CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 L’économie solidaire propose une définition du changement social qui tranche avec la manière dont celui-ci a été majoritairement pensé au xxe siècle et qui appelle une mise en perspective avec les approches du même concept par la psychosociologie. En préambule à un tel échange, il s’agit ici de retracer la genèse de la théorisation d’économie solidaire à partir d’événements définis au sens de ce numéro, c’est-à-dire des ruptures qui modifient la réflexion par leur surgissement inattendu. Les bifurcations que celles-ci entraînent peuvent être rapportées à ce que Boaventura de Sousa Santos (2011) désigne par la sociologie des absences et des émergences. La sociologie des absences « vise à montrer que ce qui n’existe pas est en fait activement produit comme non existant » (Sousa Santos, 2011, p. 34). La non-existence prend la forme de ce qui est ignoré, tenu pour rétrograde, inférieur, local et particulier, improductif et stérile. La sociologie des émergences « consiste à remplacer ce que le temps linéaire présente comme le vide du futur par des possibilités plurielles et concrètes, qui sont à la fois utopiques et réalistes ». Elle « étend le présent en ajoutant à la réalité existante les possibilités futures et les espoirs que ces possibilités suscitent, elle remplace l’idée mécanique de détermination par l’idée axiologique de soin (care) » (ibid., p. 36-37).

2 Le premier événement abordé dans la partie initiale de ce texte résulte de la confrontation avec l’expérience d’autogestion yougoslave, perçue à l’époque comme alternative au dépérissement bureaucratique des pays communistes sous l’emprise soviétique. Ce qu’un séjour de deux ans rend évident, c’est la distance entre ce qui est vécu et la rhétorique autogestionnaire du pouvoir. Dans son ressaisissement, cette prise de conscience de l’écart entre le discours officiel et la réalité quotidienne ouvre sur la déconstruction de ce récit révolutionnaire tant prisé par les intellectuels du xxe siècle. En Yougoslavie et ailleurs, les prises de position des élites en faveur des solutions radicales cachent l’absence d’un peuple réduit au silence ou à l’acclamation des leaders. Le volontarisme politique débouche sur une négation des expériences locales ordinaires qui sont ignorées ou combattues quand elles ne correspondent pas au projet de l’autorité centrale. Cette révélation conduit à se tourner vers un changement plus graduel dans ce siècle marqué par la polémique entre révolution et réforme, initiée par Eduard Bernstein et Rosa Luxemburg. Mais les années 1970 sont celles de l’essoufflement des stratégies réformistes, qu’il s’agisse de la social-démocratie ou de l’économie sociale. La deuxième partie de cette contribution est consacrée aux déceptions générées par les limites de ces approches du changement social.

3 Les deux dernières parties sont centrées sur le second événement générateur de l’économie solidaire comme tentative de théorisation d’une voie pour le changement social. Cet événement n’est pas de l’ordre de la révélation des absences, mais de la mise en évidence des émergences : l’insistance des initiatives citoyennes prend sens par rapport à deux courants théoriques, l’un avec Mauss et Polanyi mettant l’accent sur la pluralité de l’économie, l’autre avec Habermas et Fraser mettant l’accent sur la pluralité du politique. Dès lors, ce qui fait événement dans ces émergences est indissociable du travail d’élaboration qu’elles engendrent pour articuler deux approches auparavant séparées.

4 L’économie solidaire propose donc une acception du changement social qui se démarque de celles qui ont dominé le xxe siècle à un moment où la recherche des modalités appropriées de démocratisation s’impose avec l’accentuation des inégalités sociales, les dérèglements des équilibres écologiques et les menaces de régression autoritaire.

Les illusions révolutionnaires : l’événement yougoslave

5 Le xxe siècle a été marqué par la tentative de dépasser le capitalisme grâce à une prise du pouvoir d’État rendant possible la dictature du prolétariat, étape fondamentale dans la construction d’une société communiste. Au cours des années 1970, l’effritement de ce projet, qui va déboucher sur l’écroulement des pays de l’Est, devient manifeste. Toutefois, une expérience semble faire exception : la Yougoslavie est perçue comme un pays dont le non-alignement autorise une voie originale de conciliation du socialisme et de la démocratie, par un système de gouvernement des entreprises qualifié d’autogestion. Toutefois, cette expérience prend une autre tournure dès lors qu’elle est abordée à travers des phénomènes dits marginaux comme les grèves. Une méthodologie qualitative sensible au caractère analyseur des périphéries permet de découvrir une autre réalité que celle consignée dans les innombrables rapports de l’époque, basés sur des données plus quantitatives : le fait de constater que les permanents du syndicat inféodé au parti cherchent à identifier les meneurs des mouvements ouvriers incontrôlés relativise les propos courants à l’époque sur l’échec de l’autogestion. L’excès de démocratie qui conduirait à l’inefficacité est une explication fausse des limites du système. Le problème n’est pas celui de la paralysie par excès de consultations des travailleurs, ni du temps perdu en d’interminables réunions, comme le laissait croire une abondante littérature. Il est plutôt celui d’un déficit démocratique dû au maintien d’une mainmise bureaucratique sur les différentes institutions censées permettre l’expression collective. Le mythe de l’exception yougoslave va d’ailleurs très vite s’effondrer, les nationalismes détruisant tragiquement le fédéralisme instauré par Tito, et il ne lui survivra pas.

6 Dans son texte de 1924 « Appréciation sociologique du bolchevisme », Mauss livre une analyse qui anticipe non seulement la faillite du système soviétique, mais aussi les écueils rencontrés par la tentative yougoslave d’instaurer l’autogestion par le biais d’une impulsion étatique. « Les communistes, sociologues naïfs, ont cru que l’ordre souverain, que la loi peut créer comme le verbe de Dieu, de rien, ex nihilo. Hallucinés de rêves révolutionnaires, ils ont cru refondre toute la société humaine » (Mauss, 1997, p. 553). Plus précisément, l’étatisme révèle ce que Mauss appelle un « fétichisme politique », c’est-à-dire une croyance excessive en la capacité transformatrice de la loi. Or, toujours selon lui, la loi s’est révélée impuissante quand elle n’était pas supportée par les mœurs ou ne se modelait pas sur des pratiques sociales suffisamment fortes. En ce sens, « la loi ne crée pas, elle sanctionne », elle peut « rehausser » (ibid., p. 550-552) des pratiques sociales, elle ne peut pas inventer un monde social.

7 La promesse révolutionnaire était de faire advenir un monde et un homme nouveaux en bouleversant les règles d’une économie considérée comme l’infrastructure de la société. Le xxe siècle nous a fait prendre conscience du danger représenté par cette vision axée sur la prise du pouvoir, étape obligée pour la collectivisation de la propriété des moyens de production. Loin d’apporter la solution attendue, le communisme a, au contraire, conforté par son écroulement la croyance en l’inéluctabilité du capitalisme. Ce n’est pas pour autant la fin de l’histoire. Le débat sur la démocratisation de la société est plus que jamais d’actualité. Néanmoins il doit tirer les enseignements du siècle dernier : l’absence de prise en compte des médiations politiques et des médiations entre politique et économie, symptomatique du bolchevisme, ne saurait être rééditée. Pour autant, la crédibilité d’une approche renouvelée du changement social ne peut être basée uniquement sur le refus des illusions avant-gardistes, elle doit reposer sur un bilan approfondi des stratégies réformistes qui ont certes permis des conquêtes démocratiques, mais ont également rencontré des obstacles majeurs. De ce point de vue, la social-démocratie et l’économie sociale appellent une analyse critique de leurs résultats mitigés.

Les déceptions réformistes : les limites de la social-démocratie et de l’économie sociale

8 Sous la nécessité d’étayer les consensus nationaux, la complémentarité entre État et marché prend toute son importance pendant les Trente Glorieuses (1945-1975). L’État keynésien se donne pour tâche de favoriser le développement économique à travers un interventionnisme accentué alors que l’État-Providence prolonge les formes précédentes d’État social avec la Sécurité sociale et la généralisation des systèmes de protection sociale. L’État encadre et soutient le marché autant qu’il en corrige les inégalités, il confère aux citoyens des droits individuels et édicte les règles des services publics. À l’idée du marché autorégulateur se substitue la référence à un ensemble de marchés régulés, qui sont en outre encadrés par des formes étendues de redistribution publique. À cette époque, la social-démocratie apporte la preuve de sa capacité à contrecarrer le réductionnisme économique : elle oriente la dynamique marchande tout en mobilisant le principe de redistribution pour corriger celle-ci. L’économie marchande est complétée par l’économie non marchande qui correspond à l’économie dans laquelle la circulation des biens et services est confiée à la redistribution. Grâce à la synergie État-marché ainsi obtenue, la social-démocratie connaît un « âge d’or ». Deux traits relativisent toutefois cette réussite :

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  • La propension à considérer les usagers des services publics comme des assujettis concentre les arbitrages dans les sphères de la démocratie représentative (gouvernants, représentants patronaux et syndicaux) et la parole des simples citoyens y est largement ignorée. Au moment où le fordisme règne dans les entreprises, écartant les travailleurs des décisions avec en contrepartie une augmentation de leurs revenus, le « providentialisme », selon le terme de P.R. Bélanger et B. Lévesque (1990), se développe dans l’État social : les destinataires des services sociaux restent éloignés de leur conception, cette exclusion étant compensée par un accès quasi gratuit à ceux-ci ;
  • La solidarité redistributive reste dans une dépendance à la croissance marchande, insensible jusque dans les années 1960 mais de plus en plus prégnante avec le ralentissement du taux de croissance qui prive la social-démocratie d’une partie de ses moyens d’action. Cette tendance questionne les méthodes keynésiennes et les transferts sociaux. Dans ce contexte, l’option monétariste rencontre un écho chez les gouvernants parce qu’elle leur promet de ramener la croissance. Suite à l’application des principes monétaristes, le périmètre national d’action dans lequel s’était déployée la social-démocratie est profondément perturbé par les dérégulations, les déréglementations et l’accélération de la circulation internationale des capitaux, un glissement vers le social-libéralisme s’opère.

10 La social-démocratie s’est plus souciée de solidarité que d’initiative économique, comme si les choix démocratiques ne pouvaient porter que sur la répartition de richesses déjà produites. Laisser l’économie de marché aux entreprises capitalistes apparaît bien comme une faiblesse qui lui est constitutive, longtemps dissimulée derrière l’ampleur de l’expansion économique. La réflexion sur les limites de la social-démocratie gagne pour cette raison à être mise en perspective avec la tradition de l’économie sociale qui justement a insisté sur les différentes formes d’entreprises.

11 L’approche du changement social défendue par l’économie sociale parie sur l’importance d’entreprises qui ne sont pas capitalistes et dont l’exemplarité devrait engendrer la diffusion. Elle met l’accent sur différents statuts juridiques (associations, coopératives, mutuelles) qui dissocient activité économique et pouvoir des actionnaires en partageant un trait commun : la limite apportée à la distribution individuelle des profits.

12 À l’évidence, la rencontre ne s’est guère opérée entre social-démo­cratie et économie sociale. La social-démocratie s’est prioritairement attachée aux politiques macro-économiques et à la redistribution étatique sans intégrer véritablement à son projet les entreprises d’économie sociale, leur concédant au mieux un rôle supplétif au niveau micro-économique. Pour sa part, l’économie sociale s’est symétriquement concentrée sur l’entreprise collective sans envisager combien cette dernière est tributaire du cadre institutionnel dans lequel elle s’inscrit. L’économie sociale s’est peu interrogée sur la régulation des marchés, faisant des entreprises non capitalistes le principal levier pour le changement. Or, comme le dit un responsable coopératif : « Les coopératives voulaient changer le marché mais c’est le marché qui a changé les coopératives. » La banalisation des entreprises de l’économie sociale s’accentue avec le temps. La démocratie représentative instaurée dans les statuts par le principe d’égalité formelle (une personne égale une voix) ne suffit pas à maintenir une participation effective des membres dans la durée.

13 L’essoufflement de la social-démocratie et de l’économie sociale peut donc être expliqué par leurs insuffisances en matière de lutte contre les réductionnismes économique et politique : un cantonnement du marché par la redistribution et des entreprises collectives oubliant la diversité des marchés réels et les potentialités de la réciprocité sur le registre économique, une focalisation sur les méthodes disponibles dans le cadre de la démocratie représentative ne permettant pas de mobiliser la participation citoyenne sur le registre politique. À cet égard, il est révélateur que les accents mis sur la réciprocité et la démocratie délibérative soient justement emblématiques d’initiatives qui sont venues critiquer la social-démocratie et l’économie sociale tout en se revendiquant des mêmes finalités.

L’émergence des initiatives citoyennes

14 Place des usagers, rôle de la consommation, organisation de la production, respect de la nature, rapports de genre : des questions inédites, attestant que la conflictualité sociale ne se limite pas à l’affrontement entre capital et travail, sont abordées par les nouveaux mouvements sociaux dans les années 1960. Les initiatives solidaires qui y trouvent leur origine cherchent à éviter l’enlisement gestionnaire de la social-démocratie autant que la banalisation de l’économie sociale.

15 Dès les années 1970 apparaissent des entreprises « autogestionnaires » ou « alternatives ». Même si beaucoup de ces expériences se sont épuisées dans les affrontements idéologiques, elles n’ont pas moins fourni des inspirations qui vont être reprises et réinterprétées dans d’autres cadres et par d’autres groupes sociaux. Elles sensibilisent à des thèmes nouveaux, comme l’épuisement des ressources non renouvelables, et entament « ici et maintenant » la recherche d’un « autre monde » et d’une « autre économie » antérieurement à la crise économique. Quand cette dernière advient, la montée du chômage et de l’exclusion modifie l’orientation de nombreux collectifs et la quête d’un modèle économique différent se mêle à la défense de l’intégration sociale.

16 Au total, depuis les années 1980, des milliers de services sont abordés non pas comme de nouveaux marchés mais comme des opportunités pour améliorer la vie quotidienne, indissociables d’une réflexion sur leurs conditions d’accessibilité et sur l’exercice des droits. Que ce soit pour la garde et l’accueil des enfants, la réintégration dans le travail de populations exclues ou la revitalisation d’espaces urbains et ruraux défavorisés, de nombreuses structures ont été créées : en France, ce sont notamment des collectifs enfants-parents-professionnels, des comités de chômeurs, des entreprises et associations d’insertion, des groupes d’auto­production, sans oublier des régies de quartier ou de territoire porteuses de propositions des habitants sur les réformes susceptibles d’améliorer sensiblement leurs conditions de vie.

17 Au niveau international, le commerce équitable répond à une double préoccupation : d’une part des agriculteurs ou artisans veulent vivre décemment, d’autre part des consommateurs sont vigilants sur les conditions sociales et écologiques dans lesquelles sont produits les biens qu’ils achètent. Comme dans le tourisme solidaire, l’alliance des acteurs du sud et du nord a pour but de sensibiliser le public et d’œuvrer pour des changements dans les règles et pratiques des échanges internationaux. Plus de deux millions de producteurs sont concernés et la consommation critique a également engendré l’essor de circuits courts. Parmi ceux-ci, les associations pour le maintien d’une culture paysanne, qui génèrent des liens de solidarité entre producteurs et consommateurs, réunissent plus de cent mille participants. En accord avec les visées de l’agriculture biologique, il s’agit de promouvoir une alimentation naturelle, respectueuse de l’environnement autant que du social. Ce souci d’une transition écologique qui se traduise dans les faits et ne se réduise pas à des discours se retrouve dans les inventions concernant les énergies renouvelables, le recyclage et la valorisation des déchets, l’entretien du patrimoine. À la biodiversité fait écho la diversité culturelle au nom de laquelle fédérations et réseaux artistiques se sont regroupés pour faire entendre leurs revendications de lutte contre la standardisation des produits culturels.

18 Les tentatives de reconquête populaire de la sphère économique touchent également la monnaie et la finance, champs d’activités à haute teneur symbolique dans la conjoncture actuelle. Les monnaies sociales sont des dispositifs d’échanges (de biens, de services ou de savoirs) effectués au moyen d’une monnaie locale dédiée à ces échanges. Plus d’un million d’adhérents se sont répartis dans plus de trois mille associations et une quarantaine de pays, avec des cas originaux comme les banques communautaires au Brésil où les dynamiques de développement local bénéficient des apports conjoints de financements publics, de monnaies sociales et de finances solidaires. Ces dernières, constituées à partir d’une épargne qui veut être mise à disposition des besoins territoriaux, ont pour but de procurer des capitaux à des créateurs d’activités privés de prêts bancaires tout en ajoutant au microcrédit d’autres prestations (garanties, assurances…).

19 Tous ces exemples fournissent des ressources pour construire de façon réaliste une autre économie. Si leur nombre reste encore limité, leur diffusion est rapide et augmente en particulier grâce à la mutualisation entre les pratiques. Des lieux de commercialisation mixent les filières biologiques et équitables, des activités d’insertion par l’économique contribuent à la préservation de l’environnement et à l’éducation populaire. Ces processus de décloisonnement sont d’ailleurs appuyés par les collectivités publiques facilitant dans plusieurs pays le regroupement des acteurs. Enfin, autre caractéristique notable, ce sont en majorité des femmes qui s’impliquent dans ces combats pour les droits économiques, sociaux et culturels de base ; en outre, elles conçoivent de nouveaux services sur plusieurs continents – citons par exemple les cantines populaires en Amérique latine, les restaurants interculturels en France, les mutuelles de santé en Inde, les coopératives de beurre de karité au Burkina Faso et d’huile d’argan au Maroc, les groupements d’intérêt économique féminin au Sénégal ou de commerce équitable en Bolivie. Ces initiatives se rejoignent par leur démarche. En témoigne le fait qu’elles se sont reconnues au niveau international sous l’appellation d’« économie solidaire », celle-ci étant définie comme un ensemble d’activités contribuant à la démocratisation de l’économie par des engagements citoyens.

La théorisation en termes d’économie solidaire : l’événement de la rencontre entre pratiques et idées

20 De multiples initiatives ont donc surgi dans les dernières décennies, refusant la marchandisation des services de la vie quotidienne comme la privatisation des biens communs ou luttant contre les inégalités sociales et pour une transition écologique ; leurs promoteurs considèrent que la démocratisation de l’économie devient indispensable pour qu’un objectif d’émancipation puisse être maintenu. Alors que la rupture avec le déterminisme économique de la vulgate marxiste incite Touraine (1984) à abandonner le vocable de « mouvements sociaux » pour valoriser un tournant culturel assimilé à un avènement de la figure du sujet, il s’agit pour moi de cerner les métamorphoses de ces mouvements en examinant pourquoi et comment certains engagements s’arriment à une dimension politique et revendiquent une dimension économique qui leur semble indispensable pour agir dans le sens d’une transformation sociale.

21 Leur ancrage dans une résistance à la société de marché rend inopérant le cadre conceptuel de l’économie sociale. Pour les analyser, deux apports sont alors fondamentaux, ceux de Mauss et de Polanyi (Laville, 2013) qui, pour ne pas naturaliser l’économie dominante, mobilisent l’anthropologie. Mauss (2001) insiste sur le don ; ce « roc des sociétés humaines » doit être préservé dans les sociétés contemporaines afin d’éviter que le « tout marché » ne débouche sur une régression autoritaire. L’inspiration est proche chez Polanyi (2011) qui remplace l’approche formelle de l’économie orthodoxe par une approche substantielle qui reconnaît en sus du marché des principes d’intégration économique, de redistribution, réciprocité et administration domestique. Les pratiques étudiées dans les services de proximité (Laville, 1992), puis dans d’autres champs (Laville, 1994b) selon cette grille d’analyse amènent aux hypothèses d’impulsion réciprocitaire et d’hybridation dans une perspective d’économie solidaire, conçue en prolongement et en critique de l’économie sociale. Dans la lignée des principes méthodologiques évoqués ci-dessus, des études de cas permettent de caractériser des relations conceptualisées grâce à l’ouverture interdisciplinaire ; elles sont ensuite affinées via la confrontation à un nombre accru d’observations par un recours à la mise en perspective historique et internationale. Ainsi, la recomposition des flux de ressources selon la pluralité des principes d’intégration aboutit à une grille d’analyse socio-économique, précisée avec les travaux de Gardin (2013), qui rend visibles des aspects du fonctionnement ignorés dans les documents comptables des associations.

22 Examiner les relations entre économie et société sous l’angle de l’approfondissement de la démocratie conduit à envisager les interactions entre sphères économique et politique. La théorisation consécutive ajoute à la pluralité économique la dimension publique propre à l’économie solidaire (Laville, 1994a ; Laville et Eme, 2006). Cette dernière touche au registre participatif et délibératif du politique mis en évidence par Arendt et Habermas, mais en l’amendant dans trois directions : la pluralisation, le lien avec l’associationnisme, l’articulation aux questions socio-économiques.

23 « L’activité communicationnelle orientée vers la justice et la sincérité » (Habermas, 1987) ne se réduit pas à l’échange d’arguments rationnels, comme l’ont montré de nombreux auteurs à partir de données historiographiques (Calhoun, 1992), elle passe par des actes qui supposent une conviction et un engagement de ceux qui les accomplissent autant que des efforts de persuasion, voire de séduction. Le concept d’espace public peut être « sociologisé » si l’on s’intéresse plutôt au processus concret par lequel les citoyens, dont les rapports sont régis par les principes d’égalité et de liberté, questionnent l’écart entre l’affirmation démocratique et la réalité. Si l’on infléchit ainsi l’approche, ce sont les dénis de reconnaissance portant atteinte aux principes démocratiques qui sont l’un des ressorts principaux de l’action collective. L’espace public au sens générique constitue symboliquement la matrice de la communauté politique, mais, comme le dit Eley (1992), il est aussi dans les formes d’expression concrètes à travers lesquelles il se manifeste une arène de significations contestées. Différents publics cherchent à s’y faire entendre et s’opposent dans des controverses. L’espace public est en continuelle redéfinition. Une partie de celui-ci se trouve contrainte par la pression des systèmes alors même que des espaces nouveaux de formation de l’opinion et de la volonté politique sont engendrés par de multiples formes de regroupement entre citoyens. Cette reconfiguration permanente amène à parler, comme l’a reconnu Habermas lui-même (1992, p. 175), d’« espace public polycentrique » plutôt que d’espace public unique.

24 On peut alors passer de l’identification d’une pluralité d’espaces publics à l’étude des oppositions au sein de ceux-ci. Nombre d’espaces publics ont été progressivement dominés par les médias de masse et accaparés par les impératifs fonctionnels. La qualité de vie démocratique est donc suspendue à la constitution d’espaces publics autonomes, d’où le lien avec l’associationnisme constitué d’actions collectives mises en œuvre par des citoyens libres et égaux se référant à un bien commun. Pour s’émanciper du paradigme de l’action rationnelle, il est nécessaire de mobiliser ce concept d’associationnisme « qui permet de concevoir des rapports engendrés spontanément et libres de domination de façon non contractualiste » (Habermas, 1989, p. 44). D’où l’insistance de plusieurs auteurs sur les rapports d’association et la « position éminente dans la société civile » des associations autour desquelles peuvent se cristalliser des espaces publics autonomes qui ont « en commun une attention portée à l’association volontaire et à la vie associative en tant que principal médium pour la définition des engagements publics » (Habermas, 1992, p. 186). Il existerait d’ailleurs, selon Benhabib (1992), deux acceptions chez Arendt, un espace public agonistique privilégiant l’apparition avec les autres, marqué par la grandeur morale et l’héroïsme, un espace public associationniste repérant une dimension publique chaque fois que des êtres humains agissent de concert ; si l’on retient cette hypothèse, indéniablement l’économie solidaire se rapporte à la version associationniste.

25 Enfin, la séparation qu’opèrent Arendt comme Habermas entre espace public et sphère économique n’apparaît pas tenable. Le cloisonnement qu’établit Arendt entre le politique d’une part, l’économie et le social d’autre part empêche de saisir, comme le note Fraser (1992), combien l’égalité socio-économique est une précondition de la parité dans la participation publique. Autrement dit, la distinction analytique entre les activités humaines ne peut être convertie en une dissociation empirique (Laville, 2011), sauf à adopter une conception idéologique héritée des institutions grecques (Salmon, 2011). Quant à Habermas, s’il suscite l’adhésion quand il écrit que les associations « accueillent, condensent et répercutent en les amplifiant dans l’espace public politique la résonance que les problèmes sociaux trouvent dans les sphères de la vie privée », il peut être critiqué sur le fait que ce rôle serait l’apanage d’« associations non étatiques et non économiques » (Habermas, 1997, p. 394). Cette allusion à une catégorie particulière n’est guère compatible avec les constats empiriques, la partition entre associations est plutôt à remplacer par l’étude dans chaque association des tensions entre les contacts horizontaux d’interaction relevant de l’activité communicationnelle et intervenant dans la conception des problèmes publics d’une part, leur dimension organisationnelle et leur intégration dans des relations de pouvoir d’autre part.

Conclusion

26 La nécessité affirmée par Mauss de la mise en débat des interprétations données aux initiatives solidaires est aujourd’hui reprise avec force par des sociologues comme Sousa Santos. Selon ce dernier, les intégrer à l’analyse, c’est éviter de retomber dans le scientisme et de reconduire un étatisme éculé. C’est faire un choix épistémologique qu’il estime impérieux aujourd’hui, celui de sciences sociales ouvertes aux émergences, qui ne condamnent pas les expériences au motif de leurs insuffisances mais au contraire sont attentives à leurs potentialités. Elles redonnent en effet la priorité à l’action citoyenne au détriment du déterminisme économique qui a dominé les approches du changement social au xxe siècle.

27 Cette perspective d’un changement social ancré sur les acquis expérientiels est indissociable d’une option de méthode qui est le respect de l’intrication entre pratiques et idées. Incontournable pour ce qui est de la réalité associative, elle interdit d’autonomiser le débat d’idées ; au contraire, elle invite à assumer la « non-séparation de la matérialité et de l’intellectualité, du monde des choses banales et de celui des interrogations philosophiques ou spirituelles » (Roche, 1999). C’est cet « entrelacement des discours et des pratiques » (Rancière, 1981) que l’histoire des idées échoue à saisir. Seule l’approche dynamique des interdépendances entre représentations et pratiques montre à quel point les représentations sélectionnent certains aspects de la réalité sociale qu’elles contribuent de ce fait à reconstruire tout en indiquant combien les pratiques sociales donnent lieu à des interprétations qui influent sur les représentations du monde.

28 À l’évidence ces choix épistémologiques et méthodologiques appellent un dialogue avec la psychosociologie et la sociologie clinique. Il existe en effet une convergence de diagnostic sur l’ampleur des défis auxquels nous sommes confrontés depuis que se sont imposées comme références internationales l’économie monétariste, représentée par des auteurs comme Frederik Hayek et Milton Friedman, et la théorie du capital humain relevant du même creuset et personnifiée par Gary Becker. Ces orientations ont généré un « expertisme » (Sapir, 2002) qui tend à invalider toute intervention citoyenne dans les domaines économique et gestionnaire, régis par la seule loi de la valeur actionnariale et engendrant de ce fait dégâts environnementaux, inégalités sociales, mais aussi perte de sens du travail. Puisque la nouvelle gestion publique soumet l’ensemble des activités à une évaluation basée sur la mesure de l’efficacité et de l’efficience, un rabattement organisationnel s’opère, le « registre des modalités opératoires de l’action » occultant la dimension institutionnelle, c’est-à-dire les « cadres de référence qui donnent le sens de l’action » (Gaulejac, 2011, p. 157-158). La société est malade de la gestion (Gaulejac, 2005), touchée par une crise du symbolique d’autant plus que les responsables politiques valident les hypothèses propres à ce nouveau capitalisme s’appuyant sur une révolution managériale.

29 Il en résulte un désinvestissement massif de la politique, mais non du politique puisque les résistances abondent, qui s’efforcent de construire du commun (Dardot et Laval, 2014). Elles refusent le sentiment d’impuissance et tentent une re-symbolisation de la société, comme en témoigne l’Appel des appels (Gori, 2009). Ces protestations importantes, après un élan initial, manquent toutefois d’objectifs intermédiaires réalistes et c’est dans cette perspective que peuvent être envisagées les pratiques de l’économie solidaire, comme lieux de socialisation et d’expériences combinant l’intervention dans l’espace public et l’expression d’un autre rapport à l’économie. Il s’agit, comme le résume le mouvement altermondialiste, à la fois de résister et de construire, en se donnant les moyens d’élaborer des institutions intermédiaires capables de contrecarrer l’envahissement par la logique dominante.

30 La théorie critique s’est trop longtemps cantonnée, depuis l’école de Francfort jusqu’à la sociologie bourdeusienne, dans l’analyse de la domination présentant dès lors le risque identifié par Jacques Rancière (2003, p. 365) de procéder à une « critique radicale d’une situation radicalement immuable ». Les chercheurs de la psychosociologie, de la sociologie clinique et de l’économie solidaire peuvent faire alliance pour arriver à la reconnaissance de tentatives qui continuent à être marginalisées. Il est décisif qu’ils soient avec des acteurs dont l’engagement se traduit par des difficultés existentielles (Hersent et Palma Torres, 2014). L’enjeu est d’éviter que ne perdure une ignorance mutuelle, entre politiques et initiatives : les politiques publiques ne prennent guère en considération des initiatives citoyennes qui, en retour, se refusent à exercer une influence sur le cadre institutionnel, se réfugiant dans une idéologie du changement personnel ou subissant un isolement de l’alternative.

31 Une complémentarité potentielle entre économie solidaire et sciences sociales cliniques se profile. Le travail effectué autour de l’économie solidaire a généré une légitimation partielle qui permet d’établir de premiers liens avec l’action publique, non dénuée d’incompréhensions mais réelle, premier pas vers la sortie de l’ignorance mutuelle. Néanmoins cet effort de justification menée sur plusieurs décennies pour rendre visibles des actions émergentes peut avoir comme contrepartie une insuffisante analyse des tensions. La valorisation d’un imaginaire moteur, indispensable pour lutter contre les discriminations négatives vécues, peut générer la « représentation d’un sujet plus énergétique que psychique » et rendre difficile l’explicitation de « la complexité de l’engagement dans sa dimension individuelle et collective », comme le fait remarquer Florence Giust-Desprairies (2008) à propos d’un bilan portant sur « des inventeurs sociaux pour des territoires à vivre » (Muller-Theveniaut, 2008). L’imaginaire est à la fois moteur et leurrant (Enriquez, 1967). Cette ambivalence ne peut être passée sous silence, sauf à entériner un volontarisme épuisant, et les cliniciens pourraient contribuer à en comprendre les formes dans « un espace offert à la décision et à la controverse » (Hanique, 2012, p. 127), partagé avec les chercheurs de l’économie solidaire. Pourtant, les deux courants, accaparés par leurs enjeux respectifs, n’ont guère concrétisé un rapprochement souhaité. La gravité de la situation actuelle peut-elle conduire à une rencontre et, dans l’affirmative, ferait-elle à son tour événement ?

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L’économie solidaire propose une définition du changement social qui tranche avec la manière dont celui-ci a été majoritairement pensé au xxe siècle et qui appelle une mise en perspective avec les approches du même concept par la psychosociologie. En préambule à un tel échange, il s’agit ici de retracer la genèse de la théorisation d’économie solidaire à partir d’événements définis au sens de ce numéro, c’est-à-dire des ruptures qui modifient la réflexion par leur surgissement inattendu. Le premier événement abordé dans les parties initiales de ce texte résulte de la confrontation avec l’autogestion yougoslave, puis la social-démocratie et l’économie sociale. Les deux dernières parties sont centrées sur le second événement générateur de l’économie solidaire comme tentative de théorisation d’une voie pour le changement social. Cet événement est de l’ordre de la mise en évidence des émergences : l’insistance des initiatives citoyennes prend sens par rapport à deux courants théoriques, l’un avec Mauss et Polanyi mettant l’accent sur la pluralité de l’économie, l’autre avec Habermas et Fraser mettant l’accent sur la pluralité du politique.

Mots-clés

  • changement
  • économie solidaire
  • action collective
  • solidarité
  • théorie critique
  • démocratie

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Jean-Louis Laville
Jean-Louis Laville, professeur du Conservatoire national des arts et métiers, titulaire de la chaire économie solidaire, chercheur au LISE (CNAM-CNRS) et à l’IFRIS.
jean-louis.laville@cnam.fr
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Mis en ligne sur Cairn.info le 09/04/2015
https://doi.org/10.3917/nrp.019.0181
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