La réalisation d’évaluations psychologiques dans un contexte de pluralité linguistique implique de prendre en considération les appartenances, les éléments culturels amenés par le sujet ou sa famille et les langues acquises, sans préjuger de leur statut. Il nous faut alors identifier leur place et déterminer leur rôle dans les pratiques culturelles intra-familiales et dans les transmissions transgénérationnelles. Il se trouve que les contextes plurilingues offrent une complexité qui peut faire obstacle à l’identification de compétences bilingues effectives. Ils peuvent contribuer à la banalisation d’un déficit au niveau du langage, en supposant des connaissances linguistiques qui n’existent pas. Il faut donc établir la réalité ou l’absence de ressources en une autre langue, préciser le contexte de l’acquisition du langage, appréhender les pratiques langagières et la préférence linguistique.
Certaines dynamiques sociolinguistiques génèrent des rapports concurrentiels entre les langues, désorganisent les pratiques langagières et ajoutent de la spécificité aux troubles du langage qui pourraient survenir (Kohl 2008 et al. ; Di Meo et al. 2013 ; Bennabi-Bensekhar et al. 2015). Dans ce cadre, la genèse du langage et le destin des langues mises en présence dépendent de facteurs intriqués dont certains appartiennent à l’individu tandis que d’autres appartiennent à sa famille ou à l’environnement social. Ils agissent en interaction pour constituer des histoires langagières singulières générant alors une diversité de profils bilingues qui peuvent être appréhendés par une appréciation des pratiques langagières situées à l’arrière-plan de compétences par ailleurs évaluables dans les deux langues (Bennabi-Bensekhar 2010)…