1 On sait que le christianisme est le tenant d’une position théologique et éthique qui reconnaît aux enfants une valeur intrinsèque inaliénable, dès leur conception. Le Magistère ecclésiastique catholique a fréquemment rappelé son refus absolu de l’avortement et de l’infanticide [1]. Tout enfant, même en bas âge, possède une dignité personnelle qui ne peut lui être refusée.
2 Mais peut-on en inférer que la parole des enfants doive toujours être prise au sérieux dès qu’ils sont en mesure de s’exprimer ? On se souvient certainement d’un critère important en théologie catholique et dans la pratique pastorale : il s’agit de l’« âge de raison », appelé naguère « âge de discrétion », ce qui signifie exactement « âge à partir duquel un enfant est capable d’exercer un discernement ». On le situe généralement à sept ans. Cet âge forme actuellement une sorte de frontière symbolique, notamment en ce qui concerne l’accès au sacrement de l’Eucharistie. Il semble, à première vue, constituer le seuil en deçà duquel la parole enfantine serait dénuée de valeur et de crédibilité.
3 Il est alors tentant d’étendre cette notion d’âge de raison à d’autres situations, notamment celles où la parole de quelqu’un doit ou non être prise en compte. On peut penser à certaines affaires judiciaires récentes ou anciennes, où des témoignages d’enfants, parfois très jeunes, ont été soit retenus soit récusés, au nom de la fiabilité de cette parole enfantine. S’ils n’ont pas atteint l’âge de raison, peut-on croire ce qu’ils disent ? Peut-on leur faire confiance ? Etc.
4 Mais – et c’est la question décisive – d’où vient ce critère, cette idée d’un « âge de raison » ? Et la limite a-t-elle toujours été placée au même endroit ? Un éclairage théologique et canonique peut s’avérer utile.
5 Dans un premier temps, après avoir évoqué le contexte culturel de l’Antiquité gréco-romaine, on essaiera de montrer comment le judaïsme – et plus encore le christianisme naissant – a opéré une rupture décisive avec les religions mythiques de l’Ancien Orient et avec les conceptions socio-juridiques antiques, s’agissant de l’attention portée à la parole des enfants.
6 Dans un second temps, nous verrons quand, pourquoi et comment le christianisme occidental (latin), à la différence du christianisme oriental (syriaque, byzantin ou russe), a concrètement régressé sur ce point, notamment dans sa pratique d’accès à l’Eucharistie et dans sa codification canonique. La montée en puissance du rationalisme moderne n’a fait qu’accroître cette orientation, réduisant les jeunes enfants à n’être que des sujets passifs. En réalité, c’est seulement avec de récents papes (Pie X et Jean-Paul II) que s’amorce – et encore très timidement – une certaine évolution en faveur de la prise en compte de la parole des petits enfants.
L’originalité judéo-chrétienne dans le contexte de l’antiquité
7 Etymologiquement, l’enfant (in-fans) est celui qui ne parle pas, celui qui n’a pas droit à la parole, celui dont la parole n’a pas de poids. Parmi les adultes, il ne compte pas. Dans les sociétés traditionnelles, l’infans est celui qui n’est pas pubère, celui qui ne peut pas encore accéder à la sexualité reproductive.
8 Le droit antique savait marquer cette frontière. Ainsi, alors que la mise à la torture des esclaves en cas de crime commis sur la personne de leur maître était une règle générale, il y avait une exception importante : on ne torture pas les enfants esclaves. C’est ce qu’indique le Digeste, 29, 5, 1, 33 (Ulp. 1. 50 ad ed.) : « Impuberi autem utrum in supplicio tantum parcimus an vero etiam in quaestione ? Et magis est, ut de impubère nec questio habeatur : et alias solet hoc in usu observari, ut impuberes non torqueantur : terreri tantum solent et habena et ferula vel caedi. » [2] Dans l’Antiquité, la parole des enfants ne comptait pas, même sous la torture. Donc, il aurait été inutile de les y soumettre. Il ne s’agit pas ici d’humanité, mais plutôt de sens pratique. On peut noter que les mêmes règles juridiques prévoyaient de ne pas torturer non plus les esclaves déments : leur parole est sans valeur. En revanche, l’exception préservant les femmes esclaves si elles étaient enceintes n’avait pas la même visée : ce n’est pas que leur parole n’ait aucune valeur, au contraire. Mais il s’agit ici de préserver la vie de l’enfant-esclave à naître. On ne torturera la mère qu’après l’accouchement.
9 En règle générale, les religions mythiques, qui spécifient les croyances dans l’Antiquité païenne, ne font guère de place à la parole des enfants. On sait que dans les sociétés traditionnelles du Proche-Orient ancien (Égypte, Mésopotamie, Canaan), les enfants ne comptent guère : considérés comme un don de la divinité en vue de la perpétuation de la famille ou du clan, éminemment fragiles et mortels, ils ne possèdent pas de valeur à titre personnel. Ils n’ont d’intérêt qu’à titre de promesse d’un avenir pour la vie du groupe.
10 Tout au plus ces enfants pouvaient-ils servir de monnaie d’échange avec la divinité. Certains peuples du Proche-Orient, en particulier les Cananéens, procédaient à des sacrifices d’enfants, pratique attestée jusqu’à Carthage au IIe s. av. J.-C. : cette mise à mort avait pour but de réexpédier l’enfant dans le monde des dieux pour tenter d’attirer sur la terre leurs bonnes grâces ! Mais l’enfant n’avait pas la parole : son sacrifice n’était jamais volontaire.
11 L’éthique théologique d’Israël s’est constituée en réaction à de telles pratiques. L’Ancien Testament, en particulier par la prédication des prophètes dès le VIIIe s. av. J.-C., atteste ces pratiques païennes pour les condamner vigoureusement [3].
12 De même, dans l’Antiquité, un enfant pouvait servir à nouer un pacte avec les clans voisins : comme otage ou en faisant l’objet d’un mariage politique. Là aussi, on ne lui laissait pas la parole. Ce sont les adultes qui disposaient entièrement de lui et de sa vie. Dans ce contexte, la parole propre des enfants ne compte pas du tout, leurs dires sont sans aucune valeur. Littéralement, ils resteront « in-fans », jusqu’à leur accès à la vie adulte.
13 On constate que la littérature sapientielle biblique porte quand même la trace de cette mentalité antique : « La sottise adhère au cœur de l’enfant, le fouet de l’instruction l’en délivre » (Pr 22, 15), et aussi « Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant » (Qo 10, 16). Ici, la Bible juive ne diffère pas sensiblement des sagesses païennes.
14 Pourtant, il nous semble que c’est en contexte juif – puis chrétien – que s’est développée une conception sensiblement différente. En effet, parmi les religions antiques, le judéo-christianisme met en œuvre une modification substantielle des perspectives s’agissant de la valeur susceptible d’être accordée à la parole des enfants.
? La perspective développée par le judaïsme primitif
15 Les premières manifestations de la foi hébraïque ont progressivement modifié la situation. Selon le récit biblique, le Dieu d’Abraham se révèle comme un Dieu qui ne veut pas de sacrifices d’enfant (voir Gn 22). Moïse, choisi par Dieu pour être son porte-parole et pour guider son peuple, est au départ un enfant sauvé du massacre systématique planifié par le Pharaon (Ex 2, 1-10). Et le salut des « enfants d’Israël » est obtenu au prix de la mort des enfants égyptiens (Ex 11 et 12). Selon la présentation narrative adoptée par les organisateurs juifs du canon biblique, Dieu semble même se faire connaître de façon privilégiée à travers des enfants : outre Moïse, choisi par Dieu et protégé dès sa naissance, certains Juges sont choisis par Dieu dès l’enfance, comme Samson, né miraculeusement d’une mère stérile (Jg 13). Le prophète Samuel, lui aussi, a été choisi par Dieu dès l’enfance (I S 2, 18 ; 3). On retrouve la même idée dans le récit de la vocation du prophète Jérémie, auquel Dieu déclare : « Avant même de te former au ventre maternel, je t’ai connu, avant même que tu sois sorti du sein, je t’ai consacré » (Jr 1, 5). Pour le prophète Isaïe, c’est la naissance de son fils qui est interprétée comme une parole divine (Is 8, 1-3). Les rois aussi sont investis d’une mission spéciale dès l’enfance, qu’ils aient été choisis au sortir de l’enfance, comme le jeune David (I S 16, 11) ; ou bien miraculeusement protégés comme Joas (II R 11). Parfois le choix divin s’est même exercé avant leur naissance (oracle de l’Emmanuel en Is 7, 14 ; 11, 1-5). Un psaume peut donc dire : « Jusqu’aux cieux, ta [Dieu] splendeur est chantée par la bouche des enfants, des tout-petits : rempart que tu opposes à l’adversaire, où l’ennemi se brise en sa révolte » (Ps 8, 3).
? Les hésitations du judaïsme au tournant de l’ère chrétienne
16 La foi juive primitive poussait donc à croire que Dieu peut parler à son peuple par la bouche de tout-petits enfants et même de nourrissons ! Pourtant, à mesure qu’on approche de l’ère chrétienne, cette conviction a été fortement nuancée. Après le retour d’Exil (à partir de 538 av. J.-C.), le judaïsme, réorganisé autour du Temple et du Sanhédrin, marqué par une vision assez pragmatique, est devenu une affaire d’adultes et d’hommes. Les femmes et les enfants sont considérés comme des êtres secondaires dont la parole est sans valeur. Quant à la Prophétie, qui autrefois pouvait avoir été donnée même à des petits enfants, elle est considérée comme « éteinte ». Désormais, ce sont les Prêtres et les Sages d’Israël qui détiennent la capacité de parler au nom de Dieu en interprétant les Écritures saintes.
17 En revanche, dès le IIIe siècle av. J.-C., dans un contexte marqué à la fois par les persécutions religieuses (notamment celles des souverains hellénistiques séleucides), marqué aussi par les compromissions de l’élite juive avec les tenants du paganisme et surtout par l’attrait exercé par la civilisation hellénistique, le judaïsme palestinien a vu émerger en son sein une importante réaction théologique. Ce courant, que les spécialistes qualifient d’apocalyptique [4], se situe dans la ligne des Prophètes antérieurs et surtout contemporains de l’Exil à Babylone (de 587 à 538 av. J.-C.). Ces apocalypticiens Juifs exercent leur influence dans la période troublée qui précède immédiatement l’ère chrétienne. Ils attendent une intervention spectaculaire de Dieu qui viendrait instaurer définitivement son règne. Une des caractéristiques de cette « apocalypse » attendue devait être la réouverture de la Prophétie. Alors, même les petits enfants seraient à même de chanter la gloire du Dieu d’Israël, comme le suggérait déjà un oracle du prophète Joël : « Après cela, je répandrai mon esprit sur toute chair. Vos fils et vos filles prophétiseront... » (Jl 3, 1). Dans ces communautés plus ou moins marginales, on prêtait attention à la parole des enfants, puisque Dieu peut faire entendre sa Parole en choisissant qui il veut comme messager.
18 En réaction à ces positions apocalyptiques, le judaïsme orthodoxe, centré autour du culte célébré au Temple de Jérusalem et sur la mise en pratique scrupuleuse de la Torah (la « Loi » juive exprimée dans les textes sacrés du Pentateuque et commentée par les Scribes), développait l’idée que seuls les sages avérés et patentés (les membres du Sanhédrin) sont à même d’interpréter les volontés divines contenues dans les écrits de Moïse. Ces « sages » sont les lointains prédécesseurs des rabbins qui réorganiseront le judaïsme après la catastrophe de 70 ap. J.-C. (révolte juive et destruction du Temple par les Romains) et surtout celle de 131-135 ap. J.-C. (seconde révolte juive et nouvelle répression romaine).
? Le point de vue chrétien
19 Jésus et ses disciples émergent dans ce contexte marqué par la théologie apocalyptique. On peut considérer que le Christianisme naissant se situe dans une ligne très proche de celle des apocalypticiens juifs. Si Jésus est effectivement l’envoyé de Dieu qui doit instaurer son Royaume, alors ses actes et ses paroles sont de la première importance. Or Jésus invite ses disciples à porter attention à la parole des petits enfants : « Laissez les petits enfants et ne les empêchez pas de venir à moi » (Mt 19, 14). Les disciples doivent même chercher à leur ressembler : « En vérité, je vous le dis, si vous ne retournez à l’état des enfants vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux » (Mt 18, 3). Et le Seigneur Jésus ajoute cet avertissement : « Gardez-vous de mépriser un seul de ces petits [enfants] car, je vous le dis, leurs anges dans les Cieux, voient sans cesse la face de mon Père qui est aux cieux » (Mt 18, 10). Et il se réjouit ouvertement à leur sujet : « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits » (Mt 11, 25).
20 En effet, pour les chrétiens, l’attention portée à l’existence des enfants, à leurs paroles et à leurs actions, trouve son enracinement dans un événement particulier : la naissance de Jésus lui-même. Les Évangiles sont suffisamment explicites sur ce point : Dieu a parlé aux hommes par un enfant, un nouveau-né. C’est un marmot vagissant qui est présenté comme le signe que Dieu donne de sa gloire et de la réalisation de son Règne de paix : c’est ce que dit explicitement l’annonce faite par les anges aux bergers de Bethléem (Lc 2, 12).
21 Aux yeux des chrétiens, certains épisodes de l’Ancien Testament, rejetés par le judaïsme rabbinique réfractaire à l’apocalyptique, prennent au contraire une valeur exemplaire. Quelques détails du Livre de Daniel en donnent un exemple intéressant. C’est un livre de style prophétique, datable de la période macchabéenne (IIe siècle av. J.-C.). Sa composition est très marquée par les tendances apocalyptiques. À tel point que, lors de la réorganisation juive de Yabné (70 ap. J.-C.), de larges parties de ce livre furent exclues du canon de la Bible juive, parce qu’elles avaient été rédigées en grec et non en hébreu. À l’inverse, les premiers chrétiens ont considéré ce livre comme inspiré et l’ont intégralement gardé dans leur canon des Ecritures. Et, dans notre perspective, il est suggestif de le mettre en rapport avec la présentation évangélique de l’enfance de Jésus. Nous allons donc nous y arrêter un peu.
? Un détour par le Livre de Daniel
22 Le Livre de Daniel mêle des faits exemplaires et des visions prophétiques. Les faits rapportés sont censés se passer à l’époque de la déportation des Juifs à Babylone. Mais en réalité, il a été rédigé dans le contexte de la grande persécution religieuse déclenchée par les envahisseurs grecs du royaume séleucide d’Antiochus Epiphane (167-164 av. J.-C.).
23 Dans ce récit, le personnage central, le jeune Daniel, fait partie des « enfants » d’Israël choisis pour être élevés et nourris à la table du roi de Babylone (Dn 1). Diverses péripéties nous les montrent plus sages et savants que les devins de Babylone. Et, restant fidèles au Dieu d’Israël, ils affrontent sans faiblir diverses persécutions dont Dieu les délivre miraculeusement. À la fin du livre, on évoque la conduite prophétique du jeune Daniel lors de la condamnation injuste de la chaste Suzanne (Dn 13).
24 Ce chapitre 13, rédigé en grec, n’a pas été conservé dans la Bible juive. Au contraire, les chrétiens l’ont gardé dans leur canon et l’interprètent comme une sorte de prophétie de la Passion de Jésus. En effet, dans cet épisode dramatique, une jeune femme est condamnée à mort par le conseil des Anciens d’Israël, sur le faux témoignage de deux vieillards libidineux qui ont essayé d’abuser d’elle. Menée au supplice, elle en appelle à Dieu. Alors l’Esprit divin investit un tout jeune garçon, Daniel, qui questionne habilement les deux vieillards et dévoile leur ruse. La vérité éclate alors, la justice est rétablie.
25 Cet enfant, beaucoup plus sage que les sages chargés de guider le peuple d’Israël, est investi d’une capacité prophétique. Cela n’est pas sans rappeler la situation du jeune Jésus au milieu des docteurs du Temple (Lc 2, 46-47), récit qui anticipe sur le procès de Jésus devant le conseil des Anciens d’Israël (Lc 22, 66-71). Si l’on veut accorder tout son poids théologique à ce texte, il faut en tirer une conséquence pratique : en régime chrétien, la parole d’un enfant, dans la mesure où elle est inspirée par Dieu, doit être prise en compte à l’égal de celle des adultes. Elle est même susceptible de l’emporter sur celle des responsables religieux officiels.
? Une divergence importante entre le judaïsme rabbinique et le christianisme naissant
26 Nous avons dit que les textes sapientiels de la Bible portaient la trace de la traditionnelle méfiance envers la parole des enfants. Historiquement, cette tendance l’a emporté dans le judaïsme rabbinique orthodoxe, dès la fin du IIe siècle de notre ère. Le Talmud [5] enseigne que la Prophétie a été retirée aux prophètes pour être confiée aux enfants et aux fous, ce qui n’est pas flatteur pour l’activité prophétique. Pour les rabbins, refondateurs du Judaïsme après la catastrophe de 70 ap. J.-C., c’était certainement une manière vigoureuse de se démarquer du christianisme qui, de son côté, se présentait originairement comme un renouveau de l’activité prophétique dont même les petits enfants peuvent être les acteurs.
27 Au contraire des Juifs, les premiers chrétiens se présentaient comme un peuple de prophètes autant que de prêtres. Dans la vie de l’Église, l’Esprit de Pentecôte est aussi un esprit de prophétie. Il est donc susceptible de faire parler des enfants, et éventuellement avec plus de sagesse que les adultes les plus sages. Dans ce cas, leurs paroles et leurs actes peuvent compter autant que ceux des adultes. Un enfant est donc capable de rendre gloire à Dieu et de témoigner de la foi. Les enfants martyrisés [6] pendant les persécutions anti-chrétiennes furent considérés comme d’authentiques saints. Les différents Actes des martyrs qui nous ont été conservés l’attestent. Les « saints innocents » de l’évangile (Mt 2, 16-18), nourrissons massacrés par Hérode, sont devenus une figure emblématique du témoignage de foi que peuvent donner des enfants même tout-petits. Nous allons voir maintenant comment cela a évolué pendant plus d’un millénaire, avant de s’estomper à la fin du Moyen Âge.
Évolutions et ambiguïtés de l’attitude chrétienne envers la « parole des enfants »
28 Concernant l’accueil favorable fait à la parole des enfants, le canoniste et historien du Droit ecclésiastique René Metz écrit : « Certes, de nos jours, l’autonomie et la liberté reconnues aux mineurs s’exercent dans d’autres secteurs et domaines que ceux où elles avaient l’habitude de s’exercer au Moyen Âge. Il n’en reste pas moins vrai que sur le principe d’une plus grande confiance faite à l’enfant mineur, la société contemporaine est plus près de la société médiévale qu’elle ne l’est de nos devanciers des XVIIe et XVIIIe siècles, et même du XIXe. » [7] Dans son esprit, le Moyen Âge se distingue des époques suivantes : avec la Renaissance et les Temps Modernes, la confiance envers les enfants mineurs s’amoindrit. Ce même auteur ajoute : « Une étude quelque peu approfondie laisse apparaître qu’aux XIIe et XIIIe siècles, on avait du mineur une conception qui se rapproche davantage de la nôtre que de celle de nos prédécesseurs. » [8] Cela resterait d’ailleurs à voir en ce qui concerne « la nôtre » qui n’est peut-être pas aussi accueillante envers les enfants qu’on le pense...
? L’enfant dans sa vie chrétienne et sacramentelle
29 Nous nous arrêtons sur la discipline des sacrements telle qu’elle s’est élaborée dès la période patristique et surtout au Moyen Âge, ainsi que sur quelques cas particuliers de réglementation ecclésiastique. Ces domaines nous paraissent révélateurs d’un état d’esprit général.
30 La question théologique et canonique qui se pose est celle-ci : on sait que dans la vie chrétienne, les sacrements sont le moyen d’entrer pleinement dans la vie nouvelle proposée par le Christ ; par la réception des sacrements, un individu devient disciple du Christ, enfant de Dieu, membre du peuple saint ; par rapport aux sacrements, tous les chrétiens sont à égalité et il n’y a pas de « petits » ou de « grands » chrétiens ; en réalité, il n’y a que des « fidèles », tous sauvés par le Christ, tous égaux devant Dieu [9]. Mais peut-on conférer tous les sacrements dès le plus jeune âge ? Ne faudrait-il pas, au contraire, attendre que la personne ait atteint une certaine maturité ? Après tout, devenir disciple du Christ suppose quand même un certain engagement personnel, puisque la foi demande de pouvoir être confessée. Comment un tout petit enfant pourrait-il devenir croyant ?
31 Les théologiens et les canonistes médiévaux ont traité le problème. Leurs arguments reposent généralement sur une distinction : pour les sacrements qui ne requièrent pas d’engagement ou de discernement moral, la validité est plénière, même s’ils sont reçus en bas âge. Il s’agit évidemment du Baptême et de la Confirmation. Le cas de l’Eucharistie reste ambigu : l’usage primitif et ancien était que « les enfants baptisés n’ayant pas encore l’usage de la raison peuvent recevoir l’eucharistie avec fruit » [10]. Mais dès les synodes de Trèves (1227) et de Bordeaux (1255), on voit se mettre en place une pratique tendant à n’admettre les enfants à l’Eucharistie qu’à partir du moment où ils sont capables de faire une différence entre le pain ordinaire et le pain eucharistique. C’est l’avis de Thomas d’Aquin : « Quand les enfants commencent à avoir un certain usage de la raison, si bien qu’ils peuvent concevoir de la dévotion pour ce sacrement, lors on peut leur conférer celui-ci. » [11] Pour lui, l’absence d’usage de la raison rapproche les enfants nouveau-nés et les fous : on ne doit pas leur conférer l’Eucharistie, contrairement à l’usage des Byzantins (« certains Grecs », dit-il). C’est ainsi que se met en place, au cours du XIIIe siècle, la notion d’âge de « discrétion » qu’on appellera par la suite « âge de raison ». Cette limitation demeure encore aujourd’hui dans l’Église latine, car dans les Églises d’Orient et chez les Orthodoxes, l’Eucharistie est conférée en même temps que le Baptême et la Confirmation.
32 En revanche, pour les sacrements qui requièrent un engagement positif (tel le Mariage) ou un discernement moral (c’est le cas de la Pénitence, puisque pour commettre des péchés et donc en être pardonné, il faut être capable de discerner le bien du mal), ou encore pour l’Ordre qui ouvre à l’exercice d’une responsabilité concrète, une limite d’âge semble s’imposer plus naturellement. Mais, dans ce cas, où la placer ?
33 Le cas du sacrement de Pénitence (Réconciliation) est particulièrement intéressant. De nos jours, l’âge minimum pour recevoir le sacrement de pénitence est le même que celui de l’Eucharistie. On retrouve l’âge de discrétion ou de raison, fixé aux alentours de 7 ans. Or, si l’Occident a retenu cet âge moyen de 7 ans, il a longtemps admis que la maturité spirituelle peut survenir beaucoup plus tôt, notamment quand il s’agit de faire la différence entre le bien et le mal. Certains auteurs admettent qu’un enfant puisse y avoir accès dès 3 ou 4 ans [12]. Dès lors, puisque le petit enfant peut discerner entre le bien et le mal, et avoir conscience du mal qu’il a fait, l’aveu d’un péché est possible. La parole d’un enfant de 3 ou 4 ans, du moins dans ce domaine de l’aveu d’un péché, doit donc être prise au sérieux. Nous y reviendrons avec le cas des criminels précoces.
34 Le cas du Mariage semble plus simple. Un engagement au mariage suppose un échange de paroles qu’on puisse prendre au sérieux. Ce sont des paroles qui engagent pour la vie. Actuellement, l’âge minimum pour accéder au mariage sacramentel est de 16 ans accomplis pour les garçons et 14 pour les filles [13]. Et pourtant, il faut remarquer qu’il ne s’agit-là que d’un empêchement dirimant et non pas invalidant. Cet empêchement pourrait faire l’objet d’une dispense accordée par l’évêque. En théorie, un enfant pourrait donc se marier validement, pourvu qu’il soit capable de s’engager librement !
35 Le cas du sacrement de l’Ordre est similaire. La validité du sacrement ne dépend pas des dispositions de celui qui le reçoit. Pour les scolastiques et aussi pour les théologiens post-tridentins, « l’usage de la raison n’est absolument pas requis pour la validité. L’Ordre n’est pas du nombre des sacrements qui requièrent pour leur validité un acte positif d’acceptation » [14]. Il en découle que « pour certaines raisons légitimes, on peut conférer licitement les ordres mineurs à des enfants encore privés de l’usage de la raison ». Cependant, « pour les ordres majeurs, l’honnêteté et le précepte de l’Église exigent l’usage de la raison » [15]. On aura noté que ces réserves touchent seulement la licéité de l’ordination, et non pas sa validité. Au XVIIIe siècle, une décision du pape Benoît XIV concernant des enfants en bas âge ordonnés prêtres dans l’Église copte a confirmé ce point : « Si contingeret ab episcopo non solum minores, sed etiam sacros ordines infanti conferri, concordi theologorum ac canonistarum suffragio definitum est, validam sed illicitam censeri hanc ordinationem... » [16] (Bulle Eo quamvis, du 4 mai 1745, § 20). Pour ce pape, le sacerdoce pourrait donc être validement conféré à un petit enfant, mais ce serait illicitement. Et quand l’enfant aurait atteint l’âge de se prononcer sur l’engagement au célibat, il prendrait position en toute liberté. S’il ne le veut pas, il ne serait pas soumis aux obligations sacerdotales. Cependant, l’ordination reçue resterait valide.
36 René Metz écrit : « La société médiévale faisait confiance à l’enfant ; elle permettait au garçon avant la 14e année et à la fille avant la 12e, d’accomplir des actes ou d’accéder à des fonctions qui nous paraissent incompatibles avec leur âge. » [17] C’est le cas de l’exercice des charges spirituelles (abbatiat) ou temporelles (royauté). L’usage d’offrir des enfants à une abbaye (oblatus), pour qu’ils puissent recevoir un bénéfice ecclésiastique, faisait que de tout jeunes enfants pouvaient se retrouver soumis aux vœux monastiques. On connaît par exemple le cas de Gottschalk, au IXe siècle, confié comme oblat à l’abbaye de Fulda encore enfant, et qui, devenu adulte contestait ce vœu. Un concile provincial, réuni à Mayence en 829, eut à statuer sur son cas. À cette occasion, le grand théologien Raban Maur, qui était son supérieur monastique, rédige un petit traité sur la question, le Liber de oblatione puerorum, où il démontre que de tels engagements monastiques, pris par des parents au nom de leur enfant, sont parfaitement valides.
? Méfiance grandissante envers la parole des enfants
37 Il est remarquable que les Chrétiens, du moins en Occident, n’aient pas conservé l’attitude primitive, favorable à la parole des enfants, puisque Dieu peut parler par leur bouche aussi bien que par celle des adultes. En fait, le christianisme médiéval s’est progressivement aligné sur une conception rationaliste.
38 Du côté du judaïsme médiéval, le choix était déjà fait avec le refus des perspectives apocalyptiques. Durant le Moyen Âge, le judaïsme rabbinique opère une rationalisation supplémentaire de la religion, attitude dont le grand Moïse Maïmonide (1135-1204) est le plus éminent représentant. Son opinion sur la Prophétie est révélatrice : « Si, dans ce que je viens de dire des prophètes, j’ai mis pour condition que ce soient de vrais prophètes, c’est pour faire mes réserves au sujet des gens de la troisième classe, qui possèdent, non pas des notions rationnelles, ni de la science, mais seulement des chimères et des opinions erronées. » [18]
39 Comme la majorité des rabbins, Maïmonide se méfiait des prétendues prophéties qui pourraient être portées par des gens sans instruction, incapables de se tenir à une démarche rationnelle. Les enfants – comme les femmes d’ailleurs – étant considérés comme des êtres particulièrement influençables, sensibles aux émotions plus qu’à la raison, ils ne pourront donc, en aucun cas, être pris au sérieux, quand bien même leur parole serait présentée comme venant de Dieu.
40 Pour les chrétiens, du moins en Occident, les choses ont commencé à évoluer au tournant des XII-XIIIes siècles, sans doute sous l’influence conjuguée de la philosophie d’Aristote et du Droit romain, tous deux redécouverts à ce moment. Telle est l’hypothèse que nous esquissons. Effectivement, c’est dans ce contexte scolastique occidental où l’aristotélisme tient une place majeure, que se précise la notion d’âge de « discrétion », au sens de « capacité de discernement », rapidement assimilé à l’âge de raison, sous l’influence des courants rationalistes de la théologie occidentale (« aristotélo-thomisme »). Alors que dans les périodes précédentes, la parole des enfants était encore reçue comme valable, on voit se dessiner une tendance à discréditer la parole des enfants, progressivement considérés comme des « incapables », dénués de raison, à l’instar des fous ou même des femmes !
41 Dans les faits, on constate que l’âge de l’accès à l’Eucharistie n’a cessé de reculer. À l’aube du XXe siècle, on communiait vers 14 ou 15 ans (communion solennelle). Et l’âge de la confirmation a reculé encore plus : aujourd’hui, il est admis de ne conférer ce sacrement qu’à l’adolescence ou au seuil de l’âge adulte, vers 18 ou 20 ans... Dans les délibérations, les enfants n’ont pas voix au chapitre. Par exemple, en cas de convocation d’un synode diocésain, il n’est pas prévu d’avoir des délégués synodaux enfants ! Leur parole ne compte donc pas. Dans le choix d’un parrain ou d’une marraine, le Code actuel demande de veiller à ce qu’ils aient 16 ans révolus, alors que le Code de 1917 ne demandait que 7 ans... Comme si l’enfance était un âge sans valeur, un âge où les paroles et les actes ne comptent guère. Cela veut-il dire que, pour l’Église actuelle, la parole des mineurs n’ait aucune valeur ?
? Et pourtant...
42 Pourtant, la notion d’âge de raison elle-même pose un problème. Qu’entend-on exactement par « raison » ? S’agit-il de la capacité à articuler un discours pleinement rationnel ? Mais à quel âge un enfant commence-t-il à raisonner ? Sans doute le fait-il bien avant d’être en mesure de raisonner à voix haute et de communiquer sa pensée à d’autres. Sa parole pourrait donc être prise au sérieux dès le plus jeune âge.
43 Ce qui pose d’ailleurs une autre question, d’ordre théologique cette fois : un enfant en bas âge peut-il commettre un péché personnel ? Si l’on admet qu’il est accessible à la raison, qu’il est capable de faire une différence entre le bien et le mal – du moins dans la perception qu’il est capable d’en avoir – alors il faut bien admettre qu’il puisse être pécheur [19].
44 Cette problématique du péché personnel n’est pas aussi éloignée de nos préoccupations modernes qu’on pourrait le penser. De nos jours, il arrive que des enfants soient convaincus d’avoir voulu et commis un meurtre. Il y a une vingtaine d’années, la Grande-Bretagne a connu un tel drame. Que fallait-il faire de ces enfants assassins ? Étaient-ils conscients de la gravité de leur geste ? Avaient-ils cette capacité de discernement, qui permet de distinguer le bien du mal ? On peut le penser puisqu’ils furent jugés coupables, mais sans qu’on puisse les incarcérer comme des majeurs ou même des adolescents. Ils étaient trop jeunes. Il a donc fallu imaginer un traitement sur mesure...
45 On peut constater une légère évolution, en sens inverse cette fois, à la fin du XIXe siècle. En 1910, le pape Pie X promulgue le décret « Quam singulari » sur l’abaissement de l’âge de la 1re communion. C’est un geste significatif qui rompt avec les usages antérieurs. Mais, pour ce pape, l’entière réception de ce sacrement demandera quand même un développement ultérieur de l’intelligence :« Ces bienfaits de Dieu dont je viens de vous parler, vous les avez goûtés avant d’en avoir la pleine et entière connaissance, parce que les saintes affections du cœur attendent encore à votre âge le parfait développement de l’intelligence. Aussi je vous recommande tout d’abord, comme fruit de votre visite au pape, la résolution et la promesse solennelle de fréquenter encore longtemps le catéchisme... » [20]
46 La codification canonique effectuée par Benoît XV en 1917, prend position sur la notion d’âge de raison, au can. 745, § 2. Le Code précisait l’interprétation de cette notion : « On entend sous le nom d’enfant, selon la norme du can. 88, § 3, ceux qui n’ont pas encore atteint l’usage de la raison. On leur assimile ceux qui sont en état de folie depuis leur enfance (amentes ab infantia), quel que soit leur âge. Sont censés adultes tous ceux qui jouissent de l’usage de la raison. » [21] On voit la faiblesse d’une telle approche : on confond la maturité (la sortie de l’enfance), la manifestation de la raison (qui intervient progressivement, mais avant l’usage de la parole) et la capacité rationnelle qui doit être présupposée chez tout être humain. On ne peut pas dire qu’un enfant, même très jeune, ne possède pas l’usage de la raison. C’est un être raisonnable en devenir. Inversement, un adulte raisonnable et parfaitement sain d’esprit, peut parfois et momentanément, sous le coup d’un stress ou d’une émotion forte par exemple, voir l’usage de sa raison être altéré ou empêché : cela ne lui interdit pas pour autant l’accès à l’Eucharistie. Il semble que, dans cette définition canonique, le fait d’assimiler les malades psychiques ou les handicapés mentaux à des enfants, n’est qu’un pis-aller qui embrouille la question plus qu’il ne l’éclaire. D’ailleurs, la pratique pastorale envers les personnes handicapées mentales a considérablement évolué depuis 50 ans : ainsi, de nos jours, on ne trouve plus choquant de faire participer à la communion eucharistique un adulte trisomique, alors qu’autrefois cela lui aurait été interdit au motif que son niveau d’intelligence ne lui permet pas de comprendre ce qu’il fait en communiant. Actuellement, on mettra plutôt en avant la sincérité d’une telle démarche, le sérieux avec lequel un trisomique est capable de participer aux sacrements de l’Église, sans oublier le caractère proprement mystérieux de l’action divine, action dont personne ne peut préjuger. Le changement dans la pratique est donc considérable et on peut penser que la théorie théologique devra en tenir compte.
47 Enfin, on notera le geste novateur du pape Jean-Paul II qui, en 1994, a publié une « Lettre aux enfants » [22]. Ce fait mérite d’être analysé : c’est la première fois qu’un pape s’adresse directement aux enfants. Et le texte de cette Lettre ne permet pas de penser qu’il s’adresse seulement aux enfants de plus de 7 ou 12 ans. On peut en conclure que si un pape adresse la parole même à de très jeunes enfants, il faudra bien accepter aussi d’écouter ce qu’ils disent... Leur « parole », même si elle reste enfantine au regard des normes du monde adulte, peut donc être prise en considération.
48 Nous avons donc observé une double évolution. D’abord, il y a eu une rupture opérée par le judaïsme, puis par le christianisme, par rapport aux conceptions de l’antiquité païenne. Cette rupture contribue à une réelle prise en compte de la parole des enfants, toujours susceptibles d’être bénéficiaires d’une inspiration divine.
49 Avec le christianisme naissant et jusqu’au début du Moyen Âge, l’enfance acquiert donc un statut et une dignité inédite jusque-là. Nos conceptions contemporaines de la dignité des enfants et de la nécessité de les protéger trouvent là leurs lointaines origines.
50 À partir du XIIIe siècle, le Christianisme occidental s’écarte de ce point de vue, rejoignant ainsi sans le vouloir les préjugés développés dans le judaïsme rabbinique envers la parole enfantine. L’influence de la rationalité aristotélicienne est ici indubitable. La notion d’âge de « raison » ou de « discrétion » se précise et se voit progressivement codifiée.
51 Cependant, comme nous l’avons montré, des distorsions subsistent, dans le domaine des sacrements en particulier. Aucun obstacle juridique ne peut être mis à la souveraineté de Dieu : donc un enfant peut recevoir la grâce divine comme un adulte. En revanche, dans le domaine des actes engageant la volonté humaine, les théologiens et les canonistes ont eu de plus en plus tendance à lier leur accomplissement aux capacités rationnelles des personnes. C’est ainsi que les fous ont été considérés comme des sortes d’enfants permanents, incapables d’accéder à la raison adulte. Au terme de cette étude, nous constatons que notre époque ne peut plus tenir cette position : la psychologie et la pédiatrie montrent que les capacités rationnelles existent bien avant que l’enfant ne puisse les exprimer. Les bébés ne sont pas des êtres irrationnels. Le malade mental ou la personne handicapée mentale ne sont pas non plus des êtres sans raison. Il faut en tenir compte. Au plan théologique, nous avons pu mettre en lumière certaines prises de positions tendant à relativiser la notion d’âge de raison. Une plus grande prise en compte de la parole des enfants en est le fruit. Et il est probable que cette évolution doive se poursuivre dans les décennies prochaines.
Notes
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[1]
] « L’avortement et l’infanticide sont des crimes abominables » déclare le IIe Concile œucuménique du Vatican, dans la constitution Gaudium et spes, sur l’Église dans le monde de ce temps (1965) au n° 51 ; voir aussi le n° 27. On retrouve une même affirmation de la part de Jean-Paul II, encyclique Evangelium vitae (1995), au n° 62. Rappelons que, pour l’Église catholique, le « Magistère » de l’Église s’exerce principalement à travers les définitions dogmatiques et morales énoncées par les papes et par les Conciles œcuméniques.
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[2]
] « Cependant, allons-nous épargner à l’impubère seulement les supplices, ou également la question ? L’opinion préférable est de ne pas appliquer non plus la question à l’impubère. Dans d’autres circonstances, en effet, il est usuel de ne pas torturer les impubères, mais de leur faire peur et de les frapper seulement à coup de fouet ou de cravache. » (Traduction personnelle).
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[3]
Par exemple, le commandement : « Tu ne livreras pas de tes enfants à faire passer à Moloch, et tu ne profaneras pas ainsi le nom de ton Dieu » (Lv 18, 21) ; ou encore ce reproche : « Vous immolez des enfants dans le lit des torrents » (Is 57, 5).
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[4]
Du grec apokaluptein : révéler, dévoiler ce qui est caché. Il s’agit de la révélation des desseins secrets de Dieu.
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[5]
Le Talmud est une immense compilation de discussions rabbiniques, compilation effectuée au Ve siècle après Jésus-Christ, mais rassemblant des traditions orales dont certaines remontent au Ier siècle après Jésus-Christ et sont donc contemporaines de Jésus. Voir : Hermann L. STRACK et Gunter STEMBERGER, Introduction au Talmud et au Midrash, Paris, Cerf, 1986.
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[6]
Dans le grec des premiers chrétiens, le terme « martyr » renvoie explicitement à la notion de « témoin ».
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[7]
René METZ, La femme et l’enfant dans le droit canonique médiéval, Londres, avant-propos de 1985, p. X.
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[8]
René METZ, op. cit., avant-propos, p. IX.
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[9]
Alain BOUREAU (La religion de l’État. La construction de la République étatique dans le discours théologique de l’Occident médiéval, 1250-1350, Paris, Les Belles Lettres, 2006) a très bien montré ce fondement théologique de nos théories modernes de l’État démocratique.
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[10]
Alfred VACANT, Eugène MANGENOT, Dictionnaire de Théologie Catholique, art. « Communion eucharistique », tome III-1, col. 495-496).
-
[11]
Thomas d’AQUIN, Somme Théologique (IIIa pars, q. 80, art. 9, ad 3um). Nous donnons ici la traduction de l’édition du Cerf (1986).
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[12]
Dictionnaire de Spiritualité, article « enfant », tome IV, col. 714 s.
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[13]
Code de Droit Canonique, can. 1083. Ces dispositions sont les mêmes que celles du Code de 1917.
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[14]
Alfred VACANT, Eugène MANGENOT, Dictionnaire de Théologie Catholique, article « Ordre » (Tome XI-2, col. 1314).
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[15]
Ibidem.
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[16]
] « S’il arrivait qu’un évêque confère à un enfant non seulement les ordres mineurs, mais encore les ordres sacrés [diaconat ou prêtrise], les théologiens et les canonistes s’accordent clairement pour juger que cette ordination est valide quoique illicite » (trad. pers.).
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[17]
René METZ, op. cit., avant-propos, p. IX.
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[18]
Moïse MAÏMONIDE, Le guide des égarés, II, 38,Verdier, Lagrasse, 1979.
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[19]
Dictionnaire de Spiritualité, article « enfant » (tome IV, col. 719 sq).
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[20]
Pie X, Discours à des premiers communiants français (14 avril 1912).
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[21]
Alfred VACANT, Eugène MANGENOT, Dictionnaire de Théologie Catholique, Tables générales, col. 44.
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[22]
Lettre aux enfants (13 décembre 1994).