Dans les années 1930, l’élection de durkheimiens au Collège de France est un moment fort de la deuxième phase de la sociologie durkheimienne, celle qui, après la mort du maître, débute avec le retour des durkheimiens mobilisés.
On peut y voir une revanche après les échecs d’Émile Durkheim en 1897 face à Jean Izoulet, de Marcel Mauss en 1907 face à Jean Réville, puis en 1909 face à Alfred Loisy, et de François Simiand en 1912 face à Marcel Marion (Le Van-Lemesle, 2004 : 391, 392), avec comme unique succès celui de Paul Meillet en 1906 (chaire de Grammaire comparée). Une revanche également face aux élections d’adversaires de la sociologie durkheimienne (Izoulet, élu en 1897 sur la chaire de Philosophie sociale ; Gabriel Tarde, élu en 1900 sur la chaire de Philosophie moderne), ou de ceux qui, comme Henri Bergson (élu en 1900 sur la chaire de Philosophie grecque et latine, transformée ensuite en chaire de Philosophie moderne), développaient des approches différentes sans compter parmi leurs adversaires. Mais plutôt que cette approche, qui ferait sans doute trop de place à la chaleur de la bataille, à l’aigreur et au ressentiment, puis à la joie, nous proposons d’y voir le succès du groupe de chercheurs que Durkheim a formé autour de lui, avec le développement de la sociologie comme perspective commune et L’Année sociologique comme outil de cette stratégie.
La sociologie de Durkheim est une sociologie des collectifs. Les durkheimiens eux-mêmes forment un collectif : celui-ci s’organise autour d…