1 Les migrations résidentielles peuvent être analysées de manières diverses, selon que l’on s’intéresse plutôt aux comportements des individus et des ménages, à leurs choix et stratégies résidentiels, ou que l’on considère plutôt les territoires, les flux migratoires étant alors des révélateurs d’interactions entre les lieux (Desplanques, 1994 ; Baccaïni, 2006).
2 Les migrations entre les régions françaises sont régulièrement décrites et analysées, en général lors de la publication des résultats d’un recensement. En 2004 a eu lieu la première collecte du nouveau recensement. Ses résultats sont l’occasion de faire le point sur les changements intervenus depuis cinquante ans dans l’organisation spatiale des flux interrégionaux.
3 De 1962 à 1999, une question était posée lors de chaque recensement sur le lieu de résidence au 1er janvier de l’année du précédent recensement ; ainsi, en 1999, on a interrogé les individus sur leur lieu de résidence le 1er janvier 1990.
4 La rénovation du recensement a conduit à modifier cette question : désormais, les personnes interrogées lors d’une enquête annuelle de recensement doivent indiquer leur lieu de résidence cinq ans auparavant. Ainsi, lors de l’enquête de recensement de 2004, les personnes étaient interrogées sur leur lieu de résidence le 1er janvier 1999. La période de référence sera désormais de durée constante (cinq ans) et plus courte que ce n’était le cas avant (entre 6 et 9 ans), ce qui facilitera les travaux sur la mobilité résidentielle (Baccaïni, 2001b).
5 La question posée permet de comptabiliser des migrants, c’est-à-dire des personnes dont le lieu de résidence a changé entre le début et la fin de la période. Du fait des migrations multiples et des retours, non comptabilisés, le nombre de migrants est inférieur au nombre de migrations réellement effectuées. On verra qu’il est nécessaire d’utiliser des modélisations pour estimer, à partir de ces données censitaires, des taux annuels de mobilité (fréquence des changements de logement, de commune, de département, de région) ou encore des taux annuels d’entrée ou de sortie des régions.
6 Les résultats de l’enquête annuelle de recensement de 2004 permettent, avec la question sur le lieu de résidence au 1er janvier 1999, d’analyser avec précision les échanges migratoires entre régions, le sondage étant équilibré à ce niveau géographique (Baccaïni, 2005). Précisons bien qu’il s’agit ici de l’étude des migrations internes : seuls les échanges entre les 22 régions de France métropolitaine sont considérés. Les migrations en provenance et à destination de l’étranger ou des Dom-Tom ne sont pas prises en compte.
1 – Une mobilité qui augmente depuis dix ans
Méthode
7 Les résultats des recensements permettent de connaître des effectifs de migrants, c’est-à-dire d’individus qui résidaient dans un autre logement, une autre commune, un autre département ou une autre région à la date du précédent recensement, ou 5 ans auparavant avec le nouveau recensement. Ces données ne permettent pas d’estimer directement la mobilité annuelle (fréquence des migrations). En effet, du fait des migrations multiples et des retours effectués par un même individu, le nombre de migrants est inférieur au nombre de migrations.
8 Pour avoir une estimation de la mobilité, on établit, à l’aide de quelques paramètres, une formule qui estime, à partir du nombre de migrants décomptés lors du recensement, un taux instantané de migration (proche d’un taux annuel). Ce modèle a été mis au point par Daniel Courgeau (Courgeau, 1973, 1988). Les paramètres ont été réestimés récemment à l’Insee, à partir des enquêtes Emploi de 1991 à 1999 et de l’enquête Jeunes et carrières de 1997 (L’Hospital, 2001).
Après deux décennies de baisse, une augmentation de la mobilité résidentielle depuis les années 1990
9 Jusqu’au début des années 1970, la mobilité ne cesse d’augmenter (figure 1) : le taux annuel de changement de commune passe ainsi de moins de 5 % entre 1954 et 1962 à plus de 6 % entre 1968 et 1975. Le taux annuel de changement de région progresse quant à lui de 1,3 % à 1,8 %.
10 À cette hausse de la mobilité succède une baisse, jusqu’au début des années 1990. Cette baisse touche tous les types de mobilité, de courte comme de longue distance, mais plus fortement les migrations de proximité.
11 Depuis le début des années 1990, c’est à nouveau à une augmentation de la mobilité résidentielle que l’on assiste. Cette hausse, mise en évidence par les résultats du recensement de 1999, se confirme avec ceux de l’enquête annuelle de recensement de 2004.
12 Entre 1982-1990 et 1990-1999, la hausse avait nettement plus fortement concerné les migrations de courte distance. Entre 1990-1999 et 1999-2004, la hausse est au contraire plus forte pour les migrations de longue distance.
Évolution de la mobilité résidentielle en France

Évolution de la mobilité résidentielle en France
Une forte mobilité chez les jeunes adultes
13 Comme au cours des périodes antérieures, la mobilité entre 1999 et 2004 est à son maximum chez les jeunes adultes, entre 20 et 30 ans, et elle diminue ensuite avec l’âge (tableau 1). En effet, entre 20 et 30 ans, les causes de la mobilité résidentielle se cumulent : études, premier emploi, installation en couple et constitution de la famille. La mobilité plus forte des jeunes adultes est plus marquée pour les migrations de longue distance que pour celles de courte distance.
Mobilité résidentielle en France métropolitaine entre 1999 et 2004, selon l’âge en 2004

Mobilité résidentielle en France métropolitaine entre 1999 et 2004, selon l’âge en 2004
14 Entre les deux dernières périodes (1990-1999 et 1999-2004), la hausse générale de la mobilité est due aux seuls individus de moins de 40 ans, et elle a été plus forte pour les migrations de longue distance que pour celles de courte distance : le taux annuel de changement de région des 20-29 ans a augmenté de 60 %. En revanche, la mobilité des personnes de 40 ans ou plus a diminué et cette baisse a touché plus nettement les déplacements de courte distance.
2 – Les soldes migratoires : la rupture des années 1970
Des changements importants dans la configuration des soldes migratoires depuis cinquante ans
15 Entre les périodes 1954-1962 et 1962-1968, la corrélation est importante et positive (+ 0,62). Entre 1968 et 1975, la corrélation avec la période 1954-1962 baisse fortement pour devenir non significative (0,16). Elle devient négative au cours des périodes suivantes. À partir des années 1970, la configuration des taux de migration nette est donc diamétralement différente de celle qui prévalait dans les années 1950 et au début des années 1960. Depuis les années 1970, c’est une certaine continuité qui prévaut, avec toutefois des inflexions d’une période à l’autre (Pumain, 1986 ; Baccaïni, 1993 ; Baccaïni, 2001a ; Baccaïni, 2005).
16 Au cours des années 1950 (carte 1), l’Île-de-France est la région la plus attractive en termes de migration nette et seules trois autres régions bénéficient de soldes migratoires internes positifs : Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), Rhône-Alpes et l’Alsace. Les régions les plus déficitaires sont celles de l’Ouest rural : Basse-Normandie, Bretagne et Poitou-Charentes.
Soldes migratoires internes 1954-1962

Soldes migratoires internes 1954-1962
17 Au cours des années 1960 (carte 2), on n’observe pas de réelle rupture, mais la région parisienne, tout en gardant un solde positif, perd nettement de son attractivité. Elle est dépassée par des régions comme Paca, le Centre, Rhône-Alpes, l’Alsace. Le nombre de régions excédentaires augmente, passant à sept. Dans le même temps, les déficits migratoires s’accentuent et se tournent vers les régions du quart nord-est (Lorraine, Nord-Pas-de-Calais) qui connaissent de graves difficultés économiques.
Soldes migratoires internes 1962-1968

Soldes migratoires internes 1962-1968
18 La configuration des soldes migratoires change profondément au début des années 1970 (carte 3). Fait nouveau qui s’installe pour longtemps, le solde de la région parisienne devient négatif : la région voit désormais plus de personnes partir que de nouveaux arrivants s’installer. Entre 1968 et 1975, une majorité de régions enregistre un solde positif et seules six régions perdent plus de migrants qu’elles n’en gagnent. Il s’agit en premier lieu de la Lorraine et du Nord-Pas-de-Calais, suivies de Champagne-Ardenne, de la Basse-Normandie, de l’Île-de-France et de l’Auvergne. Paca est de loin la région la plus attractive en termes de solde. Toute la façade occidentale du pays, de la Bretagne à l’Aquitaine, devient excédentaire et rejoint le groupe attractif des régions du Sud-Est.
Carte des régions

Carte des régions
Soldes migratoires internes 1968-1975

Soldes migratoires internes 1968-1975
19 Cette configuration va perdurer jusqu’à aujourd’hui avec toutefois des évolutions sensibles (cartes 4, 5, 6 et 7). Petit à petit, les soldes négatifs vont se concentrer dans un groupe de régions du Nord de la France, de la Basse-Normandie à la Franche-Comté, Île-de-France incluse. Depuis le début des années 1990, c’est cette dernière (la région parisienne) qui affiche le taux de migration nette le plus défavorable.
Soldes migratoires internes 1975-1982

Soldes migratoires internes 1975-1982
Soldes migratoires internes 1982-1990

Soldes migratoires internes 1982-1990
Soldes migratoires internes 1990-1999

Soldes migratoires internes 1990-1999
Soldes migratoires internes 1999-2004

Soldes migratoires internes 1999-2004
20 Les régions du Sud-Ouest et de l’Ouest voient, en particulier depuis le début des années 1990, leur attractivité croître nettement. Entre les périodes 1990-1999 et 1999-2004, les écarts entre régions ont eu tendance à s’accroître : toutes les régions qui étaient déficitaires dans les années 1990 (huit régions du Nord de la France, de la Basse-Normandie à la Franche-Comté, Alsace exclue) ont vu ce déficit augmenter au début des années 2000, pendant que la plupart des régions qui présentaient un solde positif voyaient leurs échanges devenir encore plus favorables. La coupure entre une France du Sud et de l’Ouest attractive, et une France du Nord et du Nord-Est peu attractive est donc particulièrement marquée en ce début de XXIe siècle.
Les régions sont inégalement attractives pour les diverses classes d’âges
21 Une région globalement attractive peut très bien n’exercer cette attractivité que sur quelques classes d’âges ou l’exercer préférentiellement sur certaines d’entre elles. Il en est de même pour les régions peu attractives, qui peuvent cependant présenter un solde favorable pour certaines classes d’âges. Les facteurs d’attraction sont en effet très différents selon qu’il s’agit de jeunes adultes, de familles ou de personnes âgées. Les premiers sont plutôt attirés par des régions qui offrent un potentiel important en termes d’infrastructures universitaires ou de premier emploi. Les familles et les personnes âgées sont plus sensibles au cadre de vie.
22 L’?observation des taux de migration nette selon l’âge entre 1999 et 2004 permet ainsi de différencier six types principaux de régions (carte 8). Parmi les onze régions globalement déficitaires, l’Île-de-France et l’Alsace se distinguent du fait d’un solde excédentaire pour les jeunes adultes âgés de 20 à 29 ans et d’un déficit à tous les autres âges. La région capitale (et dans une moindre mesure l’Alsace) continue d’attirer les jeunes adultes au moment de leurs études ou de leur premier emploi. C’est pour les populations âgées de 30-39 ans et de plus de 59 ans que le déficit de la région parisienne est le plus marqué. Ce schéma était déjà observable dans les périodes précédentes en Île-de-France.
Typologie des régions selon leur solde migratoire interne par âge, 1999-2004

Typologie des régions selon leur solde migratoire interne par âge, 1999-2004
23 Trois régions situées au sud et à l’ouest du Bassin parisien, bien que globalement déficitaires, sont attractives pour les personnes âgées de plus de 40 ans : la Bourgogne, le Centre et la Basse-Normandie. L’?excédent qu’enregistrent ces régions pour les classes d’âges les plus élevées s’explique principalement par les échanges en leur faveur avec la proche région parisienne.
24 Pour les six régions globalement déficitaires du quart nord-est (Alsace exceptée), allant de la Haute-Normandie à la Franche-Comté, les départs excèdent les arrivées à tous les âges, et plus particulièrement entre 20 et 29 ans.
25 Le même type de profil par âge, avec un déficit entre 20 et 29 ans, s’observe dans les régions de l’Ouest où le solde migratoire interne est toutefois globalement excédentaire. De la Bretagne à l’Aquitaine en passant par le Limousin et l’Auvergne, les arrivées sont, à tous les âges, plus nombreuses que les départs, sauf pour les jeunes adultes de 20-29 ans. Ces régions sont avant tout attractives pour les familles et les personnes âgées ; elles le sont peu pour les jeunes adultes qui les quittent afin d’aller étudier ou travailler dans des régions offrant plus d’opportunités. La Corse présente le même profil.
26 Seules trois régions du Sud, Paca, le Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, bénéficient de soldes positifs à tous les âges. Ces régions sont particulièrement attractives pour les 30-39 ans.
27 La région Rhône-Alpes, bien que globalement excédentaire, présente le même type de profil de taux de migration nette par âge que la région parisienne ou l’Alsace : c’est pour les jeunes de 20-29 ans que la région est la plus attractive. Mais, à la différence de la région parisienne, Rhône-Alpes est également excédentaire pour les 30-39 ans et, dans une moindre mesure, pour les 40-59 ans. Seules les personnes de 60 ans ou plus sont un peu plus nombreuses à quitter la région qu’elles ne le sont à venir s’y installer.
28 La configuration des soldes migratoires des jeunes adultes (20-29 ans) est ainsi celle qui se différencie le plus nettement de celle de l’ensemble de la population (carte 9). Ceux-ci se dirigent préférentiellement vers la région parisienne et, dans une moindre mesure, vers les régions du Sud (Midi-Pyrénées, Paca, Rhône-Alpes, Languedoc-Roussillon) et l’Alsace. Les jeunes adultes sont attirés par les régions urbaines, bien équipées en infrastructures universitaires et disposant d’un marché du travail étendu et varié. Cette classe d’âges étant par ailleurs la plus mobile, ces mouvements jouent un rôle important en termes de volume des flux.
Soldes migratoires internes entre 1999 et 2004 Population de 20-29 ans

Soldes migratoires internes entre 1999 et 2004 Population de 20-29 ans
3 – Entrants et sortants des régions : des « trajectoires » variées d’une région à l’autre
29 À un solde migratoire donné peuvent correspondre des volumes d’entrées et de sorties variables ; de même, l’évolution au cours du temps de la migration nette pour une région peut être la conséquence de modifications intéressant différemment ces deux composantes, entrées et sorties. Ainsi, par exemple, une amélioration du solde migratoire peut être la conséquence d’une augmentation des arrivées et/ou d’une diminution des départs. Plusieurs types de « trajets » peuvent ainsi être distingués, dont nous présentons quelques exemples représentatifs.
30 L’Île-de-France se distingue de toutes les autres régions par son évolution particulière (figure 2a). De 1962 à 1975, la baisse du solde migratoire interne résulte principalement d’une forte augmentation des départs, les arrivées restant à peu près stables. Entre 1975 et 1982, on observe une stabilisation des départs, qui cessent de croître, tandis que les arrivées diminuent. Le regain de la migration nette entre 1982 et 1990 est dû uniquement à une baisse des départs, les arrivées restant constantes. Depuis 1990, la nouvelle détérioration du solde migratoire est la conséquence d’une forte augmentation de ces départs alors que les arrivées évoluent peu. Au cours des cinquante dernières années, c’est donc principalement la capacité ou l’incapacité de la région parisienne à retenir ses habitants qui a joué sur son solde migratoire, et non sa capacité ou son incapacité à attirer les populations provinciales.
Entrants et sortants de quelques régions entre 1954 et 2004


Entrants et sortants de quelques régions entre 1954 et 2004
Champ : migrations internes.31 Entre 1999 et 2004, parmi les 3,8 millions de personnes âgées de plus de 4 ans en 2004 qui ont changé de région, près de 40 % sont parties ou se sont installées en Île-de-France. En ce début des années 2000, bien que globalement très déficitaire dans ses échanges avec les autres régions, l’Île-de-France est toutefois gagnante avec cinq d’entre elles : le Nord - Pas-de-Calais, la Lorraine, la Franche-Comté, Champagne-Ardenne et l’Alsace (figure 3). Les régions du quart nord-est envoient donc plus de migrants vers l’Île-de-France qu’elles n’en reçoivent en provenance de la région capitale. Les échanges avec ces régions sont en fait très peu intenses, dans un sens comme dans l’autre. Avec les seize autres régions, la région parisienne est déficitaire. Globalement, les régions les plus gagnantes dans les échanges avec la région parisienne sont localisées dans le Sud, le Sud-Ouest et l’Ouest du pays. En termes d’intensité, ce sont les flux de l’Île-de-France vers deux régions voisines, le Centre et la Picardie, qui sont les plus importants. Ces migrations s’apparentent au phénomène de péri- urbanisation, qui s’étend au-delà des frontières régionales.
Solde migratoire de l’Île-de-France avec les autres régions, 1999-2004

Solde migratoire de l’Île-de-France avec les autres régions, 1999-2004
32 Les régions du Nord de la France ont également connu une évolution particulière (figure 2b). De 1962 à 1975, la détérioration de leur solde migratoire interne s’explique par une forte hausse des départs, les arrivées augmentant légèrement. Entre 1975 et 1982, les sorties se réduisent, entraînant une amélioration du solde. Entre 1982 et 1990, les départs augmentent à nouveau, les arrivées restant toujours à peu près stables, et le solde migratoire se détériore. Au cours des années 1990, l’amélioration de la migration nette résulte d’une augmentation des arrivées, alors que depuis la fin des années 1990, ce sont à nouveau les sorties qui augmentent. Globalement, les périodes de forte détérioration de la migration nette correspondent à des périodes d’augmentation des départs, plus qu’à une baisse des arrivées, celles-ci ayant augmenté au cours de ces cinquante années.
33 Les régions de l’Ouest, dont la Bretagne constitue un exemple, ont une évolution opposée à celle de l’Île-de-France (figure 2c). De 1962 à 1975, la rapide augmentation du solde migratoire, qui passe de négatif à positif, est due exclusivement à une augmentation des arrivées, les départs restant stables. Entre 1975 et 1982, on observe une relative saturation des arrivées alors que les départs diminuent. La légère baisse de la migration nette entre 1982 et 1990 est le résultat d’une baisse des arrivées. Depuis 1990, la très forte hausse du solde migratoire est, comme dans les années 1960, le résultat de l’augmentation des arrivées.
34 Le Languedoc-Roussillon (figure 2d) présente une évolution assez proche de celle de la Bretagne, bien que le niveau de la migration nette y soit nettement supérieur, caractéristique de nombreuses régions du Sud. De 1962 à 1975, la croissance rapide du solde migratoire s’explique par une hausse très nette des arrivées, les départs augmentant beaucoup moins fortement. Entre 1975 et 1982, au contraire, c’est la baisse très significative des départs qui explique la hausse de la migration nette. Dans les années 1990, la légère baisse du solde migratoire interne est le résultat d’une augmentation des départs plus rapide que celle des arrivées. Depuis 1999, au contraire, la hausse des arrivées dépasse celle des départs, entraînant une augmentation de la migration nette.
35 Les régions situées à la périphérie de la région parisienne, dont le Centre constitue un exemple, ont eu une évolution encore différente (figure 2e). De 1962 à 1975, la forte croissance du solde migratoire s’explique par une augmentation des arrivées plus rapide que celle des départs. De 1975 à 1982, les départs et les arrivées ont décru parallèlement, laissant la migration nette inchangée. Au cours des années 1980, celle-ci diminue légèrement, du fait d’une baisse des arrivées, le taux de départ restant constant. Depuis le début des années 1990, le solde migratoire de cette région n’a pas cessé de baisser ; il est devenu négatif depuis 1999-2004, du fait d’une augmentation des départs plus rapide que celle des arrivées.
36 Dernier exemple de parcours particulier, la région Rhône-Alpes (figure 2f). Depuis les années 1950, le taux annuel moyen de migration nette y est resté remarquablement stable. De 1962 à 1975, entrées et départs ont augmenté, mais à peu près parallèlement : la migration totale s’est donc accrue mais la migration nette est restée à peu près stable. Entre 1975 et 1982, départs et arrivées ont au contraire diminué, toujours parallèlement. Entre 1982 et 1990, la migration nette a augmenté légèrement, du fait d’une légère baisse des sorties associée à une hausse des arrivées. Depuis le début des années 1990, sorties et entrées augmentent, mais pas toujours au même rythme, entraînant ainsi une baisse du solde migratoire interne entre 1990 et 1999 (hausse plus rapide des sorties), puis une augmentation au cours de la période récente (hausse plus rapide des arrivées).
Conclusion
37 Les migrations internes observées en France entre 1954 et 2004, aussi bien au niveau des changements de logement, de commune, de département que de région, suivent la même évolution, marquée par une augmentation de la mobilité de 1954 à 1975, suivie d’une baisse de 1975 à 1990. Depuis le début des années 1990, la mobilité résidentielle augmente à nouveau.
38 Lorsque l’on observe les soldes migratoires des régions, ainsi que l’évolution des entrées et sorties séparément, on observe d’importants changements depuis les années 1950, qui obéissent à une logique plus complexe que la mobilité d’ensemble. Le sens des courants migratoires a profondément changé au cours des cinquante dernières années, des régions attractives étant devenues peu attractives et inversement. Le fait probablement le plus frappant est le changement radical de la situation de la région parisienne qui est passée, en un demi-siècle, de la situation de région la plus attractive à celle de région la moins attractive en termes de solde migratoire interne. On a pu voir que cette baisse de la migration nette de l’Île-de-France est avant tout le résultat d’une augmentation des départs vers les autres régions, les arrivées restant à peu près stables. Les partants sont en premier lieu des retraités et des familles, qui quittent la région parisienne en nombre toujours plus important, alors que les jeunes adultes continuent d’être attirés par la région capitale au moment de leurs études ou du premier emploi. Cette évolution s’est principalement effectuée au profit des régions du Sud et de l’Ouest, qui, en ce début de XXIe siècle, se révèlent les plus attractives.