1La publication des lettres de Max Weber vient de se terminer avec la parution d’un onzième gros volume. C’est à deux titres qu’il faut le signaler à tous ceux qui s’intéressent à l’œuvre de Weber. On trouve ici 68 lettres des années 1896 à 1918, découvertes après la parution des volumes chronologiques correspondants et éditées avec grand soin par Rita Aldenhoff-Hübinger. D’un intérêt particulier est la lettre du 28 mai 1908 adressée au théologien Adolf Deißmann dans laquelle Weber commente la thèse d’un « parallélisme polémique entre le culte de l’empereur et le culte du Christ » que Deißmann avait développée dans son ouvrage sur le Nouveau Testament (Licht vom Osten, Das Neue Testament und die neuentdeckten Texte der hellenistisch-römischen Welt, Tübingen, 1908). Plusieurs lettres adressées aux économistes Karl Bücher et Ladislaus von Bortkiewicz éclairent la conception du Grundriß der Sozialökonomik, d’autres montrent le travail quotidien de Weber comme responsable des hôpitaux militaires à Heidelberg au début de la Première Guerre mondiale.
2L’intérêt majeur de ce volume « supplément » se trouve cependant dans les pages 173 à 696 : plus de 500 pages d’index élaboré par Edith Hanke. Voilà un instrument de travail inestimable qui permet d’exploiter rationnellement cette masse énorme de plus de 3500 lettres écrites par Weber entre 1875 et 1920. Il y a d’abord un index des destinataires des lettres, ensuite un index des personnes mentionnées dans les lettres. Ici, on ne retrouve pas seulement les noms des personnes citées, mais aussi l’indication de leurs écrits (livres, articles) que Weber mentionne, cite, critique ou discute. Pour ne donner qu’un seul exemple : l’entrée « Jellinek, Georg » permet d’aller directement aux lettres ayant trait aux écrits suivants : Allgemeine Staatslehre, Ausgewählte Schriften und Reden, Bundesstaat und parlamentarische Regierung, Erklärung der Menschen- und Bürgerrechte, Die Verantwortlichkeit des Reichskanzlers et Verfassungsänderung et Verfassungswandlung. De même, à l’entrée « Weber, Max », on trouve sur une dizaine de pages (en deux colonnes) les renvois aux lettres dans lesquelles Weber mentionne, explique ou discute ses propres travaux. Suit ensuite un index des lieux, puis sur deux cent trente pages à deux colonnes un index des matières très finement subdivisé. Un seul exemple : l’entrée « Interessen » (intérêts) ne contient pas moins de trente-trois sous-catégories, allant des intérêts agraires aux intérêts scientifiques, en passant par des intérêts érotiques, capitalistes, ecclésiaux, matériels, nationaux, religieux et beaucoup d’autres. Sans oublier les renvois à une autre trentaine de concepts apparentés. On voit bien que ce travail hors norme n’a pas été accompli par un ordinateur savamment programmé mais par une véritable tête pensante, une des meilleures connaisseuses de toute l’œuvre de Max Weber, la responsable éditoriale de la MWG.
3Signalons enfin, pour clore le chapitre de la correspondance de Max Weber, la parution de deux volumes de lettres choisies. Le premier comprend une sélection de lettres de voyage de Weber (Écosse, Irlande, France, Espagne, États-Unis, Italie, etc.), le deuxième une sélection de Gelehrtenbriefe, de lettres du savant Weber adressées à des collègues et dans lesquelles il discute de questions scientifiques. Certaines de ces lettres pourraient être caractérisées ainsi : Max Weber expliqué par lui-même à l’intention de collègues qui ont du mal à le comprendre. Ces explications de texte n’ont rien perdu de leur intérêt.
4– Rita Aldenhoff-Hübinger et Edith Hanke (dir.), Max Weber. Reisebriefe 1877-1914. Ausgewählte Briefe I. Mit einem Einleitungsessay von Hinnerk Bruhns, Tübingen, Mohr-Siebeck, 2019.
5– Rita Aldenhoff-Hübinger et Edith Hanke (dir.), Max Weber. Gelehrtenbriefe. 1878-1920. Ausgewählte Briefe II. Mit einem Einleitungsessay von Gangolf Hübinger, Tübingen, Mohr-Siebeck, 2020.