CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Le secteur tertiaire occupe une place importante, voire parfois la place prépondérante, en valeur ou en emplois, dans l’ensemble des activités économiques des pays en voie de développement. Même les activités informelles seraient, selon les rares études qui en analysent la structure sectorielle, dans une grande mesure des activités de services (C. Maldonado, 1987).

2Le tertiaire dans les économies en voie de développement ne peut donc être ignoré. On peut montrer (Jany-Catrice, 1991) qu’il n’est pas seulement issu de l’industrialisation, selon un schéma dans lequel le secteur tertiaire se développe essentiellement en fonction de l’augmentation du revenu par tête, augmentation elle-même issue des gains de productivité agricole et industrielle.

3(…)

4Dans les pays en voie d’industrialisation (P.V.I.), ce tertiaire est certes important, mais il présente une double caractéristiques : d’une part une hypertrophie tertiaire des administrations (le poids moyen de l’emploi administratif dans l’emploi total des P.V.D. est d’environ 20 %), et d’autre part, une atrophie de certaines activités dites « dynamiques » dans les économies de marché développées, à savoir la rubrique « banques, assurances et services aux entreprises » (son poids moyen dans l’emploi total des P.V.D. est de 3 %) (BIT, 1988).

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6Une définition intéressante des services et s’éloignant des traditionnelles conceptions du “tertiaire-résidu”, est celle que propose T. P. Hill (1977, 318) et qui indique que « le service peut être défini comme une transformation dans la condition d’une personne, ou d’un bien appartenant à une unité économique. » Dans cette définition, la prestation de service est conçue comme un véritable processus qui s’inscrit dans la durée. Dans cette conception, le service nécessite souvent une confrontation, ou au moins une certaine interaction, entre le prestataire et l’utilisateur du service.

7Les services aux entreprises sont entendus comme les services qui entrent directement en compte dans les processus de production industriels, agricoles ou de services et dans la gestion des relations des entreprises avec leur environnement. On utilisera dans l’analyse qui suit, une classification fonctionnelle de ces services, distinguant les services administratifs (regroupant les services de gestion et les services à forte composante réglementaire), les services techniques (services de conception, d’ingénierie, et de maintenance), les services liés aux marchés, les services informatiques et les services de formation professionnelle.

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9Les services d’assistance, ceux dont la demande est la plus élevée, permettent peu l’assimilation des connaissances par l’utilisateur du service. En conséquence, le transfert de services peut rendre l’industriel de plus en plus dépendant du prestataire. La distance qui se creuse entre l’acquisition et l’assimilation du service conduit parfois à des effets pervers du type transfert régressif.

10Car l’extraversion industrielle, qui se manifeste lorsque les rapports d’échange avec l’étranger n’engendrent pas d’effets cumulatifs de croissance, peut également se développer lors de transfert des modes de production, d’organisation, de gestion, de management, de financement, de marketing et de formation des entreprises des P.V.I. au moyen de schémas préalablement conçus et destinés aux firmes évoluant dans les économies de marché développées.

11On ne peut donc plaider en faveur d’une plus grande participation des services aux entreprises aux efforts d’industrialisation que dans la mesure où les transferts de services sont conçus et organisés comme des processus interactifs (ayant de fortes chances d’agir comme des transferts progressifs) et non pas assimilés à une simple sous-traitance industrielle (agissant le plus souvent comme transferts régressifs).

12En d’autres termes, tant que ces transferts de services ne sont pas acceptés dans des schémas de co-production, par les entrepreneurs locaux autant que par les prestataires de services étrangers et locaux, les appels des instances nationales et internationales pour une industrialisation appuyée par les services (comme c’est le cas depuis le début des négociations de l’Uruguay Round du G.A.T.T. sur la libéralisation des échanges de services) risquent fort de rester vains ou inefficaces.

13MONDES EN DÉVELOPPEMENT, tome 19, n° 75-76, 1991, pp. 109-113.

Florence Jany-Catrice
Mis en ligne sur Cairn.info le 14/10/2021
https://doi.org/10.3917/med.195.0159
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