CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Ce texte vise un double objectif : tout d?abord préciser la spécificité des acceptions successives du terme parentalité, leurs convergences, leurs incompatibilités, et la synthèse problématique qui s?en est dégagée progressivement, articulant les apports sur la question de l'anthropologie, la psychanalyse, la sociologie et l'action publique ; ensuite, discuter un éventuel emploi heuristique de celui-ci, qui dépasse les formalisations réductrices liées à une opposition caricaturale entre des niveaux d?appréhension du fait parental strictement différenciés, pour l'envisager comme un organisateur de notre modernité familiale, un véritable dispositif de parentalité. Dispositif dont l'émergence socio-historique correspond à la remise en cause du modèle matrimonial de la famille dans les sociétés occidentales, la restructuration de la parenté qui l'accompagne, et l'affirmation des logiques d?affiliation dans les relations sociales, jusqu?à en affecter la forme des rapports sociaux.

2 Tout le monde pense savoir intuitivement ce dont on parle quand on évoque la parentalité, tant le terme est passé dans le langage des politiques, des journalistes, des travailleurs sociaux... Pourtant, l'histoire de son utilisation montre qu?il a d?abord été utilisé dans des acceptions savantes au sein de disciplines qui, lorsqu?elles le mirent à l'honneur, restaient peu médiatisées : l'anthropologie, la psychanalyse, la sociologie...

3 Ce texte se propose donc d?atteindre un double objectif : tout d?abord préciser la spécificité des acceptions successives du terme, leurs convergences, leurs incompatibilités, et la synthèse problématique qui s?en est dégagée progressivement [1] ; et, ensuite, discuter un éventuel emploi heuristique de celui-ci, qui dépasse les formalisations réductrices liées à une opposition caricaturale entre des niveaux d?appréhension du fait parental strictement différenciés, pour l'envisager comme un organisateur de notre modernité familiale, un véritable dispositif de parentalité. Certes, le plus simple consisterait à distinguer les termes au moyen des fonctions clairement différenciées qu?ils seraient censés recouvrir. Ce qui permettrait d?opposer terme à terme la parenté, structure structurée par l'alliance et structurant la filiation, qui définit socio-juridiquement les liens unissant les différents membres d?une famille au sein d?un système d?interactions entre des réseaux de parenté ; et la parentalité, espace de mise en ?uvre de relations parentales appréhendées dans leur concrétude, permettant d?identifier différentes catégories d?acteurs ayant une fonction parentale sans forcément directement participer du système de parenté. D?un côté, une inscription sociale d?un système de liens ; de l'autre, un réseau de pratiques engendrant des liens plus informels, ceux établis entre un enfant et des adultes endossant un rôle parental (juridiquement légitimé ou non). Un certain nombre d?approches de la parentalité participent de cette conception excluante, par exemple la définition théorique qu?en donnent Martine Lamour et Marthe Baracco, c?est-à-dire « l'ensemble des réaménagements psychiques et affectifs qui permettent à des adultes de devenir parents »[2], ou bien les propos de certains représentants institutionnels, par exemple de l'Unaf : « L?exercice de la fonction parentale, ou parentalité (...) doit sans cesse être rapporté à ce qui est à l'origine, la paternité et la maternité dont elle procède et qu?elle ne fait que manifester ou parfois, en cas de besoin, suppléer. »[3]...

4 Cette option ne me semble pas la plus pertinente, même si elle a le mérite de chercher à clarifier les choses, car ce souci de clarification présente deux écueils : un excès de simplification, d?une part, ne permettant pas de mettre en ?uvre toutes les ressources offertes par la « nouvelle » notion de parentalité ; d?autre part, une sous-estimation de la généalogie du terme, redevable pour le moins de trois disciplines différentes et ayant déjà fait l'objet de plusieurs tentatives de conceptualisation ; mentionnons par exemple Les enjeux de la parentalité[4]ou La pluriparentalité[5].

? Sédimentation des usages du terme parentalité

5 À l'issue du bilan critique que j?ai réalisé à propos de l'évolution des savoirs sur la petite enfance et les figures parentales [6], l'occasion me fut donnée par Didier Le Gall de rédiger un texte synthétisant les principaux apports de cette recherche par rapport à la parentalité [7]. L?entreprise de généalogie de ce terme est restée incomplète. Si l'une de ses filiations est à chercher dans la traduction du terme anglais parenthood, Maurice Godelier [8]nous rappelle que bien avant son adoption par des représentants de la clinique psychanalytique, il fut utilisé par des anthropologues, en premier lieu Bronislaw Malinowski dès les années 30  [9].

? Regards anthropologiques

6 Deux acceptions du terme parenthood se retrouvent ainsi convoquées dans la traduction par parentalité, et ce, dans deux champs différents. À la suite de Malinowski, d?autres approches fonctionnalistes ont été développées par des anthropologues, notamment le célèbre travail d?Esther Goody [10], qui attribue cinq fonctions différentes à la parentalité : la procréation, le nourrissage, l'éducation, l'attribution d?identité, l'accès au statut d?adulte. Agnès Fine [11]insiste sur la diversité des montages sociaux mettant en relation ces fonctions avec des acteurs sociaux différenciés ; Maurice Godelier, pour sa part, propose de leur adjoindre deux fonctions complémentaires : le droit pour certains parents d?exercer certaines formes d?autorité, et l'interdiction pour ces (proches) parents d?avoir des relations sexuelles avec certaines catégories d?enfants...

7 Notons qu?il identifie ces fonctions comme des fonctions de la parenté dans le champ de la parentalité[12], à la différence d?Agnès Fine pour laquelle la parentalité « recouvre le champ des relations parents/enfants, une partie seulement de celui de la parenté. »[13]La définition de la parentalité proposée alors par Maurice Godelier cherche à dépasser celle d?une simple désignation des relations parents/enfants au sein des rapports de parenté, comme on le propose généralement de façon hâtive. Sa propre interprétation du terme s?établit ainsi par contraste et en complémentarité avec le concept pour lui central de parenté, mais sans que l'on puisse vraiment distinguer ce qui ferait la spécificité de chacun de ces termes : les fonctions de la parentalité d?Esther Goody devenant chez lui des fonctions de la parenté... De fait, l'extension qu?il donne au concept de parenté laisse peu de place pour un autre terme ; toutefois la spécificité reconnue à la parentalité est de mettre en ?uvre des fonctions de la parenté. Or, l'un des intérêts majeurs de son ouvrage est de montrer que la parenté est incorporée dans les individus et avec elle l'ordre social qu?elle représente ; la notion de parentalité pourrait expliciter quelque chose de cette incorporation, à l'instar de ce que font déjà les psychanalystes à leur niveau. Si sa définition en reste à l'évocation de cette dimension, elle a du moins le mérite de la relier aussi bien aux règles sociales qu?aux comportements.

8 « Pour nous, le terme ?parentalité? désigne l'ensemble culturellement défini des obligations à assumer, des interdictions à respecter, des conduites, des attitudes, des sentiments et des émotions, des actes de solidarité et des actes d?hostilité qui sont attendus ou exclus de la part d?individus qui ? au sein d?une société caractérisée par un système de parenté particulier et se reproduisant dans un contexte historique donné ? se trouvent, vis-à-vis d?autres individus, dans des rapports de parents à enfants. Ces rapports diffèrent entièrement s?ils sont leurs parents en ligne directe ou en ligne collatérale, leurs parents par alliance ou par adoption, etc. Ces obligations et interdictions, ces comportements et ces sentiments attendus ou exclus de la part d?individus en position de parents, sont donc étroitement liés à la nature même des rapports de parenté que ces individus représentent et reproduisent, et dépendent de la place que chacun d?eux occupe au sein de ces rapports, et qui change au cours de leur existence»[14]Cette définition touche du doigt la difficulté d?articuler deux concepts dont les angles d?approche de la même réalité divergent, en laissant entrevoir que des individus se trouvant « en position de parents » ne sont pas forcément clairement positionnés dans des « rapports de parenté ». Ceux-ci peuvent exister socialement, mais ne pas être juridiquement définis aujourd?hui, tant il est vrai que nous vivons une période de mutation sociale, voire une révolution culturelle [15]ou anthropologique [16]. Les fonctions dévolues à des parents sont ainsi assumées par des individus en position de parents, sans qu?ils soient forcément définis comme tels dans des rapports de parenté socialement et juridiquement délimités, comme c?est le cas pour les beaux-parents, qui n?ont aucun statut juridique particulier...

9 Est donc donnée ici une représentation de la parentalité comme concrétisation ou mise en ?uvre des fonctions de la parenté, mais avec une double dissociation : entre les acteurs de la parenté et ceux de la parentalité, et entre l'extension des rapports de parenté et l'extension des rapports de parentalité. En effet, tout le champ de la parentalité n?est pas recouvert par les structures de la parenté, car ainsi que le rappelle Maurice Godelier : « les rapports de parenté sont, comme tous les rapports sociaux, investis d?intérêts qui débordent le champ de la parenté, et il s?agit aussi bien de rapports de coopération que de rapports de pouvoir et d?autorité et de rapports de force ». Les rapports de parenté sont toujours articulés à d?autres rapports sociaux, et cela a pour conséquence importante de contribuer à les modifier en retour (ce qu?on a vu avec l'Assistance médicale à la procréation). Même les mutations de la parentalité contribuent à cette évolution, comme le montrent bien les exemples de la beau-parentalité ou l'homoparentalité... Ce qui fait alors question, c?est bien le passage de pratiques sociales existantes à des règles d?encadrement de ces pratiques. L?approche anthropologique permet de ce fait de préciser les différences d?extension des deux termes, parenté et parentalité, et la façon dont ils sont susceptibles de s?articuler. Ce que s?attacheront à préciser les sociologues, mais aussi les psychanalystes.

? L?inflexion psychanalytique

10 L?utilisation qui est d?abord faite de ce terme par les psychanalystes se situe sur un autre registre, bien que les deux ne soient pas sans relation. En 1959, Therese Benedek fait paraître son fameux article « Parenthood as a developmental phase » [17], dans lequel elle développe une approche de la parentalité comme processus de construction des positions parentales à travers notamment la vie fantasmatique et la réactivation d?investissements archaïques pour chacun des parents, investissements intervenant à un stade où le vécu fantasmatique de la grossesse est très semblable pour les deux sexes. « Le premier courant organisateur de la phase orale (...) est à l'origine des tendances parentales, de l'amour maternel et de l'amour paternel », nous dit Therese Benedek (p. 395). Geneviève Delaisi surenchérit en ajoutant : « En termes psychanalytiques, cette façon de voir met l'accent sur l'importance prévalente, pour la psychodynamique de la parentalité, des éléments prégénitaux, au détriment des éléments ?dipiens classiquement mis en avant. »[18]Remarquons au passage que cette approche de la parentalité relativise l'importance extrême donnée dans notre culture à la différence biologique des sexes comme organisatrice de positions parentales... [19]Idée sur laquelle nous reviendrons.

11 Dès 1961, le pédopsychiatre et psychanalyste français Paul-Claude Racamier se réapproprie le concept dans son article sur les psychoses du post-partum[20], d?abord sous la figure de maternalité, puis par extension de paternalité et de parentalité. Un premier déplacement s?est sans doute déjà opéré, mais est inaugurée une longue tradition d?évocation de la parentalité [21]au sein des écrits psychanalytiques. Celle-ci en arrivera à constituer le terme générique utilisé pour un hommage post mortem à Serge Lebovici [22].

12 Plusieurs définitions en ont été produites, dont nous pouvons repérer les caractéristiques principales. Serge Stoléru [23]reprend ainsi la démarche de Paul Claude Racamier, en partant de l'idée de maternalité et distinguant les pratiques parentales de leur vécu subjectif : « La maternalité est à la maternité ce que la réalité interne est à la réalité externe. En effet, tandis que la maternité se définit par la survenue dans la réalité externe de préparatifs en vue de concevoir un enfant, d?une grossesse, d?une naissance, puis d?une relation mère-enfant, la maternalité se définit par le fonctionnement psychique en relation avec ces mêmes évènements. Aussi, définissons-nous la maternalité d?un sujet comme l'ensemble organisé de ses représentations mentales, de ses affects, de ses désirs, et de ses comportements en relation avec son enfant, que celui-ci soit à l'état de projet, attendu au cours de la grossesse, ou déjà né. Le développement ci-dessus est entièrement transposable à la paternalité et, plus généralement, à la parentalité. Cette dernière est une généralisation élaborée à partir des concepts de maternalité et de paternalité. [...] De plus, la parentalité s?étaye sur une fonction psychique et biologique, celle d?assurer le développement et le bien-être de son enfant. [...] La parentalité d?un sujet s?enracine dans son histoire. Elle s?élabore en particulier sur la base des identifications à chacun des deux parents. [...] C?est le fonctionnement de la parentalité qui permet que la transmission intergénérationnelle s?opère »

13 La parentalité est bien conçue ici comme un processus psychique d?élaboration d?une position parentale interne au sujet, qui accompagnerait le déroulement des différentes étapes de prise en charge de l'enfant de sa conception à son indépendance, tout en inscrivant l'enfant dans une généalogie. Cette définition restrictive a été élargie par d?autres auteurs, qui tendent à y inclure d?autres dimensions plus concrètes. Ainsi, la définition déjà évoquée de Martine Lamour et Marthe Baracco : « La parentalité peut se définir comme l'ensemble des réaménagements psychiques et affectifs qui permettent à des adultes de devenir parents, c?est-à-dire de répondre aux besoins de leur (s) enfant (s) à trois niveaux : le corps (les soins nourriciers) ; la vie affective ; la vie psychique. C?est un processus maturatif. »[24]

14 Remarquons que cette vision fonctionnaliste fait référence à un modèle biologisant par le biais de l'idée de besoins, tout en insistant sur le processus de transformations psychiques que manifeste l'accès à la parentalité : la parentalisation. Si Jacques Dayan [25]reprend cette idée de parentalité comme processus, il y ajoute cependant une vision plus synchronique en parlant de l'état d?être parent : « La parentalité est un concept en émergence désignant le processus menant à l'état d?être parent ou, dans une perspective plus synchronique, l'état d?être parent. » Relevant les multiples phénomènes psychiques évoqués à propos de la parentalité, il aborde tour à tour les idées de préoccupation maternelle primaire de Donald W. Winnicott, d?attachement de John Bowlby, d?identification, d?incorporation, de liens fantasmatiques, ou plus récemment d?héritage transgénérationnel selon Serge Lebovici. Ce qui l'incite à conclure son article par une mise en perspective : « Le concept de parentalité opère une réorientation psychopathologique éclairant le versant parental de l'interaction parent-enfant. Il se réfère à un état inscrit dans un processus de transmission, définissant un champ nouveau qui nécessitera pour se pérenniser de forger de nouveaux outils conceptuels et d?en apprécier la validité. »

15 C?est bien dans cette perspective que se situe Laeticia Solis-Ponton [26], tout en mettant l'accent sur l'idée d?étude du processus à l'?uvre : « La parentalité impliquerait, selon le suffixe ité, la notion d?étude, de connaissance. Ainsi, on pourrait dire que la parentalité est l'étude des liens de parenté et des processus psychologiques qui en découlent. La parentalité nécessite un processus de préparation, voire d?apprentissage, non dans le sens d?une pédagogie parentale mais comme un travail qui met en évidence la complexité et le caractère paradoxal du phénomène naturel de la parenté ». La parentalité en vient ainsi à représenter le travail psychique nécessaire aux acteurs pour investir leurs positions dans la parenté, dont on sait par ailleurs que loin de constituer un « phénomène naturel » son organisation en système révèle toute sa dimension culturelle. Notons ici la difficulté qu?éprouvent les cliniciens à prendre distance avec le naturalisme. Pourtant, cette difficulté n?empêche pas l'auteure d?appréhender par la suite la parentalité comme un système de catégories mentales découlant des structures de la parenté. En ce sens, elle va établir une relation entre les aléas de la parentalisation [27]et les catégories réglées par le système de parenté, telles que genre et génération.

16 « ... La parenté humaine que nous étudions sous le terme de parentalité serait l'équivalent de la construction d?un système de catégories mentales : catégorie d?âge et différence de générations : père-fils, mère-fille, parents-enfants ; catégorie de sexe et différence de genre : homme-femme. Ce modèle introduit l'asymétrie, l'hétérogénéité, voire la complexité, comme les éléments qui organisent les relations parents-enfants. Et dans la mesure où ces principes seront intériorisés par les membres du groupe familial, ils vont constituer un cadre de référence qui organisera les représentations du monde et de soi par rapport à l'entourage. Ainsi, la parentalité organise la pensée des parents face à eux-mêmes et face à leur enfant, et elle organise également la pensée de l'enfant qui apprend que les parents et les enfants ont des attributions et des obligations différentes, qu?une fille et un garçon ce n?est pas la même chose. »

17 Effleurant la question de la définition socio-historique des catégories, Laeticia Solis-Ponton souligne leur inscription dans une structure différentielle et évolutive, où l'appartenance sexuelle se situe dans une continuité tout au long de l'histoire du sujet [28], tandis que l'ordre des générations se situe, lui, en synchronie, le changement des positions générationnelles s?effectuant de manière simultanée, selon le processus de permutation symbolique des places analysé par Pierre Legendre [29]. La naissance du premier enfant fait passer le sujet d?une position d?enfant à celle de parent, et ses propres parents à celle de grands-parents.

18 Depuis Paul-Claude Racamier, on est ainsi progressivement passé d?une définition de la parentalité en termes de fonctionnement psychique et de transformations subjectives internes à une nouvelle définition qui, outre cette dimension de processus psychique, inclut désormais des pratiques parentales, renvoyant à des catégories de pensée en rapport avec la parenté, la différence des sexes et la génération. Cette approche sera systématisée avec le rapport Houzel, mais l'on ne pourrait comprendre la façon dont il se positionne sans prendre en compte les travaux sociologiques qui, entre temps, avaient abordé la question.

? L?originalité de l'approche sociologique

19 Après une longue période de veille, la notion de parentalité refait surface dans le champ des sciences sociales, et celui de l'action sociale, sans doute parce que la constitution de la parentalité en enjeu de discours renvoie aux profondes transformations sociales qui affectent le domaine privé et la réorganisation des rapports entre celui-ci, le scientifique et le politique. En 1986, la revue Actions et recherches sociales emploie le terme pour évoquer La famille instable[30] ; en 1990, Vincent de Gauléjac et Nicole Aubert parlent de la parentalité solitaire [31] ; en 1991, paraissent les Actes des journées sur le placement familial, qui évoquent la parentalité dans le soin à l'enfant déplacé[32]. Le nouvel intérêt pour la notion de parentalité est impulsé par une approche sociale et sociologique, à la suite des travaux sur les mutations familiales, notamment ceux initiés par la Cnaf sur « les familles monoparentales » [33]. De fait, on peut faire remonter au milieu des années 70 l'apparition du néologisme monoparentalité, à la suite de l'adoption progressive par les sociologues, puis les démographes et politiques, de l'expression familles monoparentales pour désigner l'ensemble des situations familiales où l'enfant est élevé par un seul de ses parents. Nadine Lefaucheur [34]montre bien comment cette traduction de l'expression anglaise one parent families fut proposée dans une perspective féministe pour mettre fin à la stigmatisation des-mères isolées, non à la suite d?un veuvage, mais d?une séparation ou d?un abandon. La monoparentalité, puis par la suite la beauparentalité, l'homoparentalité, la grand-parentalité... sont ainsi des termes qui désignent des situations parentales de fait, se détachant sous l'effet des mutations sociales du modèle conjugal de la parentalité jusqu?alors exclusif. L?importance démographique croissante de ces situations parentales et la reconnaissance sociale qui leur est accordée traduisent la désinstitution de la conjugalité et la crise du modèle matrimonial.

20 Le mérite d?Irène Théry fut d?avoir particulièrement bien saisi l'importance du processus de désinstitution de l'alliance, qu?elle qualifia de démariage[35] ; et d?avoir souligné le fait que les trois dimensions constitutives du parental et de la filiation, à savoir la composante biologique, la composante domestique et la composante généalogique [36]ont été longtemps réunies et perçues comme indissolubles en vertu d?une véritable fiction juridique socialement élaborée par un processus historique : le mariage. Constitutif du modèle matrimonial de la famille conjugale, il a pâti à la fin du XXe siècle du dégagement partiel du dispositif d?alliance, « système de mariage, de fixation et de développement des parentés, de transmission des noms et des biens »[37], d?avec ce que Michel Foucault a analysé comme dispositif de sexualité, qui jusqu?alors le recouvrait en s?y étayant.

21 « Ainsi, la force du ?modèle matrimonial' de construction de la famille est-il de fusionner, sur une personne et une seule pour chaque sexe, les trois composantes de la filiation, et de le faire à partir de la force d?une fiction juridique, entraînant en quelque sorte à sa suite le fait à se conformer à la fiction. Si des exceptions existaient à cette règle, et en premier lieu l'adoption, elles étaient d?autant plus aisées que la dimension généalogique était fortement assurée. Or, que se passe-t-il aujourd?hui ? Le démariage multiplie les cas où la filiation ne s?édifie plus ou ne se maintient plus dans le cadre du mariage. Ainsi se distinguent trois questions qui n?en faisaient qu?une ?au temps du mariage?, la question du couple, celle de la famille et celle de la filiation. »[38]

? L?émergence historique d?un dispositif de parentalité

22 Si l'on reprend la périodisation proposée par Michel Foucault, on peut dire qu?à la dominance du dispositif d?alliance dans la production de la famille qui s?est affirmée jusqu?au début du XXe siècle, et faisait dépendre la constitution de la famille de celle du couple, s?est articulée l'affirmation à partir du XIXe siècle d?un dispositif de sexualité étayé sur le dispositif d?alliance, mais que sa logique propre va amener à partiellement s?en détacher, jusqu?à promouvoir la réalisation hédoniste de soi comme modèle de l'accomplissement conjugal [39].

23 Mais, à partir du moment où le couple conjugal peut se délier du couple parental (ce que vient symboliquement souligner l'introduction du divorce par consentement mutuel en 1975), les conditions pour la constitution de la parentalité en dispositif vont se mettre en place, et celle-ci va s?élaborer comme question sociale sous l'influence de sa quadruple implication dans les champs de l'anthropologie, de la clinique psychanalytique, de la sociologie et du politique. Dans le même temps où la parentalité acquiert véritablement une dimension sociale, c?est-à-dire à ce moment où émerge un dispositif de parentalité, on assiste à une élaboration du concept de parentalité. L?on peut désormais distinguer à côté de la parentalisation psychique qui signe l'accès à une position parentale subjective une parentalisation sociale, correspondant à la dimension généalogique de la filiation, se marquant par l'enregistrement social de l'attribution de parenté et se signifiant par l'attribution du nom. Ce que l'approche sociologique permet clairement d?identifier c?est l'existence de situations où le fait d?occuper une position parentale et d?investir ainsi une parentalité psychique ne va pas de pair avec une reconnaissance sociale de cette position parentale et l'inscription dans une parentalité socio-juridique, attribuant une place dans le système de parenté. Sujet sur lequel sont interpellées les politiques publiques, alors même que notre système juridique reste organisé sur l'exclusivité de la bi-filiation.

24 La question qui se pose alors concernant la filiation est énoncée comme une recherche du « vrai » parent : est-il celui qui a biologiquement conçu, celui qui a donné son nom, celui qui a élevé ?... « Cette alternative sans issue, la crise de l'institution de la filiation contraint les individus à la prendre en charge eux-mêmes, négociant comme une affaire personnelle l'univers symbolique de la parenté. »[40]Les risques d?une désorganisation du champ de la parentalité existent tant au plan social qu?au plan individuel, s?accompagnant de la multiplication aussi bien des dénis de parentalité que des désaffiliations parentales, dont on sait qu?elles touchent préférentiellement les pères [41], alors que se précarisent les situations monoparentales féminines... [42]

25 Une fois cette problématique de la parentalité remise au goût du jour par la sociologie, elle a été rapidement réinvestie par des approches « psy », dorénavant plus ouvertes aux questions des nouvelles parentalités, pour trouver dans un deuxième temps une audience de plus en plus considérable auprès de l'action sociale. Les relations avec l'intérêt qu?y portent les politiques publiques dès le milieu des années 90 y sont sans doute dialectiques, bien que les deux approches dont elles s?inspirent paraissent peu conciliables. L?action sur et à travers la parentalité est à l'ordre du jour, et se multiplient les colloques et les journées de formation centrés sur le soutien et l'accompagnement à la parentalité, alors que font florès les ouvrages qui utilisent le terme sans trop de précautions, dans une perspective opérationnelle. Parentalité en question, en tensions, sans violence, efficace, ouverte à l'action éducative, à la pédagogie et la culture d?elle même. Autant de titres d?ouvrages récents.

? Médias et politiques publiques : la production d?un usage social de la parentalité

26 Les politiques publiques s?inspirant des travaux scientifiques moyennant un certain décalage, relayées par les acteurs délégués à leur mise en ?uvre (travailleurs sociaux et gestionnaires du familial, de la santé et du social) ont réalisé une synthèse aléatoire de cette problématique du lien parental subsumée sous le terme de parentalité dans un objectif pragmatique. Les médias lui accorderont d?emblée un crédit maximal et lui offriront une caisse de résonance incomparable au motif que le terme est intelligible et semble répondre « spontanément » à l'émergence d?une question sociale contemporaine.

27 Écoutons Claude Martin : « L?apparition d?une nouvelle notion dans le débat public est généralement le signe d?un processus de construction d?un problème public nouveau »[43]. Et si les débats sur la parentalité s?inscrivent sur la toile de fond que constituent les interrogations sur l'évolution de la famille, cette notion semble véhiculer « une inquiétude sur la capacité des parents d?assumer leur rôle, de faire face à leurs obligations », renvoyant au thème de la « démission des parents », dont la prégnance croît constamment depuis les années 90. Jacques Faget d?ajouter : « Si discours politiques, émissions de télévision ou de radio, articles de presse, s?emparent du thème, c?est pour stigmatiser l'effondrement du rôle des parents dans la socialisation des enfants, ces enfants que l'on traite de ?sauvageons? et qui n?auraient pas reçu en héritage ces codes culturels qui permettent de bien se tenir en société. Indéniablement, le discours sur la parentalité est un discours d?ordre public. »[44]

28 C?est d?autant plus vrai aujourd?hui que la délinquance future des adolescents est supposée prédictible dès l'âge de 3 ans [45], selon un rapport Inserm fortement controversé [46]. Pourtant, plusieurs travaux ont remis en question cette responsabilité dévolue aux seuls parents pour rendre compte des dérives délinquantes. Ainsi de Laurent Mucchielli [47], pour qui « les facteurs socio-économiques s?avèrent bel et bien les facteurs les plus déterminants dans la fabrique de la délinquance, mais de façon indirecte, en ruinant les capacités de contrôle des parents et surtout des pères. » Éric Debardieux surenchérit en rappelant que l'impuissance dans laquelle se retrouvent certains parents face à leurs enfants « est bien collective et ne doit pas conduire à culpabiliser les seuls parents. »[48]

29 Claude Martin en conclut très justement qu?« une réflexion sur la parentalité ne peut se limiter à évoquer des principes et des normes. Il s?agit d?engager une réflexion sur ?la condition parentale? dans la société contemporaine, en tant qu?elle dépend étroitement des conditions quotidiennes d?existence, avec leurs contraintes profondément inégales. »[49]C?est rarement le cas dans les discours sur la parentalité, tant ils ont tendance à rabattre sur la seule responsabilité des parents des déterminations du comportement des enfants et des jeunes qui participent pourtant de l'organisation sociale, de ses règles culturelles et de ses caractéristiques socio-économiques.

? Opérationnalisation de l'approche : le rapport Houzel et les axes de la parentalité

30 Ce qui est désigné comme le champ de la parentalité constitue ainsi un champ éclaté où une pluralité de discours hétérogènes se font entendre, même si l'idée que l'on s?en fait communément peut paraître relever d?une intuition largement partagée. C?est dans ce contexte de relative indécision de l'extension du concept, et de télescopage dans les médias et les discours politiques d?approches de natures différentes qu?une première tentative importante de définition et d?opérationnalisation de la problématique de la parentalité a été effectuée sous la responsabilité de Didier Houzel par un collectif comprenant psychiatres, psychologues, psychosociologues, psychanalystes, juristes, pédiatres et professionnels de la petite enfance. Le résultat de ce travail, publié sous le titre Les enjeux de la parentalité[50]manifeste l'importance de l'effort d?élaboration de la notion en concept, même si l'on peut penser que les dimensions sociologique et anthropologique y sont insuffisamment prises en compte.

? Les trois axes de la parentalité

31 Le principal apport de cet ouvrage pour notre propos réside dans la proposition de dégager trois axes correspondant à trois niveaux d?analyse articulés sur la parentalité : l'exercice, l'expérience et la pratique de la parentalité. Chacun de ces niveaux correspond à une dimension spécifique à l'intersection desquelles se définit la parentalité : l'expérience renvoie à ses fonctions, la pratique à ses qualités, l'exercice à son identité. Si les deux premières dimensions sont aisées à définir, la chose apparaît plus délicate pour la dernière, qui peut prêter à ambiguïté.

32 L?expérience de la parentalité, c?est « l'expérience subjective de ceux qui sont chargés des fonctions parentales [...], l'expérience affective et imaginaire de tout individu impliqué dans un processus de parentification. » (p. 115) On y reconnaît bien la dimension psychique en jeu, et les affiliations qu?elle met en ?uvre dans le processus d?accession aux positions parentales. La pratique de la parentalité « concerne les tâches effectives, objectivement observables, qui incombent à chacun des parents : soins à l'enfant, interactions comportementales, pratiques éducatives, etc. Chaque fois qu?un enfant est séparé de ses parents ces pratiques sont déléguées à d?autres adultes (elles le sont toujours partiellement même pour les enfants élevés par leurs parents). » (p. 116)

33 Avant même d?aborder la troisième dimension, permettons-nous une remarque concernant cette partie de la définition. Si toute autre instance éducative est conçue comme un substitut parental, c?est que cette approche de la parentalité fonctionne sur l'implicite (fort répandu) de l'assignation sociale aux parents de la charge totale de l'enfant. Ce qui occulte l'intégration des rapports familiaux au sein d?autres rapports sociaux, et l'insertion de l'enfant dans d?autres groupes et institutions s?occupant de son éducation, et plus globalement de sa socialisation. On peut se référer ici à l'analyse de François de Singly [51], qui rappelle que la responsabilité de l'enfant incombe d?abord en premier lieu au représentant institutionnel de la société, qui délègue cette responsabilité aux parents socialement définis comme tels. La délégation par les parents de pratiques de soin, de garde ou d?éducation à d?autres personnes est alors délégation au second degré ; perspective tout à fait en accord avec l'approche anthropologique de Godelier, pour lequel la famille ne saurait préexister à la société qui l'organise et la fait exister, compte tenu de l'articulation des rapports de parenté avec d?autres rapports sociaux, politiques et idéologiques (notamment religieux)... Il y a donc lieu de fournir une conception ouverte de la parentalité ? ouverte dans son extension, et souple quant à la définition de ses acteurs [52]. L?exemple du statut actuel des familles d?accueil et de leurs membres se révèle à cet égard particulièrement parlant. Il illustre la difficulté qu?il peut y avoir à définir des professionnelles devant se conduire comme des mères avec les enfants qui leur sont confiés à l'intérieur de leurs familles, sans que les positions parentales dans ce dispositif puissent être nommées [53].

34 L?exercice de la parentalité quant à lui, « a trait aux droits et devoirs qui sont attachés aux fonctions parentales, à la place qui est donnée dans l'organisation du groupe social à chacun des protagonistes, enfant, père et mère, dans un ensemble organisé et, notamment, dans une filiation et une généalogie. » (p. 115) Il correspond au niveau symbolique, c?est-à-dire « un niveau d?analyse des phénomènes humains qui transcende leur réalité concrète ». La difficulté que présente cette notion d?exercice se situe plus au niveau du choix du terme utilisé qu?au niveau du référent, car l'exercice d?une fonction implique a priori l'ensemble des dimensions qui la constituent. En conséquence, pour éviter les contresens il reste souhaitable que cet exercice soit explicitement qualifié par sa dimension symbolique, pour bien rappeler qu?il ne s?agit pas de l'exercice concret et pratique qu?un tel terme suggère, mais d?un exercice symbolique, référant à la signification individuelle et sociale de la filiation qu?il définit. Ce qui permet de distinguer cette expression de celle d?un « exercice global » de la parentalité, impliquant l'ensemble des niveaux pris dans cet exercice (pratique, subjectif et symbolique), sens courant qui, lui, est contenu dans l'idée d?exercice.

35 Au-delà du souci de précision dans l'utilisation des termes, une telle remarque vient indiquer la difficulté à élaborer une définition de la parentalité qui soit à la fois opérationnelle et univoque, et à la concevoir dans toute son étendue. Toujours est-il que cette perspective a constitué une étape importante dans l'élaboration de la parentalité en concept, jusqu?à imprégner un certain nombre de pratiques sociales se préoccupant de parentalité. Une dernière réserve peut cependant être adressée à cette approche, tenant au caractère trop restrictif de sa définition. Je la formulais ainsi : « À se focaliser sur les composantes de la parentalité, les auteurs en oublient de définir ce qui en est l'objet, ou plus exactement le champ. Ils perpétuent en cela un non-dit, celui de l'extension du rapport parental, faisant comme si ? à l'instar de la plupart des approches ? celle-ci constituait une donnée. [...] L?idée sous-jacente à cette façon de voir les choses, et qui a été réaffirmée avec force dans les années 1950, est bien que la famille constitue, selon la formule consacrée, ?la cellule de base de la société?. »[54]

36 En se situant dans cette représentation commune, l'analyse occulte le fait que la famille constitue une production des organisations sociales dans lesquelles elle se situe et non un modèle pour l'appréhension de celles-ci. Le fait que les rapports familiaux ont tendance à servir de modèle pour évaluer les autres relations sociales masque qu?ils sont eux-mêmes des constructions sociales. Comme le rappelle Pierre Bourdieu, la famille est « une structure mentale qui, ayant été inculquée dans tous les cerveaux socialisés d?une certaine façon, est à la fois individuelle et collective : c?est une loi tacite (nomos) de la perception et de la pratique qui est au fondement du consensus sur le sens du monde social (et du mot de famille en particulier) au fondement du sens commun. »[55]

? La parentalité comme dispositif social et individuel

37 Ainsi, la famille est une structure poreuse traversée par les rapports sociaux qui définissent sa place et son articulation aux autres appartenances et affiliations des individus qui la constituent, et en ce sens, la parentalité tend à s?en dissocier. C?est ce caractère illusoire de l'évidence familiale et ce processus de dissociation parentalité/famille que l'individuation, qui ne cesse de progresser dans les sociétés occidentales depuis la fin du Moyen Âge, met particulièrement en évidence. De mieux en mieux définis comme des sujets (sociaux et psychiques), les individus voient beaucoup plus facilement se dissocier les logiques sociales qui les portent et qui restaient autrefois structurellement liées.

? De la famille à la parentalité

38 L?émergence à la fin du XXe siècle d?un dispositif de parentalité s?effectue par l'intermédiaire de cette dissociation des logiques sociales jusqu?alors constitutives de la vie privée. Il se différencie aussi bien du dispositif d?alliance, sur lequel s?était appuyé l'Ancien Régime autour de la fiction juridique du mariage, que du dispositif de sexualité, dont Foucault décrit la constitution au XIXe siècle avec la mise en place d?un bio-pouvoir où le contrôle et la gestion de la sexualité constituent un enjeu essentiel. Cette autonomisation du dispositif de parentalité s?appuie sur l'effondrement du mariage en tant que fiction juridique, et sur l'individualisation des personnes et des rapports familiaux qui ré-organisent ces rapports et les liens des adultes aux enfants (liens d?origine, de filiation, ou de soin et d?éducation). En d?autres termes, devenu autonome, désormais le lien conjugal ne perdure pas forcément jusqu?à l'âge où les enfants sont considérés comme « élevés », et du même coup, la parentalité s?en trouve réaffirmée. Structurée par et autour du désir d?enfant, la parentalité s?élabore dans la constitution même de ce dispositif autonome dégagé des liens conjugaux. De multiples procédures sont ainsi construites pour que puisse fonctionner les relations d?un enfant à ses « parents ». Que ceux-ci soient séparés, additionnels par le biais d?une recomposition, investis dans une sexualité non procréatrice, ou bien parents d?accueil, adoptifs, ou encore assistés par la science médicale, c?est l'articulation de ces procédures qui les constitue en dispositif. Parallèlement à la mise en place par les institutions (Sécurité sociale, Impôts, Éducation nationale, Justice, CAF...) de mesures prenant en compte des situations parentales non conformes au modèle matrimonial, la société civile et le tissu associatif favorisent le développement d?initiatives destinées à prendre en compte les différentes formes de parentalité (lieux d?accueil enfants-parents, points rencontre pour l'exercice du droit de visite en situation conflictuelle, etc.) sans compter les multiples associations constituées pour défendre les droits de certains parents ? ou enfants ? (associations de pères séparés, de parents ou futurs parents gays et lesbiens, d?adoptants, de famille d?accueil, voire d?enfants nés sous X ou par IAD...). D?une certaine façon, la mise en place en 1999 des Réseaux d?écoute, d?appui et d?accompagnement des parents (REAPP) vient parachever ce travail de constitution d?un dispositif de parentalité, qui permet à l'enfant d?être en lien avec ses différentes figures parentales, quelle que soit la forme et l'évolution de la configuration familiale où il est socialisé. La reconnaissance sociale des « nouvelles » parentalités (beau, mono, homo, grand... parentalités) ne s?est pourtant pas encore accompagnée d?une reconnaissance juridique de cette pluriparentalité de fait, tant l'exclusivité de la bi-filiation semble encore servir de présupposé à la fiction juridique qui organise la filiation dans les sociétés occidentales.

39 Gageons que le droit, confronté à l'importance des mutations relatives aux structures organisant la vie privée aboutisse progressivement à une restructuration complète de ses présupposés fondamentaux. Le droit est désormais mis en demeure de reconnaître qu?un enfant peut de plus en plus fréquemment avoir plus de deux parents, car la multiplication des situations parentales « atypiques » fait qu?aujourd?hui il appert que les places parentales ne sont pas définies telles quelles dès la conception, mais font bien l'objet d?un véritable processus d?affiliation, qui se surajoute à la définition de la filiation.

40 C?est ainsi que se constitue en dispositif la parentalité, dont l'élaboration est sociale avant d?être juridique. Ce dispositif de parentalité peut être appréhendé :

41 ? du point de vue social, comme un système organisant entre elles les différentes situations de parentalité, autour d?une reconnaissance de la diversification des places et des fonctions, ? du point de vue individuel, comme la définition pour l'enfant d?un réseau de figures parentales, occupant des places et des fonctions différentes et éventuellement évolutives. Mais, historiquement, ce processus d?émergence d?un dispositif de parentalité a d?abord été appréhendé par ses effets : sa diffraction en une multitude de dispositifs individualisés. La parentalité gagne donc à être appréhendée à ces deux niveaux : celui de dispositif social organisant le fait parental au niveau collectif, et celui de ses expressions individuelles dans des dispositifs de parentalité personnalisés et évolutifs.

42 Cette approche en termes de dispositif présente l'avantage de prendre en compte les variations de définition et de position des différentes personnes occupant une place parentale à l'égard d?un enfant. Par surcroît, cette approche permet de prendre en compte les rapports que ces mêmes personnes entretiennent à leurs constellations familiales (réelles, imaginaires et fantasmatiques) et les effets symboliques que ces appartenances génèrent [56].

? Une articulation inédite des dimensions constitutives de la parentalité

43 On se rend compte ainsi que la parentalité se constitue comme dispositif par la mise en place d?un régime particulier d?articulation de ses trois domaines de référence : les deux qui sont traditionnellement attachés au fait parental, l'alliance et la socialisation, et celui qui la spécifie aujourd?hui, l'affiliation.

44 Sans la recouvrir, ces domaines sont partie prenante dans l'organisation de la parenté et de la filiation et contribuent à leur structuration, autrement dit sont susceptibles de participer à leur évolution, comme le montre à l'envi l'évolution du système juridique de la famille [57]au gré des mutations sociales de la conjugalité, de la procréation [58], ou plus globalement de la vie privée. Mais ce qui caractérise leur articulation en dispositif de parentalité est la redistribution de leur importance relative, et des fonctions qui leur sont attribuées. L?alliance pouvant se limiter à l'acte procréatif, alors que les affiliations prennent une importance centrale et que la socialisation des enfants devient le moteur du positionnement parental.

45 L?alliance constitue toujours le préalable à la constitution du fait parental, même si elle est de plus en plus souvent informelle. Sa désinstitution, et la perte d?importance de la transmission des patrimoines pour définir la position sociale des individus (au bénéfice du capital scolaire), ont eu pour corollaire d?en faire d?abord une affaire interpersonnelle et non plus familiale. La procréation n?est plus instituée par le mariage, mais par le désir de deux individus d?avoir un enfant ensemble. Ce qui signifie bien que si la procréation s?est désinstituée (plus de la moitié des premières naissances se font désormais hors mariage, alors même que celui-ci n?est plus l'institution contraignante d?autrefois), elle reste conjugale, mais la liaison entre conjugalité et liens parentaux est désormais instable. Le droit s?est trouvé confronté à la nécessité de donner forme à cette nouvelle norme sociale d?une parentalité initialement conjugale (et non plus matrimoniale) susceptible de voir la communauté de vie des parents se dissoudre. Il en est donc venu à affirmer progressivement le principe de co-parentalité pour contrecarrer la tendance (ou la tentation) à la monoparentalisation maternelle que met en ?uvre l'importance des séparations conjugales. Mais cette norme de la procréation conjugale et de la socialisation en couple de l'enfant qui s?en suit (on pourrait dire de la primo-parentalité conjugale) se retrouve battue en brèche par cette autre déliaison qu?a permise l'évolution sociale entre la sexualité et la procréation. Il est dorénavant possible non seulement que le couple programme la naissance de son enfant, mais que la procréation ne soit plus nécessairement le fait des partenaires sexuels. L?Assistance médicale à la procréation est venue soutenir la possibilité d?une homoparentalité provoquée (et non plus consécutive à une union hétérosexuelle antérieure) et son émergence comme revendication [59]. Existent aujourd?hui des alternatives à la norme de la procréation conjugale hétérosexuelle et de la parentalité afférente, et ces alternatives sont désormais susceptibles de se constituer en normes concurrentes. Il est à noter que la norme homoparentale en cours de constitution demeure une norme conjugale, alors que semble avoir échoué un certain projet féministe qui prétendait constituer la maternité célibataire volontaire en norme... tant il est vrai que le modèle (et non les pratiques) de la parentalité reste bi-parental. C?est bien dans cette prise de distance avec le dispositif d?alliance, et dans cette autonomisation de la sexualité qu?a pu se produire l'émergence d?un dispositif de parentalité qui s?y origine, les chevauche, et s?en distingue tout à la fois, en devenant l'organisateur des relations parents-enfants.

? Un objectif parental partagé : socialiser l'enfant

46 La place que tient la socialisation dans ce dispositif est devenue centrale. C?est en son nom qu?un certain nombre de parents additionnels revendiquent la reconnaissance de leur position parentale, c?est-à-dire socialisatrice (et affective). Ce qui est en jeu ici ce n?est plus la production de l'enfant dans un cadre normatif particulier, où se posent notamment les questions des rapports de la parentalité avec le couple procréateur et avec les corps sexuellement différenciés, mais la problématique de la transmission à l'enfant des acquis nécessaires à sa formation comme être humain socialement, familialement et sexuellement identifié. L?édification de l'enfant, de sa position de sujet en devenir [60]au statut de sujet autonome, est au centre de ce processus de socialisation de l'enfant qui constitue l'une des dimensions majeures de la pratique de la parentalité, voire de son exercice symbolique. Mais cette éducation se partage pourtant avec de multiples autres institutions et dispositifs, en premier lieu desquels les structures d?accueil de la petite enfance, les médias, l'école... Ce qui a pour conséquence directe que le soutien et l'accompagnement de la parentalité ne peuvent être efficients que si on accepte de prendre en compte l'action sur les cadres socio-économiques qui la conditionnent et la participation volontaire et éclairée des parents aux dispositions qui les concernent [61].

47 Une question s?y révèle particulièrement sensible, celle de l'autorité et de son lien traditionnel avec la figure paternelle. Sans entrer ici dans une réflexion approfondie sur le sujet ébauchée ailleurs [62], on peut constater que l'émergence sociale de la parentalité comme notion désignant les investissements parentaux, maternels et paternels, de façon neutralisée quant au genre, correspond à l'atténuation des différenciations de genre dans les pratiques sociales (dont les plus manifestes restent l'investissement professionnel féminin et l'investissement paternel sur la petite enfance) et l'affirmation d?une volonté (notamment féministe) d?égalisation des places tenues par chaque sexe dans la société, depuis l'espace public jusqu?au c?ur de l'intimité et des relations familiales [63]. La neutralisation de la dimension sexuée du fait parental dans la parentalité, outre qu?elle n?exclut pas sa reconnaissance explicite à travers les notions connexes de maternalité et paternalité va se constituer donc, non en déni de la différence des sexes, mais bien plutôt en symbole de la réorganisation de son inscription sociale.

? S?affilier à un enfant : le fondement du lien parental

48 Ce qui symbolise la constitution de la parentalité en dispositif reste cependant l'importance nouvelle prise par les démarches d?affiliation dans les nouvelles formes de parentalité, et la reconnaissance parallèle des processus d?affiliation comme fondateurs du fait parental, tant au niveau psychique que social. Dans les processus d?affiliation, se trouve à l'?uvre la concrétisation sociale et psychique des inscriptions et des appartenances, telles qu?elles se présentent dans le champ de la parentalité et telles qu?elles contribuent en son sein à donner corps à la parenté. On a vu que la parentalité est investie d? une double dimension, sociale et psychique, et qu?elle renvoie à une double parentalisation : dans un système de parenté qui définit les conditions d?une généalogie des sujets au travers de leurs appartenances familiales, et dans un processus d?adoption psychique réciproque des parents et de leur enfant qui leur permet d?élaborer de façon dynamique et continue leur position de parent (et d?enfant de ces parents). Cette dimension rappelle que les affiliations parentales s?effectuent parallèlement à d?autres affiliations de l'enfant à des acteurs sociaux différents ? acteurs qui peuvent parfois s?inclure dans le dispositif de parentalité de l'enfant (passage du statut d?amant de la mère à celui de beau-père par exemple) ? mais aussi que la parentalité en tant que support d?affiliations est susceptible d?être soumise au processus inverse de désaffiliation. En situation d?anomie, le risque de désaffiliation est bien réel, articulant comme le montre Robert Castel [64]le risque de désaffiliation socio-économique à celui de désaffiliation familiale.

? Conclusion : un dispositif de parentalité analyseur des mutations sociales

49 Se dégage ainsi progressivement une définition de la parentalité comme dispositif, où s?intègrent les multiples apports de ses approches successives, anthropologiques, cliniques, sociologiques, et ce à un double niveau, collectif et individuel. Le niveau collectif du dispositif de parentalité rend compte de la façon dont s?articulent, dans une société donnée, les rapports entre les alliances (formalisées ou informelles), les affiliations (socio-juridiques et/ou concrètes et affectives), les compétences et les socialisations ; et le niveau individuel, au sein duquel, pour chaque enfant, une construction personnalisée et évolutive de liens parentaux se met en place. L?émergence socio-historique de ce dispositif correspond à la remise en cause du modèle matrimonial de la famille dans les sociétés occidentales, la restructuration de la parenté qui l'accompagne, et l'affirmation des logiques d?affiliation dans les relations sociales, telles qu?elles affectent la forme des rapports sociaux. C?est dans ce cadre que s?affirme le caractère dynamique et évolutif du processus de parentalisation : diversification des affiliations psychiques liant un enfant à des figures parentales et diversification des affiliations sociales qui les régulent.

50 Il devient donc possible de faire fonctionner la parentalité comme un analyseur privilégié des mutations sociales et familiales dont notre modernité est le lieu, et plus particulièrement d?évaluer dans ce contexte les enjeux que le terme recouvre quant au fonctionnement de la démocratie au sein de la sphère privée dans une société républicaine. En ce sens la parentalité constitue un bon exemple de la façon dont un fait familial se révèle un fait social [65], alors que, se situant au c?ur de la sphère privée (la famille), il est présenté comme un donné naturel découlant de la biologie (la procréation). Plus généralement, il permet de montrer de façon exemplaire comment la famille, loin de constituer une sphère autonome, constitue en réalité une institution incertaine [66], perméable aux autres institutions sociales et dont les fonctions peuvent être partagées avec celles-ci, et que la constitution de la parentalité en dispositif est le signe d?une restructuration profonde de l'ordre familial.

Notes

  • [1]
    Je remercie Michèle BIGOT pour sa lecture attentive du texte et ses propositions, toujours pertinentes, d?amélioration.
  • [2]
    Martine LAMOUR, Marthe BARRACO, Souffrances autour du berceau, Paris, Gaëtan Morin, 1998.
  • [3]
    Chantal LEBATARD, Administrateur de l'Unaf et de la Fondation pour l'enfance, « Parentalité (s) », La lettre de la fondation pour l'enfance, n° 50, 2e tri. 2006, p. 1.
  • [4]
    Didier HOUZEL (dir.), Les enjeux de la parentalité, Toulouse, Érès, 1999.
  • [5]
    Didier LE GALL, Yamina BETTAHAR (dir.), La pluriparentalité, Paris, PUF, 2001.
  • [6]
    Gérard NEYRAND, L?enfant, la mère et la question du père. Un bilan critique de l'évolution des savoirs sur la petite enfance, Paris, PUF, 2000.
  • [7]
    Gérard NEYRAND, « Mutations sociales et renversement des perspectives sur la parentalité », in Didier LE GALL, Yamina BETTAHAR (dir.), La pluriparentalité, Paris, PUF, 2001.
  • [8]
    Maurice GODELIER, Métamorphoses de la parenté, Paris, Fayard, 2004.
  • [9]
    Bronislaw MALINOWSKI, « Parenthood. The basis of social structure », in V. F. CALVERTON et S. D. SCHMALHAUSEN (dir.), The New Generation : The Intimate Problems of Modern Parents and Children, New York, The Macaulay Comp., 1930, pp. 113-168.
  • [10]
    Esther GOODY, Parenthood and Social Reproduction. Fostering and Occupational Roles in West Africa, Cambridge University Press, 1982.
  • [11]
    Agnès FINE, « Pluriparentalité et système de filiation dans les sociétés occidentales », in Didier LE GALL et Yamina BETTAHAR (dir.), La pluriparentalité, Paris, PUF, 2001.
  • [12]
    Distinction clairement effectuée par le titre du chapitre VI : Les fonctions de la parenté et le champ de la parentalité.
  • [13]
    Op. cit., p. 89.
  • [14]
    Maurice GODELIER, op. cit., pp. 239-240.
  • [15]
    Eric J. HOBSBAWM, L?âge des extrêmes - Histoire du court XXe siècle, Paris, éditions Complexe / Le Monde diplomatique, 1999 (1994).
  • [16]
    Terme employé aussi bien par Marcel Gauchet que par Irène Théry pour désigner l'importance des mutations en cours dans les sociétés occidentales. Marcel GAUCHET, « Essai de psychologie contemporaine », Le Débat, n° 99, avril 1998 ; Irène THERY, « Mixité et maternité » in Yvonne KNIBIEHLER (dir.), Maternité : affaire privée, affaire publique, Paris, Bayard, 2001.
  • [17]
    Therese BENEDEK, ?Parenthood as a developmental phase?, Journal of the American psychoanalytic Association, n° 7, 1959.
  • [18]
    Geneviève DELAISI de PARSEVAL, La part du père, Paris, Seuil, 1981, p. 284.
  • [19]
    Pour un début d?analyse de cette question, voir notre article Gérard NEYRAND, « Parentalité : une notion-piège ou un concept en devenir ? », Le souci du corps - Enfances Psy, n° 20, 2002.
  • [20]
    Paul-Claude RACAMIER, C. SENS, L. CARRETIER, « La mère et l'enfant dans les psychoses du post-partum », L?évolution psychiatrique, n° 26, 1961.
  • [21]
    Alors que les articles y font depuis longtemps référence, ce n?est qu?à la fin des années 90 que le terme parentalité fait son apparition dans les titres d?ouvrages, jusqu?à connaître une véritable inflation par la suite. Le recensement effectué jusqu?à la mi 2006 des ouvrages et numéros thématiques de revues comprenant ce terme nous en donne a minima 14 pour les ouvrages cliniques, 13 pour les ouvrages socio-anthropologiques, 14 pour les ouvrages pédagogiques ou à visée opérationnelle.
  • [22]
    Leticia SOLIS-PONTON (dir.), La parentalité, défi pour le 3e millénaire. Un hommage international à Serge Lebovici, Paris, PUF, 2002.
  • [23]
    Serge STOLÉRU, « Aspects conceptuels », Entrée Parentalité in Didier HOUZEL, Michèle EMMANUELLI, Françoise MOGGIO (dir), Dictionnaire de psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent, Paris, PUF, 2000, p. 491.
  • [24]
    Martine LAMOUR, Marthe BARRACO, Souffrances autour du berceau, Paris, Gaëtan Morin, 1998, p. 26.
  • [25]
    Jacques DAYAN « Parentalité et psychopathologie », entrée Parentalité, in Didier HOUZEL, Michèle EMMANUELLI, Françoise MOGGIO (dir), Dictionnaire de psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent, Paris, PUF, 2000, pp. 492-493.
  • [26]
    Op. cit., pp. 24 et 26.
  • [27]
    Chez de nombreux auteurs, le terme de parentification a le même sens, cependant il est aussi parfois employé pour désigner le dysfonctionnement mettant un enfant en position d?exercer un rôle parental à l'égard de son propre parent. C?est pourquoi nous opterons pour le terme parentalisation pour désigner le processus de construction de la parentalité.
  • [28]
    Nonobstant les variations d?identification de genre, voire les changements chirurgicaux de sexe.
  • [29]
    Pierre LEGENDRE, L?inestimable objet de la transmission. Étude du principe généalogique en Occident, Paris, Fayard, 1985.
  • [30]
    Actions et recherches sociales, La famille instable : parentalité, conjugalité, sociabilité familiale aujourd?hui, vol. 22, Érès, 1986.
  • [31]
    Vincent de GAULEJAC et Nicole AUBERT, Femmes au singulier ou la parentalité solitaire, Paris, Klincksieck, 1990.
  • [32]
    Journées Nationales sur le Placement familial, On naît toujours d?une famille, et après... : la parentalité dans le soins à l'enfant déplacé, Le Lierre et le coudrier, 1991.
  • [33]
    Programme de recherches de 1985 de la Cnaf « Évolution des structures familiales : les familles monoparentales ».
  • [34]
    Nadine LEFAUCHEUR, « Les familles monoparentales : les mots pour le dire » in Francis BAILLEAU, Nadine LEFAUCHEUR, Vincent PEYRE (dir.), Lectures sociologiques du travail social, Paris, Éditions Ouvrières et CRIV, 1985.
  • [35]
    Irène THÉRY, Le démariage. Justice et vie privée, Paris, Odile Jacob, 1993.
  • [36]
    Même si le choix de ces trois termes peut être discuté, la distinction s?avère particulièrement heuristique.
  • [37]
    Michel FOUCAULT, Histoire de la sexualité. I. La volonté de savoir, Paris, nrf Gallimard, 1976, p. 140.
  • [38]
    Irène THÉRY, « Différence des sexes et différence des générations. L?institution familiale en déshérence », Malaise dans la filiation - Esprit, n° 227, décembre 1996, p. 80.
  • [39]
    Gérard NEYRAND, « Idéalisation du conjugal et fragilisation du couple, ou le paradoxe de l'individualisme relationnel », Penser le lien de couple - Dialogue, n° 155, 1er trimestre 2002, pp. 80-88.
  • [40]
    Irène THÉRY, op. cit.
  • [41]
    Gérard NEYRAND, L?enfant face à la séparation des parents. Une solution, la résidence alternée, Paris, Syros, 1994, nouvelle édition remaniée 2001. Troisième édition La Découverte, 2004.
  • [42]
    Gérard NEYRAND et Patricia ROSSI, Monoparentalité précaire et femme sujet, Toulouse, Érès, 2004.
  • [43]
    Claude MARTIN, La parentalité en questions. Perspectives sociologiques, Rapport pour le Haut Conseil de la Population et de la Famille, La Documentation Française, 2003, p. 12.
  • [44]
    Jacques FAGET, « La fabrique sociale de la parentalité », in A. BRUEL , J. FAGET, J. LUCILLE, M. JOECKER, C. NEIRINCK, G. POUSSIN, De la parenté à la parentalité, Toulouse, Érès, 2001.
  • [45]
    Le Collectif, Pas de 0 de conduite pour les enfants de 3 ans !, Ramonville-Saint-Agne, Érès, 2006.
  • [46]
    INSERM, Troubles mentaux. Dépistage et prévention chez l'enfant et l'adolescent, expertise collective, synthèse et recommandations, 2002. Voir à ce sujet Gérard NEYRAND (dir.), Faut-il avoir peur des enfants ? Politiques sécuritaires et enfance, Paris, La Découverte, 2006.
  • [47]
    Laurent MUCCHIELLI, « Le contrôle parental du risque de délinquance juvénile », Recherches et Prévisions, Cnaf, n° 63, 2001.
  • [48]
    Éric DEBARDIEUX, interview du Monde du 21 mars 2002, à propos de « La violence en milieu scolaire : statistiques officielles, victimisations et multivictimisations », in P. TRONQUOY (dir.), État, société et délinquance, Paris, Cahiers Français, n° 308, pp. 50-58. Cité par Claude Martin.
  • [49]
    Claude MARTIN, op. cit., p. 54.
  • [50]
    Didier HOUZEL (dir.), Les enjeux de la parentalité, Toulouse, Érès, 1999.
  • [51]
    François de SINGLY, Emmanuel MAUNAYE, « Le rôle et sa délégation ?, in Jean-Claude KAUFMANN (dir.), Faire ou faire-faire. Famille et services, Presses Universitaires de Rennes, 1996.
  • [52]
    Ou plus précisément de ses « actants », au sens greimassien de position actantielle.
  • [53]
    Cf. notre analyse de ce paradoxe : Gérard NEYRAND, « La parentalité d?accueil », Parentalité et famille d?accueil - Dialogue, n° 167, 1er trimestre 2005.
  • [54]
    Gérard NEYRAND, « Mutations sociales et renversement des perspectives sur la parentalité », in La pluriparentalité, Didier LE GALL et Yamina BETTAHAR (dir.), Paris, PUF, 2001, p. 27.
  • [55]
    Pierre BOURDIEU, « La famille comme catégorie réalisée », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 100, 1993.
  • [56]
    Voir NEYRAND Gérard (avec la collaboration de Michel DUGNAT, Georgette REVEST, Jean-Noël TROUVE), Préserver le lien parental. Pour une prévention psychique précoce, Paris, PUF, 2004.
  • [57]
    Jacques COMMAILLE, L?esprit sociologique des lois, Paris, PUF, 1994 ; CORPART Isabelle (dir.), Filiations : nouveaux enjeux - Problèmes politiques et sociaux, n° 914, juillet 2005.
  • [58]
    Tant sous l'effet du contrôle moderne des naissances que de l'Assistance médicale à la procréation, cf. Mouvement Français pour Le Planning Familial, Liberté, sexualités, féminisme. 50 ans de combat du planning pour les droits des femmes, Paris, La Découverte, 2006. Cf. Geneviève DELAISI de PARSEVAL, Alain JANAUD, L?enfant à tout prix. Essai sur la médicalisation du lien de filiation, Paris, Seuil, 1983. Cf. Marcela IACUB, « Reproduction et division juridique des sexes », Différence des sexes et ordre symbolique - Les Temps Modernes, n° 609, 2000.
  • [59]
    Emmanuel GRATTON, L?homoparentalité, côté pères, Thèse de Sociologie, 25 janvier 2006, Université Paris 7 - Denis-Diderot.
  • [60]
    Selon la formule employée par Françoise DOLTO, qui résume le nouveau statut accordé au bébé dans l'imaginaire social. Voir notre contribution, Gérard NEYRAND, « Emergence de l'enfant sujet et paradoxe de la médiatisation », in Geneviève BERGONNIER-DUPUY (dir.), L?enfant acteur et/ou sujet au sein de la famille, Ramonville-Saint-Agne, Érès, 2005, pp. 15-22. Voir aussi Claude SCHAUDER (dir.), Lire Dolto aujourd?hui, Toulouse, Érès, 2004.
  • [61]
    Alain BRUEL et alii., De la parenté à la parentalité, Toulouse, Érès, 2001 ; Saül KARZ (dir.), La parentalité en question (s) - Séminaire Déconstruire le social, Pratiques sociales, 2002 ; Daniel COUM (dir.), La famille change-t-elle ? Érès, Ramonville-Saint-Agne, 2006.
  • [62]
    Gérard NEYRAND, « Autorité parentale et différence des sexes, quels enjeux ? », L?autorité parentale et les mutations de l'ordre familial - Dialogue, n° 165, 3e trimestre 2004 ; « Sexualité, maternité, paternité, pouvoir. Un espace en cours de restructuration », La Pensée, n° 339, juillet/septembre 2004.
  • [63]
    Pour une généalogie de cette évolution, cf. Jürgen HABERMAS, L?espace public, Paris, Payot, 1978 (1962).
  • [64]
    Robert CASTEL, « De l'indigence à l'exclusion, la désaffiliation », in Jacques DONZELOT (dir.), Face à l'exclusion. Le modèle français, Paris, Éditions Esprit, 1991.
  • [65]
    Fait social total même selon l'expression de Marcel MAUSS.
  • [66]
    Louis ROUSSEL, La famille incertaine, Paris, Odile Jacob, 1989, éd. de poche.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/11/2010
https://doi.org/10.3917/rf.004.0071
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