En 1929, Pierre Janet (1859-1947), professeur de Psychologie expérimentale et comparée au Collège de France de 1902 à 1935, faisait référence à la critique qu’Émile Durkheim (1858-1917) adressait à la psychologie individuelle, dans son cours sur L’Évolution psychologique de la personnalité (1929). Il rappelait que Durkheim substituait la notion de « conscience collective » à celle de psychologie individuelle :
Vous vous rappelez quelle importance autrefois Durkheim a attachée à cette prise de conscience du groupe. Il avait même imaginé une chose assez bizarre : cette prise de conscience du groupe existait, à son avis, en dehors de l’individu (Janet, 1929 : 143). Il se moquait tout le temps de la psychologie individuelle en disant : « L’individu n’a pas conscience de ce que le groupe lui fait faire ; il n’a pas conscience du groupe, la conscience du groupe est en dehors de l’individu ». Un peu plus, il eût imaginé une âme du groupe. (Ibid. [nous soulignons].)
En parlant d’« autrefois », Janet renvoyait à l’époque de l’essor de la psychologie expérimentale à la fin du xixe siècle, qui a aussi été celle de sa critique, notamment, par la phénoménologie husserlienne alors naissante. Il renvoyait sans doute aussi à celle de l’article sur les « Représentations individuelles et représentations collectives » que Durkheim avait publié en 1898. L’auteur de cet article fondateur disait par ailleurs que c’est Émile Boutroux (1845-1921) qui lui avait inspiré la nécessité de distinguer la sociologie de la psychologie…