Au terme des travaux qui furent présentés durant les deux journées de colloque qu’Antoine Compagnon, Céline Surprenant et moi avons organisées les 6 et 7 juin 2019 au Collège de France, et dont la matière est reprise dans deux numéros de L’Année sociologique, quelles lignes de force dégager en guise de conclusion ?
Le colloque avait plusieurs objets. Il s’agissait d’abord de revenir sur l’échec des deux tentatives d’Émile Durkheim de se faire élire au Collège de France, en 1897 et 1904. Plusieurs publications antérieures avaient établi les faits, mais aussi élargi l’enquête aux durkheimiens candidats au Collège (Karady, 1976 ; Besnard, 1979 ; Fournier, 2007 ; Benthien, 2015). L’enquête sur la non-élection de Durkheim pouvait être mise en regard, par contraste, avec l’étude des conditions de son succès à la Sorbonne. Mais puisque le propos de notre colloque était d’éclairer une situation non advenue, il importait aussi de reconstituer la scène scientifique et intellectuelle sur laquelle s’était joué le sort des deux candidatures de Durkheim. Un rival élu (Jean Izoulet), un concurrent dans la discipline (Gabriel Tarde), des alliés d’autres disciplines (Henri Bergson, Pierre Janet), tels sont les acteurs dont le rôle et l’œuvre mettent en relief, fût-ce tel un négatif saisissant (Izoulet), l’importance qu’aurait pu revêtir le recrutement de Durkheim.
Nous avions imaginé aussi de procéder à une exploration contrefactuelle : si Durkheim avait été élu, son œuvre et le rayonnement de celle-ci auraient-ils connu un autre cours ou une inflexion significative …