1Dans les pays où les couples peuvent contrôler efficacement leurs naissances, la compréhension des comportements de fécondité nécessite l’analyse des intentions et de leur réalisation. En particulier, quels sont les facteurs (économiques, sociaux, culturels) conduisant à une révision (à la hausse ou à la baisse) du projet initial de fécondité ? Utilisant des données longitudinales et comparables issues des enquêtes GGS (Generations and Gender Surveys), Arnaud Régnier-Loilier et Daniele Vignoli procèdent à une confrontation des projets de fécondité et de leur réalisation en France et en Italie, deux pays où les intentions des couples sont assez proches (au moins 2 enfants pour une majorité d’entre eux) mais où leur concrétisation diffère ensuite sensiblement. Ils montrent qu’en dehors de l’âge et du nombre d’enfants, les facteurs socioéconomiques jouent un rôle important sur l’ajournement comme sur le renoncement au projet initial mais selon des modalités différentes dans les deux pays.
2Les sociétés modernes ont aujourd’hui accès à une contraception efficace, permettant de choisir le nombre d’enfants que l’on souhaite mais aussi le moment auquel les avoir. Les préférences et les choix en matière de fécondité jouent ainsi un rôle de premier plan dans l’étude des comportements familiaux (Ongaro, 1982 ; Palomba, 1991 ; De Sandre et al., 1997 ; Borra et al., 1999 ; Sorvillo et Marsili, 1999 ; Goldstein et al., 2004 ; Testa et Grilli, 2006 ; Mills et al., 2008 ; Régnier-Loilier et Solaz, 2010). Transposée à l’étude de la fécondité, la « théorie des comportements planifiés » de Ajzen (1991) invite à considérer les intentions comme un préalable aux comportements. Ces intentions dépendent elles-mêmes de la situation des personnes (conjugale, économique, etc. : Mazuy, 2009 ; Régnier-Loilier et Vignoli, 2009), du contexte plus général dans lequel elles se trouvent (politique par exemple), et elles évoluent à mesure que se constitue la descendance (Monnier, 1987 ; Régnier-Loilier, 2006).
3On distingue classiquement les intentions dites « positives » des intentions « négatives », les premières traduisant le désir d’avoir un (autre) enfant à l’avenir, les secondes l’intention de ne pas ou de ne plus en avoir. Les études s’intéressant au lien entre intentions et réalisation ne sont pas très nombreuses, principalement en raison du manque de données adaptées, même si les enquêtes longitudinales se sont développées ces dernières années. Les résultats obtenus convergent et montrent que les intentions négatives sont un très bon indicateur des comportements futurs, tandis que les intentions positives, tout en gardant un bon pouvoir prédictif, surestiment systématiquement la fécondité observée (Westoff et Ryder, 1977 ; Monnier, 1987 ; Schoen et al., 1999 ; Symeonidou, 2000 ; Noack et Østby, 2002 ; Toulemon et Testa, 2005 ; Meggiolaro, 2009 ; Rinesi, 2009). Bongaarts (2001) met en évidence certains facteurs qui peuvent conduire les couples à réviser à la hausse leur projet de fécondité : avoir eu un enfant non désiré, que l’un soit décédé, avoir un enfant du sexe souhaité. À l’inverse, le projet initial peut être revu à la baisse pour différentes raisons : retard du calendrier de fécondité, problèmes de fertilité, ou encore concurrence entre le projet familial et d’autres activités. Ces trois derniers facteurs sont selon lui les plus fréquents dans les pays développés, expliquant pourquoi la taille de la famille attendue est généralement surestimée dans ces pays.
4Malgré une relative uniformisation des modèles de fécondité en Europe, des contrastes relativement importants demeurent entre pays. D’un côté, certains comme l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal ou l’Italie enregistrent des taux de fécondité particulièrement bas (compris entre 1,3 et 1,5 enfant par femme), tandis que d’autres comme le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Suède, l’Irlande ou la France gardent un niveau de fécondité proche du seuil de remplacement des générations (entre 1,9 et 2,0 enfants par femme ; Pison, 2011). Si le contexte politique propre à chaque pays peut rendre compte d’une partie des différences observées (Thévenon et Gauthier, 2010), on sait finalement peu de chose sur la manière dont, au niveau individuel, un projet de fécondité se concrétise ou non et, notamment, si dans des contextes différents les caractéristiques des couples jouent à l’identique sur la réalisation des intentions de fécondité.
5Le choix de mettre en regard la France et l’Italie se justifie pour au moins deux raisons. La première est théorique. Elle repose sur le fait qu’il s’agit de deux pays voisins, relativement proches en termes d’intentions de fécondité (Régnier-Loilier et Vignoli, 2008) mais aux modèles de fécondité contrastés (2 enfants par femme en France contre 1,4 en Italie) et dont les contextes institutionnels sont différents, avec des politiques sociales, familiales et des infrastructures de garde d’enfants nettement plus favorables en France. Cette comparaison doit ainsi permettre de mieux comprendre les situations qui, à l’échelle du couple, font obstacle à la réalisation des intentions positives de fécondité, dans un contexte donné. La seconde raison est pragmatique. La confrontation des intentions de fécondité à leur réalisation nécessite de disposer de données longitudinales et comparables entre pays. Les données des enquêtes Generations and Gender Survey (GGS) offrent pour la première fois cette opportunité (annexe), mais pour quelques pays seulement. Si 17 pays ont réalisé la première vague de l’enquête GGS, la seconde n’a pas encore été conduite dans tous et, lorsqu’elle l’a été, les données ne sont pas encore disponibles.
6Dans un premier temps, nous décrivons les situations de fécondité françaises et italiennes, selon le calendrier, le nombre d’enfants et les intentions à court terme. On se demande ensuite si les intentions positives se réalisent dans les mêmes proportions dans les deux pays et si les obstacles à la réalisation des intentions sont les mêmes. Enfin, approche peu développée jusqu’à présent, les données de l’enquête GGS permettent de voir dans quelle mesure la non-réalisation d’un projet de court terme conduit à son ajournement ou au renoncement.
I – Faire famille en France et en Italie : cadre théorique et empirique
Un contexte différent
7En France, au cours des quarante dernières années, l’institution matrimoniale s’est profondément transformée : le nombre de mariages a diminué au profit de l’union libre et les unions se sont fragilisées, occasionnant une transformation du paysage familial et notamment une forte augmentation des familles monoparentales. Toutefois, ces évolutions ne se sont pas accompagnées d’une désaffection vis-à-vis de la famille, la majorité des couples souhaitant avoir des enfants. Plus de la moitié des naissances surviennent ainsi aujourd’hui en dehors du cadre du mariage (Pla et Beaumel, 2010). Par ailleurs, dans la majorité des pays européens – dont la France et l’Italie –, l’un des phénomènes les plus marquants de la dynamique de construction de la famille a été le report de plus en plus tardif du premier enfant. Celui-ci a été expliqué, pour le cas de la France, par l’allongement des études (Robert-Bobée et Mazuy, 2005) et l’entrée de plus en plus tardive sur le marché du travail, le souhait de s’assurer que le couple soit stable (Mazuy, 2009), mais aussi par le désir de profiter un temps de sa vie de couple sans enfant (Régnier-Loilier et Solaz, 2010). Ces évolutions sont indissociables de la diffusion des méthodes modernes de contraception (en particulier la pilule, méthode la plus utilisée en France) à partir des années 1970 et de l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail.
8En Italie, à l’inverse, la majorité des couples continuent à avoir leurs enfants dans le cadre du mariage (20 % de naissances hors mariage en 2008 selon l’Istat). Toutefois, malgré la persistance de cette spécificité du faire famille en Italie (Dalla Zuanna et Micheli, 2004), le pays est entré depuis peu dans une nouvelle phase démographique marquée par davantage de divorces, d’unions libres et de mariages célébrés uniquement de manière civile (Rosina, 2007 ; Vignoli et Ferro, 2009). Dans ce contexte, les obstacles à franchir pour devenir parents sont sans doute plus importants en Italie qu’en France en raison de l’absence d’un support institutionnel à la famille et au rôle de mère. Les opportunités professionnelles des femmes semblent en effet sérieusement compromises par la vie familiale, principalement lorsque le conjoint ne contribue pas ou peu aux activités domestiques et à l’éducation des enfants. Cette situation conduit beaucoup de femmes à reporter l’arrivée d’un enfant, à limiter le nombre d’enfants qu’elles souhaitent, voire à renoncer à en avoir (Mencarini, 2007). À ceci s’ajoute ces dernières années un taux de chômage élevé chez les jeunes et une précarisation des emplois, notamment féminins (Salvini et Ferro, 2007). Parmi les raisons du retard à la parentalité en Italie, et en plus de celles communes à la France et plus généralement aux sociétés modernes, comme l’allongement de la scolarisation et les difficultés accrues d’insertion sur un marché du travail de plus en plus difficile à définir (Vignoli, 2011), il ne faut pas oublier d’autres spécificités comme l’importance des liens familiaux et le marché du logement particulièrement peu favorable en Italie (Dalla Zuanna et Billari, 2008). Sur le premier point en effet, la solidarité entre les membres d’une même famille est particulièrement forte en Italie, à chaque étape du cycle de vie : les jeunes restent vivre plus longtemps chez leurs parents et, une fois partis, ils élisent souvent domicile à proximité. Sur le second point, les difficultés d’accès à la propriété et le coût prohibitif des rares logements disponibles sur le marché locatif représentent un frein à la construction de la famille chez les jeunes.
9Cette différence de contexte dans lequel les couples construisent leurs choix familiaux en France et en Italie s’accompagne aussi de modèles de fécondité qui se sont en certains points différenciés ces dernières décennies.
Intensité et calendrier de fécondité : des différences de plus en plus marquées
10Le nombre moyen d’enfants par femme ayant entre 45 et 64 ans (au moment de la première vague d’enquête) est relativement proche dans les deux pays, bien que légèrement inférieur en Italie avec 1,9 contre 2 en France. En termes de distribution, les familles à deux enfants sont les plus fréquentes (39 % en France et 44 % en Italie), mais les familles de trois enfants ou plus sont nettement plus répandues en France (32 % contre 24 %).
11Le déclin de la fécondité italienne, commencé à la fin des années 1970, se retrouve dans l’évolution du calendrier de fécondité des générations plus jeunes (figure 1). Pour les femmes âgées de 45 à 64 ans, on n’observe aucune différence entre les deux pays quant à l’arrivée du premier enfant : à 25 ans, 58 % des femmes en France et 55 % en Italie avaient eu leur premier enfant et, au terme de leur vie féconde (à 45 ans), 90 % des premières et 88 % des secondes avaient eu un premier enfant. Pour ces générations de femmes, on note cependant un léger retard dans l’arrivée du deuxième enfant en Italie. À 30 ans, 49 % des femmes avaient eu un deuxième enfant en Italie contre 58 % en France, et il en résulte, à terme, une moindre proportion de femmes ayant eu un deuxième enfant en Italie (67 %) qu’en France (71 %). Cette différence est encore plus marquée pour le troisième enfant.
Proportions cumulées de femmes ayant eu un premier (second, troisième) enfant à un âge donné (France, Italie)

Proportions cumulées de femmes ayant eu un premier (second, troisième) enfant à un âge donné (France, Italie)
12S’il n’est pas possible d’observer la descendance finale des femmes plus jeunes (35-44 ans) dans la mesure où elles n’ont pas toutes achevé leur vie reproductive, on note cependant un retard dans l’arrivée des premier et deuxième enfants dans les deux pays, mais plus marqué en Italie : à 25 ans, 42 % des femmes en France et 35 % en Italie ont eu un premier enfant (soit une différence de 7 points de pourcentage contre 3 points pour les 45-64 ans) et à 30 ans, 43 % des premières et 32 % des secondes ont eu un deuxième enfant (soit un contraste de 11 points contre 9 points pour les 45-64 ans). Ces différences ne marquent pas seulement un retard des naissances plus important en Italie qu’en France puisque les écarts demeurent à 35 ans : 84 % des femmes en France ont alors un premier enfant et 61 % un deuxième, contre respectivement 74 % et 47 % en Italie. Enfin, pour les plus jeunes (25-34 ans, résultats non présentés ici), le retard à l’arrivée du premier enfant est encore plus accentué en Italie.
Des intentions de fécondité différentes
13Les différences de comportements de fécondité entre la France et l’Italie se retrouvent dans une certaine mesure au niveau des intentions de fécondité (figure 2). Parmi les femmes sans enfant âgées de 20 à 40 ans, l’intention d’avoir un enfant dans les trois prochaines années [1] est moins fréquente en France (74 %) qu’en Italie (85 %). Cela tient à un effet de sélection : dans cette classe d’âges en effet, on compte proportionnellement plus de mères en France (71 % contre 49 % en Italie). À l’inverse, les mères ont plus souvent l’intention d’avoir un autre enfant dans les trois prochaines années en France : 62 % des femmes ayant un enfant en souhaitent un second contre 53 % en Italie, écart que l’on retrouve également dans l’intention d’avoir un troisième enfant (respectivement 23 % contre 10 %).
Proportions de femmes ayant l’intention d’avoir un enfant dans les trois prochaines années selon le nombre d’enfants déjà nés, en France et en Italie

Proportions de femmes ayant l’intention d’avoir un enfant dans les trois prochaines années selon le nombre d’enfants déjà nés, en France et en Italie
Champ : Femmes en couple âgées de 20 à 40 ans (France : N = 1 229 ; Italie : N = 3 766).14De manière générale, le nombre désiré d’enfants (y compris les enfants déjà nés) des femmes de 20 à 40 ans est un peu plus élevé en France, avec 2,4 enfants par femme en moyenne contre 2,1 en Italie (Régnier-Loilier et Vignoli, 2009) : en France, 43 % désirent deux enfants et 41 % trois enfants ou plus, tandis que le nombre désiré se concentre largement sur 2 enfants en Italie (60 %). Malgré cette différence, la référence symbolique à une famille comptant au moins deux enfants persiste dans les deux pays et rares sont les femmes qui n’en souhaitent qu’un seul (15 % en Italie et 11 % en France), y compris en Italie où la conjoncture actuelle montre pourtant que de plus en plus de femmes n’ont qu’un seul enfant au terme de leur vie féconde (Breton et Prioux, 2009). Si la plupart des femmes ont l’intention d’avoir un ou des enfants, la différence actuelle de fécondité observée entre la France et l’Italie laisse supposer que le projet n’est pas toujours concrétisé, notamment en Italie. Afin de mieux comprendre les différences de comportements, il importe de vérifier a posteriori si les intentions déclarées ont été ou non réalisées et de caractériser les couples qui n’ont pas eu l’enfant qu’ils souhaitaient.
II – Les intentions ont-elles été réalisées trois ans plus tard ?
15Les données longitudinales de GGS permettent de confronter intentions de fécondité et réalisation. Les deux premières vagues, réalisées à trois années d’intervalle dans chacun des pays (annexe), offrent en effet la possibilité de rapprocher les réponses données à la question « Avez-vous l’intention d’avoir un enfant dans les trois prochaines années ? » aux comportements observés dans les trois années qui ont suivi.
Brève revue de la littérature
16Une contribution récente au débat sur la correspondance entre intentions de fécondité et réalisation a été développée en Italie par Rinesi (2009). À partir d’une base de données croisant les résultats d’une enquête conduite auprès de mères d’au moins un enfant (renseignant sur leurs intentions) avec les registres de population (afin de voir si une naissance a suivi), elle montre que les intentions exprimées, parmi d’autres caractéristiques démographiques et socioéconomiques, représentent le facteur qui pèse le plus sur les comportements, tant dans la transition vers le second que le troisième enfant.
17Parmi les variables démographiques, l’âge et le nombre d’enfants déjà nés jouent un rôle de premier plan (Noack et Østby, 2002 ; Quesnel-Vallée et Morgan, 2003 ; Berrington, 2004 ; Testa et Toulemon, 2006). Le report des naissances ne réduit pas seulement le nombre désiré d’enfants mais également la probabilité d’avoir les enfants souhaités. En outre, plus la différence entre le nombre d’enfants déjà nés et le nombre attendu d’enfants est importante, plus la probabilité d’expérimenter la transition vers la parité suivante est faible (Symeonidou, 2000).
18Le type d’union apparaît central dans certaines études, dont deux menées aux États-Unis (Schoen et al., 1999 ; Quesnel-Vallée et Morgan, 2003) où l’on note qu’à parité donnée, les couples mariés réalisent plus souvent leurs intentions positives de fécondité. En France, à l’inverse, le type d’union ne semble pas influer de manière significative sur la réalisation des projets, toutes choses égales par ailleurs [2] (Toulemon et Testa, 2005). Le rôle des indicateurs de genre au sein du couple n’est pas non plus univoque selon les pays. En Grèce par exemple, les femmes ayant une vision moins traditionnelle des relations de genre réalisent moins souvent leur projet de fécondité (Symeonidou, 2000), corrélation non mise en évidence aux États-Unis (Thomson, 1997).
19Concernant l’effet des caractéristiques socioéconomiques, les femmes les plus diplômées paraissent plus souvent réaliser leurs intentions positives de fécondité, tant en France qu’en Italie (Toulemon et Testa, 2005 ; Rinesi, 2009). Toutefois, Quesnel-Vallée et Morgan (2003) montrent qu’au-delà de la réalisation des intentions de court terme, les femmes les plus instruites ont au final moins d’enfants qu’elles n’en désirent aux États-Unis.
20Enfin, parmi les facteurs économiques, le rôle des conditions de logement et de la sécurité économique (dont la situation d’emploi) est souvent mis en avant (Thomson, 1997 ; Symeonidou, 2000 ; Berrington, 2004). Rinesi (2009) montre, par exemple, comment dans le contexte italien les couples en situation de meilleure stabilité ont plus fréquemment le nombre d’enfants qu’ils souhaitent. L’incertitude économique joue également en France, une situation de chômage compromettant la réalisation des projets initiaux de fécondité (Testa et Toulemon, 2006).
Une moindre réalisation des intentions de fécondité en Italie
21Parmi les couples cohabitants dont la femme était encore en âge d’avoir un enfant lors de la première vague, 19 % ont eu un enfant en France dans les trois années qui ont suivi contre 15 % en Italie [3], résultats conformes à ceux obtenus dans les deux pays à partir d’autres données (France : Toulemon et Testa, 2005 ; Italie : Rinesi, 2009).
22Derrière cette proportion d’ensemble, de très nettes différences apparaissent selon les intentions déclarées trois ans auparavant et leur degré de certitude [4]. De manière générale d’abord, et quel que soit le pays considéré, les intentions négatives de fécondité (ne plus vouloir d’enfant) ont un excellent pouvoir prédictif des comportements à venir (figure 3). Les personnes qui déclaraient ne pas du tout vouloir d’enfant (réponse « Non ») sont très rares à avoir eu un enfant entre les deux vagues (seules 6 % ont eu un enfant en France et 2 % en Italie). À l’inverse, les intentions positives tendent à surestimer les comportements : parmi les personnes qui avaient l’intention ferme (réponse « Oui certainement ») d’avoir un enfant dans les trois ans, seuls les deux tiers ont réalisé ce projet, en France comme en Italie [5].
23Outre ces similitudes entre pays, une spécificité se dégage : la proportion de couples ayant eu un enfant est systématiquement supérieure en France, quel que soit le degré d’intentionnalité. En particulier, parmi les 5 % de personnes incertaines ayant répondu en France « Probablement pas » à la question, 32 % ont tout de même eu un enfant contre seulement 9 % en Italie (la catégorie « Probablement pas » rassemblant 22 % des intentions dans ce pays). Il semble y avoir en France une attitude plus flexible vis-à-vis du futur parmi les « incertains » qui pourrait tenir à des politiques familiales contrastées. Installées de longue date en France, elles atténueraient au niveau individuel l’effet de certains obstacles à l’arrivée d’un enfant, contrairement à l’Italie où la politique familiale reste peu développée, notamment en termes de conciliation entre travail et famille (Matysiak et Vignoli, 2010).
Proportion de couples ayant eu au moins un enfant selon les intentions déclarées trois ans avant (France, Italie)

Proportion de couples ayant eu au moins un enfant selon les intentions déclarées trois ans avant (France, Italie)
Champ : Personnes en couple cohabitant et encore en âge d’avoir des enfants lors de la première vague (dont la femme est âgée de moins de 50 ans et dont les deux membres du couple pensent pouvoir encore avoir des enfants) (France : N = 2 225 ; Italie : N = 3 390).24Dans le but de repérer d’éventuels obstacles à la réalisation des intentions de fécondité, on se limite pour la suite à l’étude des intentions positives (personnes ayant répondu « Oui » et « Oui probablement » à la question des intentions), en opposant celles qui ont été suivies d’une naissance à celles qui ne l’ont pas été.
Caractéristiques des couples n’ayant pas eu l’enfant souhaité
25La revue de littérature présentée précédemment indique qu’un ensemble de caractéristiques influent sur la réalisation des intentions : âge, situation de couple, nombre d’enfants déjà nés, mais aussi situation professionnelle des conjoints (notamment la stabilité de l’emploi), statut d’occupation du logement (propriétaire ou locataire), niveau d’instruction des conjoints, éloignement du domicile de la mère du répondant (laquelle peut être un soutien pour la garde des enfants), pratique religieuse (dont dépendent les intentions de fécondité). Afin de démêler l’effet net de ces différents facteurs, notamment en tenant compte du degré d’intentionnalité, et repérer les caractéristiques qui contrarient le plus la réalisation d’un projet d’enfant, nous avons modélisé la probabilité d’avoir un enfant dans les trois années suivantes parmi les couples en ayant eu l’intention, en Italie et en France. Le tableau 1 présente les coefficients ? issus de la régression logistique, les probabilités estimées (%) [6] et le seuil de significativité de chacun des facteurs.
26Les caractéristiques retenues se rapportent toutes à la situation observée lors de la première vague d’enquête, sauf l’indicateur de rupture d’union qui décrit les changements survenus entre les deux vagues. Les autres caractéristiques ont pu évoluer dans le même temps (évolution du statut professionnel par exemple), mais nous ne disposons pas d’informations sur la datation de ces événements, rendant impossible l’interprétation que nous pourrions en faire. D’autres caractéristiques auraient mérité d’être prises en compte, au rang desquelles l’intention du conjoint [7], la participation relative de chacun des conjoints aux travaux domestiques, la durée de l’union [8] ou encore des problèmes de fertilité. Ces informations ne sont cependant pas présentes simultanément dans les deux enquêtes, ou pas suffisamment comparables. En outre, les effectifs limités empêchent la création d’interactions entre certaines variables. Par exemple, il eût été intéressant de croiser le nombre d’enfants déjà nés et l’activité de la femme, ces deux variables étant liées (Neyer et al., 2011).
27La situation prise comme référence correspond à un couple sans enfant, marié, n’ayant pas rompu son union entre les deux vagues, dont la femme a moins de 25 ans lors de la première vague et travaille dans le secteur public, dont le conjoint est actif, ayant l’un et l’autre un bas niveau de diplôme [9], propriétaires de leur logement (y compris accédant), habitant à une distance lointaine de la mère du répondant [10], n’assistant jamais ou rarement aux services religieux et dont l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans était la plus ferme (« Oui certainement »). Ce « couple de référence » a plus souvent réalisé ses intentions positives de fécondité en France (71 %) qu’en Italie (56 %).
28La comparaison des résultats pour les deux pays fait d’abord ressortir quelques similitudes, notamment le rôle prépondérant des intentions (Ajzen, 1991) et de leur fermeté sur les comportements (Toulemon et Testa, 2005). La probabilité d’avoir eu un enfant est deux fois plus élevée pour les personnes ayant répondu « Oui certainement » à la question des intentions par rapport à celles ayant répondu « Oui probablement ». Toutes choses égales par ailleurs, on retrouve un effet très marqué de l’âge en France comme en Italie, avec cependant quelques nuances. La probabilité d’avoir eu un enfant est plus forte pour les couples dont la femme était âgée de 25 à 34 ans au moment de la première vague (relativement aux couples dont la femme avait moins de 25 ans), mais seulement en France, tandis qu’elle est plus élevée dans les deux pays au-delà de 35 ans. En France, les intentions exprimées sont sans doute moins « réalistes » aux jeunes âges, dans la mesure où nombre de couples souhaitent préalablement réunir un ensemble de conditions avant d’entrer en parentalité : avoir une situation professionnelle installée, être « sûr » que l’union va tenir, avoir profité de sa vie de couple à deux sans enfant (Régnier-Loilier, 2007), mais aussi que les deux conjoints soient « prêts » ensemble (Mazuy, 2009). La période 25-34 ans est celle durant laquelle la majorité des couples ont leurs enfants en France comme en Italie, la plupart des conditions préalables étant alors réunies. Après 35 ans, l’âge peut devenir un obstacle à la réalisation des intentions, la fertilité déclinant progressivement au cours de la vie féconde (Leridon, 2010).
29Parmi les autres points communs aux deux pays, la proximité géographique des ascendants, en particulier de la mère, principale pourvoyeuse de l’aide apportée pour la garde des petits-enfants, favorise la réalisation des intentions. Ce soutien intergénérationnel desserre sans doute dans une certaine mesure les contraintes qui pèsent sur les mères actives, en particulier en Italie où les structures de garde ne sont pas très développées. L’effet reste cependant modeste, mais sans doute atténué en raison de l’imprécision de l’indicateur utilisé (cf. supra). À l’inverse, avoir rompu son union entre les deux vagues contrarie sans surprise la réalisation des intentions. Enfin, la religion, dont le nombre désiré d’enfants dépend fortement – les plus pratiquants souhaitant davantage d’enfants (Régnier-Loilier et Vignoli, 2009) –, n’a aucun effet significatif sur la réalisation des intentions de court terme.
30Contrairement à l’étude des caractéristiques affectant le nombre désiré d’enfants qui montraient majoritairement des similitudes entre la France et l’Italie (Régnier-Loilier et Vignoli, 2009), on observe ici davantage de différences. Le nombre d’enfants joue, mais à des niveaux différents selon le pays. En France, la probabilité d’avoir réalisé son projet est de 71 % pour les couples sans enfant mais n’atteint que 51 % chez les parents d’au moins deux enfants. Si l’arrivée d’un deuxième enfant est pour la plupart des couples une « évidence » pour chacun des conjoints, le choix d’en avoir un troisième est en revanche moins consensuel. L’arrivée d’un troisième enfant implique en outre davantage de changements dans l’organisation du couple (Régnier-Loilier, 2007), pouvant expliquer une remise en cause des intentions. En Italie en revanche, ce sont les intentions positives des couples ayant déjà un enfant qui se sont le plus souvent réalisées entre les deux vagues. Sans doute peut-on y voir un effet de sélection. Dans un contexte sociopolitique donné et de manière générale peu favorable à la famille, on peut faire l’hypothèse que les couples ayant un premier enfant ont des intentions de fécondité plus « réalistes » que ceux n’ayant pas encore expérimenté la parentalité.
Probabilité (coefficient ? et %) d’avoir eu un enfant entre les deux vagues d’enquête versus ne pas en avoir eu, parmi les personnes ayant l’intention d’en avoir un lors de la première vague (France, Italie)

Probabilité (coefficient ? et %) d’avoir eu un enfant entre les deux vagues d’enquête versus ne pas en avoir eu, parmi les personnes ayant l’intention d’en avoir un lors de la première vague (France, Italie)
Lecture : Un coefficient positif (resp. négatif) et statistiquement significatif indique que l’on est en présence d’un facteur qui accroît (resp. diminue) la probabilité d’avoir eu un enfant, toutes choses égales par ailleurs. Plus le coefficient est fort (positif ou négatif), plus le facteur pèse sur cette probabilité.Seuils de significativité : * : 10 % ; ** : 5 % ; *** : 1 % ; n.s : non significatif.
Champ : Personnes ayant exprimé l’intention d’avoir un enfant « dans les trois ans », vivant en couple cohabitant et encore en âge d’avoir des enfants lors de la première vague (dont la femme est âgée de moins de 50 ans, dont les deux membres du couple pensent pouvoir encore avoir des enfants).
31Le statut matrimonial joue également, mais uniquement en France où le mariage n’est pas aussi « systématique » qu’en Italie. Les couples mariés ont ainsi plus souvent concrétisé leur projet que les couples non mariés. Le mariage étant en perte de vitesse, il concerne d’une certaine manière des couples de plus en plus « sélectionnés » aux valeurs familiales plus affirmées. Si le mariage renvoie à une vision plus traditionnelle de la famille et à des comportements familiaux spécifiques, il concerne aussi davantage des couples formés depuis plus longtemps [11] pour lesquels on peut faire l’hypothèse que l’intention d’avoir un enfant est plus construite. Toutefois, leur probabilité d’avoir eu un enfant est plus faible, toutes choses égales par ailleurs (modèle non présenté ici) [12]. Il est intéressant de noter que lorsque l’on introduit cette variable, l’effet du statut matrimonial demeure, contredisant les résultats obtenus en France à partir d’une précédente étude. Toulemon et Testa (2005) ne trouvaient en effet aucune différence selon le statut matrimonial. Cela pourrait tenir au fait que la temporalité retenue entre intention et réalisation couvrait une période plus longue (5 ans contre 3 ans ici) ou encore que les couples mariés sont aujourd’hui de plus en plus sélectionnés [13].
32Le niveau d’instruction des conjoints n’affecte les comportements qu’en Italie, les plus diplômés ayant plus souvent réalisé leur projet, résultat qui confirme une récente recherche pour ce même pays (Rosina et Testa, 2009). Ceci pourrait s’expliquer par un effet « revenu », le diplôme étant un bon proxy des chances de réussite et d’insertion sur le marché du travail, et donc du revenu du couple (Kreyenfeld, 2002). On peut ainsi avancer l’hypothèse d’une plus grande possibilité pour ces couples de surmonter certains obstacles (pour la garde des enfants par exemple), facteur qui aurait d’autant plus d’importance en Italie en raison d’une politique familiale peu favorable, tant sur le plan économique qu’en termes de moyens facilitant l’articulation entre vie familiale et vie professionnelle. Dans ce contexte, l’hypothèse d’une meilleure capacité à se projeter dans l’avenir ou d’intentions plus « réalistes » de la part des plus diplômés peut également être avancée.
33En France en revanche, on ne retrouve pas ici d’effet du diplôme [14]. C’est la stabilité professionnelle qui semble primer. Le projet de fécondité a d’autant plus de chances d’avoir été concrétisé que la femme occupe un emploi stable : alors que la probabilité estimée d’avoir eu un enfant pour un couple dont la femme occupe un emploi en contrat à durée déterminée n’est que de 53 %, elle est de 62 % si elle est titulaire d’un contrat à durée indéterminée et de 71 % si elle travaille dans le secteur public, suivant ainsi une sorte de gradation en fonction du degré de sécurité de l’emploi (OCDE, 2009). Celui-ci pèse sur la situation économique du couple, mais aussi sur les possibilités de conciliation entre activité et vie familiale, l’aménagement du temps de travail étant par exemple plus simple dans le secteur public que lorsque l’on est en contrat à durée déterminée dans le secteur privé. En Italie, l’effet est différent. Les couples dont la femme est titulaire d’un CDI dans le privé ont plus souvent eu un enfant que celles exerçant dans le secteur public, cette situation allant de paire avec une maximisation du salaire potentiel du couple (les salaires y sont supérieurs à ceux des emplois publics). De même, les couples dont la femme est au foyer – situation plus fréquente en Italie qu’en France – ont plus souvent eu un enfant. La situation professionnelle de l’homme lors de la première vague n’a en revanche aucun effet significatif, contrairement à ce que l’on aurait pu attendre. Les interprétations microéconomiques traditionnelles mettent en effet l’accent sur le rôle central de la situation économique du conjoint dans la réalisation des intentions de fécondité. L’absence de significativité tient peut-être à un manque de précisions quant à la situation d’activité de l’homme retenue ici et au petit nombre de couples dans lesquels il n’a pas d’emploi.
34Enfin, le statut d’occupation du logement (propriétaire ou non) influe sur la réalisation des projets, mais uniquement en France et dans un sens qui peut surprendre. Alors que l’on se serait attendu à ce que les propriétaires (ou accédants) réalisent plus fréquemment leur projet, ce statut pouvant aller de paire avec une situation économique, géographique et conjugale plus installée, c’est l’inverse que l’on observe. La réalisation des intentions est plus fréquente chez les locataires que chez les propriétaires ou accédants. Une explication pourrait être que le coût de l’accession à la propriété entre en concurrence avec celui de la maternité (Courgeau et Lelièvre, 1992). Concernant l’Italie, il n’est guère surprenant de ne pas trouver d’effet significatif. Une précédente étude a montré que le statut d’occupation du logement n’affectait pas les intentions de fécondité, celles-ci dépendant davantage du sentiment de sécurité qu’une personne a de sa situation d’habitat dans les trois années à venir [15] (Vignoli et al., 2011). Une majorité de ménages doit en effet faire face à des contraintes de divers ordres : prix élevé des logements, parc locatif réduit ou encore difficultés pour obtenir un prêt immobilier (Ström, 2010). On ne peut cependant donner plus de précisions ici dans la mesure où les données françaises et italiennes ne contiennent pas le même niveau de détail : il n’est pas possible de distinguer dans l’enquête italienne les propriétaires des accédants à la propriété ; à l’inverse, on ne dispose d’aucune précision sur le sentiment de sécurité relatif à l’habitat dans l’enquête française.
III – Ne pas avoir eu l’enfant souhaité : ajournement du projet ou renoncement ?
35L’étude de la non-réalisation des intentions de fécondité reste incomplète si l’on ne s’interroge pas sur sa signification, en particulier du fait que l’analyse porte sur une courte période (3 ans). On court en effet le risque de mettre sur le même plan le report d’un projet de fécondité et le renoncement à celui-ci, risque d’autant plus élevé si l’on considère les femmes au début de leur vie féconde (Noack et Østby, 1985 ; Berrington, 2004). Or on peut penser que certaines caractéristiques du couple peuvent amener à reporter le projet tandis que d’autres conduiront à y renoncer.
36Afin de distinguer renoncement et ajournement du projet exprimé lors de la première vague, on peut s’intéresser aux intentions déclarées lors de la seconde vague pour les trois années suivantes par les personnes n’ayant pas réalisé leurs intentions positives de fécondité. Trois cas de figure se présentent : soit la personne exprime de nouveau l’intention d’avoir un enfant, soit elle exprime une intention négative (ne veut pas d’enfant dans les trois prochaines années), soit enfin elle est « hors champ » lors de la seconde vague d’enquête (la question des intentions ne lui a alors pas été posée, soit parce qu’il s’agit d’un couple dont la femme a atteint ou dépassé 50 ans, soit parce que le couple a déclaré ne plus pouvoir avoir d’enfant). Ces deux dernières situations peuvent être considérées à l’horizon des trois années suivantes comme un « renoncement » au projet de fécondité, la première situation comme un « report ».
37La non-réalisation des intentions positives de fécondité correspond à un renoncement dans 56 % des cas en Italie et 52 % des cas en France. Derrière cette statistique d’ensemble se cachent d’importantes disparités selon les caractéristiques des couples et, en particulier, leur avancée dans la vie reproductive.
Proportion de couples ayant ajourné et renoncé au projet d’enfants selon l’âge de la femme lors de la première vague d’enquête (France, Italie)

Proportion de couples ayant ajourné et renoncé au projet d’enfants selon l’âge de la femme lors de la première vague d’enquête (France, Italie)
Champ : Personnes ayant exprimé l’intention d’avoir un enfant « dans les trois ans » mais n’en n’ayant pas eu, vivant en couple cohabitant lors des deux vagues d’enquête avec le même conjoint et encore en âge d’avoir des enfants lors de la première vague (France : N = 219 ; Italie : N = 445).38Le renoncement au projet d’enfant est particulièrement rare chez les plus jeunes (couples dont la femme est âgée de moins de 25 ans lors de la première vague d’enquête) : tous ou presque ont encore l’intention d’avoir un enfant à court terme (dans les trois ans), tant en France qu’en Italie (figure 4). Ce résultat n’est guère surprenant dans la mesure où, parmi les plus jeunes, beaucoup n’ont pas encore d’enfant et très peu souhaitent rester sans enfant. Différents événements ont pu venir contrarier leur projet, par exemple une insertion professionnelle retardée ou une rupture d’union. En revanche, le rapport s’inverse avec l’avancée en âge, et à partir de 35 ans la majorité des intentions non réalisées se soldent par un renoncement : 76 % en France et 55 % en Italie [16]. Si à cet âge on renonce moins en Italie qu’en France, cela tient sans doute à un effet de structure lié au nombre d’enfants déjà nés, celui-ci étant moindre à ces âges en Italie. Corrélativement à l’âge, on retrouve un effet similaire selon le nombre d’enfants déjà nés : plus celui-ci est élevé et plus la part de renoncement au projet est importante.
39Au-delà de l’âge et du nombre d’enfants, on peut s’interroger sur l’influence d’autres facteurs pouvant conduire à renoncer au projet plutôt qu’à le reporter. Afin de tenir compte des effets de structure, une régression logistique a été mise en place pour confronter, parmi les couples n’ayant pas eu l’enfant qu’ils projetaient d’avoir, ceux ayant renoncé au projet de ceux ayant toujours l’intention d’en avoir. La modélisation reprend globalement les mêmes variables que celles utilisées lors du précédent modèle, en les « actualisant ». Les intentions exprimées lors de la seconde vague n’ont en effet pas lieu d’être rapportées à la situation des personnes observées lors de la première vague [17]. On tient compte de la situation professionnelle des conjoints, de l’éloignement du domicile de la mère et du statut d’occupation du logement au moment de la seconde interrogation, et on repère l’évolution du statut matrimonial entre les deux vagues. Le champ est limité aux personnes n’ayant pas connu de séparation entre les deux vagues afin de disposer des caractéristiques des deux conjoints. Certaines modalités sont absentes en Italie (« moins de 25 ans », tous souhaitant encore avoir un enfant, et « mariage entre les deux vagues »).
Probabilité (coef. ? et %) d’avoir renoncé au projet versus l’avoir reporté (France, Italie)

Probabilité (coef. ? et %) d’avoir renoncé au projet versus l’avoir reporté (France, Italie)
Lecture : Un coefficient positif (resp. négatif) et statistiquement significatif indique que l’on est en présence d’un facteur qui accroît (resp. diminue) la probabilité d’avoir renoncé au projet d’enfants, toutes choses égales par ailleurs. Plus le coefficient est fort (positif ou négatif), plus le facteur pèse sur cette probabilité.Seuils de significativité : * : 10 % ; ** : 5 % ; *** : 1 % ; n.s : non significatif.
Champ : Personnes ayant exprimé l’intention d’avoir un enfant « dans les trois ans » mais n’en n’ayant pas eu, vivant en couple cohabitant lors des deux vagues d’enquête avec le même conjoint et encore en âge d’avoir des enfants lors de la première.
40Comme pour la réalisation des intentions, la comparaison entre les deux pays fait apparaître quelques similitudes mais surtout des différences. Le degré d’intention déclaré en première vague joue sur les intentions déclarées en seconde vague : la probabilité d’avoir renoncé au projet est plus élevée pour les personnes qui avaient exprimé une intention moins ferme (« Oui, probablement »), effet commun aux deux pays. Et de la même manière, l’avancée en âge de la femme conduit davantage de couples à renoncer au projet d’enfants dans les deux pays.
41Au-delà de ces caractéristiques, les couples renonçant ou ajournant leur projet ne se distinguent que très peu en France sur la base des critères retenus dans la modélisation (tableau 2). Seuls les plus pratiquants (assister aux offices religieux au moins une fois par mois) ont moins souvent renoncé à leur projet d’enfants, toutes choses égales par ailleurs. Cet effet ne se retrouve pas en Italie. Ceci pourrait tenir à un effet de sélection des personnes les plus pratiquantes en France. Par le passé, l’adhésion à la religion était massive et pouvait s’apparenter à un certain conformisme social (aller à l’église était la norme) alors qu’aujourd’hui, elle correspond davantage à un choix individuel. La pratique religieuse est ainsi devenue plus « discriminante » en France (Régnier-Loilier et Prioux, 2009), alors qu’elle l’est moins en Italie où elle reste très fréquente et diffuse.
42En Italie en revanche, le renoncement ou l’ajournement du projet dépend de davantage de facteurs, en particulier de la parité atteinte et du niveau de diplôme des conjoints. En premier lieu, parmi les couples n’ayant pas eu l’enfant prévu, ceux sans enfant ont une probabilité deux fois plus faible que les parents d’un enfant d’avoir renoncé à leur projet (respectivement 15 % contre 32 %), et inversement pour les parents d’au moins deux enfants pour lesquels la probabilité d’avoir renoncer à leur projet exprimé en première vague est double (64 %). En second lieu, l’effet marqué du niveau de diplôme des conjoints sur la probabilité d’avoir réalisé leurs intentions se rejoue ici à l’identique. Plus le niveau d’instruction des conjoints est élevé et moins la probabilité d’avoir renoncé au projet est importante. Le diplôme apparaît donc comme un facteur clé des comportements de fécondité en Italie, contrairement à la France où il ne joue pas.
43La proximité géographique avec la mère, comme aide potentielle à la garde d’enfants, joue également de manière significative en Italie lorsque la mère est décédée : dans ce cas, la probabilité d’avoir renoncé au projet est plus forte. Par contre, effet qui reste difficilement explicable, une distance « moyenne » plutôt que « lointaine » augmente également la probabilité d’avoir renoncé au projet. L’imprécision de l’indicateur (proximité de la mère du répondant mais sans connaître la proximité de la belle-mère) rend ce résultat fragile.
44Enfin, en France comme en Italie, et par contraste avec la probabilité d’avoir ou non réalisé ses intentions positives de fécondité entre les deux vagues, ni le statut matrimonial, ni le fait d’être ou non propriétaire n’influent sur le fait d’avoir renoncé ou reporté le projet, toutes choses égales par ailleurs.
Conclusion
45On pourrait s’attendre à une forte correspondance entre intentions de fécondité et réalisation en Europe dans la mesure où l’on dispose à la fois de moyens permettant de planifier les naissances (Thomson et Brandreth, 1995) et de techniques médicales d’aide à la reproduction en cas de difficultés (Sobotka et al., 2008), bien que ces dernières ne permettent pas toujours d’avoir un enfant en cas de problèmes de fertilité. Cependant, bien des raisons peuvent conduire à réviser les intentions initiales de fécondité ou à ne pas parvenir à les réaliser.
46La comparaison de la France avec l’Italie du point de vue de la réalisation des intentions se justifie, puisqu’il s’agit de deux pays presque « opposés » en termes de niveau de fécondité, malgré un nombre désiré d’enfants proche (la majorité des couples souhaitant, en France comme en Italie, au moins deux enfants). Les enquêtes GGS se prêtent bien à cette comparaison en offrant des données comparables (même formulation des questions) et longitudinales permettant la mise en regard des intentions déclarées « dans les trois ans » avec les comportements observés dans les trois années suivantes. Plusieurs résultats émergent de cette étude.
47En premier lieu, le fort pouvoir prédictif des intentions négatives de fécondité et, à l’inverse, le fait que les intentions positives surestiment largement les comportements des couples sont ici confirmés.
48En second lieu, la comparaison met en lumière une différence importante : la proportion de couples réalisant leurs intentions positives de fécondité est systématiquement plus élevée en France. Ce pays bénéficie de longue date d’une politique encourageant la fécondité, avec des modes de garde plus développés favorisant une meilleure articulation entre vie familiale et vie professionnelle, des mesures fiscales, des allocations familiales, et plus généralement une meilleure couverture de certains risques (comme la perte de son emploi). En Italie, si la participation des femmes au marché du travail s’est nettement accrue ces dernières décennies, les institutions ne se sont pas suffisamment ajustées aux récents changements (Livi Bacci et Salvini, 2000 ; McDonald, 2000).
49Mais, de la même manière, lorsque les couples n’avaient pas l’intention d’avoir un enfant, la proportion de ceux en ayant eu un est également supérieure en France, laissant supposer que le futur y est toujours plus « ouvert » (en particulier pour les personnes ayant répondu « Probablement pas » à la question des intentions). Cet écart pourrait tenir au fait que les intentions ne découlent pas seulement des désirs des couples mais aussi des normes sociales dominantes (Livi Bacci, 2001), lesquelles sont peut-être plus prononcées dans un pays à forte empreinte familialiste comme l’Italie (Dalla Zuanna, 2001). Les couples répondraient alors à la question des intentions de manière moins réaliste qu’en France, où il serait plus dicible de ne pas souhaiter d’enfants. Cette « surestimation » des intentions de fécondité en Italie pourrait expliquer la moindre réalisation des intentions dans le court terme. Une interprétation complémentaire pourrait être qu’en France, la possibilité de changer d’avis serait plus « ouverte » en raison de politiques familiales plus avantageuses, tandis qu’en Italie, au contraire, le système institutionnel peu favorable à la famille rendrait les couples beaucoup plus « réalistes » face à l’avenir et définitifs dans leur choix de ne pas avoir d’enfant.
50En troisième lieu, au-delà de l’effet classique de l’âge ou du nombre d’enfants sur la réalisation des intentions, les facteurs socioéconomiques jouent un rôle de premier plan au niveau individuel. Mais, contrairement aux déterminants du nombre désiré d’enfants qui sont relativement proches en France et en Italie (Vignoli et Régnier-Loilier, 2009), les facteurs pesant sur la réalisation des intentions sont sensiblement différents (c’est le cas pour le niveau d’instruction, la pratique religieuse, etc.). L’une des différences les plus notables est l’importance du niveau d’études des conjoints en Italie sur la réalisation des intentions de fécondité, facteur non significatif en France. Parmi les caractéristiques jouant sur les comportements en France, on retiendra en particulier que les situations de précarité professionnelle se posent en obstacle à la réalisation d’un projet d’enfant.
51Enfin, si les couples n’ont pas réalisé leurs intentions dans les trois années observées, certains peuvent l’avoir simplement reporté, d’autres y avoir renoncé. À cet égard, les déterminants de la non-réalisation des intentions de fécondité (partie II) ne sont pas tous identiques à ceux qui jouent sur le renoncement au projet (partie III) : c’est notamment le cas de la religion ou du statut matrimonial en France, et des caractéristiques d’emploi dans les deux pays. Par contre, en Italie, le niveau d’instruction joue à la fois sur la réalisation des intentions et sur le renoncement au projet, indiquant l’importance de ce facteur sur les comportements de fécondité dans ce pays. Mêmes si nos résultats restent à cet égard exploratoires, notamment en raison d’effectifs peu conséquents, et qu’ils mériteraient d’être approfondis, ils montrent l’intérêt de ne pas s’en tenir à l’étude des obstacles à la réalisation des intentions dans le court terme mais d’aller au-delà en distinguant renoncement et ajournement du projet.
53
Remerciements
Daniele Vignoli a bénéficié du soutien financier du PRIN 2007 via deux projets financés par le ministère de l’Instruction, de l’université et de la recherche : The cost of children coordonné par Gustavo De Santis et Life Course Dynamics between Context and Strong Ties coordonné par Francesco Billari. Les données longitudinales italiennes ont été obtenues suite à un accord entre l’Istat (Istituto nazionale di Statistica) et les universités de Florence, Milan Catholica, Milan Bocconi, Padova et La Sapienza (Rome). Les auteurs tiennent à remercier Gerda Neyer pour ses commentaires sur une version préliminaire du texte ainsi que les relecteurs anonymes sollicités par le comité de rédaction de Population pour leurs suggestions et remarques constructives.
Données et champ de l’étude
Les données : les deux premières vagues de l’enquête Generations and Gender Survey
54Le projet d’enquêtes longitudinales et internationales Generations and Gender Survey (GGS), initié par la Commission économique des Nations unies pour l’Europe (Vikat et al., 2007), offre l’opportunité de confronter les intentions de fécondité aux comportements effectifs dans différents pays, dont la France et l’Italie. Le questionnaire de chaque vague, construit dans une optique prospective, permet entre autres choses de disposer d’un ensemble d’informations factuelles sur la situation des personnes (situations professionnelle et conjugale, nombre d’enfants, religion, etc.) et sur leurs intentions de fécondité.
55En France, la première vague d’enquête (rebaptisée Études des relations familiales et intergénérationnelles, Erfi) a été réalisée fin 2005 par l’Ined et l’Insee auprès de 10 079 hommes et femmes âgés de 18 à 79 ans (Régnier-Loilier, 2009a). Une personne tirée au hasard dans le ménage était interrogée et donnait un ensemble d’informations la concernant elle-même (d’ordre factuel mais aussi sur ses intentions personnelles) ou relatives à son conjoint (niveau d’études, situation d’activité, etc.). Parmi elles, 6 534 ont été réinterrogées trois ans plus tard (fin 2008). Le calcul d’une variable de redressement corrige les biais liés à l’attrition, laquelle a davantage concerné les plus jeunes, les plus âgés, les personnes en mauvaise santé, vivant seules, les étudiants, etc. (Régnier-Loilier, 2009b). Une troisième et dernière vague est programmée fin 2011. L’Italie n’a pas réalisé à part entière l’enquête GGS mais a intégré dans une opération déjà en cours, l’Indagine Famiglia e Soggetti Sociali (FSS), un certain nombre de questions de GGS dont celles sur les intentions de fécondité. Cette enquête a été conduite par l’Istat (Institut national de la statistique italienne) [18] fin 2003 dans le cadre du programme Multiscopo sur les familles. À cette occasion, 24 000 ménages ont été interrogés, soit environ 50 000 personnes (chaque membre du ménage étant interrogé) [19]. Deux membres d’un même couple ont donc pu être interrogés mais ils répondaient pour eux-mêmes de manière indépendante. Un sous-échantillon de 10 000 personnes âgées de 18 à 64 ans a été reinterrogé un peu plus de trois ans après (début 2007) [20]. Comme pour la France, une variable de redressement corrige les biais liés à la structure de l’échantillon et à l’attrition. Il n’y a pas de troisième vague prévue.
56Cette étude s’appuie essentiellement sur une question, commune aux deux enquêtes : « Avez-vous l’intention d’avoir un enfant dans les trois prochaines années ? Oui, certainement ; oui, probablement ; non, probablement pas ; non, certainement pas » [21]. Si cette question était directement posée aux personnes en âge d’avoir des enfants en Italie, elle était pour des raisons méthodologiques [22] filtrée en France par une question préalable : « Cherchez-vous actuellement à avoir un enfant ? Oui ; non, pas pour l’instant ; non, je ne veux plus d’enfants ni maintenant ni plus tard ». Seules les personnes ayant répondu « Non, pas pour l’instant » étaient interrogées sur leurs intentions de fécondité. Celles ayant répondu « Oui » ont été considérées comme des personnes souhaitant assurément avoir un enfant dans les trois prochaines années ; celles ayant répondu « Non, ni maintenant ni plus tard » pouvant être assimilées à des personnes ne souhaitant assurément pas avoir d’enfant dans les trois prochaines années.
57Parmi les informations disponibles, seules celles communes aux deux enquêtes ont été retenues afin de garantir la comparabilité des résultats (situations conjugale, familiale, de logement, d’activité, etc.). D’autres, comme la répartition des tâches au sein du couple, ne l’étaient pas suffisamment pour pouvoir être retenues.
Champ de l’étude
58La première partie porte sur les femmes âgées de 35 à 64 ans lors de la première vague d’enquête afin de proposer un cadre d’ensemble de l’évolution des niveaux et calendriers de fécondité dans chacun des pays, puis sur les femmes en couple âgées de 20 à 40 ans afin de décrire leurs intentions de fécondité.
59La seconde partie se limite aux personnes en couple cohabitant dont la femme était âgée de moins de 50 ans à la première vague et réinterrogées trois ans plus tard, l’objectif étant de voir dans quelle mesure leurs intentions ont été ou non réalisées. Puis, parmi celles-ci, seules les personnes ayant exprimé l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans sont prises en compte afin de repérer les caractéristiques qui conduisent à ne pas avoir eu l’enfant souhaité.
60Enfin, dans la troisième partie, seules les personnes n’ayant pas réalisé leurs intentions « positives » de fécondité sont prises en compte afin de différencier le profil des couples ayant renoncé à leur projet de fécondité de ceux l’ayant reporté.
61Dans les seconde et troisième parties, les répondants hommes et femmes sont regroupés afin de disposer d’effectifs suffisants. La comparaison des réponses des deux membres d’un même couple à la question des intentions de fécondité montre que leur réponse est très majoritairement la même (Régnier-Loilier et Solaz, 2010), permettant d’opérer ce regroupement malgré les limites que cela peut induire.
Notes
-
[1]
Cumul des réponses « Oui certainement » et « Oui probablement ».
-
[2]
Notamment en tenant compte de la durée de l’union.
-
[3]
La proportion pour l’Italie est légèrement surestimée dans la mesure où la seconde vague d’enquête a eu lieu un peu plus de trois ans après la première (annexe). Les couples dont la femme est enceinte au moment de la seconde vague sont considérés comme ayant eu un enfant : on peut en effet estimer qu’ils ont déjà, au moment de la seconde vague, concrétisé leur projet d’enfant.
-
[4]
Selon les 4 modalités « Oui certainement ; oui probablement ; non probablement pas ; non certainement pas ». Il est à noter que l’exclusion du terme « certainement » en France ne semble pas conduire à une sous-estimation des intentions les plus fermes, celles-ci étant proportionnellement plus nombreuses qu’en Italie, tant pour les intentions positives que négatives.
-
[5]
L’effet gradué de la variable d’intention, et notamment le meilleur pouvoir prédictif des intentions négatives, ne surprend guère en raison d’un effet de sélection : on trouve en effet, parmi les couples ne souhaitant plus d’enfant, davantage de couples dont l’âge de la femme rend moins probable l’arrivée d’un enfant.
-
[6]
Méthode de calcul (p. 100): 1 / [1 + exp (– ?(constante) – ?(facteur))].
-
[7]
L’intention du conjoint influe sur la réalisation des projets (Thomson, 1997). Plus spécifiquement, la réalisation des intentions est plus fréquente si les conjoints ont les mêmes intentions (Istat, 2010).
-
[8]
Celle-ci n’est pas retenue dans le modèle car trop corrélée à l’âge de la femme.
-
[9]
Les systèmes éducatifs n’étant pas directement comparables, trois catégories ont été construites : « Bas », « Moyen », « Haut ». Le niveau « Bas » regroupe l’ensemble des diplômes inférieurs au baccalauréat, le niveau « Moyen » rassemble les titulaires d’un Bac jusqu’au niveau Bac + 2, et le niveau « Haut » correspond aux diplômes supérieurs à Bac + 2.
-
[10]
Il s’agit de la distance séparant le domicile de la mère de celui du répondant, lequel peut être un homme ou une femme (dans GGS, la distance séparant le domicile du répondant de celui des beaux-parents n’est pas indiquée).
-
[11]
En France par exemple, les couples mariés cohabitent depuis plus de 7 ans en moyenne contre 4 ans pour les couples non mariés (sur le champ ici considéré).
-
[12]
En raison de la forte corrélation entre la durée de l’union et l’âge de la femme, nous avons choisi de ne présenter que le modèle incluant l’âge, les autres résultats n’étant pas contredits, que l’on ajoute ou non cette variable.
-
[13]
En outre, dans l’enquête « Intentions de fécondité » 1998-2003 (Ined) sur laquelle ils s’appuyaient, l’attrition particulièrement forte entre les vagues d’enquête a pu conduire à certains biais (La Rochebrochard et al., 2005).
-
[14]
Toutes choses égales par ailleurs, contrairement aux résultats de précédents travaux (Toulemon et Testa, 2005). Comme évoqué auparavant pour le statut matrimonial, on notera que la temporalité retenue n’est pas la même et que les modèles ne sont pas identiques terme à terme. On tient notamment compte ici du secteur d’activité et du type de contrat.
-
[15]
La question était : « Quanto si sente tranquillo nei prossimi 3 anni rispetto alle sue condizioni abitative? – Molto, abbastanza, poco, per niente » (« Dans quelle mesure vous sentez-vous serein(e) dans les trois prochaines années relativement à vos conditions de logement ? Très serein(e), plutôt, peu, pas du tout »).
-
[16]
Il y a là un effet de « construction » dans la mesure où parmi ces couples, un certain nombre d’entre eux sont devenus « hors champ » du fait de l’âge de la femme.
-
[17]
À titre d’exemple, la mère du répondant peut être décédée entre les deux vagues, rendant inadaptée la question de la proximité géographique. Il en est de même pour la situation matrimoniale, le logement, l’activité.
-
[18]
Grâce au financement du ministère du Travail et des politiques sociales (Ministero del Lavoro e delle Politiche Sociali).
-
[19]
http://www.istat.it/strumenti/rispondenti/indagini/famiglia_societa/famigliesoggettisociali/indagine_2003
- [20]
-
[21]
Dans l’enquête française, les modalités de réponse étaient « Oui ; oui, probablement ; non, probablement pas ; non ». Le « certainement » avait été exclu des modalités suite au test de l’enquête dans la mesure où ce mot prêtait parfois à confusion avec « probablement » et que cette formulation affaiblissait finalement dans l’esprit des répondants la fermeté de l’intention par rapport à un simple « Oui » ou « Non ».
-
[22]
Les tests de l’enquête avaient notamment montré que les questions d’intentions étaient trop nombreuses et trop insistantes pour les couples dont la femme était déjà relativement avancée en âge (mais moins de 50 ans) et ayant déjà le nombre d’enfants souhaité.