentalité. Pour une éthique d’intervention, érès, 2018 (avec Daniel COUM et Marie-Dominique WILPERT) ; Les liens affectifs en familles d’accueil, érès, 2018 (avec Nathalie CHAPON et Caroline SIFFREIN-BLANC)...
Mis en ligne sur Cairn.info le 03/03/2022
https://doi.org/10.3917/rf.019.0011
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