CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 La décentralisation, la gouvernance, l’e-administration, les logiques de redevabilité et l’exigence de participation sont depuis quelques décennies déjà à l’origine d’une révolution permanente de l’action publique. Face à cette situation de constant boule-­ versement, la littérature en sociologie et en science politique a elle-même, de façon assez homologue à son objet, accumulé les modèles explicatifs.

2 Ainsi, la littérature a insisté voici deux décennies sur l’évidement de l’État, illustré par la métaphore de l’« État creux » (Rhodes, 1994) ou par la mise en évidence de l’influence des communautés d’action publique, des réseaux politiques ou des communautés épistémiques (Le Galès, Thatcher, 1996 ; Duran, 1999). Les analyses tendent plutôt aujourd’hui à mettre en avant le renouvellement des formes de contrôle de l’État. Dans cette optique, est peinte depuis quelques années la figure d’un État stratège qui se délesterait de ses capacités opérationnelles mais se recentrerait sur des fonctions de pilotage stratégique (Bezes, 2005a). Cette logique est celle d’un gouvernement (Epstein, 2005 ; 2015) ou d’un contrôle (Bezes, 2005b) à distance, en particulier en rapport avec le territoire.

3 Le constat sous-jacent aux deux thèses est le même : les relais étatiques sur le territoire ont perdu de leur poids. Mais la signification est tout autre selon qu’on assimile cette situation à l’émergence d’un État stratège ou selon qu’on soutient que, du fait d’une part de la décentralisation et de l’affirmation des régions, et d’autre part des tentatives pour réduire les budgets publics, le centre a perdu de sa prise sur les territoires. Dans cette seconde optique, la proclamation d’un État stratège ne serait qu’une variation sur l’État creux, celle où les élites centrales bomberaient le torse pour faire oublier leur faiblesse. Il est incontestable cependant que ce serait une variation particulièrement réussie car tout se passe comme si l’apparente puissance de l’intellect avait totalement éclipsé aux yeux de nombre d’observateurs le caractère de plus en plus étique des muscles.

4 Alors que la construction de l’État a longtemps été analysée comme un processus séculaire (Weber, 1971; Lipset, Rokkan, 1967 ; Élias, 1975 [1939] ; Evans, Rueschemeyer, Skocpol, 1985) de monopolisation de la violence légitime et de construction d’un dispositif de contrôle (des impôts, du territoire, puis de l’ensemble des conduites), la situation actuelle vient interroger non seulement le caractère linéaire et régulier de ce processus, mais également sa nature irréversible. En d’autres termes, les évolutions de l’action publique et les modèles qui prétendent en rendre compte nous obligent en premier lieu à évoquer les accidents qui peuvent marquer cette affirmation séculaire de l’État et qui correspondent à des périodes de crise ou de moindre affirmation. Ils nous contraignent également en second lieu à nous demander si nous ne parvenons pas au terme de ce processus pour entrer dans une phase de recomposition majeure.

5 La littérature est en effet partie de l’hypothèse d’un État creux et désargenté pour aboutir à celle d’un État stratège, oubliant peut-être dans ce passage combien la stratégie pouvait être obérée par l’impotence. Les évolutions que nous avons mentionnées ci-dessus correspondent-elles à un changement majeur (par rapport à une logique séculaire) due à l’essor du New Public Management (NMP) et des NTIC, permettant de fait un contrôle à distance ? En sont-elles au contraire l’aboutissement, le moment où l’État a si bien colonisé les âmes qu’il peut se désintéresser des corps ? N’ouvrent-elles pas plutôt un accident, voire une inversion, dans cette affirmation de l’État [2] ?

6 Cet article souhaite initier une réflexion sur ces points. Il interroge l’hypothèse du déploiement d’un gouvernement à distance, notamment dans les rapports entre l’État et les territoires. Il met à l’épreuve la thèse selon laquelle la « résidualisation de l’État local » (Epstein, 2015, p. 465) se serait accompagnée d’un renforcement de l’État central par le passage d’une logique d’administration des territoires à un rôle de pilotage et de coordination de l’action publique territoriale.

7 Pour mieux comprendre les formes contemporaines de gouvernement et de gouvernance, il repose sur différents matériaux recueillis respectivement par les auteurs dans le domaine des politiques de développement territorial d’une part (pôles de compétitivité, pôles d’excellence rurale) et de celles d’enseignement supérieur et de recherche d’autre part. Plus précisément, il s’appuie sur des études d’un ensemble de dispositifs territoriaux qui ont été promus dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche depuis le début des années 2000 et qui visaient à renforcer les coopérations territoriales. Il nous semble en effet que les analyses proposées pour rendre compte des relations entre l’État et les territoires, si elles reposent généralement sur la comparaison de terrains, se limitent par contre trop souvent à une seule politique et couvrent un nombre assez réduit de domaines d’action publique : la politique de la ville, l’environnement et le développement des territoires. La diversité des terrains que nous allons mobiliser a donc pour but de consolider des analyses dont il n’est pas sûr qu’elles concernent véritablement dans la même mesure tous les secteurs d’action publique.

8 Nous commencerons par présenter les politiques sur lesquelles nous nous appuierons en ce qui concerne leur origine, leurs temporalités et leurs dynamiques d’évolution (1). Nous pourrons ainsi montrer que le gouvernement à distance est, comme ses prédécesseurs, « apprivoisé » (2). Cela nous conduira finalement à définir un mode contemporain du gouvernement des territoires, reposant à la fois sur un faible pilotage par l’État, au sens d’une stratégie réel­- lement consciente et dont la mise en œuvre découlerait d’objectifs explicites, et pourtant sur un crédit porté à son action (3).

I. Politiques de développement territorial, de l’enseignement supérieur et de la recherche : un ensemble d’évolutions similaires

9 Les politiques de développement territorial et celles de l’enseigne­- ment supérieur et de la recherche sont marquées par un ensemble de dynamiques convergentes. Depuis deux à trois décennies, de façon tout à fait comparable en matière de temporalité, ces deux domaines ont connu une émergence des logiques de territorialisation, une différenciation croissante des territoires et plus récemment, une prégnance de l’excellence. Ces similitudes justifient leur comparaison tout en donnant du poids à la thèse d’un type de régulation (à distance) qui vaudrait pour la plupart des domaines et non seulement tel ou tel secteur.

Le corpus empirique

10 Notre article repose en premier lieu sur une étude de la mise en place des pôles de compétitivité dans une région française dans le cadre d’une enquête collective (Mendez, 2008). Rappelons que les pôles de compétitivité ont été lancés à la suite d’un appel à projets de la DATAR en 2004. Ils visaient à rassembler sur un territoire et une thématique, des entreprises, des établissements de formation et des laboratoires de recherche. 71 projets ont été labellisés en deux vagues, dont 66 (sur 105) lors de la première vague lancée en 2005 et cinq en 2007. En 2010, six nouveaux pôles ont été labellisés dans un domaine spécifique, les éco-technologies.

11 Il est fondé en second lieu sur des données concernant les poli­- tiques de développement rural issues d’une enquête sur l’appel à projets « Programme de recherche évaluative sur les pôles d’excellence rurale (PER) » lancé par la DATAR en 2007 (Barral, Simoulin, Thumerel, 2010). Initiés en décembre 2005, les PER correspondaient à des objectifs similaires à ceux des pôles de compétitivité, mais étaient destinés à des territoires ruraux et étaient d’envergure beaucoup plus petite. Il s’agissait officiellement d’identifier des projets exemplaires qui pouvaient être à l’origine de bonnes pratiques, diffusables à l’ensemble du territoire national. 642 projets ont été labellisés en deux vagues, 379 (sur 888 candidatures) lors de la première lancée en 2006 et 263 (sur 906) lors de la seconde initiée en 2009.

12 L’article mobilise par ailleurs un travail de thèse sur le gouvernement régional de la recherche depuis les années 1980 (Crespy, 2015) et les résultats d’une enquête collective (Aust et al., 2008) sur la mise en place des pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). Les PRES visaient à promouvoir une « masse critique », à renforcer la lisibilité et la visibilité des établissements d’enseignement supérieur.

13 Les deux domaines sont donc marqués par des dispositifs d’action publique qui impliquent une mobilisation des acteurs, à la fois sur une base territoriale mais aussi sectorielle ou inter-sectorielle. Historiquement, ils ont été caractérisés par une prééminence de l’État central et la vision d’une action publique étatique et nationale.

Une même logique de territorialisation

14 À la suite des politiques industrielles nationales qui ont dominé jusqu’à la fin des années 1980, une vision renouvelée de l’efficacité de l’action publique dans les secteurs d’intervention de l’État a tout d’abord conduit à mobiliser la proximité dans les politiques publiques, aussi bien en tant que ressource que comme référentiel (Dalle et al., 1998).

15 En ce qui concerne les politiques territoriales, les mesures visant à créer les conditions d’un développement endogène se sont multipliées avec la conversion progressive des experts de la DATAR au développement des territoires comme en témoignent la loi d’amé­- nagement et de développement du territoire de 1995, le CIADT (comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire) de 1997 et la loi Voynet de 1999. Au milieu des années 2000, ce mouvement est amplifié dans un contexte renouvelé, notamment dans le cadre européen, de promotion d’une « économie de la connaissance ». Des dispositifs sont promus en matière de développement des territoires, que ce soit en direction de territoires concentrant des activités innovantes ou de ceux qui reposent sur des activités plus traditionnelles.

16 La politique des pôles de compétitivité s’inscrit ainsi dans un contexte de déploiement de la stratégie de Lisbonne, au niveau national par les développements d’une nouvelle politique industrielle (Blanc, 2004 ; Beffa, 2004), au niveau régional par l’Acte II de la décentralisation et l’élaboration des schémas régionaux de développement économique (SRDE). L’appel à projets « pôles de compétitivité », lancé à l’automne 2004, constitue en effet la contribution française à la stratégie de Lisbonne [3] tout comme il représente l’adaptation sociétale d’un modèle de développement économique basé sur les clusters [4]. La politique des pôles d’excellence rurale vise pour sa part à soutenir des projets innovants en milieu rural, de façon complémentaire (et compensatoire) par rapport aux pôles de compétitivité.

17 Les politiques d’enseignement supérieur et de recherche ont fait montre d’évolutions comparables (Musselin, 2008 ; Ravinet, 2012). Les relations entre le ministère et les établissements ont évolué suite à la mise en place des contrats quadriennaux (à la fin des années 1980) devenus quinquennaux, amorçant un mouvement de renforcement des établissements que la loi d’autonomie des universités (2007) est venue consacrer. Dans un même temps, les collectivités locales, notamment les conseils régionaux, ont contribué au financement de ces politiques de manière croissante et continue, leur donnant une dimension territoriale qui, sans être totalement nouvelle, avait connu une longue éclipse [5].

Une différenciation croissante

18 Une seconde similitude entre les politiques de développement territorial et celles de recherche et d’enseignement supérieur est que l’action publique ne vise plus à couvrir l’ensemble du territoire national (Aust, Crespy, 2009). L’attractivité et la compétitivité entre les territoires se jouent désormais dans la capacité des acteurs locaux à proposer des projets pour leur territoire, à fixer des activités et à être un lieu-aimant (Benko, Lipietz, 2000). Une telle exigence rejoint les évolutions liées à la décentralisation, à la fois la multiplication des initiatives locales et la figure de l’élu entrepreneur de politiques publiques (Balme et al., 1998 ; Le Bart, Fontaine, 1994). Il n’est donc plus seulement question de ce que l’État veut et fait pour les territoires, des adaptations locales de ses politiques, mais bien d’initiatives dont les acteurs des territoires sont eux-mêmes porteurs.

19 Depuis le début des années 2000, une inflexion s’est produite avec la mise en place de dispositifs territoriaux pour soutenir plus précisément les dynamiques de collaboration science-industrie, en ce qu’elles sont porteuses d’innovation. Ces dispositifs ont concerné notamment les incubateurs inter-universitaires et surtout le domaine de la recherche en santé avec les génopoles et les cancéropôles. L’adoption du Pacte pour la recherche en 2006 a donné une nouvelle impulsion avec la mise en place des PRES et des Réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA) en 2007. Par la suite que ce soit l’Opération Campus (2008), plan de financement de l’immobilier universitaire [6], ou les initiatives d’excellence (IDEX) dans le cadre du Programme des Investissements d’Avenir – Grand Emprunt – (2011), toutes les politiques ont eu pour objectif de promouvoir des formes de coopération entre établissements d’enseignement supérieur et organismes de recherche. Les RTRA ont avant tout concerné les laboratoires de recherche selon une logique thématique [7] tandis que les PRES, l’Opération Campus et les IDEX, dans une logique de site, se sont adressés aux universités et grandes écoles principalement.

Une logique de l’excellence

20 Une troisième similitude est que, dans les deux domaines, l’excellence s’est progressivement imposée, depuis le milieu des années 2000, comme une catégorie d’action publique, comme un mot d’ordre qui fait l’objet d’investissements différenciés.

21 Dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche, si l’excellence n’apparaît explicitement qu’à l’occasion des investissements d’avenir, elle est sous-jacente dès la mise en place des PRES. Elle renvoie à la recherche d’une plus grande visibilité et lisibilité à l’échelle internationale du système académique. Dimension tech­- nique et idéale de l’action publique, l’excellence apparaît comme une évidence qui s’impose dans les discours (Tauveron, 2013). Le programme des investissements d’avenir consacre explicitement et littéralement cette logique. Ce sont surtout les IDEX dont il sera question ici, c’est-à-dire le volet du programme qui porte sur la constitution de groupements d’établissements d’excellence visibles à l’échelle internationale et dotés en conséquence de moyens importants. Huit projets ont été retenus à ce titre.

22 Les pôles d’excellence rurale portent également dans leur appellation même le référentiel de l’excellence. Ils marquent de ce point de vue une inflexion rhétorique par rapport aux pôles de compétitivité. Et, pourtant, comme souvent, l’excellence est d’autant plus affichée dans le discours qu’elle est problématique à définir et à identifier en ce qui concerne les projets financés. Ceux-ci sont beaucoup plus nombreux que les pôles de compétitivité, représentent des budgets beaucoup plus faibles (de quelques dizaines de milliers d’euros à quelques millions) et correspondent à des opérations hétérogènes voire hétéroclites (aménager des bâtiments pour regrouper des artisans d’art, créer une maison de santé pluridisciplinaire, conduire un plan de rénovation et de développement du thermalisme…).

23 La comparaison des dispositifs promus est donc fondée par ces similitudes et invite à examiner plus précisément les modes de faire dans les rapports entre l’État et les territoires afin de mieux en saisir les ressorts actuels, d’interroger ce que sont ces modes contemporains de gouvernement des territoires et de se demander dans quelle mesure le gouvernement à distance permet de les rendre intelligibles.

II. Le gouvernement à distance : un procédural apprivoisé ?

24 L’ensemble des transformations que nous venons de décrire sont corrélées à un changement majeur en matière de financement et à l’appropriation de celui-ci par les différents acteurs en présence. Toutefois, si la généralisation de la procédure de l’appel à projets peut sembler appuyer la thèse du gouvernement à distance, son fonctionnement concret amène à la nuancer.

Un cadre procédural défini par l’appel à projets ?

25 De par le nouveau regard que porte la littérature sur les instruments (Lascoumes, Le Galès, 2004), comme les nouveaux modes de gouvernement (Epstein, 2005 ; 2012), les instruments d’action publique, tel l’appel à projets, jouent depuis le début des années 2000 un rôle accru dans la contrainte et le contrôle, notamment en direction des territoires. Parmi les traits caractéristiques du gouvernement à distance (Epstein, 2005 ; 2015), l’appel à projets apparaît comme un élément essentiel au même titre que la mise en concurrence des projets locaux. Tous deux permettent en théorie qu’un pouvoir à distance s’exerce sans une intervention directe des services centraux de l’État dans les projets et les territoires. Les acteurs locaux, disciplinés par ces techniques de gouvernement, produiraient spontanément une action en conformité avec les choix politiques de l’État central.

26 Les mouvements de décentralisation et de déconcentration devenant disjoints à partir de l’Acte II de la décentralisation (2004), les services centraux de l’État retrouvent indéniablement une place plus grande, notamment à travers ces appels à projets. Initiés par les services centraux de l’État, les agences (ANR et ANRU) ou encore l’administration de mission (DATAR), les appels à projets tendent à se diffuser au niveau des collectivités locales.

27 Cette forme de gouvernement à distance repose sur la mise en compétition des territoires et une autonomie dans un cadre contraint. Progressivement, tout se passe comme si la libre-conformation des acteurs locaux aux attentes de l’État se faisait sans recourir comme précédemment à la contrainte ou à la négociation. La mise en compétition des projets configurés localement par des réseaux d’acteurs conduirait à créer de l’action collective à l’échelle du territoire en lien avec la capacité politique des régions qu’elle a pour but de jauger et de stimuler (Pasquier, 2004).

28 Dans différents domaines [8], et nos terrains montrent que c’est bien le cas, l’appel à projets s’est développé ces dernières années comme l’une des modalités privilégiées de construction de l’action publique. Il circonscrit les projets initiés localement en définissant des critères relatifs aux types d’acteurs impliqués, à l’objet de la coopération. Malgré la sélectivité qui le sous-tend et qui pourrait décourager le montage de projets, il est un instrument de mobilisation des acteurs locaux et connaît d’autant plus de succès que les autres modalités de financement se raréfient en nombre et en montant. Il en résulte que la compétition est de plus en plus intériorisée et acceptée par tous, même si cette intériorisation s’opère de façon variable et au prix de traductions, par exemple, comme dans le cas des PER, lorsque la logique d’excellence se transforme en une modalité d’émulation (Simoulin, 2010).

29 Les services centraux tentent en outre d’échapper aux pressions et négociations par le recours à des jurys internationaux pour sélectionner les projets, ce qui offre de surcroît une garantie supplémentaire dans la mise en avant de l’excellence. Cette évolution est perceptible dans le cadre des politiques d’enseignement supérieur et de recherche, où l’on note une différence entre les PRES et les dispositifs suivants. Dans l’enseignement supérieur et la recherche, ce mode de faire est introduit à l’occasion du plan Campus (2008) et plus encore lors de la mise en œuvre des dispositifs d’excellence [9] au titre du Grand Emprunt (2009). Des jurys internationaux assurent dorénavant la sélection en lieu et place de la direction ministérielle concernée. Les relations nouées entre les élus locaux et les représentants des services déconcentrés de l’État suite à la décentralisation sont dès lors contournées.

30 Le caractère non obligatoire de l’appel à projets implique cependant que des réseaux d’acteurs s’en saisissent ou non, d’où l’importance des coopérations tissées précédemment. Dans le cas des pôles de compétitivité, les systèmes productifs locaux (SPL) labellisés précédemment par la DATAR ou des clusters reconnus par les comités interministériels pour l’aménagement et le développement des territoires (CIADT) ont bien souvent constitué la base des projets de pôle de compétitivité [10]. Ce caractère non obligatoire implique surtout de renoncer plus ou moins à couvrir l’ensemble du territoire. C’est à ce titre que l’appel à projets marque une rupture avec les logiques de territoire de projet et de contractualisation qui l’ont précédé. Là où les « pays » correspondaient à une tentative pour unir des acteurs et des territoires proches, les procédures d’appels d’offre reviennent à des logiques de disjonction territoriale puisque la concurrence n’oppose plus les riverains mais l’ensemble des territoires nationaux. Or, la concurrence entre voisins d’une part obligeait à une forme de communication et de négociation, d’autre part imposait des compensations lors d’un projet ultérieur ou la constitution de compromis. C’est beaucoup moins le cas lorsque la concurrence oppose des territoires éloignés à tous égards. Cela peut induire, comme dans le cas de l’enseignement supérieur et de la recherche, une concentration des dispositifs dans les plus grands centres métropolitains – PRES, RTRA, mais aussi pôles de compétitivité, opération Campus et IDEX.

31 L’appel à projets ne suffit pas toutefois à lui seul à produire de la sélectivité, même s’il en crée les conditions. En effet, si le chiffre d’une quinzaine de projets était prévu à l’occasion de la labellisation des pôles de compétitivité, soixante et onze projets ont été finalement labellisés. L’appel à projets définit ex ante des règles qui s’adressent théoriquement et simultanément à l’ensemble des protagonistes mais qui sont la plupart du temps ouvertes et peu précises. Ce cadre procédural n’est pas figé et ne constitue que partiellement une source de contraintes pour les acteurs territoriaux. C’est bien l’intention du législateur qui donne son sens à la procédure et non l’instrument lui-même qui est porteur d’une logique qui l’emporte­- rait sur toute considération politique. Les PRES, limité à neuf en 2007, ont ainsi vu leur nombre tripler et on en comptait vingt-sept en 2013.

Une politique procédurale en perpétuelle correction 

32 On observe en effet une dynamique des règles car les acteurs ne sont pas seulement contraints par ces règles et procédures, ils jouent aussi avec elles, les redéfinissent et rétroagissent sur le cadre procédural défini. Tant du côté des services de l’État que des collectivités locales, des formes de contournement sont mises en œuvre. La libre-conformation des acteurs locaux est ainsi écornée et l’autonomie dans un cadre contraint tend à être amendée.

33 C’est tout d’abord dans la rencontre entre les acteurs locaux et les acteurs centraux que se négocie la marge par rapport aux objectifs affichés nationalement. Si c’était déjà le cas auparavant, comme cela était décrit dans les arrangements entre le préfet et les grands élus locaux (Crozier, Thoenig, 1975), cela ne se joue plus au même niveau ; la négociation est davantage régionale que locale. Les négociations ne portent pas sur les adaptations locales, mais sur le contenu même de l’action publique et c’est là une différence majeure avec les politiques précédentes. Ainsi, lors de la création des premiers PRES, on a pu observer des différences entre par exemple le PRES d’Aix-Marseille qui est très vite devenu le support à la fusion des trois universités et le PRES ParisTech composé essentiellement de grandes écoles d’ingénieurs et assurant avant tout la lisibilité et la visibilité internationale d’une marque.

34 En second lieu, et du fait même du caractère flou des objectifs nationaux, on note de fréquentes tentatives et tentations des services centraux pour rentrer dans le détail d’une part de l’appel à projets et d’autre part des projets eux-mêmes. La mise en place des PRES a été ainsi accompagnée par l’implication du directeur général de l’enseignement supérieur à la fois pour définir une forme juridique qui a exclu de facto certains projets et pour inciter certains sites à proposer un projet (Aust, Crespy, 2009).

35 Dans le même temps, les acteurs locaux arrivent à échapper au gouvernement à distance. Le caractère multi-positionné des « grands élus » leur permet toujours de mobiliser diverses ressources : à travers leur lobbying, les élus locaux ont cherché à obtenir l’implantation des pôles de compétitivité sur leur territoire. De même, les acteurs sectoriels ont un accès plus ou moins privilégié aux scènes nationales de sélection. En outre, dans les politiques lancées par l’État, le soutien financier des collectivités locales devient un critère d’éligibilité des projets locaux. Les projets de R&D financés dans le cadre des pôles de compétitivité montrent ainsi des régions, comme PACA, où, dans un premier temps entre 2005 et 2007, il y a un refus de cofinancement par le conseil régional car ce dernier se sentait lié par les choix des services de l’État, sans pouvoir véritablement peser sur ceux-ci [11].

36 S’il ne s’agit pas d’une logique de guichet, il ne s’agit pas pour autant d’un cadre uniquement procédural. L’appel à projets, par son efficacité propre, recompose l’action de l’État et introduit une rupture dans les modes d’allocation des ressources : la concurrence porte sur un objet donné, il y a simultanéité dans l’examen des propositions et cet examen se déroule à un niveau global. Au-delà, cela change les conditions de relations entre institutions locales et services centraux. L’allocation centralisée des moyens implique de procéder à des arbitrages. Cela rompt avec une action uniforme porteuse de saupoudrage, même si, dans les faits, on assiste à une juxtaposition de deux manières de faire, saupoudrage versus ciblage des moyens pour le dire très vite, notamment dans les phases de rattrapage qui impliquent de reconnaître davantage de projets qu’initialement prévus. Cela est visible tant pour les pôles de compétitivité que les PRES ou l’Opération Campus.

37 En conséquence, le recours à l’appel à projets contribue bien à renouveler les formes de gouvernement, sans pour autant que ceci puisse s’apparenter à un véritable pilotage à distance de la part des services de l’État. On ne décèle pas en effet une intention explicite et claire de la part du niveau central (Simoulin, 2011), les contourne­- ments sont nombreux et le « pilote » n’a aucunement renoncé à entrer dans le détail du contenu des projets et à être présent au niveau local. À cette lumière il n’est pas sûr que les porteurs de projets aient réellement été contraints de se soumettre aux critères du centre, critères dont Renaud Epstein concède lui-même qu’ils restent en partie « implicites » (Epstein, 2015, p. 472).

III. Gouverner les territoires, un gouvernement à crédit ?

38 L’observation des formes contemporaines de gouvernement des territoires dans les deux domaines étudiés conduit par conséquent à nuancer la capacité même de pilotage, fut-il à distance, car le mode de gouvernement contemporain repose en fait sur une reconstruction a posteriori de logiques d’action. On serait à notre sens bien plus fondé à insister sur le caractère central du crédit que les acteurs portent à l’État.

Un pilotage sans pilote ?

39 Le pilotage à distance postule implicitement une certaine intention du pilote, « une conception disciplinaire qui repose sur des techniques concrètes de cadrage des individus qui permettent de conduire à distance leurs conduites » (Lascoumes, Le Galès, 2004, p. 20). Il y a certes une incontestable ambigüité dans la thèse du gouvernement à distance qui énonce que le recours aux instruments permet une forme de pilotage tout en soutenant que ce recours est en partie dû à la difficulté de se mettre d’accord sur des objectifs et de définir des politiques. S’il est clair que le recours aux instruments n’est pas neutre, que ceux-ci ont des effets qui outrepassent leurs buts explicites et qu’ils participent à une nouvelle forme de régulation sociale, on peut malgré tout s’interroger sur l’idée même de « pilotage ».

40 Les caractéristiques de la procédure d’appel à projets relativisent en effet fortement celui-ci. Tout d’abord, les délais extrêmement courts proposés aux porteurs de projet ne permettent que difficile­- ment de monter ex nihilo un projet et avantagent très fortement les projets déjà prêts. Pour la plupart des pôles de compétitivité, il existait des formes de structurations préexistantes. Le pôle « Solutions communicantes sécurisées » reprend par exemple des structures de coordination territoriale de la filière qui avaient vu le jour avec le soutien des collectivités locales dès les années 1990. En d’autres termes, par ses délais, la procédure exclut presque d’office des projets qui auraient été spécifiquement conçus en réponse aux attendus de l’appel à projets. Le travail de montage de projet consiste plutôt à reformuler à la marge un projet à maturité afin de le faire répondre en apparence aux objectifs perçus de ce dernier. Les projets, y compris ceux qui sont labellisés, ne répondent donc que de façon « cosmétique » aux intentions (à supposer qu’il y en ait) des concepteurs de l’appel à projets. Dans le cas des PER, cette « cosmétisation » a précisément consisté en une mise en avant de l’excellence sur le plan rhétorique, la plupart des projets étant déjà prêts quant au fond. La mise en place des PRES a aussi pu résulter d’une coopération pré-existante plus ou moins ancienne à la fois avec la création des pôles européens ou des structures de coopération de site comme à Paris-Est, soit par d’autres appels à projets préalables qui avaient eu un caractère obligatoire comme les incubateurs inter-universitaires à Aix-Marseille.

41 La duplication des vagues limite ensuite les effets de distinction. En effet, que ce soit pour les PER, l’Opération Campus, ou les Investissements d’avenir, la seconde vague apparaît comme largement dédiée à la recherche d’un plus grand équilibre territorial, mais aussi au rattrapage des sites qui pour le ministère semblaient s’imposer comme éligibles (Grenoble et Lyon) mais n’avaient pu passer les fourches caudines du jury international. Dans le cadre du plan Campus, l’Ouest de la France s’est ainsi vu doter de deux campus prometteurs. Pour les IDEX, le site lyonnais non retenu a fait l’objet d’un financement ad hoc spécifique. Dans la même perspective, l’appel à projets IDEX a connu une nouvelle vague en 2015 qui visait à reconnaître de nouveaux projets de taille mondiale mais aussi à promouvoir des I-SITE (Initiatives Science Innovation Territoire et Économie) en mettant l’accent sur la capacité d’évolution et de transformation des sites sur des domaines plus limités [12]. Les PER ont également connu une seconde vague qui a, à la fois, permis une répartition assez équilibrée de ceux-ci sur l’ensemble du territoire et limité le caractère distinctif de la labellisation pour les projets retenus.

42 Tout ceci produit un cumul et une concentration des labels, ceux-ci créant finalement moins qu’ils institutionnalisent et stabilisent parfois des caractéristiques et des thématiques ou points forts propres à certains territoires : c’est particulièrement vrai pour les sites métropolitains qui concentrent RTRA, PRES et IDEX. À partir des politiques de l’obésité et de consommation durable (Bergeron et al., 2014), les auteurs montrent comment les labels ne conduisent pas pour autant à une stabilisation d’un standard et à l’uniformisation des pratiques. Il en est de même ici, à ceci près que des spécialisations parfois anciennes (à travers les RTRA et les pôles de compétitivité) tout comme les sites déjà les plus visibles sont mis en avant (que ce soit à travers les PRES et les IDEX). C’est également sensible dans le cas des PER, où le fait de pouvoir s’appuyer sur une gouvernance éprouvée et des spécificités reconnues (comme les pôles « valorisation de la châtaigne cévenole », « valoriser le bois local » en Ariège ou « les chemins de l’art de vivre en Provence ») ont conféré une crédibilité aux projets et conforté les coopérations et spécialisations ainsi mises en valeur.

43 Par ailleurs, la procédure ne donne pas un sens univoque ni même clair au label qu’elle décerne. Ainsi, les pôles de compétitivité reconnus lors de la première vague sont en nombre beaucoup plus grand que prévu. Des projets très hétérogènes sont récompensés pour des raisons qui tiennent parfois à une certaine volonté de répartition à travers l’ensemble du territoire. Aucune région ne se retrouve sans pôle de compétitivité mais, à côté des secteurs de pointe, des domaines plus traditionnels sont reconnus et des logiques d’aménagement des territoires régionaux sont mises en avant : le pôle PASS associe ainsi l’arrière-pays alpin aux Alpes-Maritimes (Mendez, 2008). Ce caractère hétéroclite et l’attribution à chaque fois beaucoup plus large que prévu des labels atténuent considérablement les effets de distinction qu’ils étaient censés permettre.

44 C’est seulement dans un deuxième temps, par exemple dans le cas des pôles de compétitivité, des PRES ou des IDEX, que la politique acquiert une signification explicite. Ainsi, pour les pôles de compétitivité, une hiérarchisation est chemin faisant introduite au sein des projets labellisés en distinguant des envergures territoriales (pôles mondiaux, à vocation mondiale, nationaux). Les finance­ments dont les projets de R&D issus de ces pôles ont pu disposer ont été inégalement répartis, se concentrant principalement dans les pôles de plus grande envergure. Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a distingué des campus « prometteurs » et « innovants » au sein de l’opération Campus. Le même a enfin, après une première phase où les PRES étaient basés sur le volontariat, proposé trois formules (fusion, fédération, confédération) entre lesquelles les universités doivent choisir puisque la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche (2013) leur impose désormais des regroupements à travers les communautés d’universités et d’établissements (COMUE).

45 Encore convient-il de noter que le label demeurera sans sens clair ni valeur évidente pour d’autres programmes, comme par exemple les PER, malgré le lancement d’une seconde vague. Les pôles d’excellence rurale labellisés, même s’ils sont globalement de qualité et plutôt plus convaincants que les projets auxquels le label a été refusé (Barral, Simoulin, Thumerel, 2010), sont d’ambition très inégale et parfois très peu innovants. Tous les acteurs concernés en ont conscience et s’interrogent à ce propos, d’autant que la labellisation attire malgré tout les regards et les attentions sans que les porteurs de projet puissent réellement la valoriser par une doctrine proposée par le niveau central. Jamais l’excellence territoriale n’a été définie et aucune communication locale ne peut de ce fait se développer puisqu’il faudrait proposer une définition propre qui à la fois serait non consensuelle et opposerait le territoire à ses voisins.

46 On a donc une logique d’ensemble en trois temps qu’on retrouve dans la plupart des programmes (voir tableau 1).

47 Une politique affichée comme sélective connaît une première phase dans une logique constitutive, sans objectifs explicitement formulés et sur une base volontaire et non impérative. La réponse à cette première phase est ici importante quant au passage ou non à la seconde phase et quatre possibilités se dégagent en croisant d’une part la réponse des acteurs locaux et les intentions et intérêts des acteurs centraux.

48 – L’absence ou la rareté de projets déposés, ou l’émergence de réactions très négatives, conduit à l’abandon de cette tentative après une phase qui apparaît rétrospectivement comme une expérimentation (en l’absence de réponse) ou une sonde (en cas de rejet). Aucun des cas que nous avons étudiés ne correspond à cette possibilité. La pénurie budgétaire semble en fait exclure cette possibilité et obliger les collectivités et porteurs de projets potentiels à répondre aux appels à projets.

49 – L’absence ou la rareté de projets déposés, ou l’émergence de réactions très négatives, conduit malgré tout à la reformulation de cette politique à laquelle les acteurs centraux sont extrêmement attachés. Aucun des cas que nous avons étudiés ne correspond à cette possibilité mais la proposition de fusionner volontairement, faite par François Hollande aux régions françaises le 14 janvier 2014, à laquelle seules la Bourgogne et la Franche-Comté répondront, s’en rapproche, le gouvernement adoptant très vite un nouvel objectif de réduction de moitié du nombre de régions.

50 – Un grand nombre de projets sont déposés en réponse à la politique proposée, mais ils ne permettent pas d’élaborer des solutions qui vaudraient (aux yeux de l’État) d’être généralisées à l’ensemble du territoire national. La politique des PER a ainsi vu un très grand nombre de candidatures, ce qui a conduit au lancement d’une seconde phase, mais elle s’est faite sans qu’émerge une typologie et cette politique est apparue comme sans véritable perspective. La politique s’arrête alors à l’issue de la seconde vague et les porteurs de projet demeurent perplexes quant aux intentions de l’État, à la signification que revêtait leur labellisation et à la façon dont ils peuvent continuer à la valoriser.

51 – Les projets déposés en réponse à l’appel d’offres permettent de développer un raisonnement typologique distinguant deux ou trois solutions et celles-ci valent aux yeux des fonctionnaires centraux en charge de la politique d’être proposées à l’ensemble des territoires potentiellement concernés. Le cas des PRES et des pôles de compétitivité correspond à cette possibilité.

52 Si ce raisonnement typologique semble convaincant, la politique peut finalement être généralisée à l’ensemble des territoires (comme pour les PRES), ce qui reconstruit rétrospectivement une signification et peut effectivement donner l’impression que les représentants de l’État savaient dès le début quel était son objectif final et qu’ils y sont arrivés en pilotant les acteurs à distance et en plusieurs temps. L’IDEX et l’engagement des sites dans la voie de la fusion proposée par les candidats non-retenus lors de la première phase de pré-sélection en 2011 reposent ainsi en partie sur le postulat que les membres du jury attendaient que les établissements d’un même site fusionnent.

Tableau 1 : Le gouvernement à crédit

Tableau 1 : Le gouvernement à crédit

53 La participation plus ou moins forte des porteurs de projet n’est donc pas entièrement déterminante, même si elle influe en partie sur le devenir de la politique. À ce titre, on peut effectivement considérer qu’il y a bien pilotage au sens que les acteurs centraux usent de filtres face à la réception de leurs tentatives. Même une réponse forte et enthousiaste de la part des acteurs locaux ne conduit pas à une généralisation de la politique si elle ne répond pas à ce qui leur semble des objectifs essentiels et si elle n’a été adoptée que dans une perspective symbolique et compensatrice. Les PER ont ainsi été lancés car les élus des territoires ruraux se plaignaient d’être écartés des pôles de compétitivité. Même le nombre important de projets déposés (1794 sur l’ensemble des deux vagues) n’a donc pas conduit à généraliser une politique qui ne s’inscrivait pas dans les priorités des acteurs centraux.

54 Pour autant, on est moins en face d’un véritable pilotage à distance que d’une pratique systématique de reconstruction a posteriori d’objectifs et de modèles en fonction des propositions des acteurs que les segments étatiques prétendent « gouvernés ». Les porteurs de ces politiques, qu’on ne peut guère qualifier de « concepteurs », peuvent également changer entre les vagues leurs modalités d’action. Par exemple, l’excellence est très présente dans les politiques de l’enseignement supérieur et de la recherche. Mais cette excellence est d’abord incarnée par les PRES, puis par l’Opération Campus et enfin, du moins pour l’instant, par les IDEX. Les porteurs peuvent aussi changer de logique, l’excellence et la sélectivité s’effaçant par exemple devant l’objectif de couvrir l’ensemble du territoire dans le cas des PRES, des pôles de compétitivité et des PER. Une fois constituées, le fonctionnement au concret, le fait de devoir trouver une place dans les pratiques des acteurs et l’évolution des répertoires d’action des services centraux conduisent à redéfinir l’enjeu même des structures de coopération. Les PRES glissent au cours du temps de la mutualisation vers le portage de projet (Aust, Crespy, 2014), notamment pour répondre à l’appel à projet IDEX du Grand Emprunt. In fine, l’évaluation des IDEX rendue publique en avril 2016 montre un gouvernement qui suit immédiatement l’avis du jury international, lequel infirme pourtant des évolutions initialement validées par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, par exemple dans le cas toulousain du passage d’un projet de fusion des universités existantes à un projet de construction d’une université fédérale.

Un mode de gouvernement qui repose sur le crédit

55 Il en ressort que dans les politiques étudiées, on ne peut identifier complètement les modes de production de l’action publique au « gouvernement à distance », si ce n’est à travers les instruments de gouvernement. Ces politiques, qui affichent des objectifs bien plus ambitieux que leur degré initial d’élaboration ne devrait le leur permettre, contribuent effectivement à une intériorisation relative des objectifs affichés (excellence) et, sans les appels à projet, les projets ne verraient pas le jour dans des temporalités aussi brèves. Il demeure donc une capacité de l’État à mettre en mouvement les acteurs d’un territoire. De même, ceux-ci continuent à reconnaître à l’État et à ses représentants une capacité à opérer la sélection [13]. Mais ces capacités reposent désormais sur des croyances collectives et l’absence pour l’instant d’alternatives plus que sur des politiques réellement réflexives et intentionnelles. Par la force de l’habitude et la peur du vide, on prête aux acteurs étatiques bien plus qu’ils ne sont en mesure de réellement proposer en matière de vision prospective et de pilotage stratégique.

56 Ce constat n’est pas limité à nos terrains. S’attachant aux journées de commémoration nationale, Sarah Gensburger (2010) montre par exemple elle aussi une administration centrale qui institutionnalise une politique à laquelle elle a du mal à donner un sens. S’il y a stratégie, elle vise moins à réellement commémorer et ainsi à préciser le sens contemporain de l’unité nationale qu’à contourner le problème posé par la concurrence croissante entre diverses définitions de l’identité nationale en proposant une journée dont la symbolique n’est en rien définie au centre mais est laissée ouverte à ces interprétations concurrentes.

57 Tant les politiques de développement territorial que d’enseignement supérieur et de recherche consistent peut-être moins à définir ce qu’est l’excellence des territoires ou du système académique qu’à susciter des réformes des modes de faire des acteurs. Cette forme de gouvernement des territoires repose donc fortement sur le crédit dont est empreinte à plus d’un titre l’action publique produite. Ce crédit revêt à la fois une dimension économique, politique mais aussi morale. Crédit tout d’abord du fait de la situation désargentée de l’État français qui recourt d’autant plus aux politiques constitutives et en particulier aux appels d’offre qu’il est en pratique désormais incapable de financer à lui seul ces politiques et dépend des fonds ou cofinancements que lui apportent principalement les collectivités territoriales et l’Union européenne. Crédit également au sens que ces autres acteurs accordent (encore) une très grande foi aux prétentions et aux affirmations des acteurs étatiques, quand bien même ils ont régulièrement constaté que les financements garantis étaient souvent retardés voire annulés (Pasquier, 2012). Bien entendu, il ne s’agit pas d’une radicale nouveauté comme en atteste la contractualisation entre l’État et les conseils régionaux (Leroy, 2011). Dans une certaine mesure, la construction de l’action publique s’apparente au pari pascalien. Les acteurs font le choix de participer aux dispositifs qui leur sont proposés, par crainte de s’en voir exclus par la suite. Crédit enfin parce que l’État lui-même se ment sur la réalité actuelle de son pouvoir et se cache qu’il est beaucoup plus contraint par les évolutions du nouveau management public, par l’européanisation et la mondialisation, qu’il ne se l’avoue (Simoulin, 2014).

58 Au-delà, ce gouvernement à crédit a été rendu possible et nécessaire d’une part par la décentralisation, qui a construit l’espace régional comme un espace d’action publique et a fait sortir en partie les élus de leur rapport à leur territoire d’élection. Travailler dans l’espace régional les a conduits à prendre de la distance par rapport aux revendications locales et cela a été le cas notamment lors des différentes vagues de contractualisation [14]. La raréfaction des res­- sources financières étatiques a d’autre part rendu la sélection inéluctable. Durant les années 1960-1970, la croissance permettait, en l’absence de consensus sur un projet, de le dupliquer. Ainsi, quand les acteurs ne parvenaient pas à se mettre d’accord quant à l’implantation d’un campus universitaire dans une ville, deux campus pouvaient être créés [15]. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, où la pénurie budgétaire oblige au contraire à des regroupements.

59 Un tel mode de gouvernement soulève de ce fait la question de l’égalité entre les territoires. La différenciation territoriale est précisément au cœur des travaux sur l’action publique locale (Douillet et al., 2012) car l’uniformité n’est plus produite hiérarchiquement par l’État. La question de l’efficacité et de la viabilité à long terme de ce mode de gouvernement se pose également. De même que les recherches de Jérôme Aust et Benoît Cret (2012) décrivent un appareil étatique déconcentré qui perd peu à peu ses moyens et sa raison d’être, les délégations régionales à la recherche et à la technologie, du fait de la décentralisation et du recours croissant aux appels d’offre, de même, nous découvrons dans nos terrains des acteurs déconcentrés qui perdent foi dans leur mission et leurs compétences. On sait par ailleurs combien le recours aux instruments expose le « gouvernant distant » aux conditions d’utilisation de ceux-ci et le rend dépendant de ceux qui collectent et transmettent des données, dont ils ne connaissent ni les traitements ultérieurs ni les utilisations. Le risque est grand alors de construire un centre « stratège » qui se coupe de ses relais naturels et perd ainsi en remontée d’informations. On ne serait plus très loin de ce qui définissait la nature même de la bureaucratie selon Crozier (1963), soit un fonctionnement organisationnel où ceux qui n’ont pas l’information décident tandis que ceux qui l’ont sont dépourvus du pouvoir de décision.

Conclusion

60 En définitive, à la lumière de la comparaison inter-sectorielle, la thèse du gouvernement à distance apparaît avant tout liée à l’usage de certaines techniques de gouvernement à l’instar de l’appel à projets et de ce qui l’accompagne, à savoir la sélection et la mise en compétition. Mais ce mode de gouvernement repose sur un ensemble de croyances collectives qu’il est de plus en plus difficile de maintenir. La présence de moins en moins affirmée de l’État sur les territoires, ou le fait qu’elle corresponde de moins en moins à un appui financier et technique sensible, marqué et indéniable [16], risque sous peu de le rendre de plus en plus problématique et de moins en moins opérant.

61 Le pilotage étatique doit donc être nuancé. Les logiques de conduite de l’action publique font l’objet d’une rationalisation a posteriori et sont le fruit d’un tâtonnement itératif. La sélectivité n’opère pas seulement comme support dans une optique d’excellence et de choix d’un nombre limité de projets. Elle procède en plusieurs phases et constitue aussi bien une voie d’identification de solutions que de socialisation des acteurs. La centralité des services de l’État est tout autant réelle que symbolique et postulée par les acteurs locaux. Elle agit toutefois comme un puissant aiguillon pour l’action et montre encore toute la difficulté, plus de trente ans après la décentralisation, à penser l’action publique territoriale sans référence à l’État.

62 En cela, c’est bien le crédit qui apparaît comme un des ingrédients essentiels de ce mode de gouvernement. Ce dernier n’est par conséquent pas sans parenté avec la gouvernance performative identifiée par Futrell (2002) en matière de participation du public au sein de commissions de débats. La maîtrise des impressions et le fait de tenir son rôle comptent tout autant que la prise en compte effective de la participation. À ce titre, nous sommes bien invités à explorer les « fondements anthropologiques » (Pinson, 2015) de la gouvernance, les raisons, d’une part qui incitent à agir et à obéir et d’autre part, qui font que les autres acteurs, notamment locaux, prêtent une capacité d’action bien plus grande qu’elle ne l’est en réalité aux services de l’État. Ils cultivent aussi une croyance envers l’État comme garant de l’intérêt général et de l’égalité territoriale qui n’est plus guère fondée sur son action (Pasquier, 2012). Cette forme de gouvernement illustre finalement l’émergence d’une régulation marquée par les procédures et des formes d’autonomie des acteurs, mais dont le caractère conjoint et processuel est masqué et méconnu et où la véritable énigme est peut-être moins la stratégie du gouvernant que le consentement du gouverné à sa « servitude volontaire ».

Notes

  • [1]
    Nous tenons à remercier les lecteurs et évaluateurs de cet article, ainsi que les membres du Labex Structuration des Mondes Sociaux – SMS – (ANR-11-LABX-0066), qui nous ont aidés à le finaliser.
  • [2]
    Une première lecture des travaux de Philippe Bezes (2009) reviendrait par exemple à voir dans l’affirmation des ministères centraux (ministère des Finances, etc.) une tendance forte de l’analyse des réformes menées depuis cinquante ans tandis qu’une seconde insisterait au contraire sur les différences profondes entre les quatre périodes et configurations qu’il distingue, dont certaines voient des ministères sectoriels et « dépensiers » tels que l’Éducation ou la Santé, s’affirmer davantage.
  • [3]
    Suivant en cela la Méthode Ouverte de Coordination (Dehousse, 2004).
  • [4]
    Tel que décrit par Porter (1998) et repris dans différents pays.
  • [5]
    Sous la iii e République, les financements municipaux ont joué un rôle dans la promotion des centres académiques en province (Grossetti, 1995).
  • [6]
    L’Opération Campus lancée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche en 2008 visait à soutenir le développement de dix campus d’excellence selon quatre critères : ambition pédagogique et scientifique du projet, urgence de la situation immobilière, développement de la vie de campus, caractère structurant et innovant du projet pour le territoire. Douze sites ont été labellisés, les dix annoncés ainsi que deux supplémentaires dans le cadre du plan de relance (sites lillois et lorrain). Cinq campus prometteurs et quatre campus innovants ont été retenus dans un second temps.
  • [7]
    Treize RTRA ont vu le jour et neuf centres thématiques de recherche et de soin (RTRS) ont été reconnus dans le domaine de la recherche clinique entre laboratoires et structures hospitalières.
  • [8]
    Que ce soit les politiques urbaines (Epstein, 2013) ou le domaine du social (Bureau et al., 2013).
  • [9]
    Que ce soit pour les IDEX mais aussi les Laboratoires d’excellence (Labex) et Équipements d’excellence (Equipex).
  • [10]
    On peut citer le cluster Popsud et le pôle de compétitivité Optitech en région PACA. Le pôle Arôme Saveurs et Senteurs s’appuie en partie sur deux SPL existants.
  • [11]
    Les élus locaux sont assez peu associés à ces négociations car ces politiques impliquent avant tout un dialogue et des interactions entre les services centraux de l’État et les porteurs de projet, entre les présidents d’université, directeurs de grandes écoles et la direction générale de l’enseignement supérieur pour les PRES, entre les représentants des entreprises et les services du ministère de l’Industrie pour les pôles de compétitivité.
  • [12]
    Les résultats de cette phase ne seront connus qu’en 2016. Trois projets (sur sept) ont été pré-sélectionnés dans la catégorie IDEX et cinq (sur treize) en tant que I-SITE.
  • [13]
    Dans certaines régions, les conseils régionaux ont ainsi refusé d’établir une hiérarchisation des projets de pôles de compétitivité s’en remettant aux représentants de l’État.
  • [14]
    Celle-ci n’est pas totale comme le montre O. Nay (2002).
  • [15]
    Un exemple est fourni par le développement universitaire à Marseille (Guidarini, 2002), où l’absence de consensus conduit à la fin des années 1960 à créer deux campus, l’un au Nord et l’autre au Sud de la ville.
  • [16]
    La différence s’est ici creusée avec les premières années de la décentralisation où les services de l’État avaient gardé une prééminence en raison de leur expertise technique, à l’instar des directions départementales de l’équipement (Reigner, 2002).
Français

Cet article s’interroge sur la réalité et la portée du développement de formes de contrôle à distance, étant entendu que les gouvernements des territoires sont effectivement en profonde transformation. En s’appuyant sur l’étude de dispositifs promus depuis le milieu des années 2000 dans différents domaines d’action publique, il avance que ce mode de gouvernement repose sur le crédit que les acteurs lui apportent et leur cécité sur la difficulté qu’éprouve désormais l’État à réunir des financements assez conséquents et précis pour avoir une action réelle sur les territoires. Peut-on à ce titre parler de « pilotage » alors que, à force de chercher à s’affirmer par rapport à leurs services déconcentrés, les acteurs administratifs centraux se sont condamnés à des stratégies dont les modalités pratiques sont bricolées et les objectifs reconstruits rétrospectivement ?

Mots-clés

  • Action publique 
  • Action publique territorialisée 
  • État 
  • Gouvernement local 
  • Instruments d’action publique 
  • Nouvelle gestion publique 
  • Régulation

Références bibliographiques

  • En ligne Aust J., Cret B., 2012, « L’État entre retrait et réinvestissement des territoires », Revue française de sociologie, 1, pp. 3-33.
  • En ligne Aust J., Crespy C., 2009, « Napoléon renversé ? Institutionnalisation des Pôles de recherche et d’enseignement supérieur et réforme du système académique français », Revue Française de Science Politique, 5, pp. 915-938.
  • Aust J., Crespy C., Manifet C., Musselin C., Soldano C., 2008, Rapprocher, intégrer, différencier. Éléments sur la mise en place des Pôles de recherche et d’enseignement supérieur, Rapport à la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, 104 pages.
  • Aust J., Crespy C., 2014, « Rassembler pour réformer ? Les PRES, de la mutualisation au portage de projets », in Chevaillier T., Musselin C., (eds), Réformes d’hier et réformes d’aujourd’hui. L’enseignement supérieur recomposé, Rennes, PUR, pp. 159-174.
  • Balme R., Faure A., Mabileau A., 1998, Politiques locales et transformations de l’action publique en Europe, Grenoble, CERAT.
  • Barral F., Simoulin V., Thumerel B., 2010, « Ingénierie de projet et excellence territoriale », Territoires 2040, 2, pp. 137-148.
  • Beffa J.-L., 2005, Pour une nouvelle politique industrielle, Paris, La Documentation française.
  • Benko G., Lipietz A., 2000, La Richesse des régions. La nouvelle géographie économique, Paris, Puf.
  • En ligne Bergeron H., Castel P., Dubuisson-Quellier S., 2014, « Gouverner par les labels. Une comparaison des politiques de l’obésité et de la consommation durable », Gouvernement & Action publique, 3, pp. 9-32.
  • En ligne Bezes P., 2005a, « Le modèle de ‘l’État-stratège’ : genèse d’une forme organisationnelle dans l’administration française », Sociologie du Travail, 4, pp. 431-450.
  • En ligne Bezes P., 2005b, « Le renouveau du contrôle des bureaucraties », Informations sociales, 126, pp. 26-37.
  • En ligne Bezes P., 2009, Réinventer l’État. Les réformes de l’administration française (1962-2008), Paris, Puf.
  • Blanc C., 2004, Pour un écosystème de la croissance, Paris, La Documentation française.
  • En ligne Bureau M.-C., Sarfati F., Simha J., Tuchszirer C., 2013, « L’expéri­mentation dans l’action publique. Usages, pratiques et jugements des acteurs », Travail et emploi, 135, pp. 41-55.
  • Crespy C., 2015, Gouverner la recherche en région. Les politiques régionales de recherche en Provence-Alpes Côte d’Azur (1982-2004), Paris, L’Harmattan.
  • Crozier M., 1963, Le Phénomène bureaucratique, Paris, Seuil.
  • En ligne Crozier M., Thoenig J.-C., 1975, « La régulation des systèmes organisés complexes. Le cas du système de décision politico-administratif local en France », Revue française de sociologie, 1, pp. 3-32.
  • Dalle J.-M., Didry C., 1998, « Les approximations de la proximité comme catégorie de l’action publique », in Bellet M., Kirat T., Largeron C., (eds), Approches multiformes de la proximité, Paris, Hermès, pp. 309-325.
  • En ligne Dehousse R., 2004, « La méthode ouverte de coordination. Quand l’instrumentation tient lieu de politique », in Lascoumes P., Le Galès P., (eds), Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po, pp. 331-356.
  • Douillet A.-C., Faure A., Halpern C., Leresche J.-P., (eds), 2012, L’Action publique locale dans tous ses états. La démocratie à l’épreuve de la différenciation, Paris, L’Harmattan.
  • Duran P, 1999, Penser l’action publique, Paris, LGDJ.
  • Élias N., 1975 [1939], La Dynamique de l’occident, Paris, Seuil.
  • Epstein R., 2005, « Gouverner à distance. Quand l’État se retire des territoires », Esprit, novembre, pp. 96-111.
  • Epstein R., 2012, « De la différenciation territoriale à la libre conformation » in Douillet A.-C., Faure A., Halpern C., Leresche J.-P., (eds), L’Action publique locale dans tous ses états. La démocratie à l’épreuve de la différenciation, Paris, L’Harmattan, pp. 127-138.
  • En ligne Epstein R., 2013, La Rénovation urbaine : Démolition-reconstruction de l’État, Paris, Presses de Sciences Po.
  • Epstein R., 2015, « La gouvernance territoriale : une affaire d’État. La dimension verticale de la construction de l’action collective dans les territoires », L’Année sociologique, 65, 2, pp. 457-482.
  • Evans P. B., Rueschemeyer D., Skocpol T., 1985, Bringing the State Back In, Cambridge, Cambridge University Press.
  • En ligne Futrell R., 2002, « La gouvernance performative. Maîtrise des impressions, travail d’équipe et contrôle du conflit dans les débats d’une City commission », Politix, 57, pp. 147-165.
  • En ligne Gensburger S., 2010, Les Justes de France. Politiques publiques de la mémoire, Paris, Presses de Sciences Po.
  • Grossetti M., 1995, Science, industrie et territoire, Toulouse, Presses universitaires du Mirail.
  • Guidarini V., 2002, L’Université : un nouvel outil de recomposition urbaine. L’exemple du site de la faculté des sciences de Saint-Jérôme dans les quartiers nord de Marseille, thèse de doctorat de sociologie, E.H.E.S.S. Marseille / LAMES UMR CNRS. MMSH.
  • Lascoumes P., Le Galès P., (eds), 2004, Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po.
  • Le Bart C., Fontaine J,. (eds), 1994, Le Métier d’élu local, Paris, L’Harmattan.
  • Le Galès P., Thatcher M., (eds), 1995, Les Réseaux de politique publique. Débat autour des policy networks, Paris, L’Harmattan.
  • En ligne Leroy M., 2011, « La régulation financière de l’action publique régionale », in Barone S., (ed.), Les Politiques régionales en France, Paris, La Découverte, pp. 235-256.
  • Lipset S., Rokkan S., 1967, Party Systems and Voter Alignments. Cross National Perspectives, New York, Free Press.
  • Mendez A., (ed.), 2008, Quelle articulation entre les pôles de compétitivité et les tissus productifs régionaux ? Une mise en perspective de quatre pôles en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Rapport pour le conseil régional PACA, 349 pages.
  • En ligne Musselin C., 2008, « Les politiques d’enseignement supérieur », in Borraz O., Guiraudon V., (eds), Politiques publiques. La France dans la gouvernance européenne, Paris, Presses de Sciences Po, pp. 147-172.
  • Nay O., 2002, « La politique des bons offices. L’élu, l’action publique et le territoire », in Lagroye J., (ed.), La Politisation, Paris, Belin, pp. 199-219.
  • Pasquier R., 2004, La Capacité politique des régions, Rennes, PUR.
  • En ligne Pasquier R., 2012, Le Pouvoir régional. Mobilisations, décentralisation et gouvernance en France, Paris, Presses de Sciences Po.
  • En ligne Peters B. G., 1994, « Managing the hollow State », International Journal of Public Administration, 3-4, pp. 739-756.
  • En ligne Pinson G., 2015, « Gouvernance et sociologie de l’action organisée. Action publique, coordination et théorie de l’État », L’Année sociologique, 65, 2, pp. 483-516.
  • Porter M., 1998, « Clusters and the new economics of competition », Harvard Business Review, novembre-décembre, pp. 77-90.
  • En ligne Ravinet P., 2012, « La politique d’enseignement supérieur. Réformes par amplification et rupture dans la méthode », in De Maillard J., Surel Y., (eds), Les Politiques publiques sous Sarkozy, Paris, Presses de Sciences Po, pp. 361-380.
  • Reigner H., 2002, « Le pluralisme limité de l’action publique territoriale : le ministère de l’Équipement entre adaptations et continuité », in Fontaine J., Hassenteufel P., (eds), To Change or Not to Change ? Les Changements de l’action publique à l’épreuve du terrain, Rennes, Presses universitaires de Rennes, pp. 189-209.
  • En ligne Rhodes R. A. W., 1994, « The hollowing out of the State: the changing nature of the Public Service in Britain », The Political Quarterly, 2, pp. 138-151.
  • Simoulin V., 2010, « Quand ambition ne rime pas avec réalisation. L’action publique face aux limites de la volonté politique », Sciences de la société, 79, pp. 144-158.
  • En ligne Simoulin V., 2011, « Les politiques régionales comme esquisses et miroirs de l’action publique », in Barone S., (ed.), Les Politiques régionales en France, Paris, La Découverte, pp. 287-298.
  • Simoulin V., 2014, « La réforme territoriale : bâclée ou machiavélique ? », Pouvoirs locaux, 103, pp. 30-35.
  • Tauveron M., 2013, « Excellence. Une analyse logométrique », Mots. Les langages du politique, 102, pp. 121-138.
  • Weber M., 1971, Économie et société, Paris, Plon, 2 tomes.
  • Worms J.-P., 1966, « Le préfet et ses notables », Sociologie du travail, 3, pp. 246-269.
Cécile Crespy
est professeure de Science politique à Sciences Po Toulouse et chercheure au laspp – Laboratoire des Sciences Sociales du Politique (ea 4175). Ses recherches portent sur le gouvernement des politiques scientifiques et universitaires. Elle a notamment publié Gouverner la recherche en région. Les politiques régionales de recherche en Provence-Alpes Côte d’Azur (1982-2004) (Paris, L’Harmattan, 2015 ) et codirigé avec Jerôme Aust La Recherche en réformes. Les politiques de recherche entre État, marché et professions (Paris, Éditions des Archives contemporaines, 2014).

Sciences Po Toulouse – LaSSP
cecile.crespy@sciencespo-toulouse.fr
Vincent Simoulin
est professeur de Sociologie à l’Université de Toulouse Jean Jaurès et chercheur au certop – Centre d’Étude et de Recherche Travail Organisation Pouvoir – (umr 5044 cnrs). Ses recherches portent sur le changement organisationnel, la gouvernance territoriale et les politiques scientifiques. Outre de nombreux articles de revues et des ouvrages en co-direction, il a notamment publié Sociologie d’un grand équipement scientifique. Le premier synchroton de troisième génération (Lyon, ENS Éditions, 2012) et La Coopération nordique. L’organisation régionale de l’Europe du Nord depuis la tentative autonome jusqu’à l’adaptation à l’Europe (Paris, L’Harmattan, Collection Logiques Politiques, 1999).

Université de Toulouse Jean-Jaurès – CERTOP
simoulin@univ-tlse2.fr
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 24/10/2016
https://doi.org/10.3917/anso.162.0465
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour Presses Universitaires de France © Presses Universitaires de France. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...