Le besoin de faire trace, inscrire, incarner, pour dire de soi et dire à l’autre existe depuis toujours et permet à chacun de définir son identité individuelle et groupale. Même si tout le monde ne sait pas ou ne peut pas écrire, l’écriture concerne une grande partie de la population à travers les âges et les milieux socio-culturels. À travers le geste d’écriture principalement graphique, nous incluons aussi la trace, le dessin et tout ce que l’on peut déposer d’un mouvement qui va du corps jusqu’au support choisi. Il s’agit d’une « mise en acte d’un corps pulsionnel et de ses ressentis, qui cherche, dès les premières traces, à figurer un “corps psychique”. L’enfant y inscrit son identité : “Ici je suis” » (Garcia-Fons, 2002, p. 44). Que ce soient des notes dans un carnet, des journaux intimes, des échanges épistolaires, des petits mots laissés, ces traces discrètes montrent que notre vie est à tout moment soulignée par une multitude d’écritures ordinaires (Fabre, 1993). Si bien que lorsque l’écriture devient plus officielle – qu’elle soit scientifique, romanesque, historique, journalistique – elle participe de la même manière à une étape de fixation du temps à un moment donné de la vie. Lorsque Freud parlait du « bloc magique » (1925) comme métaphore du fonctionnement de l’appareil psychique, c’était pour envisager une machine d’écriture dont seule la surface d’inscription importe. On inscrit ce que l’on croit nous échapper et ainsi la mémoire laisse toujours des traces ineffaçables en dessous de ce qui peut se voir…