Des peuples qui n’osent plus manger de la viande de peur de devenir fous, qui n’osent plus faire l’amour de peur de se rendre malades, qui n’osent plus presser le bouton d’un aérosol de peur que le ciel ne leur tombe sur la tête, ne sont plus ni modernes, ni post-modernes, ni barbares ? ; ils sont revenus à la commune humanité, à ce que l’anthropologie a toujours décrit chez « les autres ». Lorsque l’on se décide à mêler, dans une même vie collective, des sociétés d’humains et une société plus vaste encore d’objets, de prions, de neutrinos, de virus, de puces et de réseaux câblés, il faut « faire gaffe », il faut prendre soin de toutes les connections. L’ancienne idée de progrès, celle que nous avons quittée récemment, permettait de ne plus faire attention, elle libérait de toute prudence, de toute précaution ? ; la nouvelle idée apparaît plutôt comme ce qui oblige à la prudence, au choix sélectif, à un triage minutieux des possibles. »
Article
Auteur
Bruno Latour
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/03/2010
- https://doi.org/10.3917/pro.293.0064
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour C.E.R.A.S © C.E.R.A.S. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.