CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Le déni de grossesse est un sujet particulièrement actuel dont la complexité est à la mesure de la fascination qu’il exerce. Actuel, car ce qui est nommé « déni et négation de grossesse » à notre époque semble apparaître comme un fait nouveau. La récurrence des titres médiatiques en témoigne (la plus connue et marquante étant l’affaire Courjault). Bien que l’existence du déni de grossesse soit dévoilée au grand public, son traitement médiatique, parfois racoleur, induit bien souvent une image déformée qui ne fait que créer des amalgames. L’entretien d’une confusion notamment avec l’infanticide pourtant bien différent – même s’il peut exister quelque fois une frontière commune – est courant.
Le monde scientifique s’intéresse également depuis peu à l’apparition de cette entité clinique et au sens qu’elle peut revêtir. Alors que le terme de déni de grossesse apparaît dans les années 1970 (Bécache et Bécache, 1976), c’est au cours de ces dernières années (depuis octobre 2008) que les tout premiers colloques, congrès et journées scientifiques voient le jour en France (notamment organisés par l’AFRDG : association française pour la reconnaissance du déni de grossesse). Le déni de grossesse devient alors un enjeu de santé publique.
Si les différents tabous et préoccupations des siècles derniers (contexte de guerre mondiale, rapport à la grossesse plus instinctuel, représentations de la femme et de la mère marquées par une vision patriarcale) n’ont laissé que peu de place à la connaissance et la reconnaissance de cette entité clinique, ce phénomène semble toutefois avoir toujours existé…

Français

Les dénis et négations de grossesse, entendus comme la non prise de conscience de l’état de grossesse au-delà du premier trimestre, apparaissent comme une préoccupation actuelle. À l’aide de la méthodologie projective (Rorschach et TAT), nos hypothèses interrogent le type de fonctionnement psychique, la qualité de l’image du corps, les représentations liées à la sexualité et enfin les capacités de traitement de la perte. Nos résultats révèlent une pluralité des organisations psychiques d’une part, avec des profils plus fragiles chez les femmes qui ont dénié leur grossesse. D’autre part, des conduites psychiques communes apparaissent par rapport à un groupe témoin, menant à la conclusion que la survenue de la grossesse (chez les femmes rencontrées) et par conséquent d’un enfant, constitueraient une tentative pour se dégager de l’imago maternelle, vécue comme toute-puissante.Les dénis et négations de grossesse pourraient alors être considérés comme des mécanismes de défense, dans le sens d’une nécessité de survie psychique.

  • déni
  • négation
  • grossesse
  • tests projectifs
English

Denials and negations of pregnancy: an attempt to free oneself from the grip?

Pregnancy denial, understood as the non-awareness of the pregnancy state beyond the first trimester, appears to be a current concern. Using projective methodology (Rorschach and TAT), our hypotheses question the type of psychic functioning, the quality of the body image, the representations linked to sexuality and finally the capacities for processing loss. Our results reveal a plurality of psychic organisations on the one hand, with more fragile profiles in women who have denied their pregnancy. On the other hand, common psychic behaviours appear in comparison with a control group, leading to the conclusion that the occurrence of pregnancy (in the women we met) and consequently of a child, would constitute an attempt to free oneself from the maternal imago, experienced as all-powerful. The denials of pregnancy could then be considered as defence mechanisms, in the sense of a need for psychological survival.

  • denial
  • negation
  • pregnancy
  • projective tests
Sarah Seguin
Psychologue clinicienne, Psychothérapeute, Docteure en psychologie, Enseignante EPP. 
Sylvain Missonnier
Professeur de psychologie clinique de la périnatalité à l’Université de Paris. Directeur du laboratoire PCPP (EA 4056). Psychanalyste SPP. Président de l’IVSO. www.rap5.org.
Sarah Vibert
Psychologue clinicienne, Psychothérapeute, Institut Mutualiste Montsouris, Maître de conférences, UFR de psychologie, Université de Paris-Paris Descartes.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Il vous reste à lire 96 % de cet article.
Acheter cet article 5,00€ 17 pages, format électronique
(html et pdf)
add_shopping_cart Ajouter au panier
Autres options
S'abonner à cette revue link Via la page revue
Membre d'une institution ? business Authentifiez-vous
Déjà abonné(e) à cette revue ? done Activez votre accès
Mis en ligne sur Cairn.info le 06/05/2022
https://doi.org/10.3917/psye.651.0069
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour Presses Universitaires de France © Presses Universitaires de France. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...