Selon Medici Senza Frontiere, le système d’accueil des demandeurs d’asile en Italie s’appuie en grande partie sur des centres d’accueils extraordinaires, avec peu de services visant à accompagner l’inclusion sociale et des zones de marginalité subsistent dans les contextes urbains et ruraux (MSF 2018). Si ces constats décrivent un système d’accueil étatique qui apparaît normal dans sa capacité d’exclure, en effet, d’autres organisations de la société civile sont engagées dans la critique de ce système en faveur d’un accueil plus respectueux des subjectivités des migrants, fait « par le bas ». Elles sollicitent les « dilemmes éthiques endémiques » de l’humanitaire (Feldman 2007 : 692), questionnant sa nature intrinsèquement asymétrique et hiérarchique. D’ailleurs, est-il toujours dit que ces organisations civiles privilégient des relations équilibrées entre leurs membres bénévoles et les migrants ?
Pour explorer ce sujet, la méthode utilisée est celle de la théorisation ancrée (Glaser & al. 1967 ; Paillé 1994 ; Charmaz 2005 ; Flick 2018). L’objet de recherche initial, à savoir les stratégies d’accueil du système étatique italien et leurs effets sur le bien-être bio-psycho-social des migrants accueillis, a été adapté chemin faisant (Becker 2005) par un processus « cognitif itératif » (Fasseur 2018 : 581), fait par des allers-retours répétés entre données et théories, jusqu’à une élaboration théorique finale. Soulignant la co-temporalité du chercheur et des situations observées (Agier 2013a), cette étude finalement interroge l’intersubjectivité dans la relation d’aide établie entre les bénévoles et les demandeurs d’asile dans une organisation en dehors du système d’accueil officiel…