CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 « Quand il se présente à la culture scientifique, l’esprit n’est jamais jeune. Il est même très vieux, car il a l’âge de ses préjugés. Accéder à la science, c’est spirituellement rajeunir, c’est accepter une mutation brusque qui doit contredire un passé » (Bachelard, 1938 : 14).

2 Depuis une cinquantaine d’années, l’émergence de domaines d’études étiquetés sous le concept-parapluie des « studies » – les cultural studies en tête – met en lumière les grandes potentialités mais aussi les limites et difficultés persistantes de l’interdisciplinarité. Le rapport entre les savoirs disciplinaires institutionnalisés de longue date dans les sciences humaines et sociales (shs) et la constitution de domaines d’études pluri- ou inter-disciplinaires – voire clairement opposés à l’idée même de discipline (« anti-disciplinaire ») – implique que l’on s’interroge non sur ce que les cultural studies « font aux savoirs disciplinaires » pour faire écho au titre de la contribution d’Éric Maigret (2013), mais inversement et de manière complémentaire sur ce que les disciplines font aux studies, soit comme contributions positives, soit comme résistances ou empêchements de penser hors de leurs cadres respectifs. Les champs des studies représentent-ils autant de nouveaux paradigmes scientifiques sur des thématiques variées ou de simples recombinaisons plus ou moins originales de partages disciplinaires préexistants ? Répondent-ils à la « fameuse injonction d’interdisciplinarité » (ibid.) ? Quels rapports entretiennent-ils avec l’organisation encore massivement disciplinaire du monde académique, sont-ils des domaines de connaissances véritablement novateurs et créatifs sur les plans institutionnels, conceptuels, théoriques et méthodologiques ou finissent-ils par rejoindre, par nécessité d’existence et de survie, un mode de fonctionnement disciplinaire ? Selon l’expression d’Éric Maigret (2013), la « prolifération » des studies est-elle inéluctable ? Quels sont les objectifs, les intentions et les finalités d’un tel mécanisme de prolifération ? Les replis disciplinaires et les luttes de territoires académiques sont-ils susceptibles d’agir comme des traités de non-prolifération visant à contrer le développement croissant de domaines d’enseignement et de recherche qui se situent à la croisée des disciplines ?

3 En se fondant sur ces questions formulées en guise de déclenchement réflexif, il ne s’agira pas de livrer un commentaire critique systématique de la contribution d’Éric Maigret (ibid.), mais d’établir un dialogue sur les enjeux plus larges de l’interdisciplinarité au prisme des principaux constats et arguments défendus par l’auteur. Pour cet exercice, les questionnements prioritaires suivants sont retenus : le lien, voire les tensions, entre les savoirs et les paradigmes disciplinaires et les studies (dont les cultural studies sont certes un exemple représentatif, mais nous nous concentrerons sur l’ensemble des studies) ; la nature, les potentialités et les limites des studies et la pertinence de leur « prolifération » ; à propos de prolifération, il convient de signaler les usages prolifiques des concepts mobilisés pour décrire et comprendre ce qui se joue entre et au-delà des disciplines (monodiscipline, interdiscipline, transdiscipline, anti-discipline, post-disciplinarité, etc.), d’en opérer une sélection et de saisir l’opportunité de proposer quelques définitions d’un corps de concepts interreliés ; enfin, nous ferons référence au désir épistémologique qui guide le travail interdisciplinaire.

Les studies : un monde en équilibre

4 Des domaines fédérateurs plus ou moins denses et englobants occupent une partie du champ académique telles les sciences cognitives, les sciences de l’environnement, les sciences de l’éducation, la bio-informatique ou encore la grande convergence des nanotechnologies (N), des biotechnologies (B), de l’intelligence artificielle (I) et des sciences cognitives (C) fédérées sous le sigle des nbic. Ces domaines se démarquent à l’unisson par un appel à la multidisciplinarité interconnectée entre deux ou plusieurs disciplines pour analyser et comprendre des problématiques complexes (environnementale, éducative, biologique ou cognitive). Apparemment, les domaines des studies témoignent de cette même volonté de décloisonnement disciplinaire pour aborder la complexité de problématiques qui ne peuvent être traitées à partir d’une seule discipline. Ainsi les cultural studies se situent-elles à l’interface de la sociologie, de l’anthropo-ethnologie, de la philosophie, des arts ou encore de la littérature, visant une approche transversale des phénomènes culturels au sens large du cultural turn dans les shs. Cette dynamique d’ouverture se retrouve dans de nombreux autres champs plus ou moins visibles et qui se construisent à peu près sur le même principe : pensons aux gender studies, aux postcolonial studies, aux visual studies, aux war studies et autres american ou black studies... En résumé, le filon se décline en reproduisant une séquence dénominative du type [{Thématique, T + n} + {studies}] qui indique des approches plurielles (les {studies}) d’une diversité de thématiques ({T1, T2, T3, + n}).

5 La duplication de cette formule (à laquelle, en effet, peu de thématiques multidimensionnelles sont susceptibles d’échapper) connaît un certain succès, tantôt salué par les fondateurs et promoteurs de ces nouveaux champs de recherche, tantôt craint, voire rejeté par les esprits disciplinaires qui campent sur leur position et reprochent aux studies d’être indélébilement marquées par le contexte anglo-saxon de leur genèse, de faire preuve de faiblesses épistémologiques et méthodologiques, sans compter un militantisme exacerbé qui mettrait en défaut la rigueur scientifique. Plus fort que le rejet, dans un court texte de vulgarisation, Xavier Molénat (2012) ose la question d’accroche « Faut-il brûler les studies ? ». L’auteur rallume le débat entre, d’une part, les accusations de médiocrité militantiste de studies a-critiques qui portent sur des orientations politiques en lien avec des mouvements sociaux et des minorités et, d’autre part, les avancées académiques bien réelles de ces champs d’études, voire de leur progressive normalisation. Cette métaphore du bûcher, dont Xavier Molénat (2010) avait déjà usé dans un texte précédent – « Faut-il brûler les études postcoloniales ? », est intéressante au-delà de l’effet rhétorique de captation du lecteur. Faire subir le supplice du feu aux studies qui se réclament d’une approche plurielle et ouverte aux dialogues des disciplines, ce serait s’appuyer sur une accusation douteuse d’hérésie à l’encontre de chercheurs hérétiques qui refuseraient le dogmatisme disciplinaire. Par nature, opter pour une trajectoire hors frontières disciplinaires revient à transgresser la vision orthodoxe de la pratique scientifique et à repenser l’habitus disciplinaire (Bourdieu, 2001 : 86). En effet, si « les centraux, les orthodoxes, les continuateurs » reproduisent une doxa scientifique qui représente l’ensemble des présupposés théoriques et méthodologiques partagés par une communauté de chercheurs, en revanche, les hétérodoxes, les « marginaux, les hérétiques, les novateurs se situent souvent aux frontières de leur discipline (qu’ils traversent parfois) ou qui créent de nouvelles disciplines à la frontière de plusieurs champs » (ibid. : 87). Cette tension entre la reproduction d’un ordre disciplinaire établi et des stratégies de transformation ou de rupture est particulièrement représentative des studies qui semblent osciller entre des postures d’affranchissement envers les disciplines et/ou de mimétisme disciplinaire dans le besoin et la nécessité de s’ancrer dans un système académique où le régime disciplinaire demeure dominant.

6 Prenons l’exemple des porn studies qui, depuis une dizaine d’années, visent l’étude des représentations plurisémiotiques de la sexualité (texte, image, web) ainsi que des discours qui les médiatisent et de leurs relations avec les pratiques (Paveau, 2014). Cette problématique complexe – dont les enjeux éthiques, sociaux, culturels, politiques et médiatiques sautent aux yeux – fait désormais l’objet d’une revue fondée en 2014 et présentée comme le premier peer-reviewed journal qui entend couvrir le champ des porn studies[1]. L’introduction du numéro inaugural (Attwood, Smith, 2014) contextualise la problématique en en dé-montrant la multidimensionnalité et les enjeux, tout en insistant sur le besoin de créer un espace spécifique de réflexion et de diffusion de la recherche. Les auteures n’oublient pas de souligner que la fragmentation en disciplines et sous-disciplines non seulement ne facilite jamais la création d’un dialogue constructif, mais qu’elle peut même encourager les chercheurs à une certaine hostilité envers d’autres points de vue :

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« Cultural, economic, political, feminist, artistic, psychological, medical and media discourses all contribute to the examination of pornography but often involve the deployment of specialist languages and concepts that carry with them their own implications, histories and problematics. Intellectual, political and moral disagreements over pornography can be compounded by ingrained disciplinary sub-divisions: academics communicate within their own disciplinary boundaries and can sometimes be hostile to other approaches » [2] (ibid. : 3).

8 Emboîtant le pas à la rhétorique spécifique du discours sur l’interdisciplinarité, soit le constat de la multidimensionnalité/complexité de l’objet d’étude et le besoin de dépassement de la fragmentation en disciplines et sous-disciplines, les auteures enchaînent de manière prévisible sur la nécessité du travail interdisciplinaire :

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« Interdisciplinarity requires that different research traditions talk to each other and begin to learn from each other, not so that we all speak the same language or that we all agree, but so that our analysis grows. There are important insights scattered across the various domains interested in pornography: how might different definitions, frameworks and methodologies open up representations, practices, consumption, industries and politics to good research ? […] We hope that the journal will become a central space for drawing together work from across disciplines » [3] (ibid.).

10 ?Les appels au décloisonnement disciplinaire se répètent comme un refrain : « ? ?Pornography is now of interest for academics working across a range of disciplines? ? »?  [4] ? (? ?ibid. ? ?: 1), « ? ?By offering a space for researchers to develop conversations across different disciplines, the study of porn will move in new directions? ? »?  [5] ? (? ?ibid.? ?: 3). ? Cette posture épistémologique en faveur de l’interdisciplinarité fait particulièrement sens dans le cadre de ce texte d’introduction qui fonctionne comme un discours constituant (Cossutta, 1995 ; Maingueneau, Cossutta 1995), visant à instaurer/légitimer les porn studies en tant que domaine de recherche et de publication. Il est alors très étonnant de découvrir l’une des réponses que Feona Attwood et Clarissa Smith (ibid. : 5) apportent à la question programmatique qu’elles posent en conclusion de leur introduction : « Where do we want Porn Studies to be in 10 years ? » [6]. Malgré un puissant argumentaire en faveur de l’ouverture interdisciplinaire et des limites inhérentes à l’organisation des savoirs en disciplines, les auteures optent pour une mise en discipline anticipée du champ des porn studies : « A space that has enabled the discipline to grow and develop and become an archive of and for those developing studies » [7]. Cette anticipation du futur des porn studies répond au souhait de transformer à terme la discipline en une « archive » [8] qui démarquerait l’identité d’une communauté scientifique donnée [9]. Ce battement, voire cette indécision entre une ouverture au dialogue entre les disciplines et les intentions plus ou moins explicites de repositionnements disciplinaires sont symptomatiques des potentialités et des obstacles à la mise en œuvre de l’interdisciplinarité.

Mise en paradigme ou fin des disciplines ? Pour une pensée dialogique

11 Le champ des studies, mais aussi l’ensemble des initiatives des chercheurs consistant à franchir des frontières disciplinaires se heurtent à cet apparent paradoxe entre la nécessité de recourir à une approche interdisciplinaire et les tentatives de mise en discipline et de « structuration paradigmatique » plus ou moins aboutie (Maigret, 2013 : 150). En effet, si l’on étudie les pratiques réflexives des chercheurs sur leur manière de penser leurs rapports aux disciplines dans des communautés scientifiques qui se reconnaissent dans l’interdisciplinarité, on constate une tendance à s’inscrire dans des domaines d’études plurielles en entrant par des thématiques ou des objets et non à partir d’un strict ancrage disciplinaire. C’est du moins ce que l’on observe par exemple dans notre recherche conduite en Suisse dans dix institutions ou centres de recherche dans les universités et les écoles polytechniques fédérales [10]. Ce dont témoigne, entre autres personnes, cette chercheuse lors d’un entretien individuel [11] :

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« Je pense... la réponse est toute simple : c’est que je ne me suis jamais inscrite vraiment dans une discipline. Oui j’ai étudié l’anthropologie, mais déjà là j’ai aussi étudié la criminologie, la science des communications, et au sein de l’anthropologie j’ai toujours choisi un peu les choses qui m’intéressaient, qui étaient beaucoup plus sociologiques. Et, à partir de la thèse, j’ai commencé à travailler... avec une orientation thématique et notamment quand il s’agit des migrations, des ethnic and racial studies. […] Ce n’est pas devenu une discipline, mais c’est devenu un champ énorme où il y a des personnes issues de disciplines très très diverses. […] C’est un champ de recherche très interdisciplinaire. Et vu que j’étais très active dans ces domaines thématiques et théoriques, je n’ai en fait plus jamais suivi d’orientations disciplinaires » (11/04/13).

13 Dès lors, face à ce type de postures de plus en plus fréquentes, comment penser à la fois l’émancipation au-delà des ancrages disciplinaires pour le développement de nouvelles compétences interdisciplinaires et la pression exercée par la structuration paradigmatique souvent requise pour accéder à une forme de reconnaissance académique, de visibilité identitaire et de captation de ressources tant matérielles que symboliques. Les multiples domaines étiquetés « studies » peuvent-ils être pensés à l’aune d’une vision paradigmatique, alors même qu’ils sont rétifs à toutes visées normatives, voire qu’ils proclament plus vigoureusement des ambitions anti-disciplinaires ? La notion de paradigme (une « science normale » ou « matrice disciplinaire ») au sens de Thomas Kuhn (1962) se définit comme un accord sur les méthodes et les fondements épistémologiques qui guident à un moment donné la pratique des chercheurs appartenant à une même communauté scientifique. Ainsi un paradigme offre-t-il une démarche théorique commune à un groupe de spécialistes à une époque donnée de l’évolution du champ scientifique. Il fixe de manière prioritaire le type de problèmes à résoudre au sein de la discipline, les choix méthodologiques partagés, l’utilisation d’un langage spécialisé et l’établissement de procédures unifiantes de validation, de vérification et d’élaboration du travail de recherche. Il s’agit bien d’une situation de normalisation-normalité de la science qui prétend résoudre les problèmes susceptibles d’être posés dans les limites de l’application de méthodes attestées dans une discipline et qui « tend à faire oublier qu’elle ne résout que les problèmes qu’elle peut poser ou qu’elle ne pose que les problèmes qu’elle peut résoudre » (Bourdieu, 1975 : 104).

14 En effet, la mise en paradigme et les effets de clôture qu’elle implique sont opérants et légitimes dans les configurations disciplinaires et sous-disciplinaires autonomes et constitutives de l’organisation institutionnelle des universités en facultés, départements ou laboratoires. Il y a ici un certain renoncement à la mise en cause du principe de disciplinarisation (mise en discipline) : « Toute discipline se pose comme circonscrite : elle sait et elle accepte qu’elle a des limites. Elle se reconnaît comme locale et partielle. […] La discipline circonscrit et renonce » (Schlanger, 1992 : 292). En revanche, il en va tout autrement dans le contexte de champs d’études qui – comme nous l’avons vu ci-dessus – entendent se construire sur le principe endogène du décloisonnement entre les frontières disciplinaires. La logique paradigmatique semble inappropriée pour comprendre les dynamiques qui s’y jouent à l’interface des disciplines, comme nous l’avons démontré ailleurs dans le cadre des études du tourisme (tourism studies) (Darbellay, Stock 2012a, 2012b) ou plus largement dans les sciences humaines et sociales (Darbellay, 2011). Dépasser la logique paradigmatique implique de prendre sérieusement en considération la double nature paradoxale du processus interdisciplinaire : entre la volonté et la nécessité de l’ouverture et les allers-retours vers les ancrages disciplinaires qui re-surgissent sans cesse. Ce battement (tension/oscillation) est fondé sur un paradoxe inhérent aux postures apparemment antagonistes entre la disciplinarité et l’interdisciplinarité. Mais qu’est-ce qu’un paradoxe ?

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« Un paradoxe est la cristallisation d’un raisonnement dynamique qui oscille indéfiniment faute de s’élaborer en fonction d’un raisonnement complet. Comprendre le fonctionnement d’un paradoxe, et par conséquent “résoudre” le paradoxe, consiste donc à déceler, puis à restituer explicitement dans le raisonnement, les prémisses manquantes qui sont la cause de son oscillation perpétuelle » (Landheer, Smith, 1996 : 8).

16 Afin de résoudre le paradoxe qui oppose les logiques contradictoires de la mise en discipline et de l’interdisciplinarité, il convient d’apprivoiser la pensée paradoxale (Abiteboul, 1998) comme mode de raisonnement non contradictoire, complexe et pluraliste (Wunenburger, 1990). C’est ici que prend sens une pensée dialogique dans la veine élargie du dialogisme bakhtinien (Bakhtine, 1929), soit une capacité cognitive constitutive de l’intelligence humaine qui est mobilisée dans le travail interdisciplinaire et qui se construit entre convergences, divergences et déplacements de frontières entre les disciplines : « C’est dans et par l’exercice dialogique que la rationalité se déploie et trouve ses limites » (Vernant, 1997 : 13). Selon Edgar Morin et Jean-Louis Le Moigne  (1999 : 254), « le principe dialogique unit les deux principes ou notions antagonistes, qui apparemment devraient se repousser l’un l’autre, mais qui sont indissociables et indispensables pour comprendre une même réalité ». Ainsi ce principe conjoindrait-il les visions apparemment antagonistes de la disciplinarité et de l’interdisciplinarité.

17 Le processus interdisciplinaire peut être envisagé comme une pratique dialogique de reformulation/transformation des disciplines-sources antérieures dans une dynamique interdisciplinaire seconde, multidimensionnelle et intégratrice [12]. Il présente une grande plasticité : tout processus dialogique de reformulation d’une ou plusieurs disciplines mises en interaction est marqué par des facteurs de variabilité et de déformabilité pour faire référence aux concepts utilisés par Catherine Fuchs (1994) dans la description des pratiques de reformulations discursives. Le processus dialogique de reformulation interdisciplinaire se caractérise par une discontinuité sur fond de déformation continue ;il oscille entre la nécessité de réinterpréter les disciplines tout en produisant de nouvelles configurations interdisciplinaires : l’interprétation des disciplines-sources est simultanément la production de nouvelles interdisciplines-cibles. Par conséquent, il existe entre les disciplines-sources et les interdisciplines-cibles, une dialectique de reproduction/altération inhérente au processus dialogique : la reformulation de disciplines antérieures n’est pas une simple reproduction de savoirs figés dans un contexte nouveau ; au contraire, elle est soumise à un processus d’innovation qui produit des savoirs hybrides, tout en métamorphosant les disciplines impliquées. Une parenté sémantique dynamique demeure entre les nouvelles interdisciplines et les disciplines d’ancrage, tant qu’un seuil de distorsion entre les modes d’organisation disciplinaires et les nouveaux modes d’organisation interdisciplinaires des connaissances n’est pas irréversiblement franchi, c’est-à-dire dans la mesure où il n’y a pas de rupture interprétative radicale.

18 Le processus interdisciplinaire en appelle à une démarche cognitive créative qui évoque le processus de « bissociation » (et ses dérivés : trissociation ou multissociation) décrit par Arthur Koestler dans son ouvrage Le cri d’Archimède (1964) et affiné en 1979 dans Janus : esquisse d’un système. Arthur Koestler (1979 : 140) rappelle que le latin « cogitare »(« penser ») vient de « coagitare »(« secouer ensemble et mêler ») et que – partant de cette compétence cognitive – la bissociation consiste à secouer des éléments incompatibles qui se heurtent et se séparent aussitôt : « L’homme de science vise la synthèse, l’intégration d’idées précédemment distinctes. […] Il s’agit de combiner des holons cognitifs jusque-là non reliés de manière à ajouter un nouvel échelon à la hiérarchie du savoir, qui s’incorpore les structures précédemment séparées. […] Ce qui semblait une collision s’achevait en fusion : le mot d’esprit est l’énoncé d’un paradoxe, la découverte la solution d’un paradoxe » (ibid.). En effet, le schéma de production de connaissances interdisciplinaires consiste à relier, combiner et reformuler des savoirs disciplinaires qui n’avaient pas nécessairement de rapports préalables entre eux. La mise en circulation des idées, des concepts et des méthodes, ainsi que leur hybridation, sont des mécanismes essentiels de l’interdisciplinarité, comme nous l’avons exemplifié dans un ouvrage collectif (Darbellay, 2012) [13]. Il s’agit de « reculer pour mieux sauter » : « Telle est la démarche ou le schéma du processus créatif : régression temporaire à des niveaux d’idéation primitifs et sans inhibition, suivie d’un bond en avant dans l’innovation. Désintégration et réintégration, dissociation et bissociation, c’est encore le même schéma » (Koestler, 1979 : 158).

Prolifération conceptuelle et définitions

19 L’interdisciplinarité est une invitation faite aux chercheurs à s’émanciper de leurs jargons et de leurs zones de confort disciplinaires – « comfort zones » au sens de Stephen Stromberg (2005) – en les transformant dans et par la collaboration avec d’autres langages disciplinaires, pour favoriser l’émergence de « trading zones » entre différentes cultures scientifiques (Galison, 1997) [14]. Le travail sur les zones d’interface entre les disciplines ouvre de nouveaux espaces de collaboration qui permettent d’ancrer l’interdisciplinarité dans des no man’s lands pour reprendre la métaphore spatiale utilisée par Éric Maigret (2013 : 158) à propos des cultural studies : soit des espaces ouverts à identités multiples et n’étant la propriété exclusive de personne en particulier. Ces zones de productions scientifiques, qui se situent entre deux ou plusieurs frontières disciplinaires ou sur leurs lignes de front, sont dans le même temps plus que de simples no man’s lands dans la mesure où elles sont justement habitées par de nouveaux profils de chercheurs hybrides qui participent de l’élaboration et de l’extension de l’écoumène interdisciplinaire. Nous avons rencontré de nombreux chercheurs de ce type dans notre projet de recherche sur les pratiques interdisciplinaires dans les universités. Ils expriment les avantages, mais aussi les difficultés, de leur(s) identité(s) transformée(s) ou indiscipliné(es), comme l’illustrent ces témoignages lors d’entretiens individuels :

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A : « Je ne me suis jamais construit comme disciplinaire… Ma thèse a porté sur le rôle des images dans la production du savoir scientifique et puis je me rappelle que déjà à l’époque, mais aussi parce qu’on avait aussi cette liberté en tout cas mon directeur de thèse à l’époque me l’avait donnée, c’était une thèse assez j’ai envie de dire indisciplinée, puisqu’elle empruntait à la fois à l’histoire des sciences mais aussi à l’anthropologie, etc. » (19/04/13).

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B : « Donc… je dis peut-être que je suis hybride !… Je ne peux pas m’attacher à une discipline spécifique, aujourd’hui ! Vraiment, je ne peux pas ! » (03/05/13).

22 Comment définir les zones de stabilité/instabilité en tension entre les ouvertures interdisciplinaires plus ou moins indisciplinées et les tendances au repli disciplinaire ? Quels sont les principaux concepts utilisés pour décrire et comprendre la dynamique qui se joue dans, entre et au-delà des disciplines ? Si l’on prend comme point de départ la contribution d’Éric Maigret (2013), on repère une prolifération de concepts qui gravitent autour de l’idée du travail entre les disciplines, leur décloisonnement, leur irréversible dépassement ou une pure et simple mise à mort anti-disciplinaire. « Savoirs ou espaces disciplinaires », « disciplines », « hors-disciplines », « anti-discipline », « interdiscipline », « transdiscipline », « interdisciplinarité », « monodisciplinaire » ou encore « postdisciplinarité », autant de termes mobilisés à bon escient par Éric Maigret et qui offrent un bel échantillon d’une liste ouverte que nous n’allons par densifier ici. Ce florilège sémantique est certes stimulant par les effets de polysémie, de synonymie, d’antonymie ou de néologie qu’il conviendrait d’exploiter encore, mais nous nous restreignons à une mise au point conceptuelle susceptible de montrer la progressivité, les interrelations et les tensions entre les différents paliers de complexification des liens entre les disciplines.

23 En se centrant sur les degrés de décloisonnement, d’interaction et d’intégration entre les disciplines, on peut retenir les notions clés suivantes qui tendent à un certain consensus dans les travaux scientifiques sur l’interdisciplinarité : la disciplinarité, la multidisciplinarité, l’interdisciplinarité et la transdisciplinarité. Définissons très succinctement ces concepts et dégageons leurs idées-forces [15] :

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  • disciplinarité : appartenant à la même discipline, des chercheurs travaillent de manière plus ou moins coordonnée sur des objets légitimes au sein de celle-ci (idées-forces du concept de disciplinarité : cloisonnement, fragmentation, communautés et paradigmes disciplinaires) ;

25

  • multidisciplinarité : la multidisciplinarité est un processus séquentiel dans lequel des chercheurs de disciplines différentes travaillent, à partir de leur propre point de vue, sur un objet d’étude plus ou moins partagé et ceci de manière linéaire et indépendante, sans véritable interaction (idées-forces du concept de multidisciplinarité : pluralité de disciplines, hétérogénéité, séquentialité, linéarité, juxtaposition) ;
  • interdisciplinarité : des chercheurs travaillent ensemble à partir de – et entre – leur point de vue disciplinaire sur un objet d’étude commun, de manière coordonnée et interactive. (idées-forces du concept d’interdisciplinarité : ce qui est entre les disciplines, interaction, interface, co-production, bi- ou multissociation, intégration, transfert ou emprunt de concepts ou de méthodes, hybridation) ;

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  • transdisciplinarité : des chercheurs travaillent pour développer un cadre conceptuel et méthodologique commun qui transcende les limites disciplinaires dans le but de résoudre un problème concret entre science et société (idées-forces du concept de transdisciplinarité : ce qui est au-delà et au travers des disciplines, transgression, résolution de problème, implémentation, participation, rapport science-société).

27 De la multi-, à l’inter- et la transdisciplinarité, se construit un décloisonnent progressif des frontières disciplinaires sur fond d’une dynamique sémantique fondée sur le seuil incompressible de la disciplinarité qui s’intègre dans un réseau de relations de plus en plus dense et interactif. L’interdisciplinarité prend sens dans ce processus en dépassant la simple juxtaposition de plusieurs disciplines caractéristiques de la multidisciplinarité. Elle représente une étape charnière dans l’intégration progressive des disciplines dans une perspective transdisciplinaire. Si une approche multidisciplinaire – qui tend à maintenir le cloisonnement entre les compétences disciplinaires – est parfois nécessaire à l’analyse séquentielle d’un problème théorique ou pratique par différents spécialistes, il n’en demeure pas moins que la simple addition (ou juxtaposition) de compétences est insuffisante pour analyser et comprendre une problématique pensée dans sa globalité. Face à ce dispositif définitionnel qui ne touche pas en soi au concept central de discipline, quelles places peuvent alors prendre les concepts plus perturbateurs de « postdisciplinarité » (post, qui vient après), « anti-disciplinarité » (anti-, qui s’oppose à ou qui vient avant) ou « indiscipline » (in-, qui est sans) ? Faudrait-il ajouter des sections supplémentaires dans la présentation ci-dessus ou tout simplement prendre acte de la nature hors champ de ces concepts qui mettent radicalement en cause tout point d’appui disciplinaire ou alors opter pour une posture médiane ? En suivant la pensée dialogique et non dualiste convoquée ci-dessus pour comprendre les transformations disciplinaires dans le processus interdisciplinaire, la voie médiane est prévalente, dans la mesure où elle encourage à penser la disciplinarité non pas comme un simple repoussoir, mais comme un lieu de questionnement permanent sur la nature des disciplines elles-mêmes et sur leurs frontières. Comme nous l’avons vu, une discipline délimite un domaine de connaissances institutionnalisé dans et par une communauté scientifique donnée, socialement et historiquement située et régie par un paradigme qui définit les présupposés et les objectifs des savoirs à construire. Toutefois, il n’empêche que toute discipline est construite, qu’elle est le fruit d’une naissance, d’une genèse, d’un développement et qu’elle est toujours susceptible de disparaître du champ académique, de se propulser hors des logiques facultaires et des départements cloisonnés. L’interdisciplinarité travaille au cœur des disciplines. Notre réflexion est ici très proche de celle d’Éric Maigret (2013 : 259) dans la conclusion de sa contribution :

28

« Si les cultural studies doivent quelque chose à un espace-temps spécifique, comme tout courant de recherche, elles ont depuis longtemps dépassé cet instant zéro en se diversifiant géographiquement et intellectuellement, en s’appropriant également l’héritage d’un nombre important de penseurs qui ne relèvent pas de la tradition d’origine, enfin, en refusant l’idée d’un savoir figé, d’une clôture. Cela signifie-t-il alors qu’elles s’éparpillent en tous sens, en perdant toute scientificité ? La réponse est négative. La diversification ne s’est pas faite au détriment d’une véritable logique de recherche unifiée : les cultural studies ne sont pas dépourvues d’idées directrices, ni de méthodes rigoureuses. Leur spécificité est tout simplement de refuser de s’ériger en discipline pour mieux épouser/contrarier la dynamique fluctuante du monde. Elles sont un art de faire et de défaire les pouvoirs et les identités, se donnant pour objectif une émancipation non naïve des formes de vie ».

29 C’est le refus de la mise en discipline (mimétisme disciplinaire) et le travail dialogique entre et au-delà des disciplines (où le faire est un refaire) qui fait office de marque spécifique non des cultural studies, mais aussi d’autres champs (studies) qui optent pour ce genre de posture épistémologique et qui sont capables d’assumer le choix de l’interdisciplinarité, sans repli disciplinaire ni effet de clôture stérilisant. Comme nous le soulignions ci-dessus à propos des continuateurs disciplinaires et des hérétiques, il semble que les aventures interdisciplinaires ne relèvent ni de « stratégies de conservation-succession » (Bourdieu, 1975 : 108) qui viseraient à assurer la perpétuation de l’ordre scientifique établi, ni de « stratégies de subversion » trop coûteuses et risquées, mais plutôt d’un état intermédiaire de discontinuité sur fond de continuité : « L’antinomie de la rupture et de la continuité s’affaiblit dans un champ qui, ignorant la distinction entre les phases révolutionnaires et la “science normale”, trouve dans la rupture continue le vrai principe de sa continuité ; et corrélativement l’opposition entre les stratégies de succession et les stratégies de subversion tend de plus en plus à perdre son sens » (ibid.).

Conclusion

30 Le travail interdisciplinaire mobilise des compétences disciplinaires, mais il résiste dans le même mouvement au régime de la disciplinarité. Il représente un espace de liberté et de créativité sous contrainte de rigueur qui répond à une pulsion de connaissances (la libido sciendi), sans volonté de répulsion ou de domination (libido dominandi). Ce désir épistémologique (Paveau, 2010) ou épistémophilie au sens freudien (une pulsion d’investigation) est aux commandes des trajectoires de chercheurs qui transforment et subliment leur(s) propre(s) identité(s) disciplinaire(s) plus ou moins socialement valorisées dans le monde académique. Il ne s’agit plus de brûler tel ou tel ennemi disciplinaire, mais, au contraire, de brûler ardemment pour le développement de nouvelles compétences de franchissement des frontières entre disciplines. Le chercheur qui s’engage dans l’interdisciplinarité vit au quotidien une oscillation entre son engagement au service de la discipline intellectuelle et une distanciation par rapport aux limites disciplinaires, de manière à favoriser sa propre évolution créative. Comme l’a mis en évidence Norbert Elias (1939 : 10), engagement et distanciation sont finalement deux postures cognitives (deux impulsions) indissociables et apparemment contradictoires : « Ces impulsions peuvent entrer en conflit les unes avec les autres, lutter pour la prééminence ou passer des compromis et se combiner selon les proportions et les formes les plus diverses. En dépit de toute cette diversité, c’est la relation entre ces deux pôles qui détermine le cours des actions humaines ».

Notes

  • [1]
    Accès : http://www.tandfonline.com/loi/rprn#.UzKDh8eImPc. Consulté le 25/03/14.
  • [2]
    Ici et dans toute la contribution, nous traduisons : « Les discours culturels, économiques, politiques, féministes, artistiques, psychologiques, médicaux et médiatiques contribuent tous à l’examen de la pornographie, mais ils impliquent souvent le déploiement de langages spécialisées et de concepts qui portent en eux leurs propres implications, histoires et problématiques. Des désaccords intellectuels, politiques et moraux sur la pornographie peuvent être aggravés par des sous-divisions disciplinaires enracinées : les universitaires communiquent au sein de leurs propres frontières disciplinaires et peuvent parfois être hostiles à d’autres approches ».
  • [3]
    « L’interdisciplinarité nécessite que différentes traditions de recherche se parlent entre elles et commencent à apprendre les unes des autres, non pas au sens que nous parlons tous la même langue ou que nous sommes tous d’accord, mais pour que notre analyse se développe. Il y a des informations importantes éparpillées dans les différents domaines qui s’intéressent à la pornographie : comment des définitions, des cadres théoriques et des méthodologies différents pourraient-elles s’ouvrir à des représentations, à des pratiques, à l’univers de la consommation, aux industries et aux politiques pour pratiquer une bonne recherche ? Nous espérons que la revue deviendra un espace central pour travailler ensemble à la croisée des disciplines ».
  • [4]
    « La pornographie est maintenant un intérêt pour les chercheurs qui travaillent à la croisée d’un large éventail de disciplines ».
  • [5]
    « En offrant un espace pour les chercheurs pour développer des échanges entre les différentes disciplines, l’étude de la pornographie évoluera dans de nouvelles directions ».
  • [6]
    « Où voulons-nous que les porn studies soient dans 10 ans ? ».
  • [7]
    « Un espace qui aura permis à la discipline de croître et de se développer et de devenir une archive de et pour ces études en développement ».
  • [8]
    Sur la notion d’« archive » en analyse du discours, voir Dominique Maingueneau (1991).
  • [9]
    De même, au-delà de la mise en évidence de la diversité des formes et des études de/sur la pornographie, François-Ronan Dubois (2014) opte pour un affichage disciplinaire sur la quatrième de couverture de son ouvrage, Introduction aux porn studies : « Les études pornographiques ou porn studies se sont imposées depuis quelque dix ans comme une des disciplines les plus novatrices en sciences humaines, d’abord aux États-Unis, maintenant aussi en France ».
  • [10]
    ?Ce projet (« Analyzing Interdisciplinary Research: From Theory to Practice. ? Case Studies in the Swiss University Context ») est financé par le Fonds national suisse de la recherche scientifique (fns/Comité spécialisé en recherche interdisciplinaire, Requête : CR11I1_143816, 2013-2014).
  • [11]
    Nous respectons ici l’anonymat des personnes et de leur institution d’appartenance. La confidentialité des données recueillies vaut pour toutes les citations de chercheurs faites dans la présente contribution.
  • [12]
    Pour un approfondissement dans une perspective discursive, voir F. Darbellay (2005).
  • [13]
    Sur l’interdisciplinarité comme processus créatif, avec un accent sur la sérendipité, voir F. Darbellay et al. (2014).
  • [14]
    Sur l’interdisciplinarité comme interculturalité, voir Violaine Lemay et Frédéric Darbellay (2014).
  • [15]
    Pour de plus amples développements, voir notamment Jean Piaget (1972), Julie Thompson Klein (1990), Pasqualina Perrig-Chiello et Frédéric Darbellay (2002), Frédéric Darbellay (2005), Robert Frodeman, Julie Thompson Klein et Carl Mitcham (2010) et Katri Huutoniemi et al. (2010).
Français

S’intéresser aux domaines des studies dans leur diversité, c’est questionner de front les rapports complexes qui se tissent entre les tendances à la disciplinarisation de nouveaux champs d’études et leur intention revendiquée de s’émanciper – voire de s’affranchir – de tout ancrage disciplinaire. Les tensions et oscillations entre des postures épistémologiques apparemment contradictoires – entre discipline et anti-discipline – peuvent se résoudre en optant pour une pensée dialogique qui travaille au cœur du processus interdisciplinaire. Sous cet angle, la contribution aborde les potentialités et les limites des studies et la pertinence de leur « prolifération ». Elle définit également les principaux concepts qui tentent de cerner ce qui se joue entre et au-delà des disciplines. Une ouverture finale évoque le désir épistémologique qui anime tout chercheur qui s’aventure aux confins des disciplines.

  • interdisciplinarité
  • dialogisme
  • studies
  • paradigme
  • prolifération
  • bissociation
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Frédéric Darbellay
Cellule inter- et transdisciplinarité
Institut universitaire Kurt Bösch
CH-1950
frederic.darbellay@iukb.ch
Mis en ligne sur Cairn.info le 19/09/2014
https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.9012
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