Des écoliers qui jouent jusqu’à la nuit tombée sur un terrain vague où se côtoient ordures et carcasses de vieilles voitures comme dans Le Petit Nicolas, une grande sœur chargée une journée entière de nourrir, baigner et promener son petit frère comme dans l’album Martine petite maman, des enfants en culotte courte circulant seuls dans Paris comme dans le film Le Ballon rouge : autant de situations impensables pour les parents d’aujourd’hui ! Partagés entre la peur d’exposer leurs bambins à de multiples risques – à une époque où même la pratique de la baby-gym peut requérir un certificat médical – et l’envie de goûter à la simplicité d’une parentalité qui ne se vivrait pas sur le mode de la performance, ils se demandent pourquoi être parent est devenu si difficile. Si l’élévation des standards éducatifs ne fait guère de doute, il est plus délicat d’en inventorier les causes, très nombreuses. La première est d’ordre médical et juridique : la baisse drastique du taux de mortalité infantile – qui était encore de 0,5 % en 1950, contre 0,03 % aujourd’hui – et la légalisation de l’accès à la contraception et à l’avortement au cours des années 1960 et 1970 ont contribué à faire de l’enfant une entité extrêmement précieuse, dont l’existence n’est plus laissée au hasard mais repose sur un projet parental mûrement réfléchi. La seconde est d’ordre scientifique et pédagogique : la diffusion des découvertes en psychologie sur le développement de l’enfant et, parallèlement, l’essor de l’éducation nouvelle ont eu pour conséquence d’imposer peu à peu de nouveaux modes éducatifs, respectueux du rythme et des besoins cognitifs de l’enfant…