Comme souvent, le détour par l’étymologie peut aider à cerner ce que recouvre le terme que l’on entend préciser. Le terme accueillir vient du latin populaire accoligere qui signifie « rassembler ». Le mot accoligere tire lui-même son origine de colligere qui veut dire « cueillir », au sens de prendre ce qui est présenté, en le détachant, en le séparant. C’est à partir du XIIIe siècle que le terme revêt la signification que nous lui connaissons aujourd’hui : celle de « recevoir » ou plus précisément « prendre avec soi », faire entrer l’autre « dans son espace ».
Ce détour par l’étymologie permet de repérer quelques processus proprement anthropologiques qui sont à l’œuvre lorsqu’on accueille. Si, comme nous venons de le dire, accueillir c’est rassembler, c’est dans le même temps séparer. Ainsi, par exemple, l’école maternelle en France accueille, rassemble, des enfants à partir de 3 ans (2 ans dans certaines écoles qui comprennent une « toute petite section »), en les séparant d’abord, fût-ce momentanément, de leur milieu familial, mais aussi des enfants d’autres classes d’âge. D’une façon générale, accueillir, c’est nécessairement procéder à une catégorisation sociale, à un classement social, qui délimite ceux qui peuvent bénéficier d’un accueil des autres qui en sont écartés. Bien que cela puisse sembler paradoxal, accueillir c’est exclure en distinguant les outsiders (ceux qui sont dehors) des insiders (ceux qui sont dedans) tant il est vrai, comme le rappelle Jacques Derrida, que « l’exclusion et l’inclusion sont inséparables dans le même moment »…