CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Première partie / Mémoires originaux / Deuxième partie / Analyses / Première section / Sociologie générale / I. ? Traités, manuels, philosophie sociale / A. ? Traités / B. ? Manuels / par M. P. Fauconnet

Henry Pratt Fairchild . — Elements of Social Science. An Introduction to the Study of Life in Human Society, New York, Macmillan, 1924, 484 p., in-8o [1].

1L?auteur s?adresse à deux catégories de lecteurs et vise deux buts : 1 / Tous les membres d?une société moderne doivent, avant de terminer leur éducation, être initiés à la science sociale. Pour beaucoup, c?est donc à la High school que cette initiation doit avoir lieu. L?introduction de la sociologie dans les programmes élémentaires si ardemment critiquée chez nous, ne soulève aux États-Unis aucune objection, ni pédagogique ni confessionnelle. Il faut d?ailleurs reconnaître que la religion est traitée, dans ce livre, de manière à ne pas inquiéter un protestantisme libéral. 2 / Les étudiants ont besoin, vers la première année de College, d?une introduction d?ensemble aux sciences sociales (à savoir : sociologie, science économique, anthropologie, science politique, civics) qu?ils étudieront ensuite plus spécialement. Il n?est pas sans intérêt de comparer ce petit livre avec les manuels français, suscités par les programmes des Écoles normales primaires, et qui servent, à défaut d?autres, à un étudiant de licence.

2Notons l'indépendance totale de l'auteur : pas de programme officiel. Beaucoup d?images, soit documentaires, soit symboliques, ces dernières d?une naïveté voulue. L?auteur parle à de grands enfants. De brèves et bonnes indications bibliographiques, quelques sujets étant plus difficiles, à la fin des chapitres. Pas d?histoire de doctrines, à peu près pas de théories. Dans un langage très concret, l'auteur raconte la vie sociale telle qu?il la voit.

3On ne peut pourtant pas dire que nous ayons là un exposé-modèle de faits. Quand il s?agit de la société actuelle, l'auteur décrit, mais se réfère, le plus souvent à des faits précis, localisés, datés. De l'ethnologie et de l'histoire, il donne des vues d?ensemble, concrètes, mais tellement synthétiques qu?il s?agit moins des faits eux-mêmes que de la représentation qu?il s?en ait formé. L?ordre des matières a quelque chose de déconcertant. Ce n?est ni un tableau des initiations réelles ni une analyse de la famille, de la société politique ou religieuse. Ce mode de présentation me paraît être le principal défaut de ce petit livre, par ailleurs attrayant et raisonnable. La partie économique est de beaucoup la plus longue : 172 pages sur 480. Son plan rappelle celui des précis d?économie politique.

4Avant cette partie économique, dix chapitres (165 p.) groupent des notions et des faits sous des rubriques disparates. I, l'organisation sociale ; II, les débuts de l'humanité ; III, le progrès économique ; IV, les intérêts (où sont traités ceux du langage, de la nationalité, du patriotisme) ; V, confiance dans une conduite normale, conformisme ; VI, développement de la famille ; VII à IX, le contrat social : la vanité ; la peur ; la religion ; X, les droits.

5Après la partie économique viennent deux chapitres sur la population et l'immigration ; trois sur l'État, où il est question surtout du crime et de la peine ; un sur l'assistance et le chômage ; un, enfin, sur le progrès social.

6Tout professeur de sociologie sait combien ces introductions, encyclopédiques et élémentaires, sont difficiles à construire. Je crois que celle de M. Fairchild , malgré ses mérites, manque un but essentiel : donner aux élèves le sentiment qu?il y a des groupes naturels de faits, leur montrer comment la science s?y prend pour les aborder méthodiquement.

7P. F.

C. — Philosophie sociale / II. — Psychologie et sociologie / A. — Psychologie sociale / B. — Philosophie des valeurs / C. — Logique et théorie de la connaissance / par M. M. Mauss

Ernst Cassirer . — Philosophie der Symbolischen Formen, vol. 2 : Das Mythische Denken. — Vorwort, p. VII-XIV, Berlin, Bruno Cassirer, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1925, XVI-320 p., in-8o [2]. / Cf., du même. — Sprache und Mythos. Ein Beitrag zum Problem der Götternamen. — Leipzig/Berlin, B. G. Teubner, Studien der Bibliothek Warburg, Herausgegeben von Fritz Saxl , 1924, 87 p., in-8o, index. — Die Begriffsform im mythischen Denken, Leipzig/Berlin, B. G. Teubner, Studien der Bibliothek Warburg 1, 1922, II-62 p., in-8o[3].

8Ce livre fait suite au premier volume consacré au « Langage » dont M. Antoine Meillet et nous-même avons parlé l'an dernier. M. Cassirer poursuit sa grande œuvre de « Philosophie des formes symboliques » – et en vient au Mythe, ou plutôt à la pensée mythologique. Ce livre a eu le même succès que le premier. Aussi clairement écrit que pensé, aussi bien informé, aussi plein de faits intelligemment choisis, enrichi de toutes les ressources de l'admirable fondation [Warburg], et avec cela érudit, très généralement exact (Goulden Bough – répété – n?est évidemment qu?une erreur de secrétariat [4]), il donne tout ce qu?on doit attendre d?une recherche si vaste et conduite expressément vers un but philosophique.

9Car c?est vers une critique de la pensée et de la valeur du symbole mythique que tend M. C. ; et le couronnement de cette seconde partie c?est une « dialectique de la conscience mythique » [Die Dialektik des mythischen Bewusstseins] (IVe partie, p. 287-320), le mot dialectique étant entendu au sens hégélien : théorie du devenir d?une forme de pensée, de son évolution, conduisant à une « critique » (à une « théorie de cette forme de la connaissance »), à une vue et de son « contenu » et de sa « fonction » (p. 294, 312). Il ne s?agit donc pas ici exclusivement ni d?une psychologie, ni d?une sociologie de la pensée mythique, et, à son point de vue, M. C. ne relève pas de nos études, bien qu?il leur fasse de larges emprunts.

10Si larges même qu?il nous faut enregistrer ce livre comme une seconde adhésion aux méthodes que Durkheim et ses collaborateurs ont préconisées ici depuis trente ans. D?une part, on n?y trouve pas cette pure dialectique et l'introspection logique qui est d?ordinaire le seul ouvrage du philosophe. L?auteur n?y analyse pas une pensée mythique personnelle ou plutôt l'idée qu?il s?en fait ou ne discute pas par une argumentation [...] la façon dont les autres philosophes se la sont représentée. Mais M. C. a quitté l'abstraction, même celle des [...]. C?est bien au mythe, ou plus généralement à la mythologie, et aux représentations collectives de la religion et de la magie. Sa description est aussi concrète, aussi complète que possible, étant donné que M. C. se borne à mettre en son ordre à lui, les résultats acquis par les divers spécialistes, comparatistes et historiens. Sa philosophie de l'histoire des mythes est bien au fond exclusivement historique – tout comme le serait une sociologie en ces matières. Certes M. C. poursuit son but personnel. De plus, parmi les sociologues français, c?est avec le plus philosophe d?entre eux, avec M. Lucien Lévy-Bruhl qu?il aurait le plus d?affinité. Mais comme lui et comme nous, il n?étudie pas la raison en soi, la connaissance en elle-même et en général, mais exclusivement à travers les « mentalités » historiquement constatées. Le « phénomène de l'esprit » prend enfin ici tournure à la fois positive et dialectique. Il ne consacre à celle-ci qu?une introduction où l'on trouve d?ailleurs un remarquable exposé de la « philosophie et de la mythologie » de Friedrich Wilhelm Joseph von Schelling (p. 10 sq. [5]) qui avait, lui, bien entrevu le problème.

11À un autre point de vue, M. C. est même plus près des sociologues français que personne d?autre. D?abord, sur l'importance du symbole, fonds même de l'œuvre de M. C. ; – comme de celle de Durkheim et de la nôtre. C?est exclusivement à ce point de vue qu?il étudie le mythe, comme il a étudié la langue – où la chose est plus facile – comme sans doute il étudiera l'art, et nous l'espérons et il nous le promet, et où il se trouvera plus à son aise. Certes il ne semble pas avoir ni accepté ni peut-être compris ce moment de la déduction de Durkheim où celui-ci pense expliquer pourquoi c?est par le symbole que l'humanité a dû commencer à penser, parce qu?un groupe d?hommes ne pouvait communiquer que par ce moyen, communier en lui et croire ainsi à une réalité dépassant le niveau sensoriel. De même la discussion (p. 239) de la théorie de Durkheim de l'importance du totémisme est faible. Enfin, au fond, l'argument que loin d?être un effet de la structure sociale le totem et en général le symbole religieux sont des conditions de ce groupement (p. 238), à notre avis, porte mal. Les mots effets et conditions, logiques, décrivent fort approximativement, même quand Durkheim les emploie, les enchaînements. Puisqu?il trouve partiale et exclusive la théorie de Durkheim, M. C. eût peut-être bien fait de dire ce qui « fonde » le mythe. On ne peut considérer comme une réponse la brillante dissertation (III, III, Culte et Sacrifice [6]) sur les rapports entre le mythe et le rite (en particulier le Sacrifice, la Prière) sur l'abîme que la conscience mythique crée entre Dieu et l'homme pour pouvoir le combler (cf. p. 305 sq.) l'intéressante analyse de la mythique – destruction de la mythologie « sensorielle »). Et généralement c?est sur une sorte d?impression décevante que nous quittons ce livre intéressant, aussi peu explicatif que satisfaisant en ce qu?il décrit.

12On y trouvera en particulier une partie excellente, un peu philosophique encore, mais en une matière qui ne peut pas ne pas être telle, et où il a naturellement déployé ses talents. Il s?agit de l'origine des catégories, des « formes de l'intuition mythique » ou, si l'on veut (sections 2 et 3) [7] – M. C. s?exprime des deux façons – « du mythe comme forme de l'intuition ». Comme nous il voit dans les catégories des symboles, et non pas seulement des « formes » logiques, ou même « esthétiques » (comme dirait Emmanuel Kant ) de la sensation. Et, comme nous il croit que c?est, avant toute expression, dans les religions et le mythe que ces catégories se sont établies, ont été inventées, pour préformer ensuite les jugements, la façon de sentir et même de voir le monde, et l'art, et même la technique (cf. p. IX). – Enfin, comme nous encore plus que comme M. Lévy-Bruhl qui analyse plutôt des formes générales de mentalité, il procède (cf. l'analyse de la « causalité mythique » dans Die Begriffsform im mythischen Denken) par analyse de catégories définies ; trois objectives : espace, temps, nombre ; une subjective, le « moi et l'âme ». Celle du nombre est particulièrement recommandable. Elles sont toutes excellentes là où M. C. entre sur le terrain de la philosophie, grecque surtout. On ne pourrait critiquer à ce propos que son interprétation de [...], mais généralement les [...] excursions hors du domaine occidental sont moins heureuses (par exemple zruvan et zruvannismus eussent pu être accordés et la transcription zruvanacarana est inutile et dangereuse ; voilà pour le parsisme. Voici maintenant pour l'Inde. Le tanu n?est pas l'essence, mais le corps, la matière (p. 72 [8]) pour la Chine, l'analyse de l'analyse que Jan Jakob Maria de Groot a donné du tao chinois manque complètement de sens philologique [9]. Ce sont là les petits inconvénients de ces synthèses bâties sur d?autres synthèses. Mais tout est intelligent et clair dans ce livre, même quand c?est trop clair. En tout cas, sur le point essentiel, M. C. a fait la même observation que nous. Il part de la division des nombres et des espaces et des temps en sacré et en profane. Et au bout de cette philosophie de l'histoire de ces notions il retrouve le même principe (p. 166, p. 319). Cette adhésion nous est très précieuse. Simplement, nous allons plus loin que lui et derrière ces idées nous voyons les groupes assemblés pour leurs fêtes, leurs rites, le rythme de leur vie.

13Nous aimons moins, sans pouvoir bien expliquer pourquoi, toute la partie consacrée à la catégorie subjective du « moi » (III, 1 et 2 [10]). Elle est pourtant traitée comme les précédentes, strictement concrète, historique, comparative, évolutive. Elle comprend elle aussi d?intéressantes et neuves remarques d?histoire de la philosophie, en partie grecque, sur la notion d?âme en particulier et que nous employons. Elle part du principe que M. Henri Hubert a souvent exprimé, et particulièrement ici. M. C. le formule un peu autrement mais c?est bien le même ! Ni la notion du moi ni celle d?un monde fantastique et animé ne sont la cause mais sont l'effet du besoin de se représenter en même temps sous le même aspect, en confusion et cependant en opposition et le moi et les choses. Durkheim avait encore mieux formulé les faits dans son analyse, aussi profonde que peu comprise de la catégorie de totalité. Enfin, la démonstration de M. C. arrive aussi à des conclusions acceptables : sur la façon parallèle dont, à partir de la notion d?un tout, mythiquement, c?est-à-dire à la fois matériellement et spirituellement conçu, le moi, les forces, les dieux, s?opposent et s?individualisent (p. 247, 253, 285). Elle traite ainsi d?une façon approximative mais intéressante la grande question de l'animation de la personne [...] mythique et expose bien en tout cas la nature symbolistique de ces procédés mentaux. Elle fait entrer en bonne ligne la question du totémisme [du mana]. Jusque-là nous suivons [...]. Malgré toutes ces qualités elle dévie [...]. Comme dans ses travaux précédents concernant le mythe, M. C. ne semble pas avoir en vue le sujet même du mythe mais celui d?une forme de la pensée, d?une « énergie singulière de l'esprit » (p. 289 [11]), productrice de [...] spéciaux. C?est donc – à partir de faits – certes une question exclusivement philosophique pure, qui est posée et non celle du mythe, de la croyance, de la science qu?il comporte, des choses qu?il représente. C?est une réponse exclusivement philosophique, sur la valeur du signe (p. 315 sq.), de l'allégorie qui y est donnée.

14Et voilà, sans doute, où toutes les recherches si brillantes de M. C. nous déçoivent. À la rigueur nous comprenons leur portée psychologique et philosophique. Les touches de leibnizianisme (p. 317) de la conclusion rendent même une note séduisante. Mais à moins que les volumes suivants nous informent mieux, il nous est impossible de convenir que cette analyse soit complète. Ni les catégories de la pensée ne sont toutes étudiées, ni leurs valeurs parmi les représentations religieuses ne sont ici réellement « critiquées » ; ni le résultat du travail de l'esprit – auteur de ces critiques et cependant soumis à elles, quand il édifie les diverses représentations mythiques d?êtres naturels et de choses naturelles ou imaginaires n?est réellement apprécié.

15Enfin, la nature du mythe lui-même n?est pas vraiment étudiée. De la mythologie, des représentations religieuses et populaires, M. C. n?observe que ce que nous appelons, nous, les représentations d?êtres et de choses. Que celles-ci soient conçues comme des parties d?un tout également mythique, qu?elles ne puissent être séparées d?une histoire, d?un mythe [...] que celui-ci ne soit généralement qu?un agrégat de thèmes, qui a sa logique à soi, sa crédibilité à soi ; qu?il s?agrège à son tour généralement en cycles, en systèmes même bien coordonnés. Qu?il arrive à se « représenter » non seulement dans le rite et le mot, mais surtout dans le drame, l'art, et en particulier le symbole plastique (peint ou sculpté). Que ces symboles (M. C. les analysera sans doute à propos de l'art) soient ici dignes d?être étudiés, parce qu?ils ont une valeur d?objet, de force magique ou religieuse, et non seulement de forme, à l'[é]gal du mot et du nom ; que leurs échafaudages aient leur logique, leur loi si l'on veut, leurs correspondances souvent visibles avec les choses ou avec les choses sociales ou avec les deux. Voilà selon nous le problème du mythe dans son entier, et aussi dans sa spécificité ; c?est tout cela que nous sentons et qui fait que malgré nos accords avec M. C., malgré l'agrément que son livre nous procura comme à tout le monde, nous le fermons avec désillusion.

16Peut-être sommes-nous trop sociologues. Peut-être n?admettons-nous pas assez qu?il y ait « la » pensée, « l' » esprit. M. C. est sûrement très hégélien ; – peut-être dissolvons-nous trop cette entité. Entre les pensées individuelles de la psychologie et ces mêmes pensées travaillant en commun, il n?y a pour nous rien d?autre. Nous ne savons et nous [ne nous] préoccupons pas cette fois de la sociologie. Ce n?est pas nous qui sommes juge, nous sommes partie.

17Posons donc le débat. Nous ne voyons dans la critique répétée de M. C. aucune raison d?abandonner une méthode sociologique presque radicale, surtout en matière mythologique. Si le mythe ne représente pas exclusivement, d?une part, les choses y compris les divers états des corps et des esprits humains, objet naturel des préoccupations humaines, matière de la pensée, et d?autre part, l'état de ces consciences s?exerçant à penser en commun, que représente-t-il ? À cette question M. C. répond : une activité spéciale de l'esprit. Mais pourquoi cette activité est-elle spéciale ? Correspond-elle à une réalité spéciale ? Cette existence est le principe de toutes les théologies, et nous serions, pour nous si entichés de philosophie, sur ce point que nous préférons les théologies à une doctrine qui résoudrait tout en simples états de conscience propagés nous ne savons ni pourquoi ni comment. M. C. annonce que cette existence du mythique religieux trouve son application dans le symbolisme esthétique et dans la « force créatrice » de l'art. Nous attendrons cette déduction. Mais nous craignons les facultés de l'âme autant que la vertu dormitive. Et nous croyons encore que si l'homme a « créé », c?est parce qu?il vit en société.

18En tout cas, pour terminer, l'argument répété par deux fois, que les idées religieuses – et autres – sont non seulement des facta [Fakta] mais des factor ([Faktor], p. 246) ne nous émeut nullement. C?est le principe même de Durkheim que les phénomènes sociologiques sont en partie des états de conscience, et que ces états de conscience agissent à leur tour sur les masses des individus, sur leurs mouvements, etc. – Le grand différend entre M. C. et Durkheim, c?est que M. C., tout en se rendant à certaines évidences, et en employant au fond la même méthode, ne voit que l' « esprit ». Nous, nous voyons les esprits, les corps, les nombres des individus groupés – ils se sont certes groupés – aussi autour d?idées, mais leur groupement est le fait principal.

19La différence nous sépare d?ailleurs non seulement de M. C., mais même de toute philosophie. Il ne revoit que des couples là où nous voyons des choses, et des êtres, et des sociétés, [phrase incomplète, ajoutée, de la main de Mauss ].

20M. M.

III. ? Histoire des doctrines par M. P. Fauconnet

Charles Seignobos . — Histoire politique de l'Europe contemporaine. Évolution des partis et des formes politiques (1814-1914). — (1897), 7e éd. entièrement refondue, t. I, Paris, Colin, 1924, XIV-596 p., in-8o[12].

21L?édition de 1897 comptait 800 pages ; celle-ci en aura plus de 1 000 : un grand nombre de faits ont été ajoutés et le récit des événements poussé de 1896 à 1914. Il a donc fallu couper l'ouvrage en deux volumes. Sous ces réserves, le plan et la méthode de la première édition ont été conservés. Ce premier volume traite de l'histoire intérieure de l'Angleterre, de la France, des Pays-Bas, de la Suisse, de l'Espagne, de l'Italie, et de celle de l'Allemagne jusqu?en 1860.

22Nous ne saurions examiner ici les additions et modifications apportées par l'auteur à cet ouvrage célèbre. Mais une page de sa nouvelle préface nous concerne directement. J?ai voulu faire, dit M. Seignobos , une histoire explicative de l'évolution politique [13]. « Cette prétention m?a attiré de la part de sociologues le reproche... de m?être contenté d?explications superficielles qui ne remontaient pas jusqu?aux lois générales des phénomènes sociaux. » Répondant à ce reproche, M. S. formule de nouveau sa conception de l'histoire. Il ne cherche pas « l'espèce d?explication nécessaire pour satisfaire les philosophes ». La connaissance des sociétés n?est pas assez avancée pour se formuler en lois scientifiques générales. Expliquer, pour l'historien, c?est savoir comment chaque fait particulier a été amené par un autre fait. La succession des événements politiques est pour une partie seulement l'effet d?une évolution régulière explicable par des lois. Une partie importante résulte d?accidents dus au hasard. La vie politique consiste en phénomènes superficiels dont l'équilibre est si instable qu?un faible accident suffit pour le bouleverser. Et ces phénomènes superficiels dominent les phénomènes profonds de la vie économique, intellectuelle et sociale.

23P. F.

IV. ? Questions de méthodologie / A. ? La statistique par. MM. M. Halbwachs et M. Mauss / B. ? Méthode comparative et méthode historique

Friedrich Alverdes . — « Über vergleichende Soziologie » [Au-delà d?une sociologie comparative], Zeitschrift für Völkerpsychologie und Soziologie. — 1925, I, 1, p. 21-33. Du même auteur. — Tiersoziologie [Sociologie animale], Leipzig, C. L. Hirschfeld, « Forschungen zur Völkerpsychologie und Soziologie », vol. 1, édité par Richard Thurnwald , 1925, 155 p., in-8o, index, bibliogr. [14].

24Le premier répète en particulier à propos de la sociologie comparée des sociétés humaines et des sociétés animales les conclusions du chapitre « Biologie sociale de l'homme » dans sa [Tiersoziologie [15]]. Celle-ci est une sociologie animale générale – non pas spéciale, où chaque espèce sociale est traitée pour elle-même – mais générale en ce sens qu?elle ne considère que les diverses natures des rassemblements d?individus animaux qui méritent le nom de « sociétés » animales à distinguer des « associations ». M. Alverdes semble être fort au courant des questions concernant les sociétés animales – nous n?en sommes pas bon juge. Peut-être est-il psychologue avec excès, même en se défendant justement de toute interprétation anthropocentrique.

25En tout cas ce n?est pas à partir d?expression comme celle de « mariage » parmi les animaux et de classifications de ces mariages, d? « inceste » chez les singes supérieurs et le porc, qu?on fera du bon travail.

26Ces études sont cependant utiles. La conclusion que M. A. présente en faveur d?une sociologie animale et humaine comparée ne nous semble pas faite pour avancer les études bien grandement. C?est que la sociologie générale ainsi entendue n?arrive qu?à des truismes ou à des hypothèses, et part d?hypothèses : « le chant de l'oiseau exprime une tendresse héréditaire », nous le voulons bien ; comme on peut et il peut le perfectionner. Les modes en sont « traditionnels » – déjà l'expression est criti[qu]able pour un « behaviouriste » conséquent. En quoi ceci instruit sur la nature de la vie sociale c?est ce qui est peu clair. Qu?elle plonge dans l'instinct nécessairement c?est ce qui est vrai autant et non pas moins comme le veut M. A. de l'espèce humaine que des autres espèces sociales. L?homme a superposé une vie sociale volontaire et traditionnelle considérable à une vie instinctive sociale – également et non inégalement considérable (Zeit., p. 32, 33). Mais, franchement, quand on a constaté cela, qui est l'évidence, on n?a fait que de la psychologie, on n?a expliqué que le « possible » dans la vie sociale. Et Durkheim a donné de la « nécessité » de certaines formes de la vie sociale, en particulier de la vie religieuse, une démonstration que M. A. eût gagné à connaître et à ne pas défigurer.

27Ce qu?une bonne sociologie animale, exclusivement objective, apportera un jour à une sociologie humaine, c?est la notion précise de ce qu?est un comportement réciproque, et une idée de l'action simultanée et de la réaction, et à partir de là, peut-être par hypothèses cette fois – une idée de la nature des modifications que la vie permanente en commun apporte à l'instinct, et par inférence seconde cette fois –, au sentiment et à la conscience.

28M. M.

V. — Civilisation. Histoire et philosophie de la civilisation / A. — Philosophie de la civilisation / B. — Théorie de la civilisation et types de civilisation / par MM. H. Hubert et M. Mauss

Ellsworth Huntington . — Civilization and Climate (1915) (3e éd., réécrite et augmentée de nombreux chapitres), New Haven, Yale University Press, 1924. 453 p., in-8o, index [16].

29M. Huntington est l'homme d?une idée : celle du rapport entre la civilisation, l'histoire humaine et le climat, et d?une preuve celle de l'effacité de ce qu?il appelle les « pulsations » du climat [pulsatory hypothesis], les changements historiques du climat, les déplacements d?humanité et les variations de civilisation. Compte a été rendu ici de ses premiers livres sur ces questions (L?Année sociologique, vol. [XII], 1913, p. 820 sq. [17]). Nous sommes relativement d?accord avec lui sur l'idée et sur certaines des preuves.

30À cette idée fondamentale, M. H. a ajouté une nouvelle considération, celle de la race, elle aus[s]i influencée par les variations du climat. Il a exposé cette nouvelle pièce de théorie et l'a séparée de cette présente édition et de la première édition de Civilization and Climate. Puis il en a fait un livre à part dans son Character of Races (New York, 1924 [18]), que nous nous excusons d?avoir laissé échapper. Il faut préciser que M. H. est un des partisans de la théorie raciste et croit à l'existence en particulier de la « race » nordique (germano-britannique) et de son élection. Il ajoute simplement à ces idées courantes que la race élue s?est développée dans le meilleur climat et dans les meilleures conjonctures pour être obligée par les variations de ce climat lui-même, à se perfectionner en même temps qu?elle perfectionnait sa culture. Car M. H. croit avoir démontré plus généralement que la situation naturelle de l'homme a été de tout temps conditionnée par le climat et ses variations.

31Nous ne nous occuperons pas davantage de cette partie de la théorie. Il est clair que l'une des conditions du progrès humain est celle du progrès des races humaines. Mais il [est] non moins certain que l'on sait très peu et encore moins ce qu?est le progrès d?une race et encore moins ce que c?est que la sélection humaine, car l'homme qui a su sélectionner plantes et animaux, et même constituer de nouvelles espèces, n?a évidemment jamais su que se sélectionner à rebours, soit par métissage excessif, soit par endogamie excessive, soit par des procédés encore plus stupides, comme la guerre, qui élimine les meilleurs. Nous ne pouvons cependant qu?admettre avec M. H. que la race, fait biologique, est comme tout fait de vie matérielle conditionné avant tout par le milieu, et dans ce milieu par le climat, facteur dominant. M. H. n?est d?ailleurs pas très fixé sur les frontières de sa [vie matérielle], ni même sur la nature de ces faits : vitalité, race, civilisation.

32Il est très remarquable que ce soit dans ce livre, Civilization and Climate, et non pas dans l'autre, Character of Races, que M. H. examine le problème des rapports de la santé, de la maladie et de la mortalité avec la pureté de l'atmosphère, les variations, l'humidité, les variations de température, et l'ensemble des trois caractéristiques choisies (p. 195) de ce qu?on appelle le temps (VII, VIII, IX). Tous ces chapitres, nouveaux dans cette édition et fort intéressants, servent, il est vrai, à déterminer le climat idéal (p. 363) pour le développement des sociétés et de la civilisation, climat qui se trouve naturellement en Europe occidentale et au nord des États-Unis. Mais passons et venons à la méthode. Cet emploi de bons documents rend sensible cette confusion qui généralement règle les rapports entre temps du biologue [et temps] du sociologue que le géographe établit : la mortalité, etc., sont des faits biologiques qui peuvent se cartographier et ainsi se placer le long des isobares ou des isothermes ; ce ne sont pas des faits géographiques pour autant. Et d?autre part, les statistiques que M. H. apporte, certaines inédites, sont toutes celles, de [...] (pour la bonne raison qu?il n?y en a pas d?autres). Or, la ville est aussi un phénomène qui peut se cartographier, mais qui est avant tout un phénomène social. La géographie, entendue à la façon de M. Huntington , est donc bien envahissante pour toutes les sciences voisines : biométrique ou démographique, peu importe. Cet envahissement aboutit d?ailleurs à vicier la géographie elle-même. M. H. emploie donc des méthodes que le démographe ou le biométricien n?emploieraient pas. Vérité statistique bien connue – la dépendance et l'indépendance de deux faits s?éta[b]lissent autrement que par des coïncidences de courbes établies comme celles de M. H. Celles-ci ne donnent que de faibles probabilités. La géographie ainsi entendue n?arrive donc même pas à isoler le facteur climat et encore moins son influence. Ce qui est regrettable car, justement sur ce point, les sociologues sont d?accord non seulement en principe, mais en fait, avec les géographes. Ils ont depuis longtemps fait des remarques (par exemple Durkheim sur le suicide et son rapport avec les saisons) du genre que les géographes trouvent désirables. Et les biométriciens le sont aussi. Seulement, les uns voient avec précision les rapports entre un phénomène social et une longueur de journée ou autre fait physique, les autres entre ces mêmes faits et un fait biologique – même les hygiénistes n?oublient pas que la mortalité est fonction de l'hygiène, et de la science, faits sociaux. La géographie de M. H. est moins précise que la sociologie ou la simple statistique biométrique.

33Les vices de cette méthode qui prétend isoler un phénomène sans essayer de voir si cet isolement est certain sont plus évidents quand il s?agit non plus de biogéographie, mais de sociologie proprement dite. La faute est alors plus grave. Lorsque le phénomène est l'un des plus complexes qui soient en sociologie, parce que c?est même plus qu?un fait, que c?est un groupe de faits, ce groupe encore mal défini que l'on enten[d] par civilisation ; groupe qui est en tout cas, si l'on peut dire, social par excellence et même, si l'on veut, social à la dernière puissance, car il dépasse même la limite des sociétés, car il est une synthèse de phénomènes sociaux, et même le mouvement de ce groupe, puisqu?il est synonyme de progrès social et de progrès tout court. Alors nous retombons avec M. H. dans la pure approximation, que dire – la pure opinion. En effet, ce qui est en question c?est ce que M. H. prend comme donnée, que la civilisation, c?est la civilisation occidentale, euro-américaine, que son centre est actuellement dans les États du nord-est des États-Unis et dans le Nord-Ouest européen. ([L]e Midi de la France a même, d?après M. H., un indice inférieur à 100 qu?obtient une partie du Nord.) Les civilisations ce sont surtout celles qui lui ont donné naissance. Et l'analyse de la civilisation, la cote donnée aux diverses civilisations en arrivent à friser le procédé, l'enquête, et encore pis que le problème, le comique. Il est bien de recueillir l'avis de M. H. Tan Kate (anthropologue somatologiste, qui a assez voyagé, mais est hors de son affaire ; le reproduire sous forme de tableau pendant trois éditions (p. [252] [19]) est erreur persévérante. Les Français du Nord n?ont que le coefficient 2 sur 10 en honnêteté et 4 en « sens de la beauté naturelle ». Les opinions de 50 auteurs fort savants ne sont pas plus intéressantes, et la mesure du jugement d?anthropologues, de géographes et de journalistes de notre petit monde à nous. Et la cartographie de cette opinion est encore plus illusoire. À l'embouchure du [Canada [20]] il y a une civilisation qui a la cote 18/100, et le désert du Nouveau-Mexique a la côte 73. Quand ce sont celles de M. H. qu?il « visualise » et cartographie, elles sont moins absurdes (fig. 44, p. 295). Cependant aucun ethnographe n?admet que Bornéo et Java soient peuplés de populations plus « basses » que l'Australie centrale. Et aucun historien ne peut considérer les répertoires de gens connus, les who is who américains comme le bon critère de [...] des individus. Cette enquête de M. Scott Nearing [21], comme celles que l'on a publiées depuis en France et ailleurs sont du pur journalisme.

34Cependant, là aussi, c?est dommage de ne pouvoir s?entendre avec M. H. Deux de ses principes sont justes. D?abord il y a évidemment des conditions optima de vie pour des races déterminées sous des climats déterminés, pour des races d?hommes déterminées avec leur civilisation déterminée. Il ne reste qu?à les démontrer. En second lieu, que le climat ait changé non seulement suivant les époques, mais encore suivant les régions, c?est ce que savent depuis longtemps paléontologues et préhistoriens, et M. H. se défend assez élégamment contre les critiques auxquelles sa théorie des « pulsations » a été soumise (chap. XV, nouveau) mais qui n?ajoute rien aux précédentes éditions). Ces déplacements des centres d?humidité et sécheresse et de ce que M. H. appelle maintenant, de façon plus [...] (cf. p. 364), « centres de tempestuosité », storminess, ont sûrement commandé, à l'époque historique comme à l'époque préhistorique, de grands déplacements humains. Ceux du désert turco-mongol à l'époque historique et du Sahara à l'époque du néolithique supérieur sont trop évidents pour pouvoir être niés. Même si rien ne prouve que les alternances de croissance des grands arbres californiens ou de salure de certains lacs américains aient coïncidé avec les variations d?habitabilité de l'Asie ou de l'Afrique – comme le veut M. H. –, il a cependant le droit de supposer que des phénomènes de ce genre se sont produits ici comme là. Même à l'époque historique le climat et l'homme ont varié, et nécessairement le climat a fait varier l'homme.

35M. H. n?a pas de peine à répondre à ceux de ses critiques (chap. XVII) qui ont opposé à sa théorie générale le fait de l'Australie et de l'Amérique Blanche contrastant avec celles des Noirs ou des Rouges. Cependant tous ses arguments ne sont pas excellents, comme quand il dit de l'ancien Pérou qu?il n?atteignit pas une haute civilisation, ni ne s?étendit pas bien loin. Par contre les quelques pages nouvelles qu?il consacre aux raisons pour lesquelles l' « Australie Blanche » ne se développe pas dans le « Territoire Nord » sont d?assez bonne démographie.

36Cependant avant de juger complètement l'œuvre longue et tenace de M. H. il faut attendre. Des trois « facteurs » de la « civilisation » (admettons un instant cette étrange nomenclature), le climat, la race et la culture (distinct de la civilisation), M. H. n?en a étudié que les deux premiers, matériels. Il serait injuste de dire qu?il leur fait la part trop belle et qu?il ne se fait pas idée de l'importance du troisième : « culture ». Il se contente de référer sur ce point (p. 369) aux travaux de M. Clark Wissler dont nous avons parlé [22]. Peut-être n?est-ce pas son sujet. Cependant c?est là que le désaccord entre sociologues et géographes doit se définir. M. H. croit à des actions directes du climat. [N]ous, nous croyons à ces actions sur des sociétés définies, composées de races plus ou moins pur[e]s, mais surtout dotées d?une technique qui les ajuste au sol et les en rend plus ou moins dépendantes, plus ou moins maîtresses aussi depuis l'agriculture et l'échange, et surtout depuis l'industrie et la science, qui vainquent, par exemple, ici la maladie, là, les distances. En particulier, M. H. fait bon marché de toute action de l'homme sur le sol ; et écarte par exemple bien aisément (p. 366) l'influence des [migrations ?], le problème n?est pas tranché. Des faits actuels et observables et considérables, sur l'extension du pâturage et de la forêt, et de la mouche tsé-tsé et de la maladie du sommeil peuvent aider à comprendre d?autres faits. Les sociétés humaines ne sont sur ce point, au-dessus et au-dessous des sociétés animales : elles véhiculent ou suivent leurs plantes, leurs animaux, leurs industries ; elles véhiculent aussi leurs folies, leurs pestes et leurs parasites dont elles sont plus ou moins responsables, et leurs destructions, comme leurs cultures (au sens propre du mot). Entre l'homme et l'animal, il y a les sociétés, moyen terme essentiel que le géographe oublie, même M. H., historien compétent.

37M. M.

C. ? Civilisation préhistorique / D. ? Ethnologie et Civilisations inférieures

Walter Edmund Roth . — « An introductory study of the arts, crafts, and customs of the Guiana Indians », Thirty Eighth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1916-1917, Washington Government Printing Office, 1924 (paru en 1925) p. 23-743, in-4o, index [23].

38M. Roth , qui fut ethnologiste de l'État du Queensland et dont nous avons utilisé les travaux sur les Australiens, est passé en 1907 au service du gouvernement de la Guyane anglaise, et publie, dans les Collections du Bureau d?Ethnologie américaine une monographie fort complète des Indiens de toutes les Guyanes. Même il entend par Guyane, outre ce que l'on appelle ainsi, une région assez vaste comprenant une partie du Brésil N. et du Venezuela S.-E. Au fond il s?a[g]it d?une partie importante des deux familles de peuples Arawak et Caraïbe. Même, avec raison selon nous, M. R. fait entrer assez souvent en compte les antiquités Antillaises.

39Le travail est purement descriptif et dans la mesure où il est comparatif, il se borne à établir des séries, des types, afin d?apercevoir des points d?origine, et des points d?aboutissement. À ce point de vue il est aussi complet que possible. L?auteur n?a pas poursuivi, pendant la guerre, ses études dans les musées d?Europe où l'on trouve tant d?objets désormais introuvables sur place.

40Il faut joindre ce travail à celui de M. R. consacré (Thirtieth Annual Report of the Bureau of American Ethnology) à l'Animisme et au Folklore [24].

41On ne comprend pas très bien pourquoi c?est ici et non dans le premier volume que M. R. a considéré les phénomènes juridiques et moraux : règles de conduite, crime et punition, suicides, moyens de propriété (chap. XXVI) ; salutations (XXXI) ; le mariage, la polygamie, le divorce (XXXIV) et la division du travail technique par sexe. Tout cela est bien sommaire ; par exemple, de quel genre sont les cousins germains qui se marient entre eux, ceux de toute souche (p. 671-672). Le traitement des enfants est mieux étudié – du côté pratique (XXXV [25]). Et on ne s?explique même plus du tout pourquoi le traitement des morts, les rites funéraires et le deuil sont séparés de l'animisme ([XXXIII]). Le plan suivi est le même que dans le précédent voyage, une compilation assez complète, extraits de nombreux documents rangés par tribus ; les seules observations inédites étant celles que M. R. a faites pour la plupart chez les Pomerson (Caraïbe). Mais il ne faut pas dédaigner ce genre de travaux. Il était bon de ressortir la citation de Frederik Paul Penard sur la couvade chez les Caraïbes de Surinam (p. 696 [26]) et sur la façon dont elle dépend des notions concernant la naissance : l'esprit fourni par la mère, le corps fourni par la mère. La seule chose qu?il y faut regretter c?est le désordre, commun d?ailleurs à tous les travaux de M. R., les répétitions forcées, les découpures des phénomènes entre de nombreuses sections dispersées de vastes livres. L?étiquette au repas est encastrée dans l'industrie alimentaire (XV). Les usages de la guerre et de la paix se trouvent aussi dans ce livre, comme une partie de la science connaissance du temps et nombres (XXXVII), mais il faut convenir que nous ne saurions les classer beaucoup mieux. Par contre (XXXVII [27]), le commerce et l'échange sont placés au petit bonheur.

42Mais ce n?est pas là le principal objet : ce sont les métiers, arts, jeux et beaux-arts – en somme une technologie et une esthétique.

43Nous préférons décidément M. R. technologiste, collectionneur et classeur d?objets, musicographe, à l'autre M. R. Sans dire que cette monographie, de l'industrie et de ses produits, de l'art et des jeux de ces Caraïbes et de ces Arawak, soit un modèle parfait, à bien des propos c?est un exemple à suivre. Soignée, [...] aussi approfondie, aussi complète que possible, comparative généralement, voilà pour ce qui en fait la valeur d?instruction. L?étude des outils primitifs (chap. I [28]) est particulièrement heureuse, la quantité d?instruments primitifs qui existent encore avec les autres plus évolués est simplement étonnante. Celle de la corderie (III-IV) et du filet (hama[c]) (XIX [29]), généralement négligée par les ethnographes, est en tous points ingénieuse ; l'art de tisser reste primitif et miniaturesque – comme ailleurs en Amérique du Sud (p. 109, 110). La vannerie aussi est analysée à fond. Elle est malheureusement répartie en deux chapitres (IX et XVIII [30]) (Instruments domestiques p. [273]-377), mais l'extrême soin de l'analyse et la façon dont alternent figures et texte est vraiment heureuse. L?art de construire a sûrement dégénéré, mais a pu être encore bien décrit, surtout la grande maison carrée. La poterie, faute de matériel sans doute, est bien moins intéressante (p. 306 sq. [31] - 130 sq. [32]).

44M. R. suit ensui[t]e la division allemande classique des industries et en particulier celle de l'alimentation. C?est là qu?on trouve, un peu mêlée à cette description des aliments, boissons, de leur préparation, une description de la chasse, de la pêche, des pièges, des armes, etc.

45La dernière partie du livre consacrée aux objets et faits de nature esthétique nous paraît bien conçue. Les « jeux, sports et amusements » (nous dirions jeux tout court), ceux des enfants en particulier (XXII), et surtout les jeux de ficelle (XXIV [33]), dont M. R. est un des spécialistes les plus autorisés (p. 500 sq.), sont fort bien étudiés. Mais pourquoi séparer les uns des autres ? Et surtout pourquoi y mélanger la danse qui est un art ? (p. 470 sq.) et le plus souvent, un rite, une fête. L?une des principales lacunes du livre concerne la musique qui n?est pas étudiée en elle-même, mais par rapport aux instruments musicaux (XXII). Par exemple ceux-ci sont décrits avec tous les détails nécessaires ; l'ornementation (XXI) depuis les déformations corporelles jusqu?à l'admirable ars plumaria (cf. aussi p. 122 sq.) et au vêtement et aux perles (V) est aussi systématiquement décrite [34].

46Il faut prendre tout ce vaste travail pour ce qu?il est ; un très utile répertoire de faits. Il a tous les avantages et tous les désavantages des travaux de pure description. À ces deux volumes il n?y a pas de conclusion, ni de détail ni de principe. Même lorsque des séries sont établies, souvent fort heureusement, en matière technologique en particulier, on chercherait vainement un mot de théorie, soit technique, soit même historique. Même l'auteur ne fait pas l'observation fondamentale de la parfaite unité de ces deux civilisations Arawak et Caraïbe. Elle s?impose cependant, encore plus après cet ouvrage qu?avant. La dégager n?eût pas été dépasser les limites de l'observation.

47C?est surtout par le détail que vaut l'ouvrage. Des études généralement manquées sont faites ici : les colles (p. 80 sq.), les narcotiques et stimulants (XV[I [35]]), les épices (XIII), les gravures et peintures sur bois (p. 604 sq. [36]). De plus, certains états modernes de l'industrie (métaux, etc.) sont bien observés. Les fautes sont rares et peu graves. Signalons-en deux un peu choquantes pour un Français. Cayenn[e] veut dire d?un bout à l'autre dans ce livre : la Guyane française tout entière ; et le nom de Crevaux porte partout (sauf dans la bibliographie) un accent de trop.

48M. M.

William Halse Rivers . — Social Organization, Londres, Kegan Paul, « History of Civilization », 1924, XIV-226 p., in-8o, index [37].

49M. Rivers considérait ce travail comme sa meilleure contribution à l'ethnologie (Conflict and Dream, p. 133 [38]). Il le répéta deux fois en cours, projetant de le revoir et de le compléter quand il mourut. M. William James Perry l'a édité, et l'a complété de notes, de corrections et quelquefois de simples additions, ex. p. 41, p. 33. Il forme maintenant le premier des volumes par lesquels s?ouvre, l' « Histoire de la civilisation anglaise », collection que dirige M. Charles Kay Ogden et qui comprend, outre des volumes originaux, la traduction des volumes publiés par M. Henri Berr dans la série de l' « Évolution de l'humanité ». Les chapitres II, III, IV, ont été en partie récrits. On y trouve en outre une réimpression de l' « Essai sur l'Origine des systèmes de la parenté classificatoire » [39], et une note sur les notes de M. Alfred Reginald Radcliffe-Brown concernant l'organisation australienne. En plus deux notes de M. W. J. Perry dont la première reprend simplement ses propres théories telles qu?elles ont été exposées dans Children of the Sun [40], et que nous avons critiquées l'an dernier [41], et une autre assez curieuse et fort hypothétique sur le mariage entre parents dans la Bible (p. 217 sq.).

50Nous ne nous occuperons que du travail de M. R. Il ne se ressent pas trop de ses théories historiques, de la « diffusion de civilisation ». Mais une rédaction définitive eût peut-être accentué le rapprochement que M. Grafton Elliot Smith affirme (Préface). Il s?affirmait déjà suffisamment dans l'History of the Melanesian Society [42] pour que nous puissions en croire M. G. E. Smith.

51Le livre est exclusivement consacré à l'étude des sociétés Tribes [43] (voir cependant, p. 5, 154, 166, etc.) et spécialement à l'organisation domestique, et à ses effets sur l'organisation politique et la propriété entre autres. Cette division du problème est contestable. M. R. n?a pas suffisamment senti que dans les sociétés qu?il étudiait le clan et la famille étaient non seulement des organes de la vie domestique, mais aussi de la vie politique, et que sa division du politique et du domestique (p. 6-7,) était trop tranchée. C?est ainsi que dans son chapitre sur les Fraternities and Secret Societies (p. [121] sq.), il n?a pas fait l'effort nécessaire pour démontrer les relations entre la parenté et les initiations dans les diverses sociétés secrètes (p. 135). Le fait que les rangs, en Mélanésie, comme en Nord-Ouest américain, se transmettent dans des cerc[l]es de famille déterminés est probant, et il y a plus qu?un « grain de vérité » dans une théorie de ce genre. Mais ce fait n?est pas un effet. Il est une cause. Les chapitres intitulés Occupation, Classe, et caste (VIII) Gouvernement (IX) posent d?autres questions, où cet oubli est moins sensible, et on fera bien d?utiliser ces clairs chapitres qui concernent d?ailleurs plutôt l'évolution que les formes élémentaires de l'organisation sociale.

52Reste la théorie de la parenté et du mariage que propose M. R., et dont ses exécuteurs testamentaires ont bien fait de nous donner ce précieux aperçu, plus complet que Kinship and Social Organization [44] qui n?en est qu?une première esquisse, et que l'Essai sur les « Origines de la parenté ?classificatoire? » (Anthropological Essays presented to E. B. Tylor [45]).

53Il s?agit là d?un problème qui tenait infiniment au cœur de Durkheim , sur lequel il avait produit de nombreux mémoires et comptes rendus (nous comprenons que Rivers ne les ait pas cités dans ses notes – mais nous ne comprenons pas que ses éditeurs ne les aient pas mentionnés) que M. R. avait parfaitement connus et utilisés.

54Viennent d?abord des définitions en série : d?une part le groupement naturel, la famille (proprement dite ascendante, descendante) et ses différentes formes et le lien de droit (Kinship) qui unit les parents ; (descendance unilatérale ou bilatérale (kindred) – puis les social groupings : clan, moitié, tribus. Un certain nombre de ces définitions s?accordent avec la nomenclature usitée ici par Durkheim , et l'opposition entre la parenté de fait et la parenté de droit y est marquée comme Durkheim l'a toujours proposé. Nous ne les discuterions même pas si sur un point grave, par une pétition de principe, la définition ne préjugeait la solution : le clan et la moiety (ce que nous appelons la phratrie) sont séparés par définition même des autres groupements familiaux. Il n?y a dès lors rien d?étonnant qu?on ne retrouve pas la relation qui les unit tous. Ce défaut est sensible. Surtout la phratrie que M. R. erronément et arbitrairement, selon nous, a contribué plus que personne à isoler du clan [46]. L?erreur de nomenclature correspond ici d?ailleurs à une hypothèse, encore plus qu?à une simple faute de terminologie. Discutons la série d?hypothèses et de faits.

55Elle part justement de ce qui est en question, la distinction de la moitié, de l'organisation duelle (dual organization) et du clan. Pour M. R., comme pour Fritz Gräbner , et pour d?autres à leur suite, la division de certains peuples australiens et [m]élanésiens en deux moitiés exogames est un fait à part de l'exogamie de la famille proprement dite, ou de celle du clan. M. R. était très frappé de cas mélanésiens où l'une des « moitiés » est appelée l'étrangère, et la maritime (p. 28) à Fiji la « noble » (p. 30). On sait quelle a été son interprétation, poussée depuis à la limite par M. Perry (voir L?Année sociologique, nouvelle série, t. I, 1925, [p. 330 sq.]) de l'origine de ces deux moitiés : effets de la mixture de deux peuples (la discussion des deux phratries en Afrique (p. 29) est infiniment faible). La moitié n?est un clan que dans le cas de dégénérescence de tribus qui ont perdu tous leurs clans sauf deux (p. 31, Todas, etc.). L?exogamie familiale est un fait naturel ; la division en groupes exogamiques : moitié et clans est un fait purement social, et d?institution se diffusant suivant des lignes données. (M. R. n?a tout de même pas été aussi loin que MM. Smith et Perry, ou que M. Gräbner que le P. Wilhelm Schmidt .)

56Nous voulons convenir que la théorie de Durkheim (perfectionnée de celle de Charles Samuel Myers ) suivant laquelle les deux moitiés sont des phratries, et les restes des deux clans primaires entre lesquels se divisaient tribus [et] les biens, n?est qu?une hypothèse à faire à part. Les faits (Sizi [47], Australie) sur lesquels on s?était appuyé pour croire qu?il existait encore des sociétés réduites à ces deux clans se sont trouvés inexacts. De telle sorte que cette répartition élémentaire en clans n?est qu?une supposition de génitique logique. Mais l'autre enchaînement est encore plus en l'air. Nous ne trouvons presque pas de sociétés à « moitiés » où des clans ne soient répartis à leur intérieur ; et toutes les exceptions connues de nous peuvent être expliquées. Par conséquent isoler hypothétiquement clan de mo[i]tié est contraire au fait. Ensuite, M. R. en convient lui-même (p. 67) et s.), la parenté classificatoire (opposée à la famille), et qui ne l'est plus, n?est possible qu?à partir de cette division binaire. Donc, même pour lui, l'organisation de la parenté par clans est dérivée de celle des moitiés – ce qui est clair dans notre hypothèse, ex-clans primaires-phratries ; donc ici dans l'Année fidèles à la tradition de Durkheim qu?au fond, P[erry] on le voit, hésitait à abandonner.

57Non pas que nous niions qu?en aucun cas des phratries n?aient été produits de coalescence de groupes divers. Il faudrait ignorer tous les cas illustres de synécisme comme ceux de Rome, d?Athènes, où certaines tribus et phratries sont d?origines diverses, liées par la Cité ; – mais ce sont des faits tardifs et puisque ces groupes se sont encadrés précisément dans le système des phratries, c?est que celui-ci leur préexistait. Nous ne nions pas plus l'importance de la colonisation, en particulier de la prise des femmes des vaincus ; le nier serait oublier l'histoire des femmes de Milet, et le grand phénomène de deux langues masculine et féminine des Caraïbes – dont celle des femmes contient d?énormes éléments Arawak. – Le processus de fusion est aussi naturel en histoire sociale que celui de scissiparité. C?est même là une des caractéristiques fondamentales qui opposent les événements de l'histoire sociale aux lois de la sociologie, même à celles de la génération [postérieure] (laquelle fournit de nouveaux individus mais de la même espèce). – Mais si les fusions de sociétés sont normales toujours et explicatives souvent de phénomènes sociaux nouveaux, elles ne se présument pas plus que les évolutions. Ce sont choses qu?il faut qu?on prouve. Il n?y a pas d?évolution uniforme, c?est entendu. Mais l'histoire n?est pas non plus faite exclusivement d?emprunts, d?initiations, d?héritages.

58L?autre théorie que M. R. tendait à édifier, et qu?il commence à appliquer dans son « History of the Melanesian Society », n?est pas encore ici formulée à titre définitif. Cette théorie a été depuis développée avec intrépidité par M. Perry (App. III [48]). Celui-ci, à la suite de M. Elliot Smith, sait que tout cela a été propagé par les Égyptiens, à l'imitation de la division de l'Égypte en Haute et Basse. Nous en avons parlé au tome précédent de l'Année [49]. Elle ne porte pas. D?abord même en Mélanésie, l'hostilité des moitiés (phratries) n?exclut pas leur égalité (cf., p. 30, observation de M. Arthur Maurice Hocart sur le [vosa [50]] de Vanua L[evu)] [51]). D?autre part, dans un certain nombre de cas, on a confondu des sociétés à deux castes endogamiques avec des sociétés à deux phratries exogamiques c?est-à-dire s?entremariant. Mais M. R. n?a pas commis (p. 31) les fautes que son disciple a commises (et aggravées cf. p. 29 et n. 75, où la dual organization des Gallas et des Ovambi devient article de foi). Il a lui-même fait les distinctions nécessaires entre phratries, classes et castes (VIII). Quoique quelques-unes de ses interprétations de faits mélanésiens soient à discuter. Nous passerons donc, avec plus de raison encore, sur cette addition d?hypothèses à l'échafaudage. Elle n?est pas entièrement de M. R.

59Nous nous sommes arrêtés à cette théorie de la dual organization parce qu?elle est la nouveauté du livre et en constitue – à notre avis – celle dont le succès relatif a été le plus grand et le plus dangereux.

60Nous aurions bien des réserves de détail à faire, mais aussi bien des assentiments à donner à propos des chapitres consacrés au mariage (III et p. 77 sq.), aux systèmes de parenté (IV), à la descendance masculine et à la descendance utérine (V) où la distinction entre lignes de descendance, lignes d?héritage et lignes de dévolution d?autorité est assez heureusement exposé. Mais ce sont plutôt des leçons de cours que des travaux orignaux, et M. R. y est trop près des idées soutenues ici par Durkheim et nous pour que nous nous astreignons à les répéter. Nous ne mentionnons spécialement que la note (app. II, p. 195-201) où M. R. discute les premières publications de M. A. R. Radcliffe-Brown de documents sur la famille en Australie [52].

61M. M.

E. ? Grandes civilisations

Walter Addison Jayne . — The Healing Gods of Ancient Civilizations, New Haven, Yale University Press, 1925, XI-569 p., pl., in-8o, index, bibliogr. [53].

62Il ne faut voir en ce livre que ce qu?il veut être : un recueil de faits ; ou plutôt même un recueil non pas de sources et de textes, mais de ce que l'on sait ou croit savoir sur les dieux guérisseurs des anciennes religions de l'Orient classique et du monde indo-iranien : Égypte, Assyro-Babylonie, Inde védique, Iran de l'Aveste, Phénicie, Grèce, Rome, Peuples celtiques. C?est une sorte de répertoire composé avec quelques monographies, avec les meilleurs manuels de mythologie et travaux d?ensemble et plus souvent avec les encyclopédies.

63De plus, ce ne sont ni les rites ni les mythes de la guérison, mais les noms des dieux qui servent de rubriques aux paragraphes, que le dieu soit ou ne soit pas essentiellement un dieu de la guérison. Ainsi Apollon, dont le nom et le surnom et la fonction relèvent de la médecine, a à peine plus de place qu?Artémis, qui en a à peine plus qu?Athéna, tout simplement parce que celle-ci sauvait Athènes de la peste, et les enfants de Sparte du mal d?yeux. Seuls les rites des Asclepiades sont bien étudiés.

64C?est donc simplement un catalogue de dieux-médecins, catalogue fait avec une diligence, un zèle et une exactitude assez remarquable chez un médecin qui n?est philologue et archéologue qu?à intervalles (même les fautes de transcription ou d?impression sont assez rares (voir p. 297, un titre) et en général peu graves. Et les sources épigraphiques sont connue[s] et utilisées. Les monographies de détail ne sont pas toutes connues. Le catalogue des dieux n?est pas partout aussi complet que celui des dieux latins (p. 414 sq.) Ainsi celui des dieux de l'Inde est restreint à la série védique (sauf trois, p. 166) Cependant les illustrations se rapportent à la mythologie épique. Le catalogue des dieux celtiques a pour base la mauvaise Celtic Mythology de M. MacCulloc[h] [54]. Enfin, manquent les Germains – et si les Phéniciens et Sémites païens occidentaux sont considérés, la doctrine du mal physique et de sa cure, celle de l'[angélo]logie (Raphaël, etc.) des Juifs et des Hébreux l'eussent peut-être été avec utilité.

65Les faits mystiques, magiques et médicaux sont réunis par M. J. dans leur cadre. Malheureusement les tableaux qu?il donne de ces religions où ils prennent place sont enfantins.

66Il n?est pas possible de tirer de cette simple collection une doctrine. L?auteur s?exprime avec une certaine généralité. Il voit en tout ceci, comme Garrison [55], une preuve de l'unité de la solidité du « folklore », de la tradition humaine primitive (p. XXVII sq.). Mais ailleurs sur la médecine en Grèce et à Rome il a le juste sens et du point de départ (magico-religieux) (voir surtout p. 277 [56]) et du point d?arrivée scientifique, expérimental.

67On rencontre assez souvent des expressions médicales et théoriques, bien peu explicatives et bien peu utiles (par exemple emotional attraction, p. [389]), etc., qui déparent un livre où au moins le sens du concret domine.

68M. M.

Ada M. Goodrich-Freer (pseudonyme de Mrs Hans Henry Spoer). — Arabs in Tent and Town. An Intimate Account of the Family Life of the Arabs of Syria, their manner of Living in Desert and Town, their Hospitality Customs, & Mental Attitude, with a description of the Animal Birds, Flowers & Plants of their Country, New York, Londres, G. P. Putnam?s Sons, Seeley, Service & Co., 1924, 325 p., in-8o, index [57].

69Mrs Sp[o]er est l'auteur facile de plusieurs livres concernant les peuples de Syrie (par là elle entend tout le pays d?Alep à la mer Noire, et comprend sous ce nom la Palestine). Elle est la femme et la collaboratrice de M. H. H. Spoer, sémitisant connu. Elle a eu Habdid, l'un des Arabes savants les plus connus, comme collaborateur. Elle a elle-même sinon tout lu, du moins beaucoup lu, et intelligemment. Et son livre se compose en partie d?innombrables citations de toutes sortes, peu précises généralement (p. 501, 507). Elle écrit bien, et, membre distingué de la Folk-Lore Society [Londres] elle a depuis longtemps fait l'expérience du monde savant. Son livre est bien écrit, même malgré ses longueurs, comme tout ce qui touche les pays saints et comme tout ce qui est anecdotique plutôt qu?érudit, il a un réel succès. – Il n?est cependant nullement satisfaisant.

70Non qu?il ne contienne rien. C?est bien ce que l'auteur veut faire : une sorte de coutumier populaire, de folklore moral et technique des populations arabes, de ce territoire, tel qu?elle l'a constaté, ou l'a appris de toutes sortes de sources. Le livre est coupé en deux. XI chap. concernant (p. 223) la vie morale, et spécialement la vie domestique et matrimoniale (I-VI). Les autres concernant la propriété (XI) l'hospitalité, le pain et le café (VIII, IX, X) et le pèlerinage (VII). Ils sont intéressants et plein de faits et d?anecdotes, par exemple sur l'étiquette du café. Mais nulle part les faits ne sont profonds. L?un des chapitres qui ont le plus intéressé : « Au sujet du harem », ne contient que des banalités. Et si la question de la position des femmes arabes n?était assez bien reprise sous les rubriques « La Vie au village » et la « Vie au désert », on pourrait même la croire oubliée. Mais même alors, même le côté folklorique, par exemple celui de rites matrimoniaux (pl. [f ?]ace p. 28 [58]) est loin d?être suffisant dans un pays où leur valeur et leur nombre sont immenses – tous ces chapitres sont d?une valeur intermédiaire entre des articles de journaux et des articles d?une revue de Folk-Lore d?autrefois [59].

71La deuxième partie est consacrée à des problèmes moins difficiles : d?abord les animaux domestiques : le chameau (XIII), le cheval, l'âne et la mule (XIV) le chien et le chat (XVI) ; puis les oiseaux et bêtes rampantes (XV), les sauterelles à Jérusalem et au désert (XVII, XVIIII), puis les fleurs, les plantes et les arbres (XIX) et surtout l'olivier. – Si l'on y ajoute le chapitre intitulé « Temps » – (XII) on aura dans un certain désordre un assez bon calendrier populaire, un assez bon coutumier de l'élevage et de l'agriculture (manquent les animaux sauvages et les plantes non cultivées). Ces chapitres sont suffisamment ornés de dictons suffisamment commentés.

72[Manquent 2 pages dactylographiées].

73M. M.

VI. ? Race et Société par MM. M. Mauss et H. Hubert

Alfred Cort Haddon . — The Races of Man (1909), Cambridge, Cambridge University Press, 1924, V-184 p., petit in-8o, bibliogr., index [60].

74Le petit manuel de M. Haddon était épuisé depuis quelques années ; or il était l'un des meilleurs résumés des connaissances d?ethnographie somatologique que nous eussions. M. H. l'a mis à jour et considérablement enrichi. Nous le recommandons à l'usage des sociologues et des étudiants. M. H. y groupe maintenant davantage l'ethnographie préhistorique avec la contemporaine, il montre la succession et les mixtures successives de races sur les mêmes terrains, par exemple en Europe, en Asie occidentale. Il développe les dernières hypothèses sur l'importance du milieu physique et social dans la formation des races et, plutôt, dans l'établissement de tel ou tel caractère somatologique héréditaire ; et, avec intrépidité, déduit de tout cela une sorte de classification mi-taxinomique, mi-génétique de toutes les races humaines. Il est bon que, sur la fin de sa carrière, un savant comme M. H. expose ses hypothèses de travail, et ses idées de derrière la tête. Mais il ne faut les prendre que pour ce qu?il les dit.

75M. M.

Lothrop Stoddard . — Racial Realities in Europe [1881], Londres, Scribner, 1924, III-252 p., in-8 [61].

76Nous n?avons jamais opposé de fin de non-recevoir à l'anthroposociologie. Mieux encore, cette rubrique a tenu sa place dans les trois premiers volumes de L?Année sociologique et il n?a pas tenu à nous qu?elle ne la gardât pas dans les suivants. Nous n?avons jamais cessé de nous préoccuper des rapports du physiologique et du social. Nous n?avons jamais oublié qu?une société est un corps physique et que les sociétés diffèrent en composition anthropologique. Nous n?ignorons pas qu?il y a des races humaines et qu?il y en a d?inégalement douées. Nous admettons qu?elles aient des aptitudes sociales diverses et que celles-ci se reflètent dans la constitution et l'évolution des sociétés. Nous savons parfaitement que les sociétés humaines tiennent à leur type physique et nous comprenons fort bien que certaines prennent des mesures pour les protéger ; nous croyons même que les sociétés démocratiques ne doivent pas être à cet égard plus indifférentes que les sociétés aristocratiques. Nous savons qu?il y a des associations dangereuses, et des métissages néfastes ; nous savons aussi qu?il y a des croisements heureux et nécessaires. Bref nous reconnaissons à peu près tous les postulats d?un livre comme celui-ci. Toutefois les rapports du physiologique et du social nous paraissent complexes ou plutôt bilatéraux. Les sociétés sont des milieux aptes à modifier les types physiques et les races par croisement et par sélection. Or, de même que la grande variété des races d?animaux domestiques est le résultat de l'élevage, il y a lieu de penser que la plupart des races humaines se sont constituées et fixées dans la vie sociale. Il y a donc dans les rapports du physiologique et du social, action et réaction, influence des races sur les sociétés et constitution de races dans les sociétés. Cela dit nous pouvons en toute liberté dire ce que nous pensons du livre de M. Stoddard .

77C?est un brillant essai sur le passé et le présent des sociétés européennes fait du point de vue d?un Américain qui tient à justifier les lois américaines sur l'immigration. Trois races, ni plus ni moins, formeraient l'humanité européenne : races méditerranéennes et nordiques, dolichocéphales ; race alpine, brachycéphale. Les deux premières sont des races maîtresses, l'une précoce, d?esprit facile, douée pour les arts et les lettres, l'autre l'emportant par les aptitudes guerrières et politiques ; la troisième est une race de paysans, solide, attachée au sol, peu apte aux grandes constructions politiques, au total incurablement médiocre. La Grande-Bretagne peuplée de Méditerranéens à l'ouest, renforcés, régénérés par de grandes masses de Nordiques est le modèle des nations, créatrice d?empires, sage en politique, et destinée à surmonter les difficultés de l'heure présente. Les pays Scandinaves, la Suède surtout, sont le Paradis des Nordiques, promis économiquement et politiquement à un avenir de sage prospérité. La France plus qu?à moitié Alpine a été épuisée de sang bleu par la dernière guerre. L?Allemagne est la grande et déplorable conquête des Alpins : tenaces, durs à vivre et prompts à se substituer partout à l'élite nordique. L?Italie partagée en deux moitiés, méditerranéenne au sud de Rome, alpine au nord, peut compter sur le fort influx des Nordiques qu?elle a reçus à diverses reprises. L?Espagne est épuisée, le Portugal, victime d?un métissage négroïde. Tous les défauts et toutes les misères des Alpins éclatent chez les Slaves des Balkans, de l'ex-Autriche-Hongrie et de la Russie.

78M. S. est fort instruit. Il est généralement assez bien, mais toujours superficiellement informé sur le passé et le présent des peuples qu?il passe en revue. Son livre, en tout cas, n?est à aucun degré un livre de science, bien que le mot de science y résonne trop fièrement. C?est simplifier à l'excès le tableau anthropologique de l'Europe que de réduire à trois races ou de caractériser les races uniquement par l'indice céphalique et la couleur des cheveux. Il y a des brachycéphales blonds de grande taille dont l'aire de formation et d?extension coïncide avec celle de l'Homo nordicus. Le Gaulois du Capitole et quelques autres faits prouvent qu?une partie des Celtes (M. S. les a oubliés) appartenaient à cette race. D?autres brachycéphales à cheveux bruns et de grande taille, au crâne élevé, ont vécu à côté des têtes rondes de la zône alpestre ; c?est la race dite dinarique, bien représentée dans les Balkans et en Asie Mineure, mais qui s?est avancée au début de l'âge de fer jusqu?à la Forêt-Noire. On a beaucoup parlé ces derniers temps d?une race de brachycéphales méditerranéens, qui auraient été les propagateurs du bronze et partis de la Méditerranée orientale auraient gagné la Grande-Bretagne ; les Skuspus en étaient et leurs descendants se distinguent encore des autres brachycéphales italiens. Produits de métissage ou de sélection peut-être, mais ni plus ni moins sans doute que l'Homo nordicus, en tout cas, produits stables ayant composé ou composant encore des groupes considérables, doués certainement d?aptitudes sociales particulières, très différentes chez le premier et le dernier de celles qui sont attribuées à l'Homo alpinus, et dont il faut tenir compte pour corriger les conclusions. À cette objection d?ordre général je n?en ajouterai que deux sur des points particuliers. Voici la première. M. S. décrit trop sommairement les effets du métissage servile dans l'Italie romaine. Il n?y eut pas seulement des esclaves levantins, mais des esclaves gaulois et germains, témoin la révolte servile et ses chefs. Or précisément la Sicile, d?où elle partit, ne représente pas seulement des éléments méditerranéens dégénérés et rabougris, mais une grande et forte race de paysans fort bien bâtis qui doivent peut-être autant aux esclaves nordiques qu?aux lointains Sicules, lesquels n?étaient pas des Méditerranéens. La seconde porte sur l'un des effets que M. S. attribue à la guerre. Elle aurait achevé l'épuisement en France et en Allemagne de la souche supérieure des hommes blonds. Sur quoi se fonde-t-il ? A-t-il des statistiques ? Ne sait-il pas que la mobilisation en France et en Allemagne a été universelle et qu?en France comme en Allemagne elle a écrémé particulièrement la campagne, dont les enfants n?avaient aucun prétexte à être mis à l'abri. Que valent les généralisations qui fourmillent dans le livre ?

79La description des aptitudes sociales des races concurrentes n?est pas plus sûre et présente de grosses contradictions. Par exemple, on peut s?étonner que les éminentes qualités politiques de l'Homo nordicus se soient manifestées si tard chez les Scandinaves et qu?elles diffèrent profondément de celles des Anglo-Saxons, les plus purs après eux. C?est sans doute que le facteur race n?est pas de nature à expliquer seul les formations politiques de l'Europe. Le plus grand nombre de ses États sont assurément des formations germaniques, c?est-à-dire nordiques, mais suivant des prototypes romains avec des idées latines et dans des cadres géographiques déjà compris par l'Empire romain. Là où manque le modèle a régné l'incertitude. Le facteur race ne résout pas tous les problèmes historiques. C?est un élément de la constitution des sociétés qui n?est pas nécessairement toujours l'élément directeur, quelque intérêt que les États puissent avoir à s?en préoccuper.

80H. H.

Henri Martin . — Recherches sur l'évolution du Moustérien dans le gisement de La Quina (Charente), vol. IV : L?enfant fossile de La Quina, Angoulême, Imprimerie ouvrière, 1926, 159 p., fig. [62].

81Cette description anatomique d?une formule encore unique (car, si l'on a déjà plusieurs crânes adultes de la race de Neanderthal, on n?a encore à étudier qu?un seul crâne d?enfant) n?est pas sans portée sociologique. Elle nous oblige en effet à rechercher l'origine des sociétés humaines au-delà de l'homme et à les enchaîner avec les sociétés animales. Mieux encore, en effet, que l'étude des crânes adultes d?hommes moustériens, celle du crâne d?enfant amène à séparer les nouveaux fossiles de l'espèce humaine, pour en faire une espèce préhumaine disparue. L?un des traits les plus intéressants que le docte Henri Martin poursuit entre l'enfant moustérien et celui de l'Homo sapiens est que le premier diffère peu du type adulte de sa race, tandis que l'autre en diffère très sensiblement. Il en conclut que la fixation des caractères de la race de Neanderthal remontait à une époque très reculée, beaucoup plus reculée que la fixation des caractères des races modernes qui doivent, pour lui, être encore un peu flottantes. Les anthroposociologues devraient prendre dans une pareille étude une bonne leçon de critique.

82H. H.

Deuxième section / Sociologie religieuse / I. ? Traités généraux, philosophie religieuse, psychologie religieuse, histoire des religions par MM. H. Hubert et M. Mauss

Oscar Montelius . — La Grèce préclassique, 1re partie, Stockholm, Kungl. Vitterhets-, Historie- och Antikvitets Akademien, 1924, 180 p., planches [63].

83Le grand préhistorien suédois Montelius , l'un des maîtres les moins contestés de l'archéologie moderne, a achevé sa carrière dans des travaux considérables. Il a ajouté un deuxième volume à ses Ältere Kulturperioden in Orient und Europa [64], où il avait exposé les principes de sa méthode chronologique fondée sur la classification technologique de séries d?objets employés parallèlement et le recoupement de séries constituées dans des régions différentes et de proche en proche sur la confrontation des civilisations sans histoire avec les civilisations à histoire de l'Afrique et de l'Asie orientale ; ce deuxième volume traite de Babylonie, de l'Élam et de l'Assyrie et constitue un exposé fort commode et remarquablement illustré de ces civilisations. L?ouvrage reste incomplet, car l'Égypte y manque. M. M. a laissé inachevé un gros ouvrage sur la Grèce antique, qui répondait aux mêmes desseins. La Crète, les îles Égéennes, la Grèce myciènienne ont été les intermédiaires de l'Europe et de l'Orient. La civilisation préhistorique de la Grèce antique dont il décrit la forme la plus septentrionale, la forme thessalienne, a eu des liens assez étroits avec celle de la Thrace, du Bas et du Moyen Danube. D?autre part la civilisation crétoise a eu des prolongements en Italie et en Sicile. Le monde antique n?était pas plus strictement compartimenté que le monde moderne. Des caboteurs longeaient ses côtes, des caravanes franchissaient ses cols. Le commerce de l'ambre, des coquilles, du métal a établi des rapports multiples entre ses façades opposées. Un premier volume était achevé, c?est celui qui nous est livré. Une dernière partie est au point, c?est la chronologie, chère avant tout au grand savant. Entre les deux les chapitres sur la civilisation et sur l'âge du fer présentent des lacunes qui seront comblées par ses élèves. Le présent volume traite des fouilles de Crète des Cyclades et du continent grec et de ce qu?elles ont donné jusqu?à l'âge du fer et c?est un compendium précieux, comme M. M. en a déjà donné pour l'Italie, qui vaut une bibliothèque.

84H. H.

Reallexikon der Vorgeschichte. Unter Mitwirkung zahlreicher Fachgelehrter herausgegeben von Max Ebert , Berlin, Walter de Gruyter, 1924-1926, vol. I-VII, 32 fasc. parus, in-4o[65].

85Nous aurions pu déjà parler l'an dernier de ce nouveau Reallexicon dont la publication se poursuit à grande vitesse. Six volumes sont complets. Le huitième est entamé et les derniers fascicules atteignent la lettre K. M. Max Ebert et ses collaborateurs ont de la préhistoire la conception la plus large. Elle embrasse presque toute l'archéologie antique, en tous cas celle de l'Orient. Peut-être l'Extrême-Orient et l'Amérique, encore sacrifiés, finiront-ils par y trouver une part égale. En tout cas, le sociologue a la sienne. On y trouve des articles Klan, Horde, Adel, Auslese, Brüderschaft, [Künstliche], Ehe, Erbe, Avunkulat, Frauenorganisationen, [Kriegerische], Gynocratie [Gynokratie], etc. Le plan n?est pas très bien arrêté. On y trouve des articles trop généraux avec des développements trop particuliers : Ausgrabungen, Fundstätten, [Reisen und Ausgrabungen im Nahem Orient], Fremdvölker. La direction ne paraît pas avoir dirigé le travail de ses collaborateurs. Les développements sont extrêmement inégaux. Il y a des répétitions dans un même article confié à plusieurs collaborateurs, comme l'article Kelten. L?article Frankreich, qui est un volume, est, à la fin, fâcheusement écourté. Bref, c?est un pot-pourri plein de bonnes choses. L?illustration est excellente.

86H. H.

Albert Kammerer . — Essai de l'Histoire antique d?Abyssinie. Le Roy aume d?Aksum et ses voisins d?Arabie et de Méroé, Paris, Paul Geuthner, 1926, 198 p. 45, pl., 4 cartes, 191 p., in-8o, index [66].

87M. A. Kammerer a consacré ses studieux loisirs de diplomate à étudier l'Histoire de la mer Rouge et de l'Abyssinie. Il s?est plu à condenser les matériaux de celle-ci. Comme il s?arrête bien avant l'an mille, il peut à très peu de chose près, faire abstraction de la littérature de langue abyssine. Restent les inscriptions, les urnes grecques, dont deux ont été copiées à Adulis par Cosmos Indicopleustès [Cosmas Indicopleuste], les autres en gheez*, des monnaies, des récits de voyages assez sommaires ou les résumés de récits perdus, des traditions rapportées par des auteurs arabes, des monuments de date problématique. M. K. encadre l'histoire antique de l'Abyssinie entre celle de l'Arabie méridionale et celle de la Nubie dont les contrecoups s?y succèdent. Mais quand on a fermé le livre surnage l'image de ces empires africains magnifiques et éphémères, dont l'Abyssinie est le seul qui ait su toujours renaître de ces cendres. Cette image s?impose à l'esprit avec d?autant plus de force que M. K. a terminé son livre par l'exposé des voyages du révérend père Azaïs dans la région des lacs de l'Abyssinie méridionale, juste à l'opposé d?Ax[o]um*, et qu?il l'a illustré en majeure partie par la photographie des monuments découverts, témoins d?une civilisation sans date et sans attache avec le présent.

88Le point de départ de l'histoire d?Abyssinie est en Arabie méridionale. De là vinrent à deux reprises les Habasat et les Gheez, qui restèrent à cheval sur le détroit de Bab-el-Mandeb et dont les factions s?attirèrent de l'un et de l'autre côté de la mer Rouge. La tradition dynastique des rois abyssins les fait remonter à la reine de Saba, mais aussi à Salomon. Il y eut des Juifs en Abyssinie, et même un État juif, qui a fini par disparaître ; aujourd?hui les Falachas juifs [67] sont disposés dans les communautés abyssines. Les historiens d?aujourd?hui pensent qu?un royaume militaire, ayant pour centre Axoum et Adulis pour débouché sur la mer Rouge, a dû exister dans le Ier siècle avant notre ère et faire à cette date une expédition dans l'Arabie méridionale qui n?est pas sans relation avec l'expédition d?Aelius Gallus, préfet d?Égypte, qui prit la suite des Ptolémées dans la politique de la mer Rouge. La deuxième inscription de Cosmas Indicopleustès nous reporte au IIIe siècle et à une nouvelle campagne d?Arabie, manifestant l'existence de la royauté axoumite. Il faut l'attribuer vraisemblablement au roi Aphilas, le premier dont nous ayons des monnaies, monnaies imitées des monnaies sabiennes et portant en exergue des inscriptions grecques. Au IVe siècle, la décadence du royaume nubien de Méroé attire l'offensive du roi Ezana , dont nous avons un nombre notable d?inscriptions. Ezana fut en contact avec des missionnaires syriens venus par la mer Rouge, se convertit au christianisme et fit de l'Abyssinie un royaume chrétien. Ce fut probablement un effet de la conquête de la Nubie qui le rapprochait de l'empire romain. Depuis l'Abyssinie fut assaillie par la concurrence des missions, constantinopolitaines et alexandrines, impliquée dans la politique mondiale, et, à la suite d?une expédition de Kaleb en Arabie, entraînée dans une expédition lointaine contre les Perses, dont le résultat fut d?amener ceux-ci dans le Yémen. Mais alors se préparait la poussée de l'Islam qui a suivi Sabiens*, Juifs, Grecs et Chrétiens en Abyssinie ; où il a laissé lui aussi des inscriptions et où il s?est également implanté.

89Le royaume nubien de Méroé était déjà un royaume nègre quand il fut détruit par Ezana . Les éléments couchitiques et nigritiques ont progressé en Abyssinie et [au] même rythme que celui de cette progression, le centre de gravité du pays se déplaçait progressivement vers le sud d?Axoum, à Addis-Ababa qui est en plein pays Galla. La langue du même coup perdait la pureté de sa construction et son caractère sémitique.

90On peut s?étonner que les monuments d?un pays qui fut en relations avec l'Égypte par la Nubie et par la mer Rouge ne montrent aucune trace d?influence égyptienne et qu?aucun objet égyptien n?ait été trouvé dans les fouilles. On n?y a trouvé non plus aucun objet grec ; or les rois abyssins ont été assez ouverts à l'influence grecque pour que la langue officielle de leurs inscriptions ait été le grec avant le sabéen. Les seules influences étrangères que manifeste l'archéologie sont les influences sabéennes. Mais nous ne connaissons rien d?analogue, en Arabie, aux grandes stèles d?Axoum et aux chaires divines d?Axoum, d?Adulis et de Méroé. L?Abyssinie dut être au temps de l'empire axoumite presque fermée au commerce étranger et ne lui demande que peu d?objets usuels. En revanche les stèles d?Axoum sont cousines germaines des innombrables menhirs sculptés trouvés par le Père Azaïs , et ceux-ci sont bien africains.

91H. H.

William Bootbbie Selbie . — The Psychology of Religion, Oxford, Oxford University Press, « Oxford Handbooks of Theology », 1924, 310 p., in-8o, index [68].

92M. Selbie est un des théologiens réputés d?Oxford, et son livre est le premier d?une série destinée aux étudiants en théologie. Il est au courant des travaux des sociologues, y compris des nôtres, et des psychologues, y compris les Français et Henri Delacroix , la Religion et la Foi [69], et il les discute abondamment. Il tente même plutôt une large synthèse qu?une discussion : opposant ici le fait collectif à ceux qui ne voient dans les religions que des illusions ou des sentiments individuels et de ceux qui ne voient dans les Églises que des associations d?individus ; et là le fait de la croyance, de la foi, de l'idéal, à ceux qui, comme nous, croit-il (chap. VIII), ne voient dans la religion, chose sociale, qu?une pure statique des masses religieuses. – Il serait bon que nous discutions ce point de vue. Mais cela nous entraînerait trop loin ici à propos d?un livre qui n?est que de vulgarisation. À certains points de vue, nous croyons même que M. S. nous concède trop quand il confond les idées de Durkheim et les nôtres avec le préanimisme de M. Robert Ranulphus Marett [70]. Par ailleurs il se fait la part belle, quand il fait du Lango (p. 120, n. 1) – qui est aussi le mana lui-même plus ou moins personnifié en toutes sortes de choses – un grand dieu [71].

93Mais ce qu?il faut noter c?est plutôt la position de M. S. vis-à-vis de la psychologie de la religion. Il en admet les quelques données, sur le [...] [72], la prière et le développement de la vie religieuse, sur le Mysticisme. Les notions de péché et celles d?immortalité de l'âme, M. S. y croit psychologiquement et pour la dernière il la trouve [...] logiquement probable. Ici nous rentrons en pleine théologie et d?ailleurs tout le livre, y compris la critique du freudisme, ne s?en est jamais écarté. La psychologie de la religion n?est qu?un moyen d?analyser la « conscience religieuse », la réaction de notre nature vis-à-vis de l'univers. De cet effort élégant il nous reste une impression vague.

94M. M.

Pierre Daniel Chantepie de La Saussaye . — Lehrbuch des Religionsgeschichte, 4e éd. complètement remaniée, publiée par MM. Alfred von Berthelot et Eduard Lehmann , avec la collaboration de MM. Bernhard Ankermann Alexander Brückner , Ludwig A. Deubner , Wilhelm Grönbech , 1925, 2 vol., vol. I, VIII, 756 p. ; vol. II, 752 p., index [73].

95Nous attribuons ici une grande importance à ce Manuel de l'Histoire des Religions que fonda Chantepie de La Saussaye  ; un de nous a dirigé autrefois sa traduction en français [74]. Nous le voyons donc avec plaisir refondu, augmenté, amélioré, mis vraiment à jour par MM. Berthelot et Lehmann et de nombreux et distingués collaborateurs. À la préface qu?Henri Hubert mit en tête de la traduction, nous n?avons encore rien à ajouter et rien à retrancher, soit que, dès ce moment tout le vrai ait été dit, soit que nous ayions été tous, de part et d?autre, figés dans des traditions. Cette hypothèse n?est vraie ni d?un côté ni de l'autre. Car M. Lehmann a ajouté au livre une assez longue « phénoménologie » et M. [Ankermann ] distingué ethnographe, a été chargé de consacrer toute une partie du livre à la Religion der Naturvölker dont nous avons à parler. Au surplus, un peu partout, y compris dans l'utile « Histoire de l'Histoire des Religions » (I, p. 16 [75]) place raisonnable est faite au point de vue sociologique. Sur ce point, chacun dans sa partie, tout ce groupe d?excellents Allemands et Scandinaves nous donne suffisamment raison, et nous apprécions vraiment cette méthode de pure histoire sociale qui anime toute la description de l'histoire de la religion dans l'Inde, par M. Lehmann, celle de la religion à Rome de M. Deubner et celle de M. Grönbech sur les religions des Germains. Il est vrai [76] qu?il est presque impossible en ces matières d?en écrire une autre, tant l'histoire des personnalités qui ont agi sur ces religions se fond dans une pénombre mythique. Mais ailleurs aussi, par exemple dans l'exposé de la religion perse dû à M. Lehmann lui-même, nous sommes en présence d?une description d?institutions et de dogmes, et d?histoire de révolutions et d?évolutions, et nous sommes plus encore que dans les précédentes éditions loin de ces exclusives questions, le qui et le quand et nous apprenons le « quoi ». – À ce point de vue toute l'œuvre dirigée par MM. Berthelot et Lehmann montre qu?il n?y a pas opposition entre les sciences sociales et une véritable méthode historique et philologique appliquée aux faits sociaux qu?on étudie le « [Reales] », les choses, et non plus les mots et les fantaisies littéraires ou les [...] individuelles. Il est impossible de ne pas s?entendre.

96On ne résume pas une série de manuels et aussi bien ils ne nous concernent pas directement puisqu?ils sont des manuels d?histoire. Les noms mêmes des auteurs, qui, pour la plupart ont contribué à l'avancement de leurs disciplines respectives sont un sûr garant. Outre les deux parties générales, sauf deux lacunes – (la religion des Hébreux et la religion chrétienne) – on trouvera ici une véritable histoire complète.

97M. Otto Franke (Berlin) a décrit les religions de la Chine et M. Karl Florenz (Berlin), un peu longuement, celles du Japon. Ils mettent à jour leurs chapitres des éditions antérieures. – M. O. Lange (Copenhague) a été un peu bref sur la religion en Égypte. – M. Friedrich Jeremias (Magdebourg) a fait un tableau historique fort précieux, bien complet de l'histoire des religions en même temps que de celle des peuples de toute l'Asie [...] [77]. Sachant faire abstraction de ses propres théories, il a mis Babyloniens et Assyriens et Hébreux à la place relative et non absolument dominante qu?ils occupent parmi d?autres. – Les [Arabes] et tout l'Islam sont magistralement décrits par M. Christiaan Snouck-Hurgronje (Leyde) [78]. Les religions des peuples de souches indo-européennes occupent tout le second volume ; l'histoire religieuse de l'Inde par M. Sten Konow (Oslo) est magistrale et fort complète ; des questions difficiles comme celles de la légende et du canon, bouddhique, ou celle du Jaïnisme sont sobrement et cependant justement traitées, et aussi la longue histoire de l'hindouisme. (M. Lehmann (Lund) s?est chargé des Perses et il a chargé son collègue M. Martin Persson Nilsson (Lund) de l'histoire des religions de la Grèce. Celui-ci est avec M. Grönbech peut-être, de tous les collaborateurs, l'un de ceux dont les idées se rapprochent le plus de celles des sociologues, des anthropologues. Cependant nous ne croyons pas qu?il ait bridé ses fécondes hypothèses dans de rigoureuses limites critiques et l'effort pour décrire et les religions prédéistes [...] (II, p. 282 sq. [79]) et toute la période préhellénique, puis la naissance des dieux, de la théologie homérique et des cultes des cités est aussi osé qu?intéressant. M. L. A. Deubner (Fribourg) [s?est] fait confier Rome et sa description de l'altération de la religion romaine est aussi juste que magistrale. – Le chapitre (II, p. 507 sq.) de Brückner (Berlin) sur les religions des Slaves est aussi utile qu?intéressant et mesuré sur un sujet difficile [80]. Malgré certaine métaphysique et certaines obscurités de langage plus que de fond, le résumé que M. Grönbech (Copenhague) a donné de ses longs travaux sur les religions germaniques est une des meilleures portions de ce Manuel. Sont remarquables les analyses de la notion d?honneur, de la notion de force, de la notion d?âme et de vie, celle de la notion de don (p. 560) ; nous nous excusons de n?avoir pas connu les travaux de M. Grönbech lorsque nous avons traité de ces questions dans notre mémoire sur le Don (L?Année sociologique, nouvelle série, t. I, 1925, p. 30-186). (Une légère erreur : le beau travail de Maurice Cahen sur les « Runes » était, [et] est plus qu?une « Revue d?ensemble ». [81]) Nous eussions dû nous en servir. Voir aussi p. 597 l'histoire de la conversion des Germains. Le chapitre qu?a rédigé M. John Arnott MacCulloch (Bridge of Allan [82]) sur les Celtes n?est peut-être pas d?une qualité égale aux autres.

98Voilà pour l'essentiel. Restent la « Phénoménologie » de M. Lehmann [83] et la « Religion des peuples non civilisés » de M. Ankermann [84], qui nous concernent spécialement ici. Les deux chapitres sont en effet de science des religions et non pas d?histoire.

99Il est naturel qu?au début d?une histoire collectivement rédigée, le directeur de la publication cherche à expliquer le sens des principaux termes, à définir le [85] contenu des principaux concepts dont il va se servir avec ses collaborateurs. Il est fort bien de substituer ainsi à la « Sociologie inconsciente » de l'histoire, une sociologie consciente. À bien des égards la tentative de M. Lehmann est même assez réussie. Elle consiste en une espèce de revue des principales catégories de faits religieux, une sorte de classification de ce qu?il appelle de façon théologique « les plus hautes et permanentes valeurs » (p. 28). En fait cette introduction est assez complète et permettra au débutant d?assez bien situer les problèmes et de ne pas tomber dans les erreurs à la mode et de croire que le dernier problème traité, totémisme ou magie est l'essentiel. Nous critiquerons plutôt la classification elle-même, par l'objet des rites et représentations : [§ 2] nature et esprits, [§ 3] l'homme (où l'on parle aussi bien du culte des ancêtres que du droit du prêtre). [§ 4] Dieux et divinité où prend place par exemple l'astrologie et une dernière division qui fait double emploi complètement avec la première : [§ 5] le culte et [§ 6] la mythologie et la théologie, [§ 7] notion de l'homme et sort du monde, [§ 8] Piété. En réalité, M. Lehmann juxtapose deux principes de divisions : celui que nous préconisons ici : pratiques et représentations, avec celui des objets de la religion. De plus, ce résumé succinct et fort dense contient toute une théorie et même une théologie de l'évolution religieuse qui vaudrait d?être discutée pied à pied, car elle fourmille d?hypothèses à vérifier.

100M. Ankermann est un des ethnologues les plus exacts. De plus, il est, des élèves de Adolf Bastian et de Friedrich Ratzel , celui qui a le mieux pratiqué la considération des « provinces géographiques », des « aires de civilisation » et de l' « histoire culturelle » comme on dit maintenant. La nécessaire souplesse du savant lui permet ici de faire de sa « Religion des Peuples non-civilisés » œuvre de pure comparaison. Il est parti du principe que les éléments constitutifs, non systématisés – des religions dites primitives sont non pas un, mais multiples – culte des morts et croyance à l'âme – notion de puissance et magie (la meilleure partie à notre avis) – le totémisme dont il restreint un peu la place, parce qu?il ne saisit pas sa nature sociale pure – la notion des dieux et le mythe – (en dernier lieu sommairement décrit) – les faits sont bien choisis et tout y est exprimé avec justesse et modération. Le plan du Manuel ne comportait qu?une simple mention ici des grandes religions de l'Amérique (Pérou, Mexique). C?est une lacune.

101L?autre lacune a toute chance de persister même dans les éditions futures. En vertu des traditions de la théologie, et tout particulièrement des traditions des éditeurs et des universitaires allemands, la Religion des Hébreux et le Judaïsme d?une part et tout le christianisme de l'autre, religions de la Révélation et de la Foi, ne sont pas à considérer ici. Elles font partie de la science ecclésiastique. Naturellement notre point de vue, en France, et ici en particulier, est tout différent. Nous ne pouvons séparer le culte ou la légende des saints de ceux des héros – une interdiction rituelle, celle du gras et du maigre, catholique ou juive, par exemple, de n?importe quel tabou. De plus, c?est défigurer l'histoire, surtout celle des autres religions depuis deux mille cinq cents ans, que de les séparer des religions juives et chrétiennes. Certes M. Snouck-Hurgronje à propos de l'Islam et M. [Nilsson ] et M. Deubner à propos de la fin du paganisme ne commettent pas cette faute, non plus que M. Berthelot , ailleurs, ne la commet à propos d?Israël. Mais une « histoire » complète de la Religion peut être écrite. Ceux qui placent à part les deux Testaments, peuvent et doivent l'écrire impartialement... comme les autres.

102M. M.

Robert Harry Lowie . — Primitive Religion, New York, Boni & Liveright, 1924, XIX-346 p., in-8o, bibliogr., index [86].

103L?auteur de ce livre est le distingué observateur des Crow, et d?autres Indiens de la Prairie et de la Californie, le professeur de Berkeley, et l'éditeur de l'American Anthropologist, l'auteur de cette sorte de manuel de sociologie juridique des sociétés dites primitives, intitulé Primitive Society [87] (classique à défaut d?autre). – Comme on fait en Amérique, il publie – sous un titre qui fait pendant à ce dernier ouvrage – un autre manuel sur la « Religion primitive » (l'auteur ne dit pas les religions primitives). Et, comme on fait en cours dans le monde académique entier, et comme on fait – en Amérique seulement – dans des livres, il pense faire avancer les études en expliquant, en définissant par rapport à ses devanciers, son point de vue. Le public américain est évidemment friand de ces tournois, à moitié dialectiques. L?auteur de ce compte rendu en a fait lui-même l'expérience. N?était l'œuvre précédente, l'autorité de l'auteur, et, par instant la valeur des faits invoqués, et, la nécessité de se comprendre sinon de s?entendre entre travailleurs d?une même science, nous passerions sur un travail du genre de celui de la première partie de ce livre. Le meilleur d?entre eux ne vaut pas une découverte positive. Quand il s?agit de Religion, les traditions dialectiques des philosophes et des théologiens doivent être, à notre avis, définitivement interrompues. C?est une faute de se laisser aller à ces discussions infinies qui les continuent. Pendant ce temps, ni les faits à connaître ne sont mis à portée, ni les faits connus ne sont encore tous rassemblés et réduits en termes théoriques clairs. On reste à la préface des grandes œuvres à accomplir, ou au démarquage des œuvres accomplies.

104Les devoirs que nous avons à remplir vis-à-vis des lecteurs de L?Année, et ceux que nous avons à remplir vis-à-vis des principes que Durkheim a posés, la vigueur de l'attaque de M. Lowie nous obligent à regret à entrer dans cette lice et à prolonger ce que nous ne croyons maintenant plus autre chose qu?un jeu, car, au fond, l'accord est fait – comme on verra.

105I. – Le livre de M. L. débute, de façon habile, par l'exposé de quatre religions, ou systèmes religieux dits primitifs : un Américain du Nord (Crow) que M. L. a des raisons de bien connaître ; un Africain, Ekoi (Nigeria S.) d?après le livre de M. Percy Amaury Talbot , deux Néo-Guinéens (Mélanésiens) pourquoi dire « Papou » de Tami et de Bukana*. Enfin, une revue d?ensemble de ce qu?il appelle la Religion polynésienne, d?après W. H. Rivers (Tikopia), William Wyatt Gill (Mang[aia] [88]), John Martin (Tonga), Edward [Tregear ] (Maori). – Cette revue n?excède pas la portée d?une conférence : la question du mana y es[t] expédiée et tranchée en deux paragraphes (p. 76, 78) : la mana c?est l'anormal ; celle du caractère de la mythologie (à propos de Mang[ai]a* [89]) est résolue non moins vite, et aboutit à distinguer le mythe de la religion (p. [8]5), ce qui n?est rien moins qu?évident. – Les trois autres descriptions n?excèdent pas la dimension et la portée de comptes rendus. Et par exemple M. L. se fait la partie belle en négligeant dans son tableau les faits de mana et de totémisme que nous avons entrevu à travers les missionnaires allemands à Tami et à Bukana (L?Année sociologique, vol. XII, 1913, p. 123 (ou 128 ? [90]) Admettons un instant que Sir James Frazer et Durkheim aient trop parlé du totémisme. N?en pas parler à propos de ces religions – pas même de celui de Samoa – est une erreur certaine, et il est vraiment exagéré de même de parler (p. 93) du caractère « iconique » [iconic character], imagier, de la religion polynésienne, et surtout de la comparer à ce point de vue avec l'extraordinaire abondance des sculptures de l'Ouest africain. – Nous ne chercherions pas ces chicanes à M. L. si, partant de l'idée juste de décrire complètement, des systèmes religieux –, il avait à chaque coup respecté la proportion des faits. – D?autres interprétations, éparses dans le livre, doivent être soumises à des critiques du même genre par exemple (p. 103), la distinction de l'âme de droite et de l'âme de gauche chez les Bojobo* des Philippines (voir Robert Hertz , « La prééminence de la main droite », dans Sociologie religieuse et folklore [91]) – ne mérite pas le nom de dualisme. Nous craignons que l'esprit de système ait [...] le choix et l'interprétation des faits. – Au surplus les quatre religions choisies : Nègre, Mélanésiennes, Polynésiennes et Crow appartiennent toutes aux sphères très supérieures de ce que l'on appelle généralement les religions primitives. En supposant même leur description exacte, elles ont nécessairement une autre physionomie que les Australiennes dont Durkheim s?est occupé.

106II. – En fait, elles préparent précisément la deuxième partie du livre consacrée à la critique des trois théories principales qui se partagent la faveur des théoriciens de la « religion comparée ». L?animisme de Sir Edward Burnett Tylor , l'idée d?un âge magique de Frazer, et ce que M. L. appelle, après M. Arnold Van Gennep, d?un mot moins horrible en anglais qu?en français : le « collectivisme » de Durkheim . Il les compare aux faits et essaie de montrer qu?aucune isolée, ni même les trois ensemble ne rendent compte de tous ceux qu?enregistre couramment l'ethnographie moderne. – De l'animisme de Tylor, M. L. n?accepte pas la critique de Durkheim. Il a pour elle de durs mots (beneath criticism, p. 109) – numerous allegations, p. 113). Nous ne suivrons pas cet exemple et ne discuterons pas cette discussion. L?auteur serait sur le point d?accepter la théorie du P. Schmidt avec lequel il s?accorde sur la primitivité des Pygmées : mais le P. Schmidt croit à un sta[d]e mono[th]éiste primitif qu?il ne peut admettre. Il se rabat donc sur un « animatism » du genre de celui de Mar[e]tt, sans convenir ou peut-être sans savoir qu?il se met d?accord avec Durkheim et avec nous qui croyons aussi que l' « animisme et l'animatisme » ne sont que « potentiellement religieux » (p. 134). À M. Frazer (chap. VI) il objecte la coexistence de la religion et de la magie dans toutes les sociétés connues (ce qui est juste si on ne définit pas la magie par la théurgie), mais dépend de la définition, et celle de M. L. ne lui a pas coûté grand peine (p. 136) : il l'a prise au Dictionnaire d?Oxford. Quelques brocards à Durkheim et à son intellectualistic psychologyzing complètent la discussion : « La distinction sociologique entre la magie et la religion est intenable. » Toutes deux sont des branches du « Supranaturalisme ». Et voilà ! –

107Après ces premiers coups, un chapitre donne le coup de grâce au « collectivisme » de Durkheim . Les épithètes deviennent plus vives (inept, no measure of absurdity, etc.) et quelques éloges (p. 157) et la comparaison avec H[ubert] qui n?a pas « exclusivement » perpétré des erreurs [92]... mais qui est un modèle de celles qu?il faut éviter (p. 113, 154, 146). D?abord M. L. s?attaque au choix du sujet de Durkheim : le totémisme australien. Il adopte l'objection de M. Alexander A. Goldenweiser que le totémisme n?est pas la seule religion primitive ; que de plus primitives, Pygmées, etc., ne l'ont pas. Nous ne nous lasserons pas de le répéter. Nous croyons faux que les Pygmées, Boshimans, etc., soient aussi primitifs que les Australiens (les Semang parlent une langue Mon-Khmer) ; nous croyons faux qu?il n?y ait pas de totémisme chez les uns ou chez les autres d?entre eux (Semang, Boy Demara [93]). Et, en particulier, M. L. a gravement tort d?invoquer M. Alfred Reginald [Radcliffe-]Brown ; et les Andamènes contre Durkheim, puisque toute une partie du livre de M. Brown donne raison – en termes exprès – à Durkheim au moins d?un nombre considérable de faits importants, sinon aux théories du totémisme. La seconde objection est un rappel du « manitomisme », de l' « esprit individuel » d?un totémisme individuel, « bien plus vieux que le totémisme ». Sur ce point encore nous résistons : aucune tribu américaine du Nord invoquée ici, pas même les Paviotro*, ne nous semble « primitive » et quand elle l'apparaît à d?autres, c?est qu?elle est dégénérée. – Puis M. L. s?attaque au fond de la théorie. Reprenant une objection de M. Goldenweiser qui, blâmant Durkheim d?avoir confondu la société avec la « foule » – (ce qui était un grave contresens puisque Durkheim a toujours opposé groupe et foule) – observait par « psychologie » assez élémentaire elle aussi, mais assez fine, que « la foule groupée n?est pas quelque chose de supérieur..., qui puisse s?objectiver au fond de lui, mais est le moi lui-même. – Une assemblée – par exemple d?Indiens pour une danse – peut rester séculière. – On peut répondre que le dernier fait est inexact pour l'Australie, où toute assemblée, en particulier de danse, est à quelque moment quelque chose de religieux. Et même dans des sociétés modernes, même la foule, pourvu qu?elle danse et à plus forte raison le groupe organisé, un régiment par exemple, une procession, ne tarde pas à prendre conscience de soi-même, de se créer un rythme, un drapeau, un symbole, un esprit auquel, surtout dans le groupe, l'individu sait même se sacrifier. À plus forte raison quand une société s?organise ainsi. – La seule objection de M. L. qui touche c?est que la » société « n?est pas toujours, même en Australie, le clan, mais la société des hommes, la phratrie, etc. (p. 160). La déduction de Durkheim en effet n?a été présentée ici par lui, que comme probable, et n?est que probable. Il objecte encore que Durkheim a sous-estimé le rôle des individus – nous reviendrons là-dessus. Enfin, M. L. oppose la « dichotomie » de Durkheim sacré-profane, celle de MM. Marett et [Freud  ? [94]] – qui ne coïncide pas entièrement avec elle – entre naturel et supra-naturel. Nous persisterons ici dans l'erreur durkheimienne, ces théories nous semblant à leur tour entachées d?intellectualistic psychologizing. – Et il ne suit Durkheim que dans son analyse du symbolisme. Ce dont nous nous féliciterons.

108Oserons-nous dire maintenant que toute cette discussion – y compris la nôtre – est oiseuse et ne porte pas contre Durkheim . Durkheim a-t-il bien décrit les faits australiens ? Personne ne le nie. On lui en oppose d?autres ? Il ne les visait pas. – Ces faits australiens sont-ils typiques ? Évidemment – même en supposant qu?ils ne soient pas aussi primitifs que Durkheim l'a cru. – Surtout on se méprend sur la pensée de Durkheim et on en méconnaît singulièrement la portée – si on s?imagine qu?il poursuivait dans les Formes élémentaires de la vie religieuse autre chose que l'explication de la croyance aux rites et aux symboles. Or cette croyance, se définissant par le fait qu?elle est commune à un groupe, ne s?explique que par le groupe. Les faits australiens ne sont là que pour permettre de constater le fait. Fussent-ils modernes comme ceux des sectes russes, d?autres faits peuvent expliquer la même chose. Toutes ces objections ramènent au rejet d?une méthode. À une explication sociologique, M. L. oppose une description ethnologique. Mais entre le travail d?explication du sociologue et le travail de description de l'ethnologue, il y a toute une différence. L?un est explicatif, donc suppose l'abstraction, le choix d?un travail dérive d?une qualité première à expliquer et explicable. L?autre est, admettons-le, plus nuancé, plus fidèle, plus concret, plus détaillé, moins simplificateur, mais aussi moins clair, moins théorique, moins rationnel, et au fond, plus arbitraire, dans sa prétention d?être complet. Car il n?existe d?aucun fait, pas même du mouvement d?un atome, une description complète possible. Au fond, M. L. et une partie du public ou ne comprennent pas ou ne veulent pas comprendre que si l'explication sociologique prétend en matière sociale être la seule, en tant qu?un phénomène est humain, c?est-à-dire aussi psychologique et physiologique, la sociologie laisse « aux sciences sœurs » le soin de faire leur théorie, de leurs points de vue, des mêmes phénomènes qu?elle a déjà étudiés, caractérisés, expliqués. Car de même qu?un phénomène biologique est tout de mathématique à biologique, de même un phénomène social est tout de psychologique à mathématique. Opposer les diverses sciences les unes aux autres est ouvrage facile, et nous dirons de pure dialectique. Nous n?avons aucune difficulté, nous, à nous mettre d?accord sur un grand nombre de principes que M. L. caractérise son point de vue dans la IIIe partie du livre.

109Il y développe la nécessité des considérations historiques, psychologiques et anthropologiques (le mot anthropologie est ici usité en un sens très large et ne désigne pas du tout la somatologie et est synonyme d?ethnologie, de psychologie et de sociologie générale). Il faut d?abord considérer les faits des religions « primitives » sous l'angle de la succession des simples faits, comme historiques, ayant été l'objet d?emprunts ; ainsi l'hépatoscopie indonésienne serait, comme l'a démontré M. Alfred Louis Kroeber (avec beaucoup trop de précision à notre avis, et sans avoir prouvé par de bonnes raisons, mais non sans vraisemblance), d?origine mésopotamienne ; le « trait » de la prise de l'âme par le magicien en Amérique du Nord serait d?origine nord-asiatique (à notre avis pour d?autres raisons que celles indiquées). – Nous aurions assez de choses à dire à propos de ces exemples et des autres ; nous ne critiquons nullement la recherche historique, mais la légèreté avec laquelle les critères en sont maniés – voir marge [ajouté à la marge gauche ; le texte suivant est décalé].

110Par psychologie, M. L. entend au fond trois choses : la psychologie individuelle proprement dite, en plus de l'étude précise du rôle de l'individu dans l'histoire, la genèse, propagation et variation des formes de la vie religieuses. Ici M. L. enfonce deux portes ouvertes. Il est facile en effet de montrer des cas d?intervention et de propagation du culte, et en Amérique du Nord, la ghost-dance, la danse des esprits (p. 188) le culte du [peyotl*] (p. 200-204) sont des exemples classiques, auxquels on pourrait ajouter la danse du Serpent, celle du Soleil, etc. Seulement jusqu?ici les [modes] d?invention n?ont pas été observés. M. L. parle même à propos d?eux de « tribal pattern » de « mode d?action tribal ». Seulement il interprète le fait comme historique – disons social, puisqu?il n?y a pas de phénomène social qui ne soit historique, et nous serons d?accord. Cette « psychologie historique », c?est pour nous la sociologie. – L?autre élément de psychologie individuelle que M. L. veut décrire est celui de la « variabilité individuelle » des « limites du pouvoir » du point de vue historico-sociologique, pour nous exprimer comme lui. Celle-ci aurait joué un [r]ôle considérable dans la « religion primitive » (XI) l'individu n?est pas plongé complètement dans son milieu social. « Il réagit en tant qu?individu ». M. L. croit que « ces différences individuelles dans le comportement religieux » peuvent se classer suivant des « types sensoriels » et le « type mixte » (p. 228) (plusieurs sens coopèrent dans les « visions des Indiens Crow ») puis ce sont des degrés variables de suggestibilité et d?indépendance (p. 231 sq.). Les documents de M. Paul Radin sur les inégalités du sentiment religieux che[z] les Winnebago ; les variations d?intelligence ; certaines [idiosyncrasies] [various idiosyncrasies], toutes choses qui culminent en général dans ce que les Américains appellent d?un terme aussi vague que commode, le « leadership », l'autorité, l'influence, le commandement (p. 248) : les historiens de Medecine Crow, de Tall-bull, etc., celles de ce qui en fit des leaders parmi les Crow, les Cheyenne, etc., suffisent à M. L. – Nous n?avons pas besoin de dire que ni ces faits ni leur importance ne sont bien connus de nous. Nous sommes aussi statisticiens. Pas plus que pour le calcul, il n?existe, pour la sociologie, de grande masse qui n?ait sa fluctuation, de grand nombre qui ne se décrive par une courbe, et ne se décompose en nombres plus petits, voire en unités. Et ces unités elles-mêmes variant suivant l'âge, le temps, suivant le lieu. On ne nous apprend rien, et nous recherchons nous-mêmes jusqu?aux cas individuels. Il n?y a ici rien d?extraordinaire pour la sociologie. Il n?y a aucune contradiction entre le point de vue de l'histoire et celui du théoricien et celui du psychologue ; ils sont différents. Tout ce que nous maintenons c?est que seul le fait de la communauté explique les choses de la communauté. Cela M. L. nous le concède (v. marge) – il est vrai du bout des lèvres – quand il veut bien reconnaître les recherches sociologiques comme « indispensables ». Toutes ces oppositions sont de pure forme.

111Aussi bien les deux chapitres les plus intéressants et les plus positifs de ce livre sont ceux où M. L. – sociologue – se laisse aller à son talent : (XII), Religion et Art, auxquels on peut rattacher les remarquables observations sur le comique (p. 311 sq.) et (X), La femme et la religion.

112La troisième chose que M. L. entend par psychologie est bien du genre des recherches connues en France sous ce nom : fonctionnement des représentations. Malheureusement nous ne saisissons pas sa pensée à lui.

113Le chapitre intitulé « Association (association des idées individuelle et sociale) » reste pour nous obscur, même les p. 285-288 consacrées au symbolisme ; et toute l'application du principe de la psychologie nouvelle, ou plutôt – comment dire ? – américaine de rationalisation p. 288, 291, 299 à 308 nous semble inutilement raffinée. Nous ne sommes pas en France, très frappés du succès de MM. Grace Helen Kent et Aaron Joshua Rosanoff [95], et le commentaire de bons faits de religion américaine, à partir de ces principes, ne nous enthousiasme guère.

114La conclusion nous semble également vague et nous avouons n?y comprendre qu?une critique du rationalisme traditionnel, que nous ne ferions aucune difficulté d?admettre ; mais nous voudrions bien savoir ce que M. L. y substitue.

115Au fond d?ailleurs, tout est clair : ce débat entre anthropologues et sociologues est le débat entre une science plus vaste, la science de l'homme, et une science spéciale, celle de la société humaine, qu?elle inclut. Il n?y a pas de raison pour jamais le fermer.

116M. M.

Reginald Edward Enthoven . — The Folklore of Bombay, Oxford, Clarendon Press, 1924, 353 p., in-8o, index [96].

117M. Enthoven est l'auteur de Tribes and Castes of Bombay [97]. C?est la Province tout entière qu?il faut comprendre sous le nom propre (1920-1922) et a été en quelque sorte l'ethnographe et le sociologue officiel de la présidence. Ce livre est une sorte d?extrait et de complément au premier. Aidé par la Bombay Branch of the Royal Asiatic Society, inspiré par l'exemple du regretté William Crooke [98] et de M. Sir James Macnabb Campbell [99], il a fait circuler parmi les instituteurs de toute cette énorme partie de l'Inde des questionnaires (celui de Crooke en particulier). On peut penser ce qu?on veut de cette façon d?observer ; elle a fourni à M. E. de nombreux faits, quelquefois infiniment instructifs qu?il était urgent d?enregistrer avant qu?ils ne s?altèrent. Nous les considérerions même comme fort utilisables s?ils étaient mieux utilisés, si M. E. précisait : ville ou village, population, caste, s?il ne disait pas le Deccan, la « Carnolie », etc., ou si quand il dit localité, il ajoutait : telle caste ou toutes les castes ont ce culte ou cette croyance.

118Quand il s?agit de l'Inde la définition de ce qu?il faut entendre par Folklore est plus difficile que partout ailleurs. Hors de l'Islam et des brahmanes, même seulement ceux des castes supérieures, il n?y a pour ainsi dire pas de religion organisée. Les sectes hindoues, les Sikhs, forment l'exception, n?englobent pas rarement toute la vie de leurs adhérents laïcs. Même la population féminine n?est généralement pas intégrée à une religion quelconque (p. 285), elle est en quelque sorte abandonnée à la religion populaire, à ses croyances lâches et confuses et à ses rites plus ou moins facultatifs, ou même à la magie proprement dite. Cette dernière remarque vaut même pour presque tout l'Orient et pour une partie de l'Extrême-Orient. Nulle part, pas même dans l'Antiquité, les croyances et rites populaires n?occupent plus de place dans la vie des femmes et dans la vie domestique en particulier. Et d?autre part, dans l'Inde, l'hindouisme, comme à de moindres degrés peut-être dans tout l'Orient, les grandes religions se plient, et s?adaptent aux vieilles religions locales, toujours vivantes, gardent les apports des religions mortes et tentent de faire fructueuse concurrence aux usages populaires et aux magies blanche et noire. Il faut donc excuser M. E. – comme nous excusons ailleurs [Sir Richard Olaf Winstedt ], s?il a dû, dans de nombreux cas, considérer des cultes de grands dieux (p. 337, Rudra [100], Surya [101] p. 29-37). Les emprunts aux classiques, aux Castra*, aux Puranos*, aux Livres des Lois, et de Mythe, sont moins justifiés (et surtout mal précisés p. 130, etc.)

119Le désordre et les mauvaises classifications semblent être inhérents à ces précieux amas de faits que sont les recueils de folklore, [le] folklore de la plus dense et de la plus superstitieuse des populations du monde est fatalement plus difficile encore à décrire. D?autant plus que, M. E. ne l'a dit que dans son autre ouvrage, il s?agit d?énormes populations, composées de véritables États, de véritables races, de peuples séparés par des civilisations et des langues de familles diverses. On ne s?étonnera pas par conséquent que M. E. ait rangé dans le folklore des faits aussi considérables que le totémisme. Il le trouve chez les Maharattes, une grande nation, très anciennement indœuropéanisée (p. 209) résumant les documents déjà publiés, au Deccan, au Koukanet* au Carnatie* [102]. Il divise bien les totems en animaux, végétaux et divers. Il le distingue bien des cultes d?animaux (p. 213 sq.), plus ou moins populaires, plus ou moins originaires, plus ou moins intégrés dans les cultes des grands dieux de l'hindouisme qu?ils incarnent ou portent. Seulement les soins du culte sont bien des faits de religion, de même le culte des Saints (IV, p. 150) ceux des ancêtres (p. 159 sq.) où ce sont les doctrines brahmaniques qui sont exposées en une espèce d?anglo-indien (ex. Pal Shahstra, p. 1[6]3). De même le culte des eaux, des tirthas (pèlerinages aux rivières et étangs sacrés, p. 95 sq.) est typique de la religiosité hindoue. De même encore, le culte des divinités des maladies, Kali et Vishna* en tête, et c?est une erreur que l'interpréter à la façon de Campbell , comme de simples usages d? « expulsion d?esprits ». L?inconvénient est poussé fort loin lorsque des cultes comme ceux des « Mères » sont morcelés (p. 185, 187, 268, 171, etc.), mal identifiés – entre les divers chapitres d?un questionnaire. Encore plus loin lorsqu?une fête comme la Holî* n?est considérée que comme date et occasion (p. 305 sq.), et n?est nulle part étudiée systématiquement. Mais qui nous donnera cette étude complète de la Holî, ne fût-ce que dans un petit district de l'Inde ?

120De plus, M. E. comprend la magie (VII) parmi le folklore. On sait que nous l'en séparons, parce que, comme la religion, elle est un système relativement fermé de croyances et d?usages (VII). Mais il n?est pas entièrement dans son tort, car dans toute société, à côté de la magie professionnelle organisée, il en est une populaire, conjurant le mauvais œil, le mauvais sort. De même il comprend dans son enquête la divination (VIII), que nous séparerions, elle aussi, dans sa forme savante, astrologique, onéiromantique, etc., des simples présages du peuple qui forment une magie populaire.

121Par contre, M. E. a parfaitement raison de donner un catalogue des dieux, grands et petits, des hommes et ancêtres divinisés, esprits des morts malfaisants, démons, etc., et même de partir de cette classification pour répartir un grand nombre de rites, simples et complexes et mieux des cultes complets. Cette division s?est naturellement imposée à lui dans l'Inde où le foisonnement des mythes et des individualisations animistique[s] de choses sacrées croît encore. Cela entraîne à de nombreuses répétitions, mais nous ne voyons pas comment les éviter.

122Nous ne voyons pas non plus comment on peut se passer, dans une description de folklore, de cette division qui évidemment fait double emploi avec d?autres : Rituels féminins, le chapitre X est bien intéressant, mais bien sommaire (en particulier à propos des cultes du Cingam, p. 296 dont l'étude est vraiment esquivée). « Rituels du village, et de la végétation », « Croyances et rites divers » sont eux aussi des espèces de pots-pourris. Les croyances concernant les arb[r]es, les serpents (III) et les animaux en sont séparés. Mais jusqu?à ce que la science du folklore soit mieux faite, on ne pourra se passer de rubriques commodes.

123Les légendes, même celles des héros, dont des listes sont données (p. 174 sq.), et à plus forte raison les contes ne sont pas enregistrés.

124M. E. n?ajoute évidemment aucune importance à la théorie purement animiste de Campbell dont il semble partir dans son introduction.

125Il ne s?intéresse qu?aux faits. Ils sont cependant présentés d?une façon très résumée. Ceux-ci sont extraordinairement nombreux, et, en gros, utilisables, et nous font vivre dans l'Inde.

126Malheureusement ce livre souffre d?un gros défaut. L?auteur se tient au temps présent, et s?il est un bon Anglo-Indien, il n?est sûrement pas indianiste. Il n?a même pas su s?entourer de savants indigènes, ses collègues. Les fautes de sanscrit (ex. p. 71, Mrichhakatitra Natak) ne se comptent pas. Les fautes d?expression (ex. p. 241, le Shakti system of worship) abondent également. D?autres compétents en ces matières, trouveront des fautes dans l'exposé des faits. Ce sont là de graves inconvénients. Nulle part un effort philologique et historique n?est plus nécessaire pour comprendre un folklore qu?à propos de celui de l'Inde. Nulle part les religions savantes, les astrologies, les manties diverses, les sectes populaires ou secrètes, les congrégations de moines, d?ascètes, de devins n?ont mieux pénétré l'âme populaire. Et inversement, aucune religion n?a de frontières plus indivises que la religion de l'Inde, n?a absorbé plus d?éléments populaires de toutes sortes de degrés, et de toutes sortes de formations.

127M. E. nous dira que cette œuvre historique n?était pas son sujet. On pourrait même lui suggérer de rétorquer que presque aucun folklore, même d?Europe, n?a été étudié de ce point de vue. Il faudrait bien convenir de ce fait. Mais ce travail d?explication, de classification est partout urgent. Il doit être fait si l'on veut faire avancer la science des rites et croyances populaires.

128M. M.

II. ? Systèmes religieux des systèmes inférieurs par M. M. Mauss

George Whitehead . — In the Nicobar Islands. The Record of a Lengthy Sojourn in Islands of Sunshine & Palms amongst a People Primitive in their Habits & Beliefs & Simple in their Manner of Living, with a Description of their Customs and Religious Ceremonies & an Account of their Superstitions, Traditions & Folk-lore. — Préface Sir Richard C. Temple, Londres, Seely Service, 1924, 276 p., in-8o, index [103].

129Le livre de M. Whitehead est bien loin de répondre à ce que l'on pouvait attendre de l'auteur d?une bonne grammaire du dialecte Car-Nicobar et qui a séjourné dans cette île. Il n?ajoute pas grand-chose à ce que nous savions par Sir Richard Temple (dont la préface à ce livre est un véritable compte rendu détaillé), par Edward Horace Man , et par Cecil Boden Kloss  ; même il est moins complet que ses devanciers : sur les phénomènes actuels de la vie sociale, de la conversion des Nicobarais, il est décevant. Enfin, quoi que craigne l'auteur (p. 6) il peut être dédié aux enfants et aux jeunes filles.

130Le sujet était cependant intéressant. Les Nicobarais appartiennent à tous les points de vue, langue, race, civilisation, à la grande famille Mon-Khmer, et isolée, tandis que les autres peuples (qui ne comprennent pas du tout ni Java ni Sumatra) (p. 52) de cette race ont été plus ou moins entraînés dans le sillage des grandes civilisations du S.-E. asiatique [104]. Et soit qu?ils soient redevenus, soit qu?ils soient restés plus primitifs, ils doivent être observés aussi profondément que possible. Mais ce livre n?est que celui d?un missionnaire assez superficiel.

131Ne contenant rien sur l'organisation sociale, de toutes petites informations sur l'organisation domestique, comment veut-on qu?un tel livre puisse être utilisé sûrement d?un point de vue sociologique ? Nous ne noterons, à ce propos, comme suffisamment décrite que la remarquable division du village en village d?habitation, et village d?apparat [105], la place, el-panam, sur le rivage de mer, avec la maison des hommes, le [démon] sacré, le cimetière, et les mais[o]ns de pureté et d?impureté (p. 40, 42, 56, etc.).

132L?institution du potlatch, en particulier funéraire, est la seule chose certaine qui se dégage. Naturellement M. W. ne l'a pas reconnue et nous ne la signalons que parce qu?il est intéressant de la trouver une fois de plus en pays Monkhmer. Ces visites avec présents des gens de Car à l'île éloignée de Chowra, pour initier les jeunes gens (p. 137 sq.), ces droits d?hospitalité (p. 77) ; les courses en canot (p. 108), les luttes, etc., tout l'ensemble de l'une des grandes fêtes – que M. W. appelle des « actions de grâce », mais qui est celle des canots, des cochons, et d?un gâteau (p. 177, 180), et enfin les importantes pyramides (cf. p. 60) de la fête des ossements (p. 190 sq.) ; à noter spécialement la décoration des poteaux funéraires avec des pièces de monnaie clouées. – Tout cela c?est du potlatch, y compris l'alternance de ces fêtes, entre les divers groupes (clans ?) locaux.

133L?attention de M. W. s?est portée presque exclusivement sur les phénomènes religieux. Il a décrit exactement les rituels funéraires fort intéressants, sans reconnaître la fête du double enterrement, celle de l'ossuaire (p. 190 sq. surtout p. 197), qu?il est naturel de rencontrer en pays austroasiatique. Il a assez bien décrit les formes religieuses d?animisme (p. 128), celles d?esprits des morts qui paraissent en effet être les plus [mot rayé], sans rechercher les notions générales ou celles qui concernent les animaux, les plantes, et les choses (voir p. 122 quelques remarques sur les souffles). – Les fêtes d?exorcisme et les procédés sont assez notoires, le « bateau des esprits » (pl., p. 128, 152) et les [démons sacrés [106]] espèces de moyens mécaniques d?en assurer la perpétuelle expulsion. Une autre partie suffisamment esquissée – mais non approfondie – concerne la magie, les magiciens, en particulier leur apprentissage, et leurs danses de chaque jour (p. 151, 149, 161).

134La mythologie doit avoir été cachée à M. W. car sa collection de « Contes populaires », même avec les notes et celles que Sir Richard Temple a ajoutées, et bien qu?elle contienne un soi-disant [...] [107], est loin d?être instructive [108].

135M. M.

A. ? Les systèmes totémiques par MM. M. Mauss et D. Essertier

Ernst Vatter . — Der australische Totemismus, Mitteilungen aus dem Museum für Völkerkunde in Hamburg, X, Hambourg, 1925, 158 p., in-4o (dont trois cartes et trois cartons) [Mit 3 Kartenskizzen im Text und einer Karte] [109].

136Le travail de M. Vatter – conservateur du Musée ethnographique de Francfort et l'un des collaborateurs à l'édition de Carl Strehlow – est une simple mise au point rigoureusement ethnographique de tout ce que M. V. sait du totémisme australien. La masse en est l'appareil critique, le pur exposé descriptif de faits. La conclusion s?arrête au fond et en droit, à une répartition des formes de totémisme australien ; celle-ci devrait être présentée sous forme cartographique. La dureté des temps fait qu?elle a dû être présentée sous forme de tableaux, et que n?a subsisté que la carte d?ensemble et de conclusion (p. 158) et trois cartons en particulier sur le totémisme des tribus méridionales.

137Sous ce rapport, et si on admet que les critères choisis soient en effet nécessaires et suffisants, ces tableaux sont extrêmement utiles (voir [...] [110], p. [1]52 sq.). Ils se divisent en cinq groupes : I. Nature des totems (animaux seulement, etc.). II. Rapport des totems avec l'homme, et en particulier. III. Tabous totémiques (allons jusqu?à l'absence de ces tabous). IV. Totems individuels, sexuels et sous-totems. Voir : Position sociologique du totem (M. V. appelle cela Soziologie des Totemismus se servant du mot de sociologie dans le sens « étude d?organisation sociale » [...] des phénomènes juridiques : rapport avec les phratries, classes matrimoniales, exogamie, descendance du totem en ligne masculine et utérine, chefferie). Chacun de ces tableaux est justifié par un double exposé – celui des faits par tribus, au nombre de 126, 128, que connaît M. V. ; celui des mêmes faits par catégories tabulées (cartographiées au fond). Le totémisme australien apparaît ainsi comme extrêmement divers : ici des totems sexuels sans totems de clan, là des totems spéciaux en réalité liés aux phratries ; ailleurs des totems sans lien avec l'exogamie, etc. – Sur le fait de cette diversité, et sur la façon dont se groupent par régions ces variations, M. V. a apporté des précisions intéressantes. On peut fort diverger d?opinion sur sa division finale en V régions et sur l'emplacement de ces régions ; on discutera moins facilement des divisions plus détaillées et bien établies comme celle qu?isole l [...] d (tribus de la boucle du Darling.)

138Cette classification autorise-t-elle les conclusions qu?en tire M. V. et les principes dont il part, et les faits qu?il dispose ainsi, sans artifice, sont-ils si bien établis qu?il faille considérer ce travail comme exprimant même l'état actuel de la science ? Bien que nous soyons pour ainsi dire excédé de cette histoire du totémisme, « c?est une autre question ». Il nous faut la débattre ici puisqu?un des enseignements de Durkheim semble être remis en question.

139Le point sur lequel nous sommes d?accord et sur lequel Durkheim nous avait toujours [...] (L?Année sociologique, vol. IV, 1901, p. 164 [111]) et Durkheim (« Sur le Totémisme », L?Année sociologique, vol. V, 1902 [112]), c?est qu?il est impossible de séparer le côté religieux du côté social du totémisme.

140Cette théorie morphique ou phylomorphique, etc., de clan, ou organisation de clan à culte de ce genre, cette définition à laquelle Durkheim et ses élèves sont fidèles pendant que Sir James G. Frazer s?en écartait, restreint et circonscrit le problème, et nous n?avons attendu personne pour localiser le fait du totémisme à certaines sociétés et à certains temps. Peut-être même y avons-nous mis plus de timidité que les soi-disant critiques n?en mettent, et, sans doute, plus qu?il ne faudrait. – Mais passons sur cet accord qui est général et dont il est utile d?attribuer le mérite et voyons les points où nous divergeons d?avec M. V. Ils sont nombreux.

141D?abord, nous ne considérons les critères choisis que comme certains parmi d?autres. Il eût fallu dire pourquoi on éliminait ceux-ci, si on ne voulait pas s?en servir. Ainsi l'absence ou la présence des intiatiuma (cérémonies improprement appelées magiques par M. V.) n?est pas plus importante que celles des totémiques d?initiation avec lesquelles il se confond d?ailleurs : Warramunga, etc., et même Arunta. Il est d?autant plus grave que celles-ci n?aient pas été considérées qu?elles sont tout à fait généralement [...]. Sur ce point, en effet, la civilisation australienne est assez uniforme. De même le droit du clan totémique à [...] le tabou de consommation du totem, non pas pour ses membres, ou pour les autres clans, mais au fur et à mesure de l'avancement en âge et des initiations est un fait beaucoup plus général que les traits choisis par M. V. à propos du tabou totémique. Des catégories de faits entiers sont négligées : blasonnement, décoration, cri totémique, rituel oral. Les cartes et tableaux de ces faits sont aussi essentiels que ceux des faits étudiés, et se présenteraient autrement, entraîneraient donc d?autres classifications.

1422 / Il faut, nous ne nous lasserons jamais de le répéter, prendre garde au défaut fondamental de toutes ces méthodes soi-disant statistiques ou cartographiques appliquées à l'étude des institutions humaines. Elles ne donnent jamais que la description plus ou moins précise de nos connaissances plus ou moins précises. Il ne peut y avoir raisonnement basé sur matière si fragile.

143Voici des tribus très mal et trop tard connues, par exemple les Kurnaï, observés après leur conversion ou les tribus du Sud de Victoria. Que d?hypothèses n?ont pas été déjà édifiées sur l'absence des totems de clan, sur la présence des totems sexuels ! Le premier fait est d?ailleurs faux ; les nombreux blancs de tant de cartes sont surtout la marque des ignorances, des enquêtes [mal] faites ou à faire. Comment comparer la valeur des très vieux documents de Sir George Grey [113] sur les [...] de la tribu de [Kariyarra* ou Watjarri ?] et celle de son insuffisante description des classes matrimoniales esquissée alors pour la première fois.

144Dangereuse quand il s?agit par exemple de répartitions d?instruments (exemple : absence ou présence du boomerang, etc.), ces expériences – car ce sont des expériences plus que des faits – le sont encore plus quand on les applique à des institutions aussi complexes et mal connues que le totémisme dans les tribus dont si peu (trois ou quatre tout au plus) sont connues à fond, comme les tribus australiennes. Les cartes du totémisme ne sont donc pas prématurées, parce qu?elles font état avant tout de documents négatifs, qui ne sont rien moins que sûrs (par exemple ceux de M. Walter Edmund Roth sur l'absence de totem de clan au Queensland N. Pour notre part, nous souhaitons ces enquêtes et ce travail sur la carte, mais nous croyons qu?il faut que l'enquête soit terminée avant que la carte soit dressée. Nous attendrons donc la fin de la recherche systématique que M. A. R. Radcliffe-Brown entreprend sur toutes les tribus pour essayer la classification que tente M. V. Le danger est encore plus grave qu?on ne croit ; il se double d?un défaut de logique. En le supposant établi, on infère en effet d?un fait négatif ; ce qui est toujours une faute en logique : encore plus en histoire. Car rien ne prouve que telle tribu qui n?a plus de totémisme n?en a pas eu, et qu?on ne puisse même expliquer cette absence ou cette perte ici ou là comme celle de tel ou tel instrument.

145La gravité de ces erreurs logiques et critiques apparaît encore davantage lorsqu?il s?agit de ce que M. V. appelle la « sociologie du totémisme ». Là, les erreurs de classification deviennent graves. D?abord celle qui consiste à appeler classes matrimoniales les deux phratries primitives (ex. : groupe si grave chez M. Fritz Gräbner et chez le P. Wilhelm Schmidt , et où M. V. (p. III) ne tombe pas tout à fait pour y tomber plus tard définitivement quand il vient aux conclusions générales (p. 142), moment où il admet l'existence de la « Culture à deux classes ». Ensuite celle qui consiste à opposer les classes matrimoniales du clan. Apparemment M. V. n?a pas étudié à fond la série des Mémoires que Durkheim a consacré à cette question dans L?Année sociologique (il ne cite pas le t. V) ni les critiques adressées à tant d?auteurs, à Northcote Whitridge Thomas en particulier. M. V. n?a pas compris (et peu de critiques de Durkheim ont compris) qu?il ne faut pas opposer le totémisme aux classes matrimoniales. Elles-mêmes ont dû être inventées en Australie, précisément pour permettre de compter les doubles lignes de descendance, régler des exogamies de divers sens, en particulier du clan local et du clan totémique pur. Raisonner autrement est commettre une erreur juridique très grande. Nous ne nous lasserons pas ici de protester contre cette erreur classique.

146Ce que M. V. dit (p. 103 sq.) des sous-totems et des classifications n?est pas très profond. Il ne connaît pas notre Mémoire, et le fait qu?il n?y ait pas de nom sous-totémique est faux. Par contre il a fort bien analysé et soupçonné l'importance des faits encore mal connus sur la division de parenté par « ombre » et « sang ».

147Nous nous excusons de cette longue discussion sur ce sujet si rebattu. Nous ne l'avons pas fait si à fond que par sympathie pour la méthode de M. V. et parce que son travail sera sûrement fort utilisé et non parce qu?il ne faut pas l'utiliser. Nous recommandons nettement les deux premières parties descriptives de l'ouvrage et mettons en garde contre la dernière. Il nous fallait donc montrer combien il y a d?hypothèses [dans] toutes ces classifications géographiques et historiques de faits sociaux. [...]. Enfin, il nous faut faire d?expresses réserves sur la façon dont ces hypothèses sont encore compliquées d?autres. Partant d?une soi-disant classification des langues australiennes du P. Schmidt et y superposant la division des « Cultures » australiennes de Gräbneret du P. Schmidt non moins hasardée, M. V. pense pouvoir y donner une vue « culturhistorique » du totémisme australien. Cette fois ce n?est plus une car[t]e qu?on joue, c?est un château de cartes qu?on va dresser. Nous savons que tout édifice scientifique est fragile. En conscience, les sociologues bâtissent moins et mieux. Mais dans l'intérêt de leur méthode elle-même, les « Culturhistoriens » feraient bien d?attendre la fin d?une véritable enquête linquistique sociologique et archéologique en Australie.

148M. M.

Charles Harrison . — Ancient Warriors of the North Pacific. The Haidas, their Laws, Customs and Legends, with some historical Account of the Queen Charolotte Islands, Londres, H. F. & G. Witherby, 1925, 222 p., in-8o, index [114].

149M. Harrison a été le premier missionnaire des Haïda* (île de la Princesse Charlotte) ; il a connu le fameux chef Edenshaw, le père ; (chap. XII [115]). Il a écrit la première haïda ; il a été le correspondant de Edward Burnett Tylor , et a formé pour les musées d?importantes collections ; il a résidé là-bas plus de quarante années ; il a été aidé dans la rédaction de son ouvrage par M. [Charles William Hobley , ethnologue distingué] ; il connaît l'œuvre de M. Franz Boas , s?il ignore celle de M. John Reed Swanton . – Et malgré tout, son ouvrage, presque de vulgarisation, est décevant. Nous indiquons tout cela pour montrer qu?il ne suffit pas d?avoir longtemps vécu dans une société hétérogène pour la comprendre, même quand on a charge de le faire. Il y a un sens ethnographique, sociologique qui ne se donne pas, et à défaut une éducation qui ne se remplace pas. M. H. est passé à côté des plus beaux faits et il était peut-être le dernier qui eût pu les enregistrer. Car les Haïdas disparaissent ou se transforment rapidement (p. 33). Et avec M. H. lui-même disparaîtront d?autres documents dont il n?a pas su nous faire part ici. Or, comme on sait, les Haïda, par leur art, sculpture et littérature, leur religion, totémisme et mythologie, leur droit et leur économie (sociétés, clans, potlatch) comptent parmi les sociétés dont l'observation eût été la plus féconde, tant au point de vue ethnologique qu?au point de vue théorique ou sociologique.

150Sur la religion des Haïda et sur leur totémisme. M. H. apporte peu de nouveaux faits. Il est même étonnant qu?il les décrive si mal alors qu?il a collectionné lui-même tant de poteaux et d?objets totémiques pendant tant d?années – il est vrai que le livre est probablement destiné au grand public et ne comprend pas d?étalage d?érudition. Mais justement sur ces questions un assez grand nombre de curiosités sont éveillées, et eussent pu être satisfaites sans que le livre devint moins intéressant pour cela. Parmi les détails un peu nouveaux les plus intéressants, on peut noter les manières spéciales à chaque clan (p. 49 sq.) comme ces [Tanu Haade] gens de mer qui sont réputés « gens de [...] aux bains » [116].) La description du shamanisme est assez nouvelle et précieuse parce qu?elle se réfère à d?anciennes observations (p. [98] sq. [117]) et à la description du Panthéon. M. H. a pu disposer de renseignements encore inédits même après les travaux de Swanton (p. 119 sq.) ; ai[n]si le rôle des dieux, en particulier dans l'administration des sanctions dans l'au-delà est fort important ; mais peut-être les légendes sont-elles un écho de la prédication russe ? bien antérieure à celle de M. H. Celles concernant les autres dieux et esprits sont moins remarquables, et d?ailleurs se répètent, et la version du mythe du corbeau [raven] et de la création de la terre (non pas du monde) est peu différente de celles qu?on connaît par ailleurs.

151C?est surtout en matière de droit Haïda, sur le clan, sur le potlatch, sur la chefferie, que ce livre est pauvre. Et nous ne voyons à noter que la courte histoire du grand chef Edenshaw, qui finit par l'érection d?un poteau totémique en l'honneur du gouverneur et celui-ci fut sculpté en redingote et chapeau haut. – À la page 72 on trouve un remarquable usage concernant la chose volée : le volé met son plat de bois à la porte des voleurs, et le lendemain y retrouve son bien. Nous mentionnons cela à titre de supplément à notre Mémoire sur le Don [118].

152M. M.

Sigmund Freud . — Totem et Tabou. Interprétation par la psychanalyse de la vie sociale des peuples primitifs [Totem und Tabu : einige Übereinstimmungen im Seelenleben der Wilden und der Neurotiker], Leipzig, Hugo Heller, 1913, 149 p., traduit de l'allemand avec l'autorisation de l'auteur par le Dr Samuel Jankélevitch , 1 vol., Paris, Payot, 1924, IX-221 p. [119].

153Cette traduction n?est pas irréprochable, et il y a lieu de le regretter, car l'ouvrage, aventureux et systématique, est riche d?idées qui méritent de retenir l'attention des sociologues. Très souvent le lecteur est arrêté : il ne comprend plus très bien, mais la faute n?est pas à Freud , qui écrit clairement. Si l'on se reporte au texte allemand, on va de surprise en surprise. Quelques exemples entre cent : p. 108 (texte français), le dernier alinéa commence un nouveau développement, mais une phrase essentielle est omise (und diese dann auf die Objekte der Aussenwelt übertrug [120]) et tout ce qui suit devient inintelligible. p. 129, le premier paragraphe, s?il était conforme au texte allemand, devrait instituer une comparaison sur un point précis entre les primitifs et les névropathes, et donner, en outre, une référence bibliographique importante : mais les quatre dernières lignes de l'alinéa allemand (ganz ähnlich wie...) et la note 1 de la page 123 sont supprimées dans la traduction [121]. Mais il y a plus grave : page 119 (2e al.), Freud a expliqué la magie par la subordination des relations entre les choses aux relations entre les représentations, et on lit, à la fin de l'alinéa : « À l'époque animiste, l'image du monde reflétée par le monde intérieur doit rendre visible cette autre image du monde que nous croyons reconnaître » (p. 120). On ne comprend plus du tout. Mais c?est qu?il y a un double contresens. Il faut lire « ... le reflet (ou l'image réfléchie) du monde intérieur doit rendre invisible cette autre image du monde... [122] ». Il s?agit bien – le texte et le contexte l'établissent sans réplique – de l'extériorisation des états psychiques qui font écran, pour ainsi dire, au monde réel.

154Espérons qu?une nouvelle édition, entièrement refondue, de cette traduction ne tardera pas à paraître – à l'usage, cette fois, des travailleurs et des savants.

155D. E.

B. ? Systèmes religieux à totémisme évolué Pygmées, Malayo-Polynésiens, Mélanésiens par M. M. Mauss

Sans titre. [Analyse de Paul Wirz , Die Marind-anim von Höllandisch- Süd-Neu Guinea, Hamburg L. Friederichsen & Co., 1922-1925, 4 t. en 2 vol., in-4o, I-II Teils [tomes] regroupés en I Band [volume], III-IV Teils, en II Band].

156Comprend : I. Band [volume], I. Teils. Die materielle Kultur der Marind-anim, 130 p., ill. II. Teils. Die religiösen Vorstellungen und die Mythen der Marind-anim, sowie die Herausbildung der totemistisch-sozialen Gruppierungen, 191 p. (Constitue une édition remaniée de la thèse de l'auteur sous le titre Religion und Mythus der Marind-anim von Holländisch Süd-Neu-Guinea und deren totemistisch-soziale Gliederung, Inaugural-disertation, Frankfurt am Main, A. Weisbrod (1920), VI-139 p.). II. Band. III. Teils. Das soziale Leben der Marind-anim, 222 p., ill. IV. Teils, Die Marind-anim in ihren Festen, ihrer Kunst und ihren Kenntnissen und Eigenschaften, 139 p., ill. Hamburgische Universität. Abhandlungen aus dem Gebiet der Auslandskunde, Fortsetzung der Abhandlungen des Hamburgischen Kolonialinstituts. Band 10, u. 16, Reihe B. Völkerkunde, Culturgeschichte und Sprachen, Band 6 u. 9.] [123].

157Cet ouvrage est un des plus importants qui ait été publié sur une société indigène dans ces dernières années. Même, sa valeur aurait dû être mieux remarquée par les revues spéciales qui peuvent devancer L?Année. Aussi allons-nous lui consacrer ici une étude approfondie de sociologie juridique et, plus loin, une sorte d?avant-propos et de résumé de tout un cours. Car c?est avec des documents fameux de Sir Walter Baldwin Spencer et Francis James Gillen , de [l'Australie], et avec quelques-unes des descriptions de sociétés de l'Amérique du Nord, l'une des plus notables, l'une des seules, l'une des rares descriptions suffisantes de sociétés totémiques. – D?autre part, au point de vue ethnographique pur, qui a aussi quelque intérêt pour le sociologue, elle éclaire l'ethnologie de la Nouvelle-Guinée en général, cette sorte de terre encore vierge de l'ethnologue, et elle [pose] de vastes problèmes que nous nous permettrons d?indiquer en conclusion, bien qu?ils ne soient pas du ressort direct de L?Année.

158M. Wirz est un sociologue et un ethnographe professionnel, à qui il faut faire un renom – en attendant que la vie lui fasse une meilleure place. La valeur historique et théorique de son information montre la supériorité incontestable de l'observateur entraîné et du sociologue professionnel. – Il a fait deux longs séjours chez les Marind-Anim – à l'est de la Nouvelle-Guinée hollandaise, le dernier dans des conditions assez heureuses, une grande partie de la tribu s?étant trouvé concentrée à [Merauke], espèce de ville qui se trouve autour du centre administratif ; et, n?y ajoutant plus les mêmes intérêts et secrets, autorisé aussi à des dépenses [...] – a représenté, pour une dernière fois, avec une couleur et des facilités remarquables, un nombre considérable de rites, de drames mythiques, etc., que M. W. n?avait pas pu constater lors de son premier séjour. – M. W. a eu d?autre part l'aide du missionnaire catholique des missions de Tilburg, dont les publications sur ces tribus sont elles-mêmes nombreuses et intéressantes, et s?étendent sur près de vingt ans. – La publication est luxueuse ; et cependant elle ne donne qu?un extrait des matériaux qui ont été rassemblés : objets de collection, photographies instantanées, etc. Seuls les phonogrammes manquèrent ainsi que les cinématogrammes. – Nous appuyons sur ces remarques un peu vulgaires pour bien montrer l'extrême valeur historique des documents de M. W. L?observation sociologique est arrivée à un point où ses résultats, concernant des sociétés infiniment séparées de nous, sont supérieurs à ceux que l'on peut extraire des histoires les mieux faites, même des époques les plus proches de nos sociétés. Nous irons même jusqu?à dire qu?il serait souhaitable qu?on décrivît de cette façon telle ou telle de nos sociétés modernes. Il n?en est pas une qui soit suffisamment connue. Même d?abondantes statistiques ne remplacent pas objectivement, totalement d?exactes descriptions.

159De plus les Marind-Anim sont une des plus grandes tribus de la côte méridionale de la Nouvelle-Guinée – étendue sur plus de 250 km de côtes et 450 km, dans l'intérieur. Ils ont compté de [...] membres au siècle dernier. Leur nombre a diminué terriblement dans ces dernières décades, la syphilis, la variole et la grippe de 1918 les ont réduits à moins de 10 000 et à se concentrer ; près de 4 000 d?entre eux vivent dans un rayon fort étroit. M. W. décrit fort bien les effets du contact avec les Européens (I, p. IV, p. [...]), ce clash comme on dit en anglais, des civilisations et des races, en particulier l'effet sur les coutumes, l'art, et sur l'espèce de [...] que procure aux Marind-Anim leur position d?échangistes vis-à-vis d?une colonie européenne. Il est merveilleux qu?en face d?une morphologie sociale si altérée, une physiologie sociale si intacte ait encore pu être constatée.

160Les Marind-Anim étaient d?ailleurs par rapport à leurs voisins de langue et de civilisation [Kanum ?]-Anim, etc., parmi les plus intéressantes des populations de la Nouvelle-Guinée. Ce sont eux les fameux chasseurs de têtes, terreur des îles et de la côte et d?une partie de l'intérieur à de longues distances. On les connaissait jusqu?ici sous le nom de [...] (qu?on leur donne en Nouvelle-Guinée britannique), de Kaya-Kaya (évidemment mot du [...] désignant le cannibalisme [124]. Enfin, ce sont les Papus, ou plutôt ils appartiennent à une famille de peuples dont le [...] résiste à l'analyse comparative et où l'on ne peut dégager que quelques éléments australiens, et assez purement mélanésiens, et la civilisation matérielle, relativement très développée. Ils sont apparentés à des tribus de l'W. de la Nouvelle-Guinée britannique, surtout de l'intérieur – et viennent même peut-être de cette région, où ils localisent de nombreux mythes d?origine de leurs clans. Enfin, M. W. les rapproche justement des tribus des îles du détroit de Torrès, qu?a décrites la fameuse Cambridge Expedition. – La masse du travail de M. W. porte sur leur religion où il a trouvé en effet des faits considérables, en quantité et en qualité.

161M. W. étant au courant des questions concernant le totémisme australien, a su chercher à fond et sans parti-pris. Théoriquement il tient compte critique des aventureuses hypothèses de MM. Gräbner et Schmidt (voir en particulier III, p. 212, 214 [125]) sur la « culture de l'arc » et celle d[u] « b[o]omerang », sur le « système des deux classes », etc. Mais il a été tout de même bien guidé par son sens sociologique. Et il a réussi à démêler à peu près tous les éléments de totémisme australien dans le totémisme de ses Marind-Anim. La seule différence sensible tient peut-être à une insuffisance d?observation, à une sorte d?indifférence de cette tribu vis-à-vis de toute réflexion de ce genre : nous ne trouvons nulle part, après avoir relu ce livre, d?indication sur la nature des croyances concernant la réincarnation des âmes. Nous avons tous les éléments de la croyance : des représentations des ancêtres totémiques par leurs descendants, quelquefois masqués (III, p. 137), toujours peints et décorés, les D[e]ma ; des centres totémiques, Dema mirov, où résident les ancêtres, encore éternels, et d?où émanent encore des forces ; des prénoms nettement totémiques, qui marquent que le nouveau-né est u[n]e particule du clan (grosse noix de coco ; banane blanche, crabe puant) ; même l'organisation dont la prépondérance est d?ordinaire la cause des croyances en la naissance miraculeuse (cf. L?Année sociologique, nouvelle série, t. I, 1925). Le clan local masculin prédomine chez les Marind-Anim. La croyance elle-même n?est pas là. Les notions concernant la [m]ort et l'au-delà sont d?ailleurs vagues (III, p. 120, 126 sq. [126]) et contradictoires, la survivance étant plutôt réservée aux membres des deux grandes confréries secrètes [Mayo et Imo] (III, p. 149, cf. p. 89) sur lesquelles nous reviendrons. Le reste du tableau de ce totémisme néo-guinésien est sans trou.

162I. — [Intichiuma] – L?ensemble des rites totémiques, dans la mesure où ils ne sont pas destinés à l'agrégation des femmes et à assurer leur virilité et fécondité, sont destinés à multiplier l'espèce animale ou végétale dont le clan est propriétaire et propriété à la fois ; tout au moins dans le cas des totems aberrants assez nombreux, par exemple l'arc [Der Bogen] (III, p. 105) à renforcer l'ancêtre, le Dema et les sous-dema totémiques qui confèrent par [...], à leurs descendants à tous les arcs et à chacune de leurs parties, leur animation, leur élasticité, leur efficacité : – Chose également notoire, les totems principaux, peut-être de phratries – (cf. plus loin, Sociologie juridique), du sagou et de la noix de coco, sont arrivés à concentrer en eux une bonne partie des cultes agraires. Comme chez les Indiens Pue[blos] d?Amérique, le totémisme a développé là une rare faculté d?adaptation. Mais si par un côté elles ont un développement indéfini, les cérémonies de fécondation sont d?autre part d?un type étrangement primitif (castes et danses), dramatiques, lyriques et musicales, et mythiques, à formules extrêmement sommaires et brèves ; les dernières peuvent dégénérer presque jusqu?au rang de formules magiques (II, p. 17), mais même alors elles sont dites, et de même les rites, quand ils ont perdu presque toute sorte de publicité (voir cependant III, p. 93), sont faits en vue des Dema ancêtres totémiques et de leurs familles. Le rituel est en général plutôt représentatif du mythe que purement actif ou [...] même il comprend presque toujours des scènes d?extravision de sang (à propos des décorations), des orgies sexuelles, en particulier avec des femmes normalement interdites, et des communions, en particulier par le sperme.

163II. — La liaison entre un rituel dramatique essentiel efficace et la mythologie est un autre point commun aux religions australiennes – sûrement au moins centrales (du N. au S.) et probablement générales. Les documents de Carl Strehlow sur les Aranda et Loritja, ceux de Spencer et Gillensur les Warramunga, ceux de Spencer sur les Kal[k]adu démontrent que les intichiuma – et non pas seulement les cérémonies totémiques d?initiation pour qui c?est naturel – sont plus que des rites mimétiques et surtout représentent [les flèches] de l'ancêtre totémique au temps où il était indéterminé entre sa nature, celle d?homme, et celle d?être sacré et d?esprit. Ce qui revient [à] l'acte mimique, mais avec en plus une complication symbolique. Voici que M. W. nous apporte la preuve rigoureuse qu?il en est ainsi chez les Marind-Anim. D?une part, toutes les représentations totémiques assurent la fructification des espèces animales et végétales, la bonne marche des choses et événements que symbolisent les totems aberrants, [...], l'arc, le sommeil, etc., et en même temps elles établissent, affermissent la communion avec les Dema toujours présents à un point du sol et leur suite ; communion, transmission de vertus, expansion d?[...] (II, p. 16, 111, p. 94, etc.). Le fait de représenter les D[e]ma, de les figurer, de danser, d?être comme eux, de chanter les chants qu?ils chantaient, voilà la meilleure [mot manquant ?] pour l'invoquer et invoquer à la fois les êtres éternels et passés et présents, futurs, et les bienfaits qu?on sollicite immédiatement de cette apparition. Même s?il n?en est plus dupe et s?il sait ce que ne savent pas les profanes, novices et femmes – que la mascarade extrêmement puissante, ne déguise que les figurants, membres du totem – le Marind-Anim croit que cette fiction repose sur quelque chose, sur le fait sur le [sic] mythe vrai de toute vérité, et que sa mimique et son chant sont la vraie nature de la chose (II, p. 68 [127]).

164III. — Le caractère dramatique (comparez justement à notre théâtre) (IV, p. 50) correspond à l'extrême force de la croyance mythique. Nulle part et à propos d?aucune tribu la liaison étroite, l'unité, la coïncidence du mythe et du rite dans le drame religieux n?ont été mieux marqués que par M. W. chez les Marind-Anim. Ou nous nous trompons et M. W. se trompe aussi, mais nous ne connaissons dans cette nation presque pas de mythes qui ne correspondent à une de ces représentations totémiques et autres M. W. a établi lui-même la série des rapprochements (cf. II, chap. 4 ; cf. IV, chap. 5 à partir de la page 51) qui s?imposent. Seuls quelques mythes d?origine (II, p. 184) de l'arrivée des Européens, de l'au-delà, ne coïncident pas tout à fait à des rituels (et encore, car nous croyons bonne l'interprétation par M. W. du mythe de l'ogresse Sobra* comme mythe de fondation de la chasse aux têtes, qui devient ainsi un gigantesque rituel). – Et inversement tout rituel a son fondement mythologique, il fait partie de la « coutume des Dema », qui l'ont joué en même temps que pratiqué, qui, de même que les iruntrerinie Arunta la dansent, la miment et la chantent encore d?eux mê[mes] quelquefois. – Cette union du mythe et du rite est même si étroite chez les Néo-Guinéens – comme en Australie centrale (N au S.) tout au moins qu?elle donne un caractère très accentué à l'un et à l'autre. Le mythe souvent puissamment imaginatif est sec, brutal, composé de peu d?épisodes, ceux au fond qu?on peut représenter. Le rite est au contraire d?une rare valeur esthétique. – Les appareils par lesquels on réussit à reproduire – nous ne disons même pas symboliser – toutes sortes d?êtres et de choses, par exemple les vagues de la mer (voir IV, pl. 36, et généralement les pl. de IV) lors des waiko et des wial sont d?une extraordinaire beauté, même dans un pays d?art aussi remarquable que la Nouvelle-Guinée en général. Nous reviendrons sur ce caractère esthétique.

165IV. — La relation entre le mythe et le rite d?une part et l'organisation sociale de l'autre sont non moins claires. Tous les rites et tous les mythes sont rattachés et à des lieux déterminés, aux centres totémiques, aux clans locaux et à des segments sociaux déterminés, phratries, clans, sous clans, des divers ordres) ou grandes confréries secrètes du Majo et de L?[Imo]. Peu de preuve plus éclatantes peuvent être données des théories que Durkheim soutint avec nous. C?est vraiment la société qui se représente à elle-même – et si elle se représente autre chose –, à savoir la nature, les esprits, et les forces sur lesquelles elle agit, c?est encore à travers elle-même qu?elle se la représente.

166À ce propos, M. W. a enfin résolu, chez les Marind-Anim au moins, un problème plus général que nous avions posé Durkheim et moi dans notre essai sur les formes primitives de classifications (L?Année sociologique, vol. VI, 1903 [128]). Nous avions déjà indiqué alors plusieurs faits néo-guinéens et avons souvent retrouvé d?autres faits de même genre dans la même région (voir L?Année sociologique, vol. [XII], 1913, compte rendu de Charles Gabriel Seligmann , Richard [Neu]hauss, etc. [129]). Les totems « enchaînés », les linked totems sont pour ainsi dire la règle par là-bas. Mais nous sommes maintenant en mesure de préciser. – D?abord c?est bien toute la nature qui est répartie entre les clans et sous-clans. C?est bien une « forme » de pensée qui s?applique a priori à tout. M. W. souligne à maintes reprises qu?il s?agit d?un Universal totemismus. Et nous nous demandons si ce fait nouveau, cette observation claire et complète fera taire quelques plaisants critiques. – Ensuite la hiérarchie logique des classes des choses et des totems est bien exclusivement la hiérarchie des clans et sous-clans – et l'inverse est également vrai. L?une des meilleures pièces de travail de ce livre est même cette « revue d?ensemble » de chaque groupe de totems et de choses donnée après chacune de énumérations (II, p. 49, tableau p. 79 ; p. 115, tableau p. 119, etc.). Elle n?est viciée que par certaines fautes de nomenclature juridique que nous essayons d?atténuer plus loin (Sociologie juridique). Il en ressort. Les clans et les familles ont des liens de parenté parce qu?ils sont liés mythologiquement (M. W. intitule cela correctement mythologisch-totemistischer Verwandtschaftskreis). Et inversement, les formes et les essences des choses sont mythologiquement associées en familles parce qu?elles sont réparties comme les hommes et avec eux. Mythologie, organisation des idées et organisation sociale forment pour ainsi dire des termes interchangeables, et la subsumption des classes de choses non seulement est connue à la façon de la subsumption des sous-clans aux clans, elle est la même, il n?y en a qu?une. À l'appui de l'hypothèse que nous avions timidement exposée sur la nature des sous-clans et leur rôle classificatoire, nous avons maintenant un fait complètement et parfaitement observé.

167Il y a plus. M. W. donne maintenant le moyen de concevoir comment s?est opérée à la fois la segmentation des phratries, clans, sous-clans et sous-sous-clans, et la classification parallèle des choses, ou plutôt comment on a par des séries fait coïncider les deux. Il conçoit même le fait sous forme historique et croit pouvoir en tirer une histoire des migrations et des alliances des clans, voire une histoire de la tribu – avec l'aide des mythes de voyages des totems ancestraux. Que toute la mythologie de cette sorte de nation soit sans valeur historique, nous nous garderions de le nier. En particulier que les « centres totémiques », les dema mirav soient presque tous situés ou hors du domaine actuel ou dans la moitié orientale de ce domaine prouve bien cette migration. D?autre part que certaines « associations de totems » se soient bien établies lors d?agrégations historiques des clans, c?est ce qui est non seulement possible, mais probable, et évident même dans quelque cas, deux ou trois. Comme tous les clans sont locaux et paternels, leurs déplacements ont entraîné forcément ces agrégations et ces scissions. Et ces faits historiques s?expriment nécessairement dans la mythologie et la symbolique totémique – qui sous ce rapport rend aux clans le même service que la héraldique – lointaine [...] rend encore à notre noblesse : l'histoire des blasons est l'histoire. – Seulement il y a autre chose que l'histoire, et, comme dans le blason, il y a la légende qui a ses lois, sa vanité, sa logique, et dans le cas présent sa valeur morale et mentale, quasi scientifique, religieuse certainement. Les clans se répètent et s?envient leur histoire totémique, l'accrochent ou s?arrogent celles-ci. Le tout forme une mythologie qui répète l'histoire sociale. Mais cette série des idées mythiques s?enchaîne à des principes d?une logique qui n?est différente de la nôtre qu?au moment de la formation des concepts. Et elle abonde en faits pour comprendre cette formation de ces concepts, de ces associations de concepts. Le dema ancêtre totémique principal est généralement accompagné dans le mythe et dans le [rit]uel dramatique d?un cortège de jeunes gens – ou d?autres dema d?autres « clans associés » à l'intérieur des grands groupes gbi-ze et mahle-ze – ou a des parentés de clans Boan (pour nous servir de la terminologie de M. W. – ou nettement subordonnés, en tant que dema des « sous-clans » aux dema des « clans » ; et chacun de ces dema, presque tous – sont à leur tour accompagnés de leurs « nakari », de leurs femmes, sœurs ou belle-sœurs, en tout cas femmes interdites – nous reviendrons (Sociologie juridique) sur ce terme – avec lesquelles ils forniquaient constamment comme ils font encore. Ces nakari sont généralement les oiseaux, les parasites qu?on trouve sur l'arbre ou la plante du totem principal (cf. II, p. 20 [130] ; IV, p. 131), les animaux qu?on chasse à l'entour des sources des rochers. Ainsi, comme il est naturel, le clan de la mer – ou des vagues – est parent de l'eau, de l'[e]au douce, de la pluie, des poissons et fruits de la mer – dont d?autres d?ailleurs forment un autre Boan, tout en étant lié (à l'intérieur de la phratrie exogame des Bragai-ze* (II, p. 139, voir Sociologie juridique au Boan du [Krokodil-(Kiu)-Boan ou de Sperma (Karoona)-Boan] et de la noix d?arec (venue par mer), et à ceux de l'aigle de la mer, à celui d?un grand arbre dont naissent les poissons [Fisch (Ave)-Boan] ([II] p. 137). Ailleurs, les différentes compagnes du Dema – du Sagou*, associées sexuellement à la fertilité de la plante sont l'une celle de la racine, l'autre celle de la pointe, l'autre celle du sommet, etc. (ibid., p. 154). Les classes du totem du feu sont aussi longuement [étudiées]. M. W. (ibid., p. 156) va trop loin quand il parle de « pure analogie », comme fondant ces systèmes. Mais il sent bien le problème et l'a supérieurement éclairé, grâce aux Marind-Anim eux-mêmes, exceptionnellement conscients de leurs actes.

168V. — Sur deux autres points, M. W. apporte des notations judicieuses. D?abord sur la notion de mana, dont il nous fournit un exemplaire fort complet, la notion de wih (II, p. 2-5). Le passage serait tout entier à citer et confirme tant tout ce que nous avons écrit ici qu?il n?y a pas lieu d?insister. M. W. rapproche plus que nous ne faisons cette notion de celle de vie – non pas d?âme, qu?on le remarque bien. Les rapports entre la notion de mana et celle d?ancêtre totémique sont assez nets. Les Dema sont des Wih-anim [(des S[a-anim/Sago ?]), j?aimerais mieux dire des êtres entièrement wih) : mais bien d?autres choses sont wih, par exemple l'élasticité de l'arc, et le suc nourricier des plantes.

169VI. — Enfin, sur le culte des soi-disant sociétés secrètes nous disposons maintenant de faits capitaux non seulement en ce qui concerne la Nouvelle-Guinée, mais absolument. De plus en plus se vérifie l'hypothèse que nous avons toujours maintenue ici, à savoir que ce sont plutôt des confréries à fonctionnement partiellement sexuel, mais à recrutement et à fonctions publiques. Ce qui fait qu?elles apparaissent nettement comme des fragments de la société des hommes. Elles ne sont pas différentes sous ce rapport des sociétés américaines du même type. Les rangs dans le Ma[y]o et dans l'Imo Marind-Anim sont ceux de la société des hommes. De plus, sauf un petit nombre de rites, de mythes et de droits (voir plus loin à propos du potlatch Marind-Anim), comme dans la tamata des îles Banles, tout l'ensemble cérémonial est constitué par les séries de représentations de totems, et des initiations. Nous sommes à la fois très loin et très près des Australiens centraux, et les cultes des autres Mélanésiens s?éclairent. Enfin, on voit comment dans ces cultes « initiatoires » ont pu se développer des formes de rituel extrêmement élevés, en particulier le sacrifice proprement dit, le sacrifice humain en particulier, nous dirions presque le sacrifice de dieu. Car en plus des sacrifices de captifs et d?esclaves, ont lieu des sacrifices précédés de rapports sexuels et suivis de consommation des chairs de jeunes gens et de jeunes filles de la tribu (voir en particulier II, p. 43, cérémonie de l'Ezam). D?autre part, ces sociétés assurent une certaine immortalité à leurs membres (III, p. 142 sq.) Pour achever le tableau il est bon de savoir que la société des Mayo a – avec les clans du [...] de prêtres des cultes de la végétation et du feu. – Nous regrettons vivement que M. W. n?ait pas pu apprendre davantage sur toutes ces sociétés. Et en particulier qui appartient au Mayo, qui à l'Imo. (Les sociétés du sosoum, diable, rhombe semblent avoir fonctionné pour tous.)

170VII. – L?étude de la magie (III, 3 [131]) comporte heureusement celle des formes magiques (III, 4) et constitue une des meilleures formes de monographie de magie mélanésienne. Cette magie est en étroit rapport avec le totémisme. – Les documents sur les interdictions rituelles sont solides mais sommaires.

171Ainsi la religion Marind-Anim couvre une sorte de considérable étendue d?évolution : touchant par ses racines à des types australiens, élevant ses frondaisons jusqu?à des formes d?association religieuse et de cultes d?ancêtre, sans abandonner le totémisme. Nous verrons plus loin, à propos du droit et des autres phénomènes sociaux Marind-Anim, quelles conclusions ethnographiques on pourrait peut-être tirer de ces constatations.

172M. M.

Charles E. Fox. — The Threshold of the Pacific. An Account of the Social Organization, Magic and Religion of the People San Cristoval in the Salomon Islands, Londres, Kegan Paul, « History of Civilization », 1924, XVIII-379 p., in-8o, index [132].

173La collection « History of Civilization » que M. Charles Kay Ogden dirige avec activité, contient la traduction de tous les volumes de M. Henri Berr , L?Évolution de l'Humanité, plus un certain nombre d?autres volumes dus à des savants anglais. L?ethnologie et la préhistoire y tiennent plus de place. Même des livres de pure description, de sources, y sont compris ; celui-ci en est un. Il est vrai qu?il contient une préface fort générale de M. Grafton Elliot Smith , et une découverte ou soi-disant telle qui confirmerait de façon fort éclatante les théories de celui-ci. C?était même ce fait qui aurait décidé notre regretté William Halse Rivers à abandonner son opposition à la théorie de l'origine égyptienne d?une bonne partie de la civilisation océanienne (cf. W. H. Rivers, Psychology and Politics, p. 130 [133]).

174Cette île mélanésienne, la plus orientale des Salomon (de là le nom ronronnant et inexact de « seuil du Pacifique » – le seuil du Pacifique c?est le détroit de Timor pour les ethnologues comme pour les géologues et les naturalistes) présente parmi les très nombreuses (neuf) formes d?enterrement en usage, un enterrement sans tumulus (heo) (p. 2[1]8 sq.) distingués en torona et mastawa. Ce dernier nom même serait étrangement égyptien (mastaba). Le chef est enterré au centre, sur une plate-forme, dans un trou comblé. Chose singulière, les torona – qui ne portent pas ce nom égyptien – sont plus proches du tombeau égyptien, car le tumulus est plus compliqué : au-dessus est un dolmen « pierre [exaltée] » [hau suru : exalted stone] (en réalité pierre de l'âme, ou « pierre-âme », le sens est clair) sur ce dolmen on fait des offrandes. Et dessous [...] dessus des crânes autour des pierres et même des [statues] de pierre où réside le « double » (cela traduit avec une légère audace adaro-ataro, cf. p. 230) [134]. Jusqu?ici rien d?extraordinaire en Mélanésie. La Nouvelle-Calédonie abonde en choses de ce genre et il n?est point besoin d?aller jusqu?en Égypte pour chercher des modèles de cela. Le « trait égyptien » c?est que le tumulus est percé d?un trou circulaire, dans toute sa profondeur et que les ossements du mort sont déposés dans une chambre funéraire située au bout de ce trou.

175Dans [...] du « diagramme » [« Diagram of a stone heo »] (p. 219) on parle même de corps momifié. Cela est une erreur grave et regrettable. Le corps est simplement déposé dans cette chambre pour être mené régulièrement à l'eau, pour hâter au contraire la décomposition des chairs (p. 220, p. 212). Les neo sont encore en usage. Mais M. Fox ne connaît ces usages que par on dit. On y danse, on y sacrifie, le mort y habite. Il est évident qu?il y a là une remarquable coïncidence [...]. Le reste est commun à bien d?autres peuples. – Mais cette disposition n?est pas exclusivement égyptienne. La préhistoire et l'histoire nous la montrent répandue ici ou là, en Afrique W ou en Europe dans des localités séparées de l'Égypte [...] ayant bien d?autres modes d?enterrement définitif. Même il reste à savoir si ici comme ailleurs, le mode n?a pas été emprunté à telle autre civilisation – connue ou non de l'Égypte, et ainsi de suite. Même nous dirions qu?il y a ici simple accident et récurrence fortuite au milieu des neuf autres rites funéraires, si cet enterrement de chef au milieu de ses gens n?était bien caractéristique du district d? « Araha », du clan des Araha et de la caste araha (areoi, ariki, etc., chefs en Polynésie). Ici le fait linguistique, le fait archéologique et sociologique s?accordent (resterait à voir le fait archéologique). Et comme San Cristo[b]al est bien mélanésienne mais presque aussi fortement polinisée par des polynésiens que Fiji, nous ne faisons aucune difficulté pour reconnaître que ce mode d?enterrement est spécial à un clan de chefs, d?une souche sociale différente, polynésienne sans doute. Donc, sur ce point, mais sur ce point seulement – du fait d?une mixture de plusieurs populations en Mélanésie, nous sommes d?accord avec M. Rivers et ses amis –, et nous l'avons toujours été. Nous n?exprimons de réserve que sur les dates et les origines, surtout telles que les conçoit M. Elliot Smith. Elles sont pure construction d?hypothèses. Toute cette discussion paraît bien longue peut-être, mais il faut continuer à résister puisque les autres continuent à écrire et à gâcher les plus beaux sujets, ceux que l'archéologie préhistorique éclairera un jour.

176Et puis, le fait est après tout petit, sauf au point de vue historique ; puisque ce n?est qu?une des neuf – ou vingt et une – (cf. p. 229) façons d?opérer le second enterrement. – (Tant il est difficile de caractériser une population même par une institution, puisque celle-ci peut revêt[i]r tant de formes !) Le reste du livre est plus intéressant pour le sociologue.

177La plus grande partie est consacrée à la religion. En premier lieu, on trouvera une importante description de la notion de mena (mana). Elle confirme singulièrement les anciennes recherches de M. Robert H. Codrington dont nous nous sommes nous-mêmes servis (voir surtout p. 236 sq., 231-253, de l'hypothèse historique d?une origine étrangère, p. 242 de la notion, nous ne disons pas du mot, elle est enfantine). La [n]otion, etc., ici est plutôt magique que religieuse, bien qu?elle s?étende à la religion et au culte des esprits. La notion d?âme ou plus exactement celle de principe, de l'aunga (M. F. eût dû rapprocher le mot et l'idée de Hau maori au polynésien) est en relations directes avec celle de mana : et même les diverses sortes d?esprits les adara (atero de Codrington) [...] tirent une partie au moins de leur pouvoir [...] et des choses où il se concentre (voir p. 253, liste de ces choses).

178L?étude de la maladie, de la médecine, et de la magie semble suffisamment approfondie sinon complète et comprend un assez grand nombre de faits intéressants du type mélanésien habituel. Elle a des fortes analogies avec celle que M. Bronislaw Kaspar Malinowski a si bien décrite aux Trobriand ; celle des souffles (mena, p. 100) y tient une grande part (p. 258, 103, etc.). La religion se distingue mal de la magie, surtout dans le rituel oral, là où l'on croirait qu?elle devrait le plus exprimer cette distinction, le rituel manuel et celui des souffles restant relativement le même. L?un et l'autre font emploi du même mena, et des deux mêmes groupes d?esprits des adero et des figona. Et même lorsque le rite total (souvent sacrificiel) est adressé à ces esprits, la formule garde un aspect direct ; assez souvent elle ne fait même pas allusion à cet esprit destinataire (voir p. 100 sq.). Même les mythes, légendes et contes, dont seule cette série comique (Masi, et non Massai, p. 149 sq.) se distingue, ont tous le même aspect à la fois fantastique (voir les très belles reproductions de dessins au trait indigène) et positif, terre-à-terre ; la distinction entre les esprits revenants des hommes qui portent le même nom que ceux des dieux (adoro), des héros adorés et des héros de simple légende est faible, sauf peut-être un seul Hatuibwari, le serpent cité, à Arosi (p. 236 sq.). La question du totémisme et de l'ensemble des pratiques et croyances morphiques à San Cristo[b]al est bien exposée, comme celle des cultes [...] morphiques (chap. XIX, XX [135]). Les cas de totémisme proprement dits sont rares et semblent restreints à des formes secondaires et évoluées. De là à croire qu?il appartient à une dernière couche de civilisation, distinct de celle des dual people (p. 275), il y a un grand pas. M. F. le franchit sans l'ombre d?une preuve, nous allons voir pourquoi, à propos de la sociologie juridique.

179Son but dépasse la pure description. Il veut déjà prouver les hypothèses de M. Elliot Smith grâce à la découverte de la soi-disant mastaba, de celle du canot à p[r]oue élevée et décorée d?œil et à quasi-ch[â]teau de poupe, soi-disant semblable au canot de mer égyptien (fig. 4 et 4 a.), mais le canot égyptien a des rames au moins de gouvernail et le rapprochement est mal venu) de quelques autres concernant la [...] et la [...] et la conque qui appartiennent en effet les uns au monde mélanésien, les autres au monde des mers du Sud, et même du Pacifique tout entier. Et il veut surtout, à la lumière des hypothèses de M. Smith, imiter son initiateur M. Rivers , et faire l'histoire de la civilisation de San Cristo[b]al. Et c?est assez simple : On fait l'histoire de l'organisation sociale de l'île et des trois petites îles environnantes (Ugi, Santa Catalina, Santa Anna) en partant comme d?une donnée (voir p. 18) des conclusions de Rivers, si contestées et si contestables.

180Il retrouve donc d?abord le dual people, l'organisation sociale en deux « moitiés » sans totem (p. 38-41, 364) [...] (des traces simplement à Arosi, autre district de l'île). Et on oublie, ce qui est formellement dit (p. 39), que les clans totémiques qu?on trouve dans cette région comme à Arosi sont considérés comme des branches des deux moitiés. De plus (cf. 35 et p. 46) les informations de M. F. sont contradictoires quant à l'absence de totem des Atawa, et même des Aniwea* ; enfin, il y a lieu de mettre en doute le soin avec lequel ont été prises ou consignées toutes ces observations ; c?est ainsi qu?après qu?il nous dit que ces « clans » sont exogames, on nous dit (p. 36) que le mariage se fait « à l'intérieur des moitiés ». – Jusqu?ici M. F. comme M. Rivers ne fait que continuer l'erreur des ethnologues allemands qui isolent sans droit l'organisation en deux moitiés de l'organisation en clans, et n?y reconnaissent pas les deux phratries. Nous répétons qu?ils se trompent : ce sont des phratries et celles-ci sont des restes ? en effet, mais infiniment lointains de deux clans primaires exogames, mais non incompatibles, ici comme dans le reste de la Mélanésie, avec leurs [ « branches » ] totémiques et ne provenant nullement d?une autre civilisation. Mais il ne se contente pas de son erreur. À l'exemple de son maître Rivers, il veut voir dans cette dual organization (à notre sens inexistante) le fruit d?une coalescence de deux sociétés, l'une supérieure, les Atawa, l'autre inférieure, les Anwea, celle-ci plus ancienne que l'autre immigrée.

181Peu d?hypothèses de M. Rivers furent plus malencontreuses. Ici le seul fait qui puisse être invoqué dans le cas du district de Bautro, à San Cristo[b]al, la confusion entre Arawa et Araha que le clan des Araha dont nous avons déjà parlé, incontestablement clan de chefs (non plus la phratrie) dans l'autre district et à Arosi, porte aussi quelquefois le nom d?Atawa qu?à Bauro le clan des Araha en fait partie ; et qu?enfin tous les privilèges (p. 35 sq.) de cette phratrie sont du type d?une société aristocratique. Le fait serait convaincant s?il n?était pas plus facile de l'expliquer autrement. Une invasion polynésienne d?araha (ariki, aroi, etc.) a constitué à Arosi et ailleurs, une caste, comme partout la classe des chefs, en Polynésie (atawa veut dire évidemment... esprit, chef) ; à Bano, cette caste s?est encastrée comme un clan dans une des deux phratries préexistantes et peut-être a même donné son nom à cette phratrie. Mais ce n?est pas (même dans l'hypothèse de M. F.) – elle qui a donné naissance aux deux phratries.

182Cette façon de présenter les choses est d?autant plus malheureuse qu?elle part d?un principe juste et d?un fait sûr. Elle interprète mal et historiquement un fait historique incontestable, à notre avis une colonisation plus ou moins vétuste (ou récente) par des chefs polynésiens, se greffant sur une plus ancienne civilisation à phratries et à clans. Ce qui est simple, vraisemblable, évident, et que l'on complique à plaisir par des arrivées d?Égyptiens qui n?ont rien à faire dans la bagarre. Que la civilisation à l'ouest de la dernière des îles [Saloman] soit une civilisation à nombreuses formations, invasions côtières en particulier, et à déformations et à multiples apports, c?est ce qui est évident – qu?il soit absurde de la considérer comme primitive et pure, c?est encore évident – Tout le dernier chapitre (p. 350 sq.) tourne autour d?un fait mal conçu, mais certain.

183D?autant plus certain que récemment encore la plus profonde des institutions domestiques, la nomenclature et l'organisation de la parenté, a subi à San Cristo[b]al de graves modifications. [L]e mariage y est devenu anomalique ; normalement il est devenu gérontocratique, et on épouse non plus la cousine croisée [...] – qui devient tabou mais sa fille, une fille d?une génération postérieure (cf. p. 61).

184Quoique toutes les recherches de M. F. sur ce point soient encore sommaires, elles sont bien intéressantes en ce qui concerne les tabous de la sœur, de la belle-[mère], etc. Il y a de nombreux potlatch au cours des diverses fêtes (p. 103, 313, etc.), voir p. 348 (?) un plan de plateformes avec dons exposés). M. F. ne connaissant pas ce type de faits l'a fidèlement décrit mais très sommairement.

185Le livre est précieux. Il l'eût été bien plus, si au lieu de concevoir une histoire prématurée, l'auteur avait plus approfondi les faits.

186Il est vrai qu?il fut encouragé à procéder ainsi par M. Rivers qui vit dans ces faits (« The Unity of Anthropology », Journal of the Royal Anthropological Institute, 1922 [136]) une preuve décisive des théories de M. Elliot Smith et des siennes. C?est parce que ces erreurs sont sanctionnées ainsi et se propagent et que l'auteur en [...] qu?il nous a fallu souffler sur tous ces ch[â]teaux de cartes.

187M. M.

Amérique du Nord

Paul Radin . — Monotheism among Primitive Peoples, Being the Seventh « Arthur Davis Memorial Lecture ». — Delivered before the Jewish Historical Society at University College on Sunday, April 27, 1924. Nisan, 23, 5684. Forward by Israel Zangwill , Londres, Allen & Unwin, 1924, 70 p., in-8o[137].

188Le distingué ethnographe et sociologue a apporté, devant un public judaïque, de l'eau au moulin du P. Schmidt (cf. p. 68 où l'Origine de l'Élu de Dieu est considérée comme une excellente discussion du problème) ; même l'archevêque et ancien Pr Nathan Söderblom est encore [trop] évolutionniste pour lui (p. 63) et dérive trop l'idée de Dieu, de grands dieux, de celle de mana. M. Radin croit que le monothéisme est « un type de pensée et d?émotion [inhérente] » et « parfaitement défini », chez un grand nombre de peuples primitifs [138]. Par là, il n?entend rien de révélé – ou du moins il s?abstient de cette théologie, et d?autre part, il ne nie ni le polythéisme, ni le mana, ni l'animisme de ces tribus. Il réclame simplement, pour la notion du grand dieu, la même place, logique et chronologique que pour les autres.

189Le point le plus important est la discussion de la notion de wakan, chez les Dakota, Wi[nn]ebago et autres Sioux que M. R. connaît en effet bien mieux que quiconque. Il y aurait peut-être en effet à estomper les contours arrêtés que lui a donnés George Amos Dorsey à la suite duquel John Napoleon Brinto Hewitt, Durkheim et nous avons spéculé. Il y a eu sans doute là quelque chose de plus compliqué que le simple mana. Mais inversement, que prouve une interprétation mystique donnée à cinquante ans de distance, et où le wakan suivant l'information de M. James R. Walker (Anthropological papers of the American Museum of Natural History) [139] n?est réellement que Wakan Tanka, le « Grand Mystère » la puissante individualité qui réside derrière les Wakan-Tanka Waste, les dieux bienveillants, et les Wakan Tanka Sica, les dieux malveillants, la « trilogie » Siou, influencée depuis trois siècles par la prédiction a fini par faiblir juste depuis le développement de la [...] p. 48. Et les quatre essences de Wakan Tanka ; grand Dieu, Créateur, Grand Esprit, Exécuteur, ressemblent un peu à la « Trinité ». Tout comme le Winn[ebago] de M. R. lui-même fait un effort consciemment [sotériologique] et inspiré – il est vrai – du culte américain des [peyotls [140]], mais aussi d?une idée chrétienne de l'âme.

190Mais ce que l'auteur nous semble relativement prouver – au moins quant à l'état actuel de quelques religions dites primitives –, c?est que l'esprit théologique y est intégralement réparti ; certains esprits sont enclins à des spéculations qui restent étrangères aux autres, et qui ne manquent ni d?ampleur ni d?élévation ? (p. [55-66 sq.]). Il n?y a d?ailleurs aucune raison pour supposer que la religiosité et surtout le raffinement des concepts et des sentiments soient ou aient été, dans les sociétés primitives, plus uniformément répandus que la moralité ou le sens esthétique. C?est Durkheim qui a dit que le crime est un phénomène normal. En religion comme en toute autre part de la vie sociale, l'écart est la règle de toute statistique. Qui l'a jamais nié. La moyenne n?est autre chose qu?une partie de la réalité, la plus grande. Mais de cette observation découlent deux autres également corroborées par les faits : d?abord c?est dans tous les sens que se produisent ces variations. Dans les groupements religieux inférieurs il y a des [a]-religieux, des anti-religieux même, tout comme il y des mystiques qui sont eux-mêmes des shamanes, des magiciens, ou même de simples croyants. Il y a plus en ce qui concerne le grand dieu, non seulement les individus dans les sociétés dites primitives mais même les sociétés ont – il serait long mais facile de l'établir – bien les deux tendances – croyance [et incroyance] mais en moyenne, c?est celle de l'incroyance qui domine. Le grand Dieu est chose de l'enseignement ésotérique. Très souvent, en Australie et en Mélanésie, la révélation finale des initiations consiste à expliquer qu?il n?existe pas, que sa voix n?est que celle des « diables » des [...], qu?il se morcelle entre les [...] totémiques, etc. – Il en était de même, il en est de même de nombreux « mystères » de nombreuses sociétés, depuis les plus primaires des sociétés des hommes jusqu?aux plus évoluées de ceux de l'Antiquité. Les uns dissolvent, détruisent leurs mystères, jusque-là œuvre de mystification. Les autres démontrent derrière ces néants l'existence de quelque chose ou de quelqu?un, de Pan, ou d?une véritable unité mystique. – La vérité est dans un juste milieu. Toute religion a ses mystères, ses fidèles et ses sceptiques. Toutes oscillent entre des notions générales et des notions d?individus.

191Cette petite conférence faite devant un milieu juif a été une bonne occasion de nous en expliquer. Elle est d?ailleurs peu éloignée de ces idées et relativement exempte d?erreurs, dans un problème fort épineux. – Nous [désapprouvons] cependant l'interprétation donnée de la mythologie uitoto par M. R. – le grand Dieu, c?est la Terre. Il est vrai que M. Konrad Theodor Preuss , l'observateur des Uitoto, a déjà expliqué ainsi ce mythe [141]. Mais il s?est contredit sur ce point.

192M. M.

Amérique du Sud

William Curtis Farabee . — The Central Caribs, University of Philadelphia, The University Museum, « Anthropological Publications, vol. X », 1924, 299 p., in-4o, pl., index [142].

193M. Farabee , dont nous déplorons la mort, avait étudié dans une première expédition les Arawaks qu?il appelle Centraux (Anthr. Publ. Univ. Mus., vol. [X [143]]). Une seconde expédition a visité les Caraïbes également appelés Centraux (expression peu heureuse) en réalité les Makusi* (p. 13- 147) et Waiwai* (p. 148-181) du Rio Branco et du Rio Essiquibo, et quelques tribus voisines peu éloignées des tribus étudiées par Theodor Koch-Grünberg (voir L?Année sociologique, nouvelle série, t. I, 1925 [144]). Le but était surtout de rassembler des documents d?anthropologie somatologique abondants (p. 252 sq.) et des collections pour le Musée qui sont en effet belles et rares. Malheureusement elles sont ici décrites de façon assez sommaire (sauf les jeux de ficelles Makusi) (p. 86 sq.) et représentées plutôt par quelques très belles planches (XIX et s.). La civilisation matérielle de ces tribus est très peu différente de celle des Arawaks voisins. Les Makusi sont assez bien connus de M. F., mais les autres tribus n?ont été que visitées (voir des descriptions de danses Diaus, p. 202 sq.) et de remarquables rites de puberté Apalaü*, p. 224 sq.) avec usage des remarquables cages à guêpes (p. 223-227). En tout, nous sommes en présence d?une simple reconnaissance générale.

194Même les Makusis, objet de la seule monographie développée, même leur « culture matérielle » resteront encore mal connus ; ainsi nous aimerions avoir plus de détails sur la grande maison commune (p. 18). La « culture sociale » n?est elle aussi que sommairement décrite. Une dizaine de pages sur la religion (p. 72-76, 81-85) ; la p[a]thologie occupe trois pages [145] ; – une nomenclature (classification) de parenté plus que schématique (p. 80 et des descriptions rapides du mariage et de la couvade ne sont pas de la sociologie descriptive approfondie. Les textes et vocabulaires sont extraits de documents chrétiens.

195Chez les Waiwai, outre des danses intertribales, et d?intéressants dessins (p. 168), l'usage de comptes par nœuds est encore à signaler ; de même un cas de polyandrie* chez les Porukatu* (p. 191).

196Convenons que nous n?avons encore aucune monographie satisfaisante d?aucune tribu Caraïbe.

197M. M.

Eskimos / Afrique / C. ? Systèmes religieux et tribaux

Henri Roux . — « Deux tribus de la région de Phongsaly (Laos septentrional) », Bulletin de l'École française d?Extrême-Orient, 1924, XXIV, 24e année, janvier-juin, no 1-2 (1925), p. 373-501 [146].

198Deux sommaires monographies de deux des tribus de Lung Thai, improprement appelées Kha[s] (nom méprisant donné par les Laotiens) du cercle de Luan Prabang. L?une, les Khas divisée en sept tribus, ne semble pas avoir une organisation sociale très différente des autres tribus du même groupe du Siam ou même de Birmanie. Le mariage est bien décrit (l'expression de rapt, p. 397 est malheureuse), la vie de famille, la séparation des adultes, des potlatch funéraires (p. 413-414), le culte de la « caisse des ancêtres » (en relation avec la reproduction de la race) et celui des jumeaux sont intéressants (p. 405). Le culte de Né* [147] (esprits) est obscurément analysé. Les Pú Noy, rameau parlant également une langue Thaï, sont également montagnards, mais petits de taille (max. 155 cm.). Leur description est un peu désordonnée et ne vaut guère qu?à propos du mariage et du rituel domestique. – Les A[-]Khas ont été fortement influencés par les Chinois, les Pú Noy par les Laotiens.

199M. M.

D. ? Systèmes religieux primitifs décomposés / III. ? Systèmes religieux nationaux par M. H. Hubert

Franz Rolf Schröder . — Germanentum und Hellenismus Untersuchungen zur germanischen Religionsgeschichte, Heidelberg, zur Germanischen Carl Winter, « Germanische Bibliothek, II. Abt. 17 », 1924, 160 p., in-8o[148].

200Il est de mode parmi les germanistes de rechercher la trace d?influences méditerranéennes et orientales dans la mythologie et la religion. Par exemple partout où se montre un culte de la fécondité et surtout un culte féminin, on cherche comme prototype un Priape, un Adonis, ou une Vénus. Certes un parti important de Germains, qui ont eu sur le développement de la civilisation germanique une action considérable, les Goths, ont vécu dès le IIe siècle sur les bords de la mer Noire, au contact des villes grecques et de l'Empire romain. Ils ont emprunté à la civilisation régnante, surtout à celle de l'Iran. La chose est patente. Jusqu?où allait la capacité d?emprunt ? C?est moins facile à déterminer.

201Ils ont emprunté l'alphabet runique, alphabet de 24 lettres et ils ne l'ont pas employé seulement pour la transmission écrite de la pensée, mais comme écriture magique. Les Grecs ont eu des ogdoades [149] de voyelles. Les Germains ont eu des ogdoad[e]s de lettres consécutives ; ce n?est pas tout à fait la même chose ; mais ce sont des choses voisines. Le géant Vapthrudhnir pose 18 questions à Odin ; Odin en pose 36 au roi Heidhrek, Adam de Brême a vu 72 victimes à Upsal. Ce sont des chiffres astronomiques familiers à la mystique orientale qui procèdent de l'astrologie babylonienne et que les Germains n?ont pas choisi tout seuls. Les 492 000 guerriers qui sortent par troupes de 800 des 540 portes du Walhall sont à comparer aux 432 000 années qui constituent les yugas indiennes. Bref, il est probable que la Germanie par l'intermédiaire des Goths a puisé dans la religion astrale qui fut la religion du monde à la fin de l'empire romain et qu?elle lui ait même emprunté sa conception du Walhall.

202Il est possible qu?ils aient également puisé dans la mythologie hellénistique pour habiller leurs cultes saisonnier et agraire. Je n?en ai pas encore trouvé l'ombre d?une preuve. La lecture attentive que j?ai faite du livre intéressant de M. Schröder ne m?en a pas apporté. Aussi bien il est presque en réaction sur ses confrères et dans le mythe de Balder, dont il donne à ses lecteurs une fort intéressante analyse, il n?a pu s?empêcher de montrer une courbe germanique.

203M. S. a indiqué qu?il faisait remonter jusqu?à l'âge du bronze l'influence des nombres babyloniens en pays germaniques. Je suis tout à fait de cet avis, et j?ai indiqué dans une communication à l'Institut français d?Anthropologie que les périodes de soixante jours du calendrier germanique devaient remonter à cette date [150]. Le commerce du bronze et de l'ambre ont mis en rapports étroits les bords de la Baltique et l'Orient méditerranéen et je doute fort que le char [151] solaire de Trundholm soit une œuvre germanique.

204H. H.

IV. ? Systèmes religieux universaux / V. ? Systèmes religieux des groupes secondaires (sectes, etc.)

Heinrich H. Maurer. — « Studies in the Sociology of Religion, American Journal of Sociology, I. The Sociology of Protestantism, vol. XXX, novembre 1924, no 3, p. 257-286 ; II. Religion and American Sectionalism. The Pennsylvania German, vol. XXX, janvier 1925, no 4, p. 408-438 ; III. The Problem of a National Church Before 1860, vol. XXX, mars 1925, no 5, p. 534-550 ; IV. The Problems of Group-Consensus ; Founding the Missouri Synod, vol. XXX, mai 1925, no 6, p. 665-682 ; V. The Fellowship Law of a Fundamentalist Group, vol. XXXI, no 1, juillet 1925, p. 39-57 [152].

205Inspiré de la Religionssoziologie de Max Weber . Porte sur la religion des Américains de souche allemande. Intéressante étude de leurs communautés religieuses : luthériennes de Pennsylvanie, etc., de leurs évolutions, en particulier la fondation du Synode du Missouri, et le développement du fondamentalisme, et du groupe qui l'exprime. – Le travail semble bien informé. Et il est de tendance exclusivement sociologique, et même, chose curieuse, plutôt de sociologie générale que de sociologie religieuse. Il étudie plutôt les rapports généraux de l'individu et du groupe, à travers ces faits spéciaux que ceux qui proviennent de la nature religieuse de ces groupes. Il y a en cette série d?articles, nombre de choses curieuses et intéressantes pour nous : l'auteur a un tempérament de théologien et un autre de sociologue légèrement métaphysicien. Une curieuse théorie de l' « inclusion » et de l' « exclusion » semble même se dégager. Malheureusement tout est écrit dans un tel langage que nous ne sommes pas sûr d?y comprendre grand-chose.

206M. M.

VI. ? Cultes spéciaux / VII. ? Croyances et pratiques dites populaires / VIII. ? Croyances et pratiques concernant les morts par MM. H. Hubert et M. Mauss

Émile Metzger . — « La mutilation des morts. Contribution à l'étude des croyances et rites funéraires des Germains », Mélanges offerts à Charles Andler par ses amis et ses élèves, Université de Strasbourg, Publications de la Faculté des lettres de l'Université de Strasbourg, fasc. 21, Strasbourg, Imprimerie alsacienne, 1924, p. 257-267, in-8o[153].

207Il s?agit du traitement des morts considérés comme vampires, tout particulièrement dans les pays scandinaves à l'époque des Vikings. À cette date, les cadavres n?étaient pas incinérés et ceux qui avaient des qualités de vampires avaient une chance de s?échapper de leurs tombeaux avec les corps des vivants. Pour les retenir ou les mettre hors d?état de nuire, on les écrasait sous des pierres massives, on les attachait au sol avec des pierres qui les transperçaient, on leur coupait la tête pour la mettre à la hauteur du bassin ou des pieds, ou encore on les brûlait. Ces pratiques pouvaient prendre une forme régulière et rituelle ; c?est ce qui est arrivé, par exemple en Groenland où le mort recevait une sépulture provisoire, où il était empalé.

208H. H.

Géza Róheim . — « The pointing bone », The Journal of the Royal Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, Vol. LV, janvier-juin, 1925, p. 90-114 [154].

209Le travail de M. Róheim porte, en principe sur la répartition en Australie d?un instrument magique : l'os de mort pointu et pointé dans la direction de l'enchanté, à l'occasion remplacé par un os d?animal, ou une pointe de bois. – Nous ne ferions que mentionner ce travail s?il n?était du type de ceux que nous considérons comme illusoires. Il n?apprend rien ni sur la nature même du rite, ni même sur la nature de l'instrument ; (la pauvre mais aventureuse philologie de M. R. ne va pas jusqu?à reconnaître une racine ma, mo, mu = mort dans de nombreux noms de cet instrument, p. 101) ; et tout ce travail consiste à empiler les hypothèses sur les hypothèses pour trouver les raisons d?une répartition de ce rituel (elle-même hypothétique puisque l'absence de documents dans de nombreuses tribus ne prouve pas l'absence du rite, mais la négligence de l'auteur, ou même de M. R.) rapprochée arbitrairement de quelques rites funéraires choisis non moins arbitrairement (exposition d?une plateforme – transport de reliques, etc.). Le tout aboutit à une hypothèse sur un centre d?influence, et à un dessin même graphique des voies de diffusion [155]. Et c?est encore compliqué par l'admission sans examen des hypothèses freudiennes, et des hypothèses non moins fragiles du P. Schmidt , sur l'hétérogénéité des langues australiennes.

210En cette matière, le travail de Robert Hertz que M. R. semble ignorer (Représentation collective de la mort [156]) a autrement illuminé les faits australiens eux-mêmes, du double enterrement. – L?étalage d?érudition, les modes scientifiques passagères adaptées toutes pour les besoins de la cause aboutissent à moins de précision qu?une simple et fine analyse comparative des faits et des documents.

211M. M.

Sir James George Frazer . — The Belief in Immortality and the Worship of the Dead. 3 vol., vol. I. : The Belief among the Aborigines of Australia, The Torres Straits Islands, New Guinea and Melanesia, The Gifford Lectures, St. Andrews (1911-1912), 1913, XXII-496 p., index ; vol. II : The Belief among the Polynesians, Conférences faites à la Royal Institution en 1916 ainsi que des cours donnés au Trinity College, Cambridge 1921-1922, X-447 p. ; vol. III : The Belief among the Micronesians, Londres, Macmillan, 1924, X-326 p., in-8o, index [157].

212De ces trois volumes, le dernier seul ressort à nos millésimes. Mais il serait injuste de l'isoler d?une entreprise qui sera consacrée considérable. Jusqu?au bout d?une vie chargée d?ans et d?actions. M. Frazer nous fait infatigablement généreuse part [sic]. Et l'on ne saurait trop admirer cette dévotion aux études, ce besoin d?être utile, de transmettre sous forme claire, souvent belle, toujours agréable non seulement les fruits d?une pensée tenace et forte, par éclairs profonde, mais aussi des recueils de faits, de documents, de « textes ». Ceux-ci dispensent d?innombrables travailleurs – parmi eux d?injustes critiques – de recommencer ce colossal ouvrage de défrichement, de semailles et de récolte que depuis les premiers articles de l'Encylopaedia Britannica – (Totémisme, Tabou [158]) occupe plus de 32 volumes, produits en bientôt quarante-cinq ans. Véritable encyclopédie qui a pour auteur un seul homme, digne des encyclopédistes écossais et français dont Sir James est l'héritier direct.

213Comme dans Totemism and Exogamy [159] [c]?est ici [à propos de] la question de l'immortalité et de l'âme et du culte des morts que M. F. s?est attaché à rassembler tous les documents imprimés. L?œuvre est plutôt « descriptive » que « philosophique et comparative ». Les faits sont rassemblés, rapprochés, à l'occasion interprétés théoriquement, mais ce ne sont que des observations jetées en passant. Même à partir du 2e volume, celui consacré aux Malayo-Polynésiens, M. F. ne s?est pas contenté d?être historien de cette partie de leur religion ; il fait œuvre d?ethnographe complet. Avant de décrire les pratiques et croyances funéraires, il donne une description sommaire du milieu physique et social, accompagnée d?une description raisonnée et de ce qu?il appelle la « sociologie » plus exactement le système d?organisation sociale, et de la religion avec [laquelle] ils se trouvent en contact. Ici, M. F. revêt un nouveau talent et adapte avec souplesse ses méthodes aux contingences du temps, essayant de singulariser chaque milieu social et de mettre en rapport ces singularités avec celles des croyances et pratiques concernant les morts de cette société. Ce côté des choses à été encore plus étudié dans le dernier volume consacré aux Micronésiens, et par exemple, on trouvera (chap. VII) une sorte de monographie des gens de Yap et (chap. VIII) une monographie des gens des îles Palaos*, où sur plus de cent pages, le sujet proprement dit de l'âme et de la mort n?en occupe que moins d?une vingtaine. Et le principe est poussé dans ses applications jusqu?à un certain raffinement. Sir James ne traite plus les faits comme au début de son œuvre anthropologique, simplement d?après leur forme extérieure, mais tâche d?en pénétrer les sens certains et les conditions sociales.

214Seuls, les deux chapitres (II et III) du début du tome I sur la « Conception Sauva[g]e de la Mort » [The Savage Conception of Death] et sur le « Mythe de la Mort » [Myths of the Origin of Death] sont encore écrits avec l'ancien procédé purement comparatif. Ce ne sont pas cependant les moins intéressants.

215D?autres essais de comparaison pourraient être mentionnés (ex. II, p. 264 sq.), sur le culte des femmes [160]. Même on peut considérer un bon nombre de ces tableaux comme une sorte d?ethnographie religieuse et juridique suffisamment complète. Aussi prévenons-nous les lecteurs studieux qu?ils trouveront surtout dans les volumes consacrés aux Polynésiens et aux Micronésiens une sorte de Manuel d?ethnographie du Pacifique central clair, juste, et écrit par un maître consciencieux quelquefois au point d?être troublant (II[I], p. 432 une note sur le tabou Maori, institution aristocratique – chose évidente – semble comme perdue à cet endroit et ne s?explique que comme une tardive addition, un « repensé » comme on dit en art.

216On peut par instant regretter que M. F. ait abandonné sa première manière. Que le « sauvage » n?ait pas conçu la mort comme naturelle, et que l'un des thèmes mythologiques les plus répandus soit l'introduction de la mort dans le monde, ce sont deux faits bien connus. Mais les vastes collections de documents – peu schématisés – du genre de celles-là sont toujours utiles. Même quand elles n?ont pas de conclusions sociologiques et quand le rapprochement de ces idées avec celles des savants modernes sur la prolongation de la vie (I, p. 83-84) est au moins déplacé. L?introduction est également théorique et consiste à marquer le point de vue de l'auteur sur le sauvage, arriéré et non dénégéré, point de vue juste mais toujours simpliste.

217Le reste du livre est une sorte de charmant recueil de « textes » relativement complet et en tout cas très vaste, où le traducteur et le professeur prendrait le pas sur les textes eux-mêmes, plus souvent résumés que transcrits.

218La description est donc le fond de cet ouvrage. C?est celle des croyances qui est l'essentiel. Ce n?est que par rapport à elles que sont étudiées les pratiques funéraires et l'organisation du culte des ancêtres – là où celui-ci existe. Ce dernier est fort justement distingué par M. F. du culte funéraire simple qui ne tombe pas dans l'erreur commune, toujours commise malgré les critiques si souvent apportées.

219Ce travail d?édition et de commentaires où M. F. excelle est même généralement ici un peu sommaire. Ainsi sur l'au-delà polynésien propre, et même sur l'au-delà des Mélanésiens, ou sur HawaIk [Hawaii [161]] en particulier, paradis et terre d?origine, chez les Mélanésiens ([...] Mari [...], IV, p. 29 [162]) ou les documents, en particulier, ceux du P. Charles Le Gobien méritaient plus de discussion [163]. Par place au contraire, surtout en matière archéologique, à propos des monuments des Fiji, des [...] de Samoa [164], etc., M. F. pose au contraire avec constance les problèmes qu?il faut en effet, et où il est compétent. Sont-ils des monuments funéraires ? Ont-ils été élevés par les ancêtres des [...], Nous ne parlons que des choses [...] au sujet.

220Le plan suivi est purement géographique. Le premier volume est consacré aux Australiens (ici le choix de documents est restreint à quelques-uns des ouvrages importants concernant des tribus assez bien connues) ; aux îles du détroit de Torrès, à la Nouvelle-Guinée et à la Mélanésie. – Dans ces deux derniers lieux apparaît le culte des ancêtres dont M. F. tente de doser l'importance, qu?il croit très grande, la religion mélanésienne lui semblant une sorte de composé par moitié de magie et du culte des morts.

221Le deuxième volume passe en revue les Polynésiens.

222Ici les collections de textes et les commentaires sont excellents, les meilleurs peut-être de l'ouvrage, mais inégaux. Les documents allemands sur Samoa, une partie des documents français sur les Fiji, une partie de ceux d?Elsdon Best [165], eussent dû peut-être être mieux étudiés [166], en particulier concernant la notion d?âme, sur les Maoris. Cependant encore c?est à propos des Polynésiens en général que, même sur le sujet du livre, M. F. commet la plus grande faute de proportion, en ne mentionnant que cette fois, à propos des Maoris (p. 85) le principe que seules les âmes de chefs sont immortelles (p. 213 ?, 313). Toutes les populations de la Polynésie n?ont pas été étudiées, les Tuamotu et Paumotou, par exemple.

223Le troisième volume concerne les Micronésiens, et M. F. s?y est fort complu [sic], étoffant ses tableaux ethnographiques de l'organisation sociale et religieuse, et résumant de moins en moins les documents et détaillant ses remarques même hors de son sujet, par exemple sur les formes de totémisme et du matriarcat proprement dit Yap, Pona[pe [167]], etc.

224Le quatrième volume sera consacré aux Indonésiens [168]. Il faudra l'attendre quelque temps car M. F[razer] a entrepris d?autres travaux également très grands sur le Culte de la Nature et sur Ovide. Mais même si cette merveilleuse activité ne parvenait pas à se satisfaire sur la question de l'immortalité, faut-il se demander le résultat théorique de cette dernière. Sûrement M. F. n?en a cherché aucun. Il ne se préoccupe que de savoir si la notion d?une âme que la mort n?éteint pas est universelle (I, p. 468), il ne s?intéresse à rien qu?au détail des faits. Et les raisons de ces croyances, il laisse à d?autres le soin de les chercher, au lecteur le soin de former son avis à l'aide des documents qui lui sont soumis.

225Au fond, M. F. a rarement poussé plus loin le goût du fait et le dégoût de la théorie. On comprend qu?il soit écœuré par toute l'apologétique matérialiste ou théologique, et par toutes les [...]logies. Cependant le dédain du travail des autres théoriciens est ici non sans inconvénient. Le travail de Robert Hertz sur la Mort n?est même pas cité, bien que l'on adopte l'interprétation et la nomenclature du fait. L?hypothèse de Durkheim sur la naissance de la notion d? « esprit du mort » est probablement considérée comme métaphysique. Mais passons là-dessus. C?est un système chez M. F. Seulement il correspond à une théorie qui pour être inconsciente n?en préside pas moins à chacune des démarches. Ces collections de faits sans but et sans principes ne sont pas nécessairement plus fidèles et plus exactes que de sincères et sévères choi[x] de faits bien définis, comme les travaux que nous venons de citer. Notre admiration pour la science et la diligence de cet ouvrage ne nous empêche pas de dire que mal conçu, il conduit à une enquête imparfaite. Ce n?est pas immortalité qu?il faut dire : les croyances décrites ne concernent que la persistance de quelque chose du vivant après la mort. Et ni les âmes ne persistent toujours, mais bien pour un temps ; ni ce sont les âmes entières mais l'une des âmes, ou une partie d?âme comme le croyait encore Baruch Spinoza , et comme il n?y a encore évidemment aucune raison de ne pas le croire – si on croit à des choses de ce genre ; ni ce ne sont toutes les âmes qui persistent même de cette façon restreinte ; ni ce sont celles des chefs seules ; ailleurs ce sont celles des hommes, les femmes n?en ayant pas, etc. – Enfin, c?est par un abus de mot que l'on confond réincarnation avec permanence d?une âme, d?une individualité. M. F. a senti la difficulté et justement expliqué en particulier l'absence du culte des ancêtres en certains cas (Australie, etc.) par le fait qu?ils reparaissent. Mais il n?attribue à ces institutions ni l'importance qu?elles ont ni le sens qu?elles ont sûrement. Voici longtemps et à maintes reprises que nous avons posé et reposé cette question sur laquelle M. Marcel Granet à propos de la Chine est revenu lui aussi à plusieurs reprises. Nous les rattachons à l'existence d?un nombre définit de prénoms dans un clan. « Tu Marcellus... », dit encore le héros dans Virgile. – Mais tout ce que nous avons dit à ce sujet est passé inaperçu, de M. F. en particulier. Il faudra y revenir.

226M. M.

IX. ? La magie

Theodor Hopfner . — Griechisch-äegyptischer Offenbarungszauber, seine Methoden, herausgegeben von Dr Carl Wessely , Leipzig, H. Haessel, Studien zur Palaeographie und Papyrusurkunde, XXIII, 1924, 172 p., in-8o, index [169].

227M. Wessely a publié quelques-uns des plus importants papyrus magiques que nous possédions. Il en est naturel de voir publier sous son égide cette étude de la magie antique, fondée sur les papyrus magiques, malheureusement publiée dans une abominable autographie aux lignes trop serrées. Nous avons traité ce sujet voilà de longues années, dans l'article Magia du dictionnaire de Charles Daremberg et Edmond Saglio [170], de la même façon que M. Hopfner , qui nous a d?ailleurs emprunté bon nombre de ses illustrations. La magie grecque, et toute la magie antique finit dans la magie grecque, nous apparaît comme un corps considérable de doctrines et de pratiques, qui se distingue assez mal de la religion. La magie se réclame d?origine divine, se proclame révélée par des dieux, est pratiquée par des prêtres ou par des personnes qualifiées pour le maniement des choses sacrées et ne diffère d?une façon générale de la religion, ni par sa technique, où des rites semblables à ceux de toute religion tiennent une place considérable, ni par ses idées. Elle ne se distingue certainement ni de la mantique [171] ni de la thérapeutique religieuses. À vrai dire, la magie, et la magie grecque en est un exemple, ne se cantonne pas dans le même cercle de représentations et de pratiques religieuses que la religion à côté de laquelle elle vit. La magie grecque a hérité d?une tradition qui vient d?Égypte et d?Orient. C?est de magie gréco-égyptienne que nous parle M. H. Il aurait pu nous parler de magie gréco-babylonienne ou perse, et le judaïsme se mêle à ses rituels gréco-égyptiens. Mais les sectes mystiques ont opéré dans la Grèce classique un syncrétisme analogue et l'hellénisme en est sorti. À ce point de vue la magie se rapproche des religions mystiques de sectes ; elle a des initiations et elle cultive le mystère. Mais, et c?est ici qu?apparaît la distinction de la magie et de la religion, elle joue avec l'interdit. Quelquefois la société lui crie holà ! Elle-même ne se croit pas toute de la même qualité. On distingue dans la magie hellénistique la goétie, magie basse aux fins pratiques et malfaisantes, vendant des charmes d?amour ou des prophylactères, la magie proprement dite, d?ordre un peu plus relevé et plus scrupuleuse dans ses fins et enfin la théurgie qui essaie d?agir sur les puissances sacrées pour entrer en communion avec elles et que pratiquent des philosophes qui sont des théosophes. Ainsi la magie se qualifie suivant les buts et l'animadversion sociale dont elle a été l'objet en Grèce et à Rome procède d?un critérium moral. Mais elle se qualifie imparfaitement. Toutefois, même la théurgie, qui ne poursuivait pas de fins dommageables et qu?absout l'opinion d?une grande partie des intellectuels, fut atteinte par la législation romaine, d?abord pour des raisons politiques et parce qu?elle s?exposait aux mêmes griefs que les sociétés décrites, mais aussi en raison de l'inquiétude que provoquaient dans le public des pouvoirs individuels incontrôlés, des pratiques suspectes et un relent d?immoralisme.

228Si je ne me méprends pas sur la pensée de M. H. (et son livre est difficile à lire), il fait des techniques destinées à produire des épiphanies divines et des épopties, des visions, chez les officiants, le centre du rituel magique. C?est d?abord le centre de la théurgie. La théurgie est une mystique et une gnostique. Elle poursuit la contemplation divine et par là le perfectionnement de l'âme. Elle cherche la divinité pour la connaître et pour monter avec elle les cercles de la nécessité, mais aussi pour l'interroger et faire avec son aide de la divination. Elle y atteint par des moyens qui sont ceux des mystères, mais elle n?a pas à sa disposition leur appareil hiérophantique et théâtral. Elle fait de l'hypnotisme, elle emploie la prière, des fumigations intoxicantes, qui font partie de tous les rituels à épiphanies. Je ne doute pas qu?elle n?ait employé le sacrifice à la même fin. Mais, M. H., qui d?ailleurs ne traite pas du sacrifice comme de l'un des moyens de la magie, n?en parle que lorsqu?il descend à la magie proprement dite pour montrer qu?elle procède elle aussi par épiphanie et époptie. C?est en effet à elle qu?il attribue la fameuse liturgie mithriaque conservée par le papyrus de Paris, qui tourne autour d?un sacrifice, dont il cite d?autres exemplaires (p. 127, 147).

229Dans la magie et la goétie, le rituel de l'épiphanie et de l'épophie se vulgarise et s?amenuise ; il devient moins solennel et plus pratique ; il emploie des mediums qui réduisent d?autant la part du prêtre et de l'intéressé. Mais d?autre part il se diversifie par l'emploi du matériel sympathique de la magie, de son attirail de choses à pourvoir et de méthodes particulières destinées à encadrer et à matérialiser les apparitions, telle la lychonomantie où l'esprit se manifestait dans la lumière, la lécanomantie [172], dans l'eau d?un bassin.

230M. H. voit des formes rudimentaires et flétries du rituel de l'épiphanie dans toutes sortes de procédés divinatoires où l'on met en jeu un intermédiaire révélateur, divinations par les sorts, phyllomantie, Kylomantie, aleuromantie, rabdommantie, ôomantie [173] (divination par les œufs, etc.). C?est à mon avis jouer sur les mots.

231H. H.

Samson Eitrem (dir.). — Papyri Osloenses. — Fasc. 1, Magical Papyri, Oslo, publiés par Det Norske Videnskaps-Akademi I Oslo (Académie des sciences d?Oslo), 1925 ; Jacob Dybwad (en commission), 152 p. ; et XIII pl. gr., in-8o, index, bibliogr. [174].

232Admirable publication d?un papyrus magique grec du IVe siècle, acheté au Fayoum* et sans doute du Fayoum (cf. mots coptes fasc. I, § 316, et p. 1[1]6). Recettes, formules y sont parfaitement claires, et toutes les difficultés de lecture et de traduction sont levées pour le lecteur. Ce fragment d?un rituel magique a surtout pour objet des rites d?amour, d?envoûtement, et tout au moins d?entrée en grâce (conjuration de [démon ou d?esprits maléfiques (every sort of evil)], etc.). M. Eitrem l'a enrichi d?un somptueux commentaire qui dispense le lecteur de toute recherche comparative sur cette magie savante, syncrétique du N. de l'Égypte hellénisée. Chaque objet, chaque nom, chaque mythe trouve sa complète explication. Seuls les spécialistes peuvent apprécier l'effort de ce spécialiste qui a réussi à tout élucider dans une matière qui suppose une érudition aussi vaste que multiple. Les rapprochements théoriques, surtout avec les magies anciennes et européennes ne manquent pas. Et pour ma part, je ne verrai à ajouter que quelques précisions à la théorie des « signatures » (correspondance des parties du corps humain et du monde) – où cependant une des origines du tatouage (p. 39) est pour la première fois bien expliquée.

233M. M.

Sir Richard Olaf Winstedt . — Shaman, Saiva and Sufi. A Study of the Evolution of Malay Magic, Londres, Constable & Co., 1925, VIII-191 p., in-8o, index [175].

234M. Winstedt est un membre distingué et ancien du Civil Service des Établissements et Protectorats malais de l'Empire britannique. Il a publié la plupart des sources sur lesquelles il appuie ce livre dans le Journal des musées malais et ce livre contient le résumé de nombreux documents nouveaux dus à M. [John Desmond Gimlette ] et à des savants indigènes. Cependant il ne fera pas oublier celui de M. Walter William Skeat , Malay Magic [176], dont nous nous sommes tant servis, H. Hubert et moi.

235En effet, il ne porte pas tant sur la Magie malaise que sur son évolution à partir de l'hindouisme, et plus précisément du civaïsme [saivism], et de la mystique musulmane, du soufisme. Une espèce de désordre règne tout au long de la démonstration. Là où il est nécessaire, l'auteur sans avertir le lecteur incompétent, sort volontiers de son domaine péninsulaire et insulaire (p. 5, 7, etc.) Souvent c?est pour reconstituer fort naturellement le « Proto-Malais » dont il part – voulant mesurer les divers apports étrangers. Mais c?est toujours fait fort rapidement et même fort légèrement. Ainsi nous citerons : voir p. 64 sq., les remarques insuffisantes sur « l'âme des choses ». La notion d?une substance spirituelle générale – si profondément malaise – est confondue avec la notion de la nature spirituelle de certaines choses. L?un des résultats les plus certains de l'analyse de l'analyse comparative, et même de la simple analyse descriptive des faits malais, celle de MM. Albertus Christiaan Kruijt et Nicolaus Adriani par exemple, est sinon inconnu de M. W., du moins méconnu par lui. Les connaissances théoriques et mythologiques font d?ailleurs défaut à M. W. Ainsi (p. 74) il dit que les Malais considèrent comme des météorites les « pierres de foudre », les haches néolithiques enterrées.

236Donc, nous ne recommanderons dans ce livre, au point de vue de la magie en général, que les chapitres qui concernent l'ensemble du shamanisme, VII et VIII, et spécialement les séances shamanistiques, les sacrifices du shamane – qui dévie cependant vers les simples sacrifices aux esprits. Le chapitre IX – La Magie et l'homme – consiste simplement dans une étude des rituels domestiques populaires, ou plutôt non expressément musulmans et non expressément magiques. En fait le magicien (p. 134 sq.) au couronnement des sultans (p. 150 sq.) en particulier au mariage, est le véritable prêtre, et il est même surprenant de voir les anciennes religions conserver un tel rôle. Le premier chapitre est un inventaire des « dieux, anges, esprits et revenants », qui dans un étonnant syncrétisme mélangent, en dessous d?Allah, tous ceux auxquels croient et le peuple, chef compris, et les écrivains de grimoires plus ou moins magiques.

237On voit ce qui manque au livre de M. W. : une idée de ce qu?est une magie, et celle qu?il a à observer en particulier. Une partie du livre (X), Magicien et Musulman, veut y répondre sans doute, mais à peine, ne consistant que dans l'analyse d?un texte, la « Couronne des Rois », et des emplois faits par le magicien malais des êtres et choses sacrées – ou diaboliques.

238Au sujet annoncé par le titre correspond un seul chapitre sur l'influence du soufisme. X[I]. Celle du Civaïsme [saivism] n?est traitée que par accident. Et nous ne sommes nullement d?accord sur ces points avec M. W. qui insuffisamment Indologiste ne donne pas assez d?importance au Bouddhisme et au Brahmanisme, et à ses formes vishnanites dans les faits qu?il nous signale. Il n?a pas non plus le sens des origines hindoues du soufisme. Shamanistes, puis Hindouistes, il était naturel que islamisés, les magiciens malais redevinssent soufistes. Cela ressort clairement des faits invoqués par M. W. lui-même.

239Cependant le livre est utile, plein de faits, un peu sommairement observés. Remarquons des emprunts aux Sakai, Jakun, etc.

240M. M.

X. ? Le rituel / A. ? Le calendrier religieux et les fêtes

Arnold Van Gennep . — « Le cycle cérémonial du Carnaval et du Carême en Savoie », I. Analyse géographique et chronologique, Journal de psychologie normale et pathologique, XXIIe année, 15 mai 1925, p. 421-445 ; II. Analyse ethnographique et psychologique, ibid., 15 juillet 1925, p. 584-612 ; III. Documents originaux, ibid., p. 728-767 [177].

241M. Van Gennep annonce avec quelque fracas les nouvelles méthodes qu?il emploie dans son travail, plus précises, plus historiques, plus démonstratives, plus explicatives d?un point de vue psychologique, que celles des « anthropologues sociaux » anglais ou que celles des sociologues en général. Nous ne soulignerons pas que l'emploi d?une méthode cartographique surtout en matière d?ethnographie – par exemple des formes de la maison – ne date pas d?hier, et que celui d?une méthode historique génétique, ou d?une méthode statistique a toujours été enseignée même par les fondateurs de nos sciences, Robertson Smith en particulier et même Edward Burnett Tylor . Ce qui est à retenir de ce travail consciencieux et aussi complet qu?il se peut en ces matières, c?est avant tout une enquête, des documents imprimés ou recueillis par M. V. G. Documents de très inégales valeurs, de dates différentes, de teneur variable. Mais tel est le cas de toutes ces observations faites trop tard sur des coutumes plus ou moins ébréchées, suivant les lieux et circonstances, même en pays montagnard, à l'écart des grands courants destructeurs d?usages. Souvent des réponses au questionnaire, négatives, positives, sont trop sèches pour vouloir réellement dire grand chose – Les fêtes du Carnaval en Savoie se décomposeraient en éléments plus ou moins indépendants : les ébaux ou feux, avec ou sans mannequin brûlé, les failles (torches et brandons) – les allonges*, cadeaux aux enfants, qui souhaitent fertilité ou stérilité suivant les cas. La répartition géographique – si celle de documents inégaux a une force probante au point de vue statistique –, prouve l'indépendance de ces divers éléments, au moins suivant les lieux, joints ou disjoints entre les jours gras ou la mi.carême, ou le premier dimanche de carême. – Mais nous ne voyons pas ce que cet inventaire utile, indispensable d?un point de vue descriptif, ajoute à ce que l'on sait d?un point de vue théorique. L?interprétation ethnographique, M. V. G. y renonce puisqu?il est bien difficile d?isoler – maintenant – les diverses composantes de cette population savoyarde si remarquablement unifiée. L?interprétation psychologique – celle de M. V. G. ne diffère, et ne peut différer, de celle de n?importe quelle interprétation d?anthropologue ou folkloriste, voire même de sociologue, et ses comparaisons ont la même étendue que celles qu?il critique [178]. Le caractère sexuel des visites d?enfants, des deux rites de balancement, du rite de la glissade ne fait pour lui pas l'ombre d?un doute. – Pour nous il y a bien autre chose dans les échanges d?allonges [allouyes] et de bugnes (beignets) – cf. L?Année sociologique, nouvelle série, t. I, 1925, Le Don. – Au fond tout cela n?est que méthode descriptive.

242Ajoutons qu?en matière de description et quand on s?en vante, on ne saurait être trop exact. La précision de M. V. G. est quelquefois spécieuse. Seyssel (Ain) n?est pas en Genevois, ni en Savoie, que nous sachions. Et les « gaudes », mets national comptois, marquent bien que le cycle de carême y appartient à une autre civilisation que la Savoyarde [179].

243Nous montrerons ici plus de tolérance que M. V. G. Ces genres d?études, indispensables, sont urgentes ; le zèle de M. V. G. dans sa longue enquête sur le Folklore est digne d?éloges. Mais [il] faut marquer les limitation[s] de ces méthodes. L?étude cartographique des variations de rituels mal conservés, peu compris, mal décrits, même de nos jours – si bien conduite qu?elle soit, si nombreux que soient les rituels –, ne vaut pas celle d?un seul rituel typique – vivant, objet de foi, accompagné de mythe, et compris – et, partant, explicatif.

244M. M.

B. ? Rites positifs. Cérémonies complètes et rites manuels

Le P. Alexis Médebielle . — L?expiation dans l'Ancien et le Nouveau Testament, vol. Ier : L?Ancien Testament, Rome, Institut biblique pontifical, « Scripta Pontificii Instituti Biblici », 1924, 307 p., in-8o, index [180].

245Le présent livre n?est pas tout à fait un ouvrage scientifique, c?est presque un livre de théologie. C?est ainsi qu?il faut le considérer pour l'apprécier équitablement. Il étudie deux formules d?expiation dans l'Ancien Testament, l'expiation par le sacrifice et l'expiation par les douleurs du Juste souffrant ; mais celle-ci a été considérée comme un sacrifice et paraît sacrificielle dans son principe. En tout cas l'auteur donne comme préface à sa double étude un exposé de ce que l'on sait sur le Sacrifice en Israël et chez ses voisins de Phénicie. C?est donc un livre sur le Sacrifice, plus exactement sur la fonction expiatoire du Sacrifice qui nous est ici proposé. L?analyse de textes relatifs à des sacrifices dans la Genèse, l'Exode, les Juges et les Rois, celle du rituel lévitique sont exactes et complètes, celle du sacrifice expiatoire en particulier est illustrée par des exemples historiques ; la description des grands sacrifices expiatoires de la Fête du Grand Pardon ne laisse pas de côté les textes talmudiques. Le chap[itre] IV est consacré à l'analyse des expressions Kipper, Kapphorâ [Kapparah], qui désignent l'expiation. Mais le P. A. Médebielle faiblit quand il arrive à l'expiation du sacrifice et du sacrifice expiatoire. Bien qu?il nous ait fait l'honneur de citer notre travail sur le Sacrifice (L?Année sociologique, vol. II, 1899 [181]) d?après M. Gressmann (Der Ursprung der israelitisch jüdischen Eschatologie, 190[5] [182]), il ne l'a évidemment pas lu et c?est dommage. Il aurait pu en profiter comme d?autres auteurs qu?il connaît l'ont lu ont fait [183]. Il n?est pas permis de dire que le sacrifice est avant tout une torture propitiatoire. À quoi bon, s?il l'est, les minutieuses préparations qu?il comporte et les précautions qui le terminent ? Quant au sacrifice expiatoire c?est le mécanisme de la substitution qui y dominerait. Mais pourquoi la double victime du Yom Kipp[u]r et le rituel compliqué de l'oblation du sang ?

246Sous la même rubrique que la tragédie du Juste souffrant, le P. M. range l'expiation par la prière et par l'intercession des Serviteurs de Dieu. Mais le serviteur de Dieu quand Isaïe apporte autre chose que des prières aux frères pour lesquels il meurt : sa mort a été comparée à un sacrifice expiatoire, ashem [184], par le prophète lui-même. Notre auteur l'accepte comme tel. Mais il revient encore ici, pour l'expliquer au mécanisme de la substitution. Il rappelle heureusement que le Juste souffrant d?Isaïe a un prototype babylonien, Tabi-Utul-Bel, un roi qui souffre comme Job et comme lui est justifié. Quelques auteurs dont M. Gressmann ont pensé que nous avions plusieurs éditions d?un personnage mythique, d?une sorte de Dieu de la végétation qui meurt comme Tammouz ou Adonis, pour renaître glorifié. Le P. M. n?a pas de peine à montrer que l'idée même d?expiation manque dans ce que nous savons du mythe d?Adonis. Mais si sa mort est un sacrifice, la riche complexité du rite permettait d?en tirer toutes les conséquences que le christianisme a tiré du sacrifice de Jésus. Le P. M. ne niera pas que la masse ne soit un sacrifice, c?est le plus parfait exemple de tous les sacrifices.

247H. H.

Karl von den Steinen. — Die Marquesaner und ihre Kunst, Studien über die Entwicklung primitiver Südseeornamentik nach eigenem Reiseergebnissen und dem Material der Museen. — Bd. 1 : Tatauierung. — mit einer Geschichte der Inselgruppe und einer vergleichenden Einleitung über den polynesischen Brauch, Berlin, Dietrich Reiner (Ernest Vohsen), 1925, VIII-200 p. (avec planches, dessins et deux cartes), in-4o[185].

248Ce livre est le premier d?une série qui sera consacré aux habitants des Marquises et à leur art. Leur auteur n?est rien moins que l'un des plus grands ethnographes allemands, explorateur du Brésil et du Pacifique, théoricien et musicographe éminent, directeur du Musée d?ethnographie de Berlin. C?est lui qui dresse à la gloire d?une population sujette des Français, population qu?il a visitée deux fois, le monument dont elle est digne et où l'ethnologie française n?a su rassemblé que quelques matériaux. Le premier volume est consacré d?abord à une bibliographie et une excellente analyse critique des sources et des documents des voyageurs, depuis la découverte jusqu?aux environs de 1900 (p. 5 et s.) (il faut écrire p. 5 du Sacré-Cœur). – Puis c?est une monographie complète du tatouage.

249Le tatouage des Marquises est fameux. Il fit même à certains premiers chroniqueurs espagnols l'effet de vêtements de soie. Cette légende a mis du temps à disparaître. Comme la grande monographie de M. von den Steinen est avant tout consacrée à l'art, c?est au côté esthétique de cette institution qu?il s?attache avec raison. Nous devrions peut-être suivre son exemple, et en traiter à propos de l'esthétique, ou même du langage, car Wurttke déjà faisait figurer dans son étude de l'écriture des faits (que M. v. den S. démontre erronément attribués aux Marquises (p. 141). D?ailleurs le gros effort du livre porte presque exclusivement sur la symbolistique. Il consiste en une énumération de chacun des motifs d?ornementation du symbole voulu et de l'origine de ce motif. Nous ne saurions trop admirer ici la précision de la méthode de M. v. den S. Elle repose [sur] ces interprétations à distance d?Européens qui se fient à leur flair de technologues et de dessinateurs et d? « ethnologues en chambre » pour constituer des séries en tous sens, géométriques ou naturistes, grâce auxquelles ils expliquent tout suivant leurs points de vue propres et leurs doctrines. Ici ce sont les Marquesans qui ont répondu à M. v. den S., donné les noms de chaque motif, expliqué que ce qu?on pourrait prendre pour une fleur est un composé de triangles et que cela qui est un composé de triangles est une fleur de courge ; que telle figure que nous n?hésiterions pas à rattacher simplement à l' « ornementique oculaire » représente « un visage » et qu?un soi-disant soleil est un visage lui aussi. – Et quand des séries ont été établies (II) elles l'ont été le plus souvent conformément aux indications des artistes tatoueurs eux-mêmes. La division en Plektogines* (motifs empruntés à la vannerie si belle des Marquises), Tikigines* (fig. humaine) le tiki, homme [...] âmes, doubles et talismans et en motifs du « visage », animaux, plantes, etc., n?a rien d?artificiel, d?a priori ; elle est un modèle de prudence ethnologique. Elle fait la part à la mode, les thèmes d?art ne sont pas rangés par une logique extérieure, mais historiquement ; on voit même au cours de quelques siècles les variations de faveur, les nouveautés, comment par exemple l'ornement « facial et oculaire » ou le « damier » ont eu leurs temps sociaux et non pas leur fatalité ethnique.

250Et cependant que de résultats et de points de départ sont ainsi acquis. Pour nous, nous remarquons tout spécialement le tiki à trois doigts (p. 15 ?) qui nous ramènent vers la Nouvelle-Zélande. C?est quelque chose de les avoir dégagés parmi tant d?autres et c?est une modestie que de n?avoir pas encombré la description d?hypothèses. Nous pourrions en indiquer d?autres. En particulier nous sommes frappés du caractère « Pacifique » de toute cette [...].

251L?intérêt ethnographique et sociologique de ces études est infini.

252Cependant nous continuons à classer ces faits dans le rituel parce qu?aux Marquises le tatouage, même chez les convertis, est encore ou était encore tout récemment un rite spécial d?initiation, spécialement des filles et fils de chefs, interdit aux esclaves, et permis seulement sous conditions aux hommes libres. C?est ce qu?établit cet ouvrage. Et M. v. den S. replace ce maximum de tatouage dans le milieu polynésien, grâce à une étude comparée en particulier du mythe du tatouage. – Les tatouages occasionnels et les multiples effets magico-religieux et sexuels, les droits du tatouage sont également étudiés de façon comparative.

253À tous points de vue cette monographie est un modèle.

254M. M.

Wilhelm Schmidt . — Ethnologische Bemerkungen zu theologischen Opfertheorien, Jahrb. d. Missionshauses St.-Gabriel, Post Mödling bei Wien, 1922, 67 p., voir d. Philos.-theol. Lehranstalt., I. 1924, p. 1-67 [186].

255Après une critique des théories évolutionnistes et « psychologico-évolutionnistes » du sacrifice, parmi lesquelles il range les nôtres, et celle cependant historique pure d?Alfred Loisy , puis il répartit entre les diverses « aires » et « couches » de civilisations les diverses formes de sacrifice dont il étudie trois plus particulièrement : le sacrifice des prémices, et en particulier celui du premier-né, et le sacrifice expiatoire, le bouc émissaire en particulier. Il critique plus volontiers Sir James Frazer. Et, chose curieuse, conclut d?une façon assez générale (p. 60, cf. p. 44) et peu « culture historique », ramenant les sacrifices à des sacrés rites de la nourriture. De la même façon, le travail est un extraordinaire mélange d?histoire ethnologique (les pasteurs à droit masculins ayant inventé ceci, les « civilisations à droit utérin » ayant inventé cela) et de méthode comparative pure (en particulier en ce qui concerne l'Urkultur). Le tout est très érudit, très contentieux (moins polémique cependant que d?habitude) quelquefois juste, quelquefois faux, comme quand il est affirmé que l'idée d?expiation est étrangère au bouddhisme.

256M. M.

C. ? Rites positifs (suite). Mécanismes rituels divers

Albert Heintze . — Die deutschen Familiennamen geschichtlich, geographisch, sprachlich [1882], [Les noms de famille allemands aux points de vue historique, géographique et linguistique]. — Sechste verbesseste Auflage hrsg. von Paul Cascorbi-Halle, Verlag der Buchhandlung des Waisenhauses, 1925, VIII-396 p., in-8o[187].

257Nous n?avons pas signalé les éditions antérieures de cet excellent livre, bien que l'intérêt sociologique du problème du nom y soit très vivement exprimé. La publication d?une sixième édition nous permet de réparer brièvement cet oubli. Le livre se compose : 1 / d?un dictionnaire de noms propres de près de 300 pages, où l'on trouve les étymologies, leur signification, leurs formes dialectales, leurs formes historiques avec les dates de celles-ci ; 2 / d?une étude théorique sur le nom, le nom de famille, la formation du nom de famille en Allemagne, les éléments de l'onomastique, sa classification géographique. Les deux parties se sont également accrues dans les éditions successives.

258L?exposé théorique énonce en termes excellents que le nom est chose d?importance et qu?il est partie principale dans le statut de l'homme social. Mais ce n?est pas assez de dire qu?une société se mire dans ses noms propres et que la vieille société germanique s?est plu à incorporer ses rêves héroïques dans des noms comme Siegfried, Chlodowald ou Hariber[a]ht. Le nom, pièce essentielle de l'état civil, définit l'individu par ses rapports avec ses ascendants (nom de famille), qui souvent l'ont porté (cas du nom individuel) ou avec le monde spirituel (nom théophores, noms de qualités). Le choix du nom, lorsque le nom individuel n?est pas complètement absorbé par le nom de famille, comme il est arrivé dans la société romaine, est une prière, ou plus exactement un vœu ou une opération qui tient de la prière et du vœu, même quand le nom a perdu, comme chez nous, toute espèce de sens étymologique et même quand il n?évoque plus aucune espèce de patronage spirituel, à plus forte raison lorsque les noms composés, théophores ou autres, étaient encore parfaitement clairs comme en Grèce ; un passage fameux des Nuées en témoigne justement. M. Heintze a comparé avec beaucoup de raison les vieux noms germaniques aux noms grecs et aux noms sémitiques. La comparaison aurait dû s?étendre au moins à l'ensemble des noms indo-européens ; car il s?agit d?un système de dénomination des plus anciens et d?ailleurs quasi universel. Mais le livre traite avant tout du nom de famille.

259Les noms de famille allemands sont venus de trois origines. Les uns sont de vieux noms germaniques. Dans ce cas, le nom de famille est sorti du patronymique ; les autres sont des noms étrangers, ce sont les noms de saints du christianisme. Les autres sont plus récents, ce sont des noms de terre (famille nobles), des noms de fonctions, de métiers, de sobriquets, quelquefois des mots phrasés (Habedan[k], [Rû]meland, Spring[insf]eld]). L?usage du nom de famille a été très lent à prévaloir. Les noms de terre des familles nobles paraissent les premiers fixés ; mais c?est un médiocre exemple de nom de famille puisqu?ils changent dans une même famille. La vie urbaine en a imposé la nécessité aux familles de la bourgeoisie, d?abord à l'ouest de l'Allemagne. Les premiers exemples datés remontent au XIIe siècle. C?est au XIIe siècle que se font dans ce sens les progrès décisifs. Mais il arrivait encore au XVIe siècle qu?une famille eût plusieurs noms. Dans les campagnes, la constitution des noms de famille paraît suivre l'affranchissement des serfs et progresse du même pas. Dans tous les cas, la conscience du nom de famille témoigne de l'importance croissante prise par les familles dans la société du Moyen Âge, comme groupes permanents, ayant des liens et des traditions.

260La répartition géographique des noms de famille correspond à la géographie des dialectes et au fait que le groupe germanique s?est étendu à l'est aux dépens de groupements slaves et que de l'ouest il a reçu des immigrants français qui n?ont pas été toujours répartis au hasard et que, en raison de la croissance industrielle de l'Allemagne, des concentrations ouvrières comprenant des éléments slaves se sont produites sur certains points. Ici l'histoire des noms de famille se confond avec celle de la formation du peuple allemand. Il faudra faire attention en se servant du livre que la 6e édition ne tient pas compte des modifications de frontières à l'est de l'Allemagne (p. 80, n. 1).

261H. H.

D. ? Rites oraux

Marcel Jousse. — « Études de psychologie linguistique Le style oral rythmique et mnémotechnique chez les Verbo-moteurs », Archives de Philosophie, Vol. 2, cahier IV, 1924, Mesnil (Eure), Imprimerie Firmin-Didot et Cie, Paris, Gabriel Beauchesne, éditeur, p. 1-235 (p. 435-669), in-8o[188].

262M. Antoine Meillet dit plus loin ce qu?il pense de cet ouvrage du point de vue linguistique proprement dit. – Il faut dire ici que le « style oral » qui préoccupe principalement M. Jousse est avant tout celui du rituel oral et de la littérature religieuse en général, prose et poésie. Il s?agit même plus spécialement des conditions dans lesquelles est composée, enregistrée dans la mémoire et récitée cette littérature qui n?est pas destinée à être lue, mais chantée, ou répétée. Sur les moyens naturels et soi-disant artificiels dit mnémotechniques par lesquels la poésie et même la prose religieuse s?organise autour d?une sorte de fatale technique psychologique des gestes, du balancement, du rythme, on trouvera (p. 110 sq.) d?excellentes observations. De même sur les « compositeurs oraux ». À propos de ceux-ci, l'importance des schèmes rythmiques, des cadres tout faits où se glissent de nouveaux mots, et des [Récitatifs ?] qui se glissent dans de nouveaux contextes, sont bien dégagés. – Les essais d?exégèse – du grec chrétien et de l'hébreu biblique et rabbinique – nous semblent moins réussis. Et les ouvrages classiques sur les diverses poésies sémitiques sont relativement peu utilisés. C?est l'abondante et intelligente compilation de toutes les théories, surtout des psychologues, et de quantité de faits, souvent sociologiques qui constitue en partie ce livre. L?effort philologique n?est pas poussé à fond (par exemple, p. 139 à propos du Cantique des Cantiques, le P[ère] J. reste bien facilement cantonné dans l'interprétation symbolique de ce qui fut à l'origine un recueil de chansons érotiques de Jérusalem).

263Cependant, sur le fond, nous sommes le plus souvent d?accord avec M. J. Il veut bien de temps en temps se servir de nous. Il faut au fait social sa place, sans l'exagérer – et pas plus que lui-même sans doute, nous ne comprenons cette façon que l'on prend d?opposer constamment ce qu?il expose avec ce que les sociologues français ont écrit ou consigné.

264M. M.

E. ? Objets et lieux de culte / XI. ? Représentations religieuses par MM. H. Hubert, M. Mauss et Ph. de Félice / A. ? Représentations religieuses d?êtres et de phénomènes naturels

Dr Johannes Winkler . — Die Toba-Batak auf Sumatra in gesunden und kranken Tagen. Ein Beitrag zur Kenntnis des animistischen Heidentums, Stuttgart, Chr. Belser, 1925, IV-234 p., in-8o, index [189].

265Ce livre est excellent. Cette « Contribution à la connaissance du paganisme animiste » consacrée au comportement des Toba Batak (une section des Batak de Sumatra), dans « leurs jours de santé et de maladie » eût enchanté notre regretté Robert Hertz et eût été un précieux appoint à ses recherches sur les notions d?impureté et d?expiation en pays malayo-polynésien. C?est aussi un nouveau document pour l'étude de la magie malaise. Et comme le promet le sous-titre honnête, c?est aussi une contribution à l'étude des représentations malaises des substances spirituelles, en général. – L?auteur est médecin de la mission rhénane ; il réside depuis un quart de siècle chez ceux qu?il observe ; et enfin il a su s?inspirer des excellents modèles de M. Johannes Gustav Warneck sur les Batak (voir Robert Hertz, L?Année sociologique, vol. XII, 1913 [190]) et de M. Albertus Christiaan Kruijt, sur l'Inde néerlandaise en général.

266Si la place l'avait permis, sans doute M. Winkler eût publié plus de documents écrits – qu?il connaît parfaitement, enregistré plus de formules orales, transcrit plus de légendes, fût resté plus près des informations indigènes. C?eût été un autre livre. C?eût été un livre parfait. Tel quel, destiné, avant tout aux missionnaires, il sera sûrement apprécié des sociologues. Il est plein de faits et ces faits sont sûrs ; et ils sont intéressants.

267Deux nouveautés le caractérisent. D?abord, M. W. analyse des notions générales qui président à toutes les croyances et à tous les rites. Ensuite, il analyse non seulement les notions et les pratiques concernant la maladie et la médecine ou le maléfice ou la divination médicale mais aussi celles qui concernent la santé, la force, la nourriture (p. 15-58). – Tout ce dernier développement comble une grave lacune. On ne fait pas d?ordinaire attention à tout ce qui est normal, ordinaire, n?est pas l'objet – étant surnaturel – de croyances et de rites impliquant la présence de forces surnaturelles. De là même ces théories à la mode que le religieux, c?est ce qui est l'inattendu, évidemment inapplicables – en ce cas comme en d?autres. Elles ne proviennent en effet que d?une faute d?observation. Ni le miracle ni la foi ne sont à ce stade les caractéristiques de la religiosité ou de la magie, ni le surnaturel ni le naturel ; tous sont mélangés. Les notions concernant la vie sont aussi pleines de mystères que celles concernant la mort – dès qu?on se les est posées. Il est utile que M. W. nous ait donné sur ce point tant de faits. Le mélange est curieux des techniques – et d?absence de techniques – et des rites, concernant la propriété, l'hygiène, le vêtement. Le chevauchement est indivisible et il est imprudent de dire si l'on a affaire à des qualités et des natures et des formes magiques, ou simplement mystiques ou mécaniques et chimiques. Le paragraphe sur la nourriture, sûrement trop court (p. 46 sq.) est puissamment intéressant. Les digressions mêmes sur le travail, sur les techniques des exposés de toutes sortes donnent des informations sur toutes sortes de questions étrangères au sujet – mais utiles à l'ethnographe.

268Sur l'autre point, celui des idées générales de cette pensée caractérisée par « l'animisme dynamiste », M. W. nous apporte une succincte mais intéressante documentation. Peut-être s?inspire-t-il trop de Warneck . En tout cas, comme les magiciens dont il a rassemblé les manuscrits ont des idées précises, sont arrivés à de nombreuses classifications de leurs rites, les [conclusions] de M. W. ont une grande valeur. Or toute la magie des Toba Hatak est basée sur deux idées : celle de t[o]ndi et celle de begui. Le to[n]di est exactement d?une part le mana – la notion d?une force – que M. W. appelle le dynamisme, et c?est d?autre part – en même temps – le mana individualisé de ch[a]que chose vivante ou spirituelle ou même de simples qualités, qui a son mana. L?homme, la tête, le cheveu ont leur tondi qui est du tondi. Les prescriptions médicales de la vie courante et de la vie n?ont pas d?autre effet que de multiplier, sauver, protéger, séparer le tondi (voir la curieuse notion de pagan et la classification des pagar – palissades – divers – p. 109-123). – Nous n?avons pas besoin de souligner cette nouvelle confirmation, à propos d?un autre peuple malais des observations souvent faites ici sur la notion de mana, celle d?âme, etc. – des forces personnelles et impersonnelles. Si M. W. la décrit, la réduction de la notion d?âmes multiples à partir de celles du tondi et des tondi divers de l'ombre, du génie individuel, des diverses parties vivantes du corps, est particulièrement bien faite par les Toba Batak et observable chez eux. – Les Batak interprètent enfin la magie et la médecine comme [...] les tondi : âmes, amulettes, magicien, âme du magicien, voix et souffles et rites, et les puissances mauvaises, les démons individuels, begu, en particulier les âmes mauvaises des morts, en particuliers des femmes mortes enceintes. Mais cela est bien connu des Batak et rentre dans les codes de l'animisme (sur tous ces points, voir p. 1-18 - p. 204-225).

269L?attention que nous avons attirée sur ces deux nouveautés ne doit pas paraître éclipser le reste de cet excellent ouvrage. L?exposé des croyances et pratiques concernant la santé et la maladie est parfaitement divisé : Étude du magicien. – Études des rituels concernant : la préservation, la cure de la maladie (amulette, culte) – la mise à mort, sorcellerie –, la divination médicale et autre. Notions, rites, conditions, formulaires sont le plus souvent parfaitement étudiés. Un certain nombre sont tout à fait typiques. Par exemple les bindu carrés magiques, sortes de templa dessinés sur le sol – et représentant le monde. Par exemple encore, les détails de la fête aux tondi et de la participation des morts aux fêtes des vivants – nous dirions même potlatch (en particulier p. 124). La divination médicale est un peu sommairement décrite mais fort notable. Il n?y a peut-être que deux réserves à faire : d?abord un peu de désordre et des digressions [...] le culte des morts étudié en deux fois. Ensuite comme dans le travail de M. Winstedt , il manque l'histoire de cette médecine et de cette magie. Les Toba Batak sont la section la plus riche d?une puissante nation, qui a une histoire aussi vieille sans doute que celle de nos campagnes. L?influence de l'Inde au nord de Sumatra est certaine pour plus de vingt siècles, celle de l'Islam lui a succédé, et, à notre avis, en ces matières a été moins forte. Cette magie malaise a eu elle-même sans doute une influence même de lointaines magies. La pierre de bezoar vient sans doute de par là. En particulier, la magie médicale (la notion de biss, rasun, sanscrit visa, rasa, des sacs et poisons, la magie divination sont fort savantes). Il faut mettre tout cela sur le même pied que nos magies médiévales et ne pas parler de primitifs à ce propos. M. W. met cela assez en lumière à propos de l'astrologie (p. 202 sq.) Mais c?est de tout cela que c?est vrai (Tout cela est mal dit).

270Mais tout le livre est à consulter. Même les conclusions pratiques destinées aux missionnaires pour la conversation des indigènes (p. 224) constituent un document sur l'état actuel de cette mentalité – et de la leur.

271M. M.

Johannes Sieber . — Die Wute : Lebenshaltung, Kultur und religiöse Weltanschauung eines afrikanischen Volksstammes, Berlin, Dietrich Reimer, 1925, XII-114 p., in-8o[191].

272Petite monographie, malheureusement bien sommaire, d?un missionnaire chez les Wute du Cameroun. M. Sieber a déjà publié une collection de Contes (Zeitschrift für Eingeborenen-Sprachen, 1922 [192]). Ethnographiquement elle est fort complète, elle suit les instructions répandues chez les observateurs allemands, et on trouvera par exemple – justement – le tatouage, p. 15, parmi les ornements, mais séparé des mutilations, circoncisions, etc., et les jeux séparés de la musique, p. 46 ou 40. Les techniques sont bien énumérées (VI-X). La religion est reprise en deux fois – ainsi que les rites de la vie familiale –, ce qui est un bon procédé de recoupement (Vie de l'Individu, chap. XI). Les chapitres sur la religion sont naturellement un peu soignés (XV, le culte funéraire est étudié au chapitre XI, ainsi que les cultes domestiques. La mythologie [...] au chapitre XII [193]). Les notions d?âmes, celles du bon principe indifférent et du mauvais njar (personnifié njadir) sont étudiées, le totémisme identifié (p. 88). La magie est particulièrement développée (p. 78 sq.).

273M. M.

B. ? Représentations d?êtres sacrés (dieux, âmes, etc.)

Paul Louis Couchoud . — « L?énigme de Jésus », extrait du Mercure de France, CLXIII, 1923, 68 p. [194].

274M. Couchoud en sept petits chapitres, d?un style très brillant, a résumé toute la critique évangélique, mais il l'a démolie. Il rejette le Christ historique, qu?ignora [Flavius] Josèphe , le seul qui ait pu en parler avec autorité et dont l'évangile de Marc ne raconte l'histoire que comme une révélation mystique insérant un nombre infime d?éléments de biographie dans un tissu de prophéties bibliques et d?anecdotes dont quelques-unes se trouvent répété[es] dans les actes [des Apôtres]. Et d?ailleurs [comment passer] du misérable aventurier juif, le plus obscur de tou[s], dont la vie et la mort avaient été l'allumette [195] du christianisme au dieu qu?était déjà Jésus quand saint Paul écrivait ses Lettres au milieu du Ier siècle. M. C. comprend le mythe et il en connaît la réalité. Pour lui Jésus est une représentation collective, en puissance dans le judaïsme et qui s?est imposée assez brusquement par des révélations et des expériences mystiques, dans des milieux judéo-grecs, en fermentation religieuse, vers le temps d?Auguste et de Tibère. En ce temps-là, on a senti venir le Messie. C?était un avatar de Jahveh, souffrant et sauveur. Voilà le Christ révélé à saint Paul, qui ne lui donne pas l'ombre d?apparence historique. Mais les mystiques des communautés pauliniennes se passaient de la connaissance historique d?une réalité présente et dont ils avaient l'expérience personnelle. Il en fut autrement à Rome et dans des communautés déjà moins homogènes et moins ferventes. C?est là que le mythe fut présenté comme histoire, sans qu?il pût être confronté avec l'histoire réelle.

275[H. H.]

Alfred Loisy . — Les Actes des Apôtres traduction nouvelle avec introduction et notes, Paris, F. Rieder et Cie, Christianisme, 8, cahiers publiés sous la direction de P.-L. Couchaud, 1925, 304 p., in.16o[196].

276La composition du livre des Actes des apôtres est un problème capital pour l'histoire des débuts de l'Église chrétienne. M. Loisy propose une solution où il fait preuve, comme à l'ordinaire, de beaucoup d?ingéniosité. Dans son introduction d?abord, puis dans une traduction, où certains passages figurent en caractères italiques, parmi beaucoup d?autres imprimés en caractères ordinaires, il tente de nous montrer ce que pouvait être l'ouvrage original et ce qu?il est devenu au IIe siècle. Est-ce à dire qu?il réussisse là où tant d?autres, à côté de lui, ont échoué ? Il est impossible de se défendre d?un certain scepticisme devant la reconstitution qu?il nous offre des débris du document primitif, altéré, remanié et considérablement augmenté par un rédacteur postérieur, obéissant à des partis pris apologétiques.

277Ph. de F.

Édouard Meyer . — Ursprung und Anfänge des Christentums ; Dritter Band, Die Apostelgeschichte und die Anfänge des Christentums, Stuttgart und Berlin, J. G. Cotta, 1923, X, 660 p., in-8o[197].

278C?est le troisième et dernier volume que l'historien Édouard Meyer consacre aux origines du christianisme. Dans les deux tomes précédents, il avait été question des Évangiles de l'évolution du Judaïsme et de Jésus de Nazareth [198].

279Ce nouveau volume commence par une étude approfondie des données fournies par le livre des Actes des Apôtres. On sait combien les critiques s?accordent peu sur la composition de ce document et sur la valeur qu?il convient de lui attribuer. M. M. ne partage nullement l'opinion de ceux qui ne veulent y voir qu?une compilation informe ou le produit plus ou moins incohérent de remaniements successifs, et qui dénient ainsi toute authenticité aux faits qui y sont relatés. Pour lui, il s?agit d?une œuvre que l'historien peut et doit utiliser avec prudence, sans doute, mais sans hésitation.

280Après s?être prononcé à ce sujet, M. M. entreprend de retracer l'histoire des débuts du christianisme. Il s?occupe d?abord de la communauté judéo-chrétienne de Jérusalem. Il en raconte la fondation, en décrit l'organisation, en expose les idées et les rites et parle de sa propagande dans les milieux juifs.

281De Judée, la religion nouvelle passe chez les Samaritains, ce qui fournit à M. M. l'occasion de s?arrêter longuement à la figure énigmatique de Simon le Magicien.

282Puis le christianisme franchit les limites de la Palestine et pénètre dans le monde gréco-romain. La personnalité de l'apôtre Paul, le principal promoteur de ce nouveau développement, passe au premier plan. M. M. étudie ses origines, son éducation, son caractère, sa doctrine et les lettres qu?il adresse aux églises qu?il a fondées. Il le suit dans ses divers voyages, jusqu?au moment où l'apôtre prisonnier arrive à Rome. C?est là que se produit, avec la persécution de Néron, le premier conflit entre le christianisme, qui s?est nettement séparé du judaïsme, et le gouvernement romain. M. M. analyse les causes et les résultats de ce conflit, dont l'influence va être décisive pour l'avenir de la chrétienté. Mais les interventions successives du pouvoir civil dans les destinées du christianisme n?empêcheront pas celui-ci de s?organiser de plus en plus fortement, de se répandre avec une incroyable rapidité et de donner naissance à plusieurs mouvements d?idées, dont on retrouve les traces dans la littérature chrétienne primitive.

283On voit par ce bref résumé combien sont nombreux les problèmes que M. M. a cherché à résoudre. Il va de soi que sur bien des points on peut ne pas accepter ses opinions. Mais cet ouvrage n?en apporte pas moins une remarquable vue d?ensemble des événements qui se sont succédé durant le Ier siècle de l'histoire de l'Église chrétienne et dont les conséquences, dans le monde, ont été incalculables.

284Ph. de F.

Louis Coulange [pseudonyme de Joseph Turmel ].— La Vierge Marie, Paris, F. Rieder & Cie, Christianisme, 9, cahiers publiés sous la direction de P.-L. Couchoud , 1925, 158 p., in-16o[199].

285Le but de ce petit livre est de retracer le développement du dogme catholique concernant la Vierge Marie depuis les origines jusqu?au 8 décembre 1854, date à laquelle le pape Pie IX, dans la bulle Ineffabilis, mit l'immaculée conception de la Vierge au nombre des vérités révélées.

286L?auteur suit à travers les siècles ce long développement et cherche à donner les raisons qui, d?après lui, ont poussé l'Église romaine à en franchir les étapes successives.

287Il montre comment, très tôt d?abord, certaines idées païennes, puis le souci de glorifier l'ascétisme, enfin l'influence de la piété populaire, imposant peu à peu à l'Église la fête de la conception immaculée de la Vierge, ont fini par donner naissance, en dépit de la tradition primitive et malgré les affirmation des Pères, à l'enseignement actuel du catholicisme romain.

288On peut regretter que M. C. n?ait pas expliqué davantage ce qui a pu inspirer cette piété qui devait l'emporter sur les textes évangéliques, sur l'avis des théologiens, sur l'opposition de certains ordres monastiques et sur les hésitations de la papauté. Cette question l'eût entraîné, sans doute, à relever, en dehors du christianisme, l'action durable exercée au sein des masses populaires par d?anciennes religions, où une ou plusieurs déesses-mères jouaient un rôle capital.

289Ph. de F.

Israël Abrahams . — Valeurs permanentes du Judaïsme, trad. de l'anglais par Germaine Constantin-Weyer, Paris, F. Rieder & Cie, Judaïsme, cahiers publiés sous la direction de P.-L. Couchoud , 1925, 128 p., in-16o[200].

290Le judaïsme a-t-il encore une valeur pour l'humanité moderne ? Telle est la question que l'auteur se pose dans une série de conférences, et à laquelle il répond par l'affirmative, en montrant tous les enseignements qu?on peut tirer aujourd?hui des idées contenues dans l'Ancien Testament, dans les Apocalypses juives, dans la philosophie de Philon [d?Alexandrie] et dans le Talmud.

291On notera combien le ton et les conclusions de ce premier volume de la collection nouvelle, publiée sous la direction de M. Couchoud , sont favorables au judaïsme.

292Ph. de F.

Rosalind Moss . — The Life after Death in Oceania and the Malay Archipelago, Oxford, Oxford University Press, Humphrey Milford, 1925, XII-247 p., in-8o, index, cartes [201].

293L?un des signes de l'existence comme science d?une discipline quelconque, c?est qu?elle peut produire des ouvrages de pure utilité... comment dire ?... scientifique. La philosophie et la littérature ne supportent guère la simplicité, la tradition, l'absence d?ambition et de système. Une science au contraire se compose non seulement de brillantes théories, ou de vastes synthèses, mais aussi de catalogues bien dressés, de faits bien observés. – La recherche de Miss Moss est de ce deuxième ordre, non moins estimable et non moins utile que l'hypothèse scientifique, même suffisamment étayée. Dans sa modeste présentation, [le livre] rendra de grands services aux chercheurs comme aux étudiants et à leurs professeurs. Si nous avions pour chaque catégorie de faits et pour chaque province ethnographique un ouvrage de ce genre, le choix des terrains d?observation pour une recherche plus approfondie ou plus vaste serait infiniment facilité. – Il est de plus, parfaitement consciencieux, et sous les réserves qu?on verra plus loin, tout à fait sûr. Miss M., élève des anthropologues d?Oxford et rompue aux méthodes philologiques et historiques, égyptologiste distinguée, a appliqué à un dépouillement consciencieux (Bibliographie, p. 219 sq.) à des sources, à leur critique, et à une classification naturelle des faits, les meilleurs principes. L?enquête s?étend à l'Océanie – (Australie exceptée, et l'Archipel malais Philippines compris) – c?est-à-dire tout l'ensemble des peuples de langue [M]alayo-polynésienne (moins ceux de l'Inde et de Madagascar), y compris les Mélanésiens, y compris encore les Papous et certains Pygmées (voir App. III).

294Le livre est divisé en deux parties, la première pour ainsi dire mythologique (chap. I-XII) concerne la destiné de l'âme, l'autre (chap. XIII-XVI) concerne les rites funéraires et leurs relations avec les croyances. Naturellement il y a des traces de chevauchements [autant] dans les plus importantes de certaines représentations que dans des pratiques : par exemple celle du voyage marin, du cercueil canot, bateau de l'âme sont des rites (chap. IV), de même le nombre des croyances concernant le voyage de l'âme vers l'oubli sont liées aux rituels des vivants (p. 92 sq.).

295Mais l'ensemble se tient. Certainement le monde malayo-polynésien est un de ceux qui a le plus développé, en sens divers, un système de mythes du monde des morts. Le développement s?est produit sans doute à partir d?une seule souche. Ce pays des morts est plus ou moins bien localisé entre la mer, la terre et le ciel, mais que l'on n?atteint que par un voyage et par des rites.

296On remarquera le peu d?exemples de punitions que Miss Moss a trouvé (p. 138-143) (comparer au contraire les ex. Pygmées, p. 116-117) et un bon chapitre sur l'annihilation (XII).

297La seconde partie est moins développée. Elle concerne plutôt le mode de traitement du cadavre, plus spécialement la répartition géographique de l'enterrement, de l'abandon dans les arbres, de la crémation (rare), de la dessiccation – et des diverses formes d?orientation, plus les dons au tombeau et le sacrifice humain.

298Cette restriction provient des intentions de Miss. M. L?une des raisons de son choix est l'intérêt qu?elle porte aux problèmes ethnographiques – celui-même qu?a soulevé M. Rivers  – du peuplement de l'Océanie par diverses familles de peuples présentant divers types d?institutions. En bon archéologue, elle a choisi les critères les plus évidents et conclut fort prudemment, pour la répartition de ces formes de rituel, ici à leurs migrations et propagation, là, à des immigrations de leurs inventeurs ou possesseurs, là enfin à des causes diverses : matériaux, inventions. La démonstration est sommaire (trois types de sacrifices humains seulement, p. 207) mais engagé dans la bonne voie. Les résultats de l'analyse ethnographique des mythes de l'autre monde (VI, quatre types : I. Mélanésien, II. Polynésien, III. Néo-Zélandais, IV. Papous et Mélanésien méridional) sont aussi très clairs et très prudents. Mais ce ne sont naturellement que des r[a]ssemblements de matériaux. Nous sommes loin des hypothèses précises, et nous restons toujours dans les limites des constations de faits.

299L?autre raison qui a déterminé le choix de Miss M. est que l'on peut, dans le monde malayo-mélanéso-polynésien, observer la liaison entre le mythe de l'autre monde et le rituel. Dans sa préface, M. Robert Ranulphus Marett appuie sur cette raison, et Melle M. y consacre une partie de ses conclusions (p. 216 sq.). Le voyage et l'entrée dans l'autre monde seraient parallèles à la série des rituels funéraires qui feraient progresser le défunt vers le point définitif. – On comprend que cette étude ait intéressé l'égyptologiste qu?elle est. Seulement il lui manque quelque chose. Elle n?a pas connu le beau Mémoire de Robert Hertz sur la « Représentation collective de la mort », si classique qu?il soit. Quelques lignes de M. Marett y font peut-être allusion ainsi qu?aux hypothèses de Durkheim sur la même question. Mais ces négligences prouvent combien des savants voisins peuvent ignorer leurs proches. – Au surplus, un travail comme celui-ci ne peut remplacer ceux-là. Tous les inconvénients d?une sèche énumération par rapport aux avantages d?une analyse approfondie éclatent aux yeux à la comparaison. Ainsi par exemple, nous ne voudrions pas rapprocher de la façon dont Hertz explique la fête des morts chez les Olo Ngadyac à la façon dont Mlle M. la résume (p. 100). Méthode et but sont différents. Et nous n?avons pas à dire pourquoi nous considérons la manière de Mlle M. comme relativement superficielle.

300Nous conviendrons cependant qu?elle aboutit à des résultats.

301M. M.

Jean Baruzi . — Saint Jean de la Croix et le problème de l'Expérience mystique, Thèse pour le doctorat ès lettres, Paris, Alcan, 1924, 772 p., in-8o, bibliogr. [202].

302Ce qu?il y a de plus intéressant pour le sociologue dans ce livre est certainement tout ce qui concerne moins la psychologie du mystique compagnon de sainte Thérèse que ce qui concerne le milieu social et religieux d?où il vient. Non pas que nous prétendions qu?il explique sa mentalité, complètement et nous nous garderons bien de soutenir pareil non sens, mais il explique sa vie, cette partie de sa vocation, les vicissitudes extraordinaires de sa carrière. L?histoire de sa canonisation eût – elle aussi – bien instruit. Et à ce propos, M. Baruzi a fort consciencieusement et élégamment transmis au public français, fort peu éclairé en ces matières, un tableau apparemment complet sur la vie religieuse séculière et monacale au XVIe siècle en Espagne, et sur les courants d?idées et d?intérêts qui l'agitèrent et sur la vie intérieure de l'ordre du Carmel et de la Réforme de sainte Thérèse.

303Le fonds psychologique nous intéresse franchement moins. D?abord la doctrine de saint Jean de la Croix nous semble infiniment plus pauvre qu?à M. B. Il a donné à l'œuvre des commentaires beaucoup plus brillants et étoffés qu?elle. C?est sainte Thérèse et non son acolyte saint Jean qui est le génie mystique du Carmel ; lui nous fait même un pauvre effet.

304Et même au point de vue d?une psychologie du mysticisme nous ne pouvons attribuer une importance mystique à cette œuvre et à l' « expérience mystique » qu?elle exprime. Cette mystique « dépouillée et nue » est selon M. B. un « exemple souverain ». Nous serons francs : c?est pour nous un pauvre échantillon.

305De cette analyse de ce mystique nous ne retiendrons guère que celle des formes dans lesquelles celui-ci s?est exprimé : ses symbolismes, sa poésie, ses mots / saint Jean prend ici de nouveau place dans un milieu, dans une littérature qu?il n?a pas créés.

306Cet ouvrage considérable annonce une série. Pour nous, même après cette première partie – peut-être par sécheresse sociologique, nous pensons que pareil sujet ne mérite pas pareil effort. Surtout nous ne voyons pas en quoi ces états d?âme, ceux de saint Jean, méritent – sauf à leur propre point de vue – le beau nom d?expérience. Les appeler ainsi, c?est simplement suivre une mauvaise tradition qu?a fondée William James . C?est confondre sensation, émotion, sentiment, suggestion, avec appréhension du réel. C?est préjuger la question. Nous ne nous lasserons pas de répéter qu?il y a du mysticisme en toute religion, mais point d?expérience, sauf [...] ou d?un dieu, dussions-nous courir le risque de paraître de grossiers rationalistes en face de spiritualistes – également « grossiers », comme disait encore M. James.

307M. M.

Henri Joachim Delacroix . — « Remarques sur ?Une grande Mystique? », Journal de psychologie normale et pathologique, 1925, p. 545-585 [203].

308Revue critique de la publication d?Albert Houtin qui porte ce titre (Paris, Alcan, 1925 [204]). M. Delacroix ajoute ainsi un personnage de plus, l'abbesse de Solesme, Mme Cécile Bruyère , toute proche de nous, à la galerie des « Grands mystiques chrétiens » qu?il peint avec passion. Mais il ne se contente pas de cela et il remet au point les conclusions qu?il proposait dans son précédent ouvrage. Il nous semble qu?il fait maintenant plus grande la part des éléments traditionnels du langage, des symboles usuels, et du besoin d?action religieuse, M. D. dit profane, sur soi et les autres.

309M. M.

Maurice Blondel . — « I. Le problème de la Mystique » et « II. Mysticisme païen et mysticisme chrétien » ; Victor Delbos , « III. Le mysticisme allemand » ; l'abbé Joannès Wehrlé , « IV. La vie et la doctrine de saint Jean de la Croix » ; Jacques Paliard , « V. L?orientation religieuse de Maine de Biran et le problème de la passivité mystique », in « Qu?est-ce que la mystique ? Quelques aspects historiques et philosophiques du problème », Les Cahiers de la Nouvelle Journée, T. 3, no 3, Paris, Blond & Gay, 1925, 198 p., in-8o[205].

310Recueil d?articles dus à des catholiques orthodoxes, bien informés de la question, dont deux sont des mystiques eux-mêmes. L?ensemble constitue, avec toute une série de travaux publiés dans d?autres revues religieuses, un sérieux rappel à l'ordre d?un mysticisme littéraire et peu religieux trop à la mode aux yeux des vrais mystiques dociles à l'Église. M. Blondel qui parle un langage abondant de philosophe ravaissonnien (quelquefois étrange – « supra[-]normal [(]sans être anormal[)] » (p. 46), mais qui manie avec aisance la scolastique et la mystique et une certaine théologie, rappelle les enfants perdus aux doctrines de la grâce, des dons infus et de l'irréductibilité du surnaturel, de la vie d[u Christ [206]] « aux choses de la raison » XXX, [Blondel] qui est plus excellent mystique et théologien qu?historien des religions (ex-brahmane du Thibet, p. 67, Soma de Perse, p. 70 et il a le bonheur de connaître des psaumes bacchiques, p. 89) – oppose fort justement « le mystère païen à la mystique chrétienne ». Seulement, admettant l'Ancien Testament comme le Nouveau, il est forcé de transformer les prêtres en précurseurs de saint Paul, et saint Paul en précurseur des surhommes de la vie morale. On a pris dans les manuscrits de Victor Delbos une leçon sur la mystique allemande ; – L?abbé Wehrlé a donné une analyse classique et bien édifiante de la vie et de l'œuvre de saint Jean de la Croix, le même qui fut l'objet de la monographie historico-psychologique de M. B. L?orthodoxie de Jean du Carme espagnol en ressort par démonstration de textes. – M. Paliard explique l'orientation religieuse de Maine de Biran .

311Il est utile que des catholiques redressent des opinions à la mode, et restaurent le dogme plus vrai que certaine littérature ou mystique ou de psychologie de la mystique, et affirment la « réalité » de ces états, et de la divinité et du surnaturel qu?ils supposent, et qu?il faut traiter religieusement des choses religieuses. C?est un fait intéressant pour le sociologue. Lui aussi est prêt à admettre que – pour le croyant – il n?y a pas de salut hors des voies tracées à l'âme par l'Église, vers Dieu. C?est même de ce principe qu?il lui faut partir. Entre le système théologique et le physiologique, il n?y a probablement rien dans la mystique.

312[M. M.]

C. ? Les mythes

Erich Brauer . — Züge aus der Religion der Herero. Ein Beitrag zur Hamitenfrage, Leipzig, R. Voigtländers Verlag, « Erste Reihe : Ethnographie und Ethnologie, no 7 », Institut für Völkerkunde, 1925, 122 p. et 9 cartes, in-8o, bibliogr. [207].

313M. Brauer étudie cinq éléments de la religion Herero : 1 / le grand dieu ; 2 / le culte des ancêtres ; 3 / les pratiques religieuses de l'élevage ; 4 / le feu sacré ; 5 / le totémisme. [I]l les compare avec d?autres croyances et rites similaires d?un certain nombre de sociétés africaines et donne d?assez bonnes cartes de répartition. Et il interprète [cette] répartition de la façon suivante : les Hereros appartiendraient – ce que prouveraient d?autres « traits » culturels, à une « culture » de pasteurs totémistes, provenant du N. E. africain. Ce seraient tous des Hamites passés à une langue Bantu. – La partie positive de ce livre – la comparaison est intéressante, utile, sinon convaincante. L?interprétation historique est elle, en question. Personne n?est sûr de cette histoire du hamitique ? Ni de celle du Bantu ? Pourquoi partir de là ? Pourquoi vouloir y aboutir ? M. B. à coup sûr la connaît peu.

314M. M.

Truman Michelson . — « The mythical origin of the White Buffalo Dance of the Fox Indians », etc., Eleventh Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1918-1919, Washington Government Printing Office, 1925, p. 23-289 ; « The autobiography of a Fox Indian woman », ibid., p. 291-349 ; « Notes on Fox Mortuary Customs and Beliefs », p. 351-496 « Notes on the Fox Society known as ?Those who worship the little Spotted Buffalo? », ibid., p. 497-539 ; « The traditional origin of the Fox Society known as ?The singing around rite? », p. 541-615, 664 p., in-8o, bibliogr., index [208].

315M. Michelson est l'observateur attiré des Fox Musquakie, une des dernières tribus algonquines de l'Est dont les souvenirs soient encore vivaces. Il est leur linguiste, leur anthropologue, leur sociologue, et on pourrait dire leur archiviste – le fondateur de leur tradition écrite. Ce volume du Bureau d?ethnologie est une collection de descriptions orales de rituels et de documents mythologiques rédigés en Fox, et traduits littéralement et littérairement. – Une observation ainsi conduite est d?une incomparable solidité. Il n?est pas exagéré de dire que nous n?avons aucun renseignement sur une religion classique quelconque qui approche de cette valeur. Elle est aussi autonome dans son expression, et, guidée, infiniment plus complète que ces fragments de sources, dates et lieux variés et incertains que nous possédons, même sur les seules religions dont nous avons un Corpus, la Védique et la Chinoise classique. Le seul inconvénient de ce genre de publication par rapport aux descriptions ordinaires des ethnographes même les plus compétents, c?est la difficulté de s?en servir – pour les sociologues trop amoureux de généralités, ou de faits faciles à cataloguer. Pour le sociologue plus sérieux, c?est une autre affaire.

316Cette collection comprend une autobiographie délicieuse d?une femme Fox où apparaissent enfin les parts exactes que jouent les pratiques religieuses et morales dans une vie de femme (voir en particulier les notes p. 341 sur les parentés à plaisanterie [209]).

317Le reste est entièrement consacré à la religion. Un grand rituel de clan totémique (descendance masculine) peut-être même de phratrie (p. 42) a été répété devant M. M. et analysé par lui (p. 37 sq.) – mais surtout les informateurs indigènes, en particulier Harry Lincoln lui ont donné le texte complet du « mythe d?origine » de ce rituel, d?ailleurs fortement apparenté aux grands sacrifices du chien algonquin et iroquois, et intéressant aussi à ce titre. Ce mythe est celui des quatre « paqu[ets] magiques » [sacred packs] (évidemment des quatre sous-sections du clan : sabot du pied droit, devant, etc.) et prodigieux de vie, de précision. Le commentaire du rituel le suit pas à pas, explique chaque geste, chaque formu[le], chaque objet. Les détails de la révélation par les divers manitous – au fond les ancêtres – sont moins curieux.

318Deux autres rituels sont encore étudiés de cette façon ; ce sont ceux de confrérie (ceux qui adorent le petit bison tacheté), et le rite de chanter autour. Ce dernier est d?origine étrangère et chrétienne, mais comprend de précieux renseignements sur la danse du scalp, etc.

319Enfin, le rituel et les croyances funéraires sont l'objet d?une troisième monographie de ce genre (voir en particulier le rituel d?adoption du remplaçant du mort et de ses invitations, p. 483, et les curieuses traces de l'influence chrétienne, p. 465).

320Si la traduction ne comprenait quelques américanismes et des termes trop européens (bénir, etc.) ce serait parfait.

321M. M.

D. ? Légendes et contes

Georges Dumézil . — Le crime des Lemniennes. Rites et Légendes du Monde égéen, thèse complémentaire pour le doctorat ès lettres, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1924, 75 p., in-8o[210].

322Suivant une légende fameuse, les femmes de Lemnos à qui Aphrodite avait envoyé un mal obscur, une « mauvaise odeur » s?étant vu délaissées par leurs maris, avaient tué tous les hommes de l'île. Une fête consacre le souvenir de l'événement : un jour par an, les hommes s?éloignent des femmes à cause de leur « dysosmie » ; or, à cette fête, on éteint tous les feux de l'île, et on se procure un feu nouveau.

323L?auteur se propose d?établir que la légende s?explique par le rite ; et celui-ci est un rite de renouvellement du feu : toutes les fonctions vitales sont suspendues, les hommes s?éloignent des femmes qu?on se représente atteintes d?un mal mystérieux et organique ; destiné à assurer le renouveau de la vie humaine et de la vie de la nature, le même rite devait s?accompagner de la mise à mort, d?abord réelle, plus tard simulée, d?un homme incarnant le génie de la végétation : par là s?expliquerait le thème du meurtre, qu?on retrouve dans la légende des Danaïdes et dans celle des Lemniens de Sparte.

324La démonstration, à base d?ethnographie, est ingénieuse et, dans l'ensemble, correctement conduite. Il est naturel que, sur tel ou tel détail, elle ne donne pas une satisfaction entière : mais M. Dumézil a sûrement restitué un schème de fête préhistorique. Il a raison d?insister, entre autres choses, sur le rôle qu?y jouent les nouveaux mariages (après leur forfait, les femmes lemniennes – guéries par prétérition – accueillent les Argonautes). Là-dessus, une petite chicane : dans la légende de Sparte, les Lemniens, reçus par les Lacédémoniens, « contractaient des mariages et donnaient à d?autres les femmes qu?ils avaient amenées de Lesbos » ; c?est du moins ce que dit, strictement, Hérodote (IV, 145 [211]). L?auteur, en interprétant « ils contractèrent de nouveaux mariages, en répudiant leurs femmes » (p. 52), introduit ici l'hypothèse de mariages annuels (p. 57). Je crois qu?une traduction moins aventurée n?est pas moins intéressante : les deux groupes échangent celles de leurs femmes qui sont en âge d?être mariées.

325L. G.

Norwegian Fairy Tales from the Collection of Asbjörnsen and Moe. — Traduit par Helen et John Allyne Gade , Scandinavien Classics, vol. XXIV, New York, The American-Scandinavian Foundation, 1924, XIV-247 p., in-8o[212].

tableau im1
Hubert 1
tableau im2
Hubert 2
Source : Ms 96 [1], Bibliothèque du Musée de l'Homme, Paris.

326La collection de contes norvégiens de Asbjömsen et Moe date de 1841. M. et Mme Gade y ont fait un choix heureux et des plus agréables à lire. Les contes sont bien classés en fables, en histoires de pêcheurs où le monde des vivants se mêle à l'autre monde, en contes de fées proprement dits où les fées sont les trolls et les nisser, des contes où Dieu, la Vierge et le Diable jouent le personnage principal, etc. Ces contes ont très peu de couleur locale et n?ont rien dans la structure de particulièrement norvégien. Quand ils offrent une version un peu particulière d?un conte connu, elle n?a rien qui dépende du pays où elle a été racontée : telle est la pupille de la Vierge Marie, où la Vierge joue le rôle de la belle-mère malfaisante (p. 202). Tous les contes sont bâtis sur des thèmes connus : l'apprenti-sorcier, la recherche de la fiancée, le cadet persécuté, l'oiseau d?or, Cendrillon (p. 165). Je dois signaler toutefois un conte d?un type d?ailleurs général. Les douze canards sauvages (p. 41) que rappelle le roman et le folklore celtique. Il commence par un motif du roman de Perceval, le sang coulant sur la neige qui suggère la figure d?une beauté rouge comme le sang et blanche comme la neige, et finit comme le conte irlandais des fils de [Lir [213]]. La chose n?est pas étonnante si l'on songe aux campagnes et aux navigations des Norvégiens en Irlande. Mais il faut noter que c?est le seul conte de cette collection qui se situe dans les îles Britanniques.

327H. H.

Just Knud Qvigstad . — Lappische Erzählungen aus Hatfjelldalen, texte original norvégien et version allemande, Kristiania, Kristiania Etnografiske Museums Skrifter, Bind 1, Hefte 4, 1924, p. 253-315 ; Lappischer Aberglaube, ibid., Bind 1, Hefte 2, 1920 ; Lappische Sprichwörter und Rätsel, ibid., Band 1, Hefte 3, 1922, p. 138-251, in-4o[214].

328M. Qvigstad est le principal des ethnographes-photologues qui se sont chargés des Lapons de Norvège. Il leur a constitué de véritables archives, il a sauvé leurs trésors mentaux. En particulier, il interroge dès 1885 des vieillards déjà octogénaires. Ses publications sont nombreuses, exactes, riches en observations personnelles autant qu?en documents quasi autonomes, enregistrés presque sans [intervention] de sa part par ses informateurs indigènes. Le dernier de ses ouvrages va être édité et imprimé par les soins de l'Institut pour l'Histoire comparée de la civilisation d?Oslo et sera le recueil des Légendes et Contes des Lappons de [Hattfjelldal]. – Il sera très important. – Celui qui nous occupe en ce moment est un des premiers travaux de M. Q. imprimé avec retard. Ce sont des contes et des légendes, presque exclusivement d?esprits, de [stalue [215]], presque toujours tirés aux autres recueils de [...], etc., plus de quelques géants et esprits divers. Les [...] du tambour shamanistique et du fondement de la magie sont des plus intéressants (p. 290 sq.)

329La collection du fascicule 2 est un superbe recueil de 318 « superstitions » données dans le texte lappon, et avec les commentaires nécessaires. Les notes donnent d?abondants rapprochements avec les traditions populaires scandinaves. Presque aucune qui n?ait son équivalent dans les deux civilisations. Nous n?avons pas beaucoup de données d?égale valeur pour d?autres groupes européens, même plus vastes.

330Le recueil de proverbes (ibid., fasc. 3) au nombre de 760, est moins curieux ; l'impression de M. Q. est qu?ils sont empruntés au monde scandinave (ibid., p. 228 sq.).

331Les 132 énigmes sont aussi souvent empruntées et par conséquent peu curieuses.

332Les notes de M. Q. sont partout excellentes.

333M. M.

Pedraic Colum . — Tales and Legends of Hawaii, vol. 1 : At the Gateways of the Day, Avec illustrations de Juliette May Fraser , United States of America. Miscellaneous Institutions, Sociétés, etc., The Hawaiian Legend and Folklore commission, 2 vol., New Haven, Yale University Press, 1924, XXVIII-217 p., in-8o, notes bibliogr. [216].

334La législature de Hawaii, colonie des États-Unis, a chargé une commission de collectionner tout ce qu?on sait des mythes et du folklore hawaiien non pas seulement dans un but historique, littéraire ou scientifique, mais dans un but d?éducation pour les enfants des îles, qui, maintenant parlent anglais, mais dont on ne veut pas qu?ils oublient complètement les traditions de leurs ancêtres. Il s?est servi, non sans talent littéraire, des « vieilles histoires des rois, des soldats, des cours et des chef[s] ». Mais il les a « transformés » pour enfan[t]s, Néo-Hawaiiens ou Hawaiiens, Européens, peu importe. Il nous donne un exemple officiel et ethnographique d?un travail qui a été bien souvent opéré. Il était difficile de trouver dans le passé, même dans les démarquages des derniers siècles, un cas plus typique de la façon dont se refabrique un folklore pour des causes sociales, dont les moindres ne sont pas le tourisme américain et un certain goût. La préface contient d?intéressantes remarques sur l'art de conter encore observable à Hawaii, sur les conteurs, sur les rapports de la littérature avec la religion et la mythologie. Le texte anglais a quelque beauté de l'original et quelque saveur enfantine et américaine. L?auteur a d?ailleurs été aidé par les meilleurs connaisseurs, M. Nathaniel Emerson , M. William Hyde Rice . La plupart des contes (car ce sont des contes maintenant) sont extraits de la collection Fornander d?Antiquités et de Folklore Hawaiien [217]. C?étaient des légendes et en particulier même des mythes parmi les plus hauts.

335Nous ne citons ce livre que comme un fait, scientifiquement l'œuvre n?est pas recommandable. Le grand mythe du héros pêcheur de la terre et formateur des choses est en particulier massacré : transformé en un pot-pourri de thèmes hawaiiens et néo-zélandais, eux-mêmes farcis d?éléments mythiques de toutes origines, p. 207. – D?un point de vue populaire, il aura du succès.

336M. M.

E. ? Les dogmes / F. ? Livres sacrés

Antoine . — « Trois conférences sur les gâthá de l'Aveste faites à l'Université d?Upsal pour la fondation Olaus Petri », Annales du Musée Guimet, « Bibliothèque de vulgarisation, 44 », Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1925, 72 p., in-16o. Cf. Marcel Mauss , Observations à la suite d?une communication de M. Antoine Meillet : « À propos des Gathâs de l'Avesta », Institut français d?anthropologie, 19 mars 1924, L?Anthropologie, t. XXXIV, 1924, p. 296-298 [218].

337Sous ce titre modeste, M. Meillet expose une importante découverte d?histoire religieuse et de philologie. Les gâthá* sont la partie la plus ancienne de l'Avesta des livres sacrés du Mazdéisme, et résistent encore sur bien des points à l'analyse. Sur leur portée générale, leur nature littéraire, leur valeur religieuse, les philologues émettent les hypothèses les plus diverses. À plus forte raison sur le sens à donner. Le détail échappe parce qu?on n?a pas la vue claire de l'ensemble, et l'ensemble est obscur parce qu?à certains moments décisifs – comme dans la Bible – un texte irrémédiablement corr[o]mpu, ou infiniment obscur résiste à toute correction, à toute interprétation. Les seuls passages sûrs sont ceux sur lesquels on s?accorde. Et le tout reste énigmatique. On ne s?accorde que sur un point : l'Antiquité de ce langage et de cette versification, et la nature religieuse de ces hymnes. Leur date, leur sens, restent discutée. – Après ce travail, résumé de longues réflexions, de nombreuses explications de ces textes, auxquelles je pus assister, M. M. a fait faire un pas à la question.

338Au point de vue de la date, il prouve avec toute son autorité de linguiste que les gâthá sont bien des hymnes ; qu?ils sont rédigés en une langue du nord-ouest de la Perse – pas très éloignée de celle des inscriptions achéménides, celles de Darius en particulier. La tradition des Parsis n?est certainement pas très éloignée de la vérité. Une autre analyse de critique interne, bien que les mentions de Zarathoustra [Zoroastre] n?y soient ni nombreuses ni claires, rien n?y contredit l'hypothèse que ces hymnes soient contemporains de la réforme de la religion perse par un prophète de ce nom, et en tout cas ils sont sûrement le fruit d?une réfo[r]me. Cette réforme est celle d?un groupe de paysans pauvres, opposés – non pas à un pouvoir central puissant comme la monarchie de Cyrus, mais à des chefs méchants, à une aristocratie immorale. Cette réforme est-elle l'œuvre de Zaratousthra, ou n?en fut-il qu?un instrument ou un contemporain, ou un successeur, il importe relativement peu : le milieu de religiosité sociale où est né le mazdéisme réformé, sa date sont à peu près fixés au VIe siècle avant J.-C.

339Tout cela est important. Mais le plus neuf, à notre avis, c?est l'interprétation philologique. Les gâthá ne seraient pas des hymnes continus, mais des formules rituelles détachées, entourées autrefois d?un [...] [219]en perse qui expliquait les formules mystérieuses, et les rattachaient les unes aux autres ; par le récit mythique, par le commentaire, par l'explication du rituel manuel. Cette explication est décisive. Elle tranche la question de la composition. Elle ne donne certes pas toutes les clartés, disparues dès la collection rituelle des textes. Elle donne exactement le sens de ce qui nous manque pour comprendre. Elle est à mon avis certaine.

340M. M. veut bien citer les observations que j?ai ajoutées à sa communication. Cette forme des gâthà, de vers enchâssés dans la prose est celle d?une partie de la littérature bouddhique la plus ancienne où nous avons cette fois le document complet, et même d?une partie de la littérature post-védique – en somme de même époque que la révolution mazdéenne. – Il semble d?ailleurs que cette expression littéraire n?est pas la seule chose commune. – Une littérature des pauvres semble avoir pris cette forme dans le monde indo-iranien. Mais le mouvement moral des pauvres, la formation des [cultivateurs], par opposition aux riches et aux nobles, semble avoir été le mouvement social par excellence du VIIe au Ve siècle avant notre ère, des confins de l'Inde à la Grèce [...] Rome en passant par les prophètes d?Israël et la communauté des pauvres de Jérusalem. – L?opposition riches-pauvres a dû avoir pour cause, et l'enrichissement des riches – probablement contemporain de l'or monnayé qui apparaît à cette époque – et l'accroissement du nombre des pauvres, dans les empires, royaumes et cités.

341Pour dissiper toute équivoque, il faudrait ajouter que la forme primitive de l'hymne est, à notre avis, la même partout. L?hymne épique continue, racontant l'histoire du dieu des principes [...], est une chose récente. Ce qui est la règle en Australie, en Nouvelle-Guinée, en pays Algonquin, en N. W. américain, en de nombreuses tribus africaines, c?est le sacré de formules qui se suivent à intervalles, changeant le long de rites dramatiques qui répètent en gestes le drame qui décrit et répète le chant. Mais celui-ci – même quand il est plus un récit qu?une formule répétée pour son efficacité – est avant tout le couronnement et le moyen de rythmer un drame. La série de strophes ne se comprend que par la série des danses. L?hymne proprement dit est une chose plus rare.

342M. M.

XII. ? Organisation religieuse par MM. H. Hubert et M. Mauss

Adolf von Harnack . — Die Mission und Ausbreitung des Christentums in den ersten drei Jahrhunderten, Erster Band. Die Mission in Wort und Tat. Zweiter Band. Die Verbreitung, 4e éd., Leipzig, J. C. Heinrichs?sche Buchhandlung, 1924, 2 vol., XI-1000 p., in-8o, 11 cartes, index [220].

343Nous avons consacré à ce livre, lors de son apparition dans le 7e volume de L?Année sociologique, 1904, p. 355, 363 [221], un trop long compte rendu, pour nous y arrêter encore beaucoup. Il a parcouru une carrière brillante. Il a doublé en vingt-trois ans. Mais son caractère général n?a pas changé. Les principales modifications que l'auteur y a introduites l'ont été sous forme d?excursus. C?est le quatrième livre qui a le plus grossi et dès la deuxième édition il formait le tiers de l'ouvrage : il en forme aujourd?hui le 2e volume. La quatrième édition nous apporte quatre excursus nouveaux sur l'origine des 48 premiers papes, sur les ordinations dans l'Église romaine, sur les commencements de l'organisation ecclésiastique de Rome, sur les ordinations d?évêques faites par l'évêque de Rome. Seule la partie du chapitre III relative à l'expansion du christianisme en Asie a été profondément remaniée sans l'être dans son esprit. Les 11 cartes dont s?est illustré le livre n?y ajoutent vraiment pas beaucoup.

344H. H.

Kirsopp Lake . — The Religion of Yesterday and To-morrow, Londres, Christophers, 1925, 183 p., index [222].

345Ce livre a eu un très grand succès. Il est dû à l'un des théologiens protestants les plus réputés, que Harvard a disputé à d?autres écoles et à d?autres fonctions. Il a été applaudi sous la forme de conférences données à Oxford et dans les églises américaines, sous celle d?articles dans les grandes revues théologiques, philosophiques, intellectuelles. À lire les comptes rendus qui en furent faits, nous croyions qu?il contenait plus de philosophie et plus de matière. Nous croyions aussi qu?il y était question de la religion en général et non seulement de la chrétienté. M. Lake est même un des rares théologiens qui parle de celle-ci et non de sa confession seule, mais il en parle comme d?un but, et dans le christianisme tout au moins de son ensemble – catholique, orthodoxe et protestant. Nous avons été bien déçus. Nous nous aventurons sur le terrain d?une Église et d?une théologie modernes. Et une fois de plus nous sommes transportés [...] de la science sociale. Nous ne nous trouvons toujours qu?en présence d?un document à demi subjectif et individuel, d?une expression d?opinion plutôt que d?un exposé de faits, et qui plus est, d?une tentative de direction, d?une aspiration normative, plutôt que d?une spéculation désintéressée, éloignée de toute pratique quotidienne, de tout problème de l'heure et de la mode.

346En fait, cet ouvrage est court, clair, intéressant, éloquent et probablement juste. Acceptons-en un instant la donnée. Du point de vue choisi, il consiste à décrire la querelle protestante, et dans le protestantisme presque exclusivement américain du nord, entre expérimentalistes, fondamentalistes et institutionalistes, au fond de la question des fondamentalistes. On sait ce que sont ces réactionnaires du protestantisme ; comment ils réclament, non sans intolérance, et non sans persécution, une croyance plus que verbale ou allégorique, une vraie foi dans la lettre de l'Ancien et du Nouveau Testament ; leur force dans certains États américains, composés surtout de petites congrégations religieuses arriérées, se fait en ce moment durement sentir, dans la loi, dans la jurisprudence, dans les mœurs, et encore plus durement au sei[n] de ces groupements d?intolérance. Tout ce qui est en même temps libéral [...] [223]que protestant tente de se dégager de pareils excès qui rappellent les temps primitifs, ceux du puritanisme, dont ils viennent. M. L. a le courage de les combattre. Il avoue sa raison critique (p. 85), la Genèse, la Création est un mythe qui concerne les principes et le dogme de la chute et de la Rédemption du jugement dernier est un autre mythe, qui concerne les principes cette fois, des principes et la fin (p. 89). – Il est un « expérimentaliste ». Il nomme ainsi les partisans de l'expérience religieuse – le mot de William James a fait fortune – ceux que nous appellerions ici modernistes (p. 9). Ce sont ceux qui voient au fond dans l'Église, ses institutions, et dans ses mythes et ses dogmes dont ils admettent la critique la plus absolue (p. 51) des moyens d?édification religieuse et mystique. M. L. est d?ailleurs un mystique avoué (p. 10, 178). C?est la mode maintenant parmi les philosophes théologiens ou les théologiens philosophants. M. L. est de ceux qui marchent et qui sautent le long de l' « autre voie » vers la « réalité », avec Jésus. Même il s?apparente à des traditions qui furent hérétiques, voire extra-chrétiennes. Ainsi il regrette qu?Origène n?ait pas vaincu autrefois (p. 82, 84) et révère même Ammonius Saccas et les prédécesseurs inconnus de Platon et d?Origène. Jésus n?est que l'un des « grands prophètes ». Cette mystique et cette critique ne sont pas sans courage. Mais elles « sentent le fagot » et nous doutons que cette nouvelle forme d?allégorisme et cette communion métaphysique où les symboles chrétiens eux-mêmes disparaissent avec l'Église (p. 164) trouvent beaucoup de zélés pratiquants. Au surplus, M. L. désespère lui-même du succès (p. 10) immédiat, s?il est sûr de la forme future de cette foi qui ne sera plus une « confession » (creed).

347Entre la réaction fondamentaliste et [expérimentaliste] se tiennent ceux que les Américains et M. L. appellent assez souvent les institutionalistes. Ce sont les conservateurs modérés des institutions de l'Église et aussi des diverses sectes protestantes, mais ce sont en même temps des progressistes au point de vue social. Ils croient pouvoir donner un sens moderne aux vieilles formes de vie religieuses à la prière en particulier, qui sera d?ailleurs une des seules institutions appelées à subsister ; – au vieux credo, celui de la divinité de Jésus, des Écritures ; – et ils croient aussi pouvoir réaliser pratiquement, dans la [vie] courante par le « service social », par toute une sociologie philanthropique, un programme de vie chrétienne. – M. L. a peur de la victoire des « fondamentalistes », mais n?y croit pas ; il voit la prépondérance actuelle des institutionalistes et ne la trouve pas sans avantage pour la religion. Il souhaite la victoire de sa propre doctrine, d?une « chrétienté » épurée du passé et du laïque, et il croit que après le « heurt des partis », on verra surgir une religion où il y aura place pour « la mystique ».

348Nous avons essayé de donner un résumé fidèle d?un livre plein d?allusions et riche de doctrine, d?observations historiques, et de perceptions actuelles. Mais on voit combien nous sommes loin de toute véritable science de la religion. D?abord n?est en question que le christianisme, et dans celui-ci que des « dernières crises », on pourrait dire du dernier cri de l'actualité religieuse protestante aux États-Unis : même les agitations de la pensée et du sentiment en Europe sont ou ignorées ou laissées de côté, comme si les « formes américaines » de l' « expérience chrétienne étaient nécessairement les plus hautes ou les plus riches » possibles ?, comme si même nous n?assistions pas ici précisément en particulier chez les catholiques et chez les orthodoxes au réveil tardif et lent mais plus étoffé de cette mystique que M. L. croit pouvoir prévoir.

349Mais il y a plus. Est-on sûr que les autres religions aient fini leur temps, que l'islam, le bouddhisme et même le brahmanisme et le jaïnisme aient perdu toute [...] de progrès ? On compterait aisément les nouveaux et vrais prophètes de ces religions fort à la mode. Avec Rabindranath Tagore , la « Sagesse » de l'Inde, l'amitié bouddhique avec un [...] répandent encore dans ce monde des parfums pénétrants. Et les mouvements mystiques de l'émigration russe sont pleins d?intérêt plus que nos mystiques académiques. Donc, le christianisme, même protestant ultra-libéral et « grossièrement » mystique ne permet pas plus d?entrevoir le futur – parce qu?il est le dernier en date – que telle forme d?activité financière purement spéculative, également américaine, ne permet de prévoir ce que sera l'économie de demain.

350Il y a dans toute cette attitude du théologien une foule d?acceptations de principes que le sociologue n?accorde pas. – Bien au contraire, le sociologue discerne ici des symptômes d?affaiblissement religieux. En fait, cette façon dont les institutionalistes renoncent à la charité pour une activité pratique – simplement éthique, philanthropique, même gymnastique, consiste au fond à oublier ce qu?est la religion – Ô saint Paul ! – au profit de ce qu?est le social, le laïque, le charnel. M. L. voit cela lui-même et par exemple blâme, en biologiste pur, les excès de protection du faible (p. 170). Mais la mystique est elle-même, pauvre de faits, pauvre d?idées, pauvre de sentiments collectifs, anarchique. – Où voit-on sa force d?attraction ? Elle attire des milieux littéraires, quelques congrégations, quelques faibles nerveux. N?est-elle pas pour ses adeptes le simple chemin de traverse qui permet de s?évader des cultes, du dogme, de l'Église, auxquelles ils ne croient plus – qu?allégoriquement ? Comme aux temps alexandrins, elle n?est qu?un refuge.

351Nous sommes loin de croire ici que la religion, les religions ont dit leurs derniers mots. Nous nous abstiendrons donc de prévoir le futur. Cependant nous sommes à peu près sûrs d?une chose : ce n?est pas aux théologiens, même à ceux de talent, qu?il sera donné de formuler les choses sacrées de l'avenir. Il faut pour cela des prophètes, des visionnaires et des masses qui puissent les suivre. Même de ce point de vue la théologie ne nous intéresse pas autant que la juste observation des formes religieuses. Comme ceux des philosophes, ses livres ne sont que des faits et même moins, des documents littéraires qu?il faut critiquer. Nous ne nous lasserons pas de nous répéter à ce sujet.

352M. M.

Sir Charles Alfred Bell . — Tibet. Past and Present, Londres/Milford, Oxford University Press (1re éd., 1924 ; 2e éd., 1926), 3e éd., 1927, XII-326 p., in-8o, index [224].

353Ce livre a eu un grand succès. Les premières éditions étaient splendidement illustrées. La dernière usuelle n?en donne qu?une faible idée. Sir Charles Bell est le diplomate qui a su concilier à l'empire britannique, et les [É]tats de souches Tibétaine, Sikkim et [Bhoutan], et le Tibet lui-même, en particulier les deux grands prêtres dieux-rois, le dernier Dalaï-Lama et le dernier Tastri Lama. Le sobre récit de sa carrière, de ses voyages, de ses aventures, de sa diplomatie, occupe presque tout le volume. La description des sociétés thibétaines d?autrefois et d?aujourd?hui ne vient que par surcroît.

354Sur la religion autochtone, le Pön, comme on dit, Sir B. passe (p. 24, 79, etc.) ; sur les formes officielles du bouddhisme, les mœurs intimes des deux grands lamas, auquel il a servi si longtemps de conseiller et d?attaché dans l'exil, il donne de nombreux détails inconnus : (p. 82, etc., p. 123, etc., et un bon tableau de leur activité et de leurs pouvoirs administratifs). Mais sur l'Église bouddhique, ses pouvoirs, son organisation, [...] [225] ses croyances, on ne trouve que des anecdotes, ou si l'on veut les appeler ainsi, des faits historiques. Quelques faits de droit intéressants. C?est tout ce que le sociologue y trouvera – avec les illustrations extrêmement instructives.

355M. M.

Troisième Section / Sociologie morale et juridique par MM. M. Mauss et E. Lévy, et H. Lévy-Bruhl / I. ? Du droit et de la morale / A. ? De la morale / B. ? Théories générales sur le droit. Le juge, la loi et le droit

Rudolf Stammler . — Rechtsphilosophische Abhandlungen und Vorträge. — 2 vol., 1er vol., 1888-1913, 459 p., 2e vol. 1914-1924, 427 p., Berlin, Neudruck der Ausgabe, Charlottenburg, Rolf Heise, 1925, bibliogr., in-8o[226].

356M. Stammler a réuni ici beaucoup de travaux presque tous connus où se trouve sa pensée essentielle. Souvent reviennent les mêmes développements, les mêmes anecdotes. On est porté par sa passion, enchanté par ses aperçus. Il va toujours au-delà, au-delà du romantisme de l'École historique, au-delà de la technique de Rudolf von Jhering , de la morale marxiste : la substance du droit est comparable à la matière économique, il faut connaître cette substance, l'idée sans elle est vide, la communauté des hommes vivant librement doit dégager le droit juste du droit établi, connaître son histoire, sa vigueur, ses concepts, sa méthode, sa technique, sa pratique, la volonté juridique s?impose d?elle-même, inévitable pour unir les hommes, le droit qui correspond à la nature ou droit naturel a un contenu variable mais qu?il faut déterminer, diriger par une méthode de valeur générale. M. S. prétend élargir la conception matérialiste de l'histoire ; plusieurs fois il le dit ou le sous-entend.

357Sa doctrine est connue des lecteurs français, particulièrement par François Gény (Science et technique en droit privé positif, t. II, p. 127-190 [227]).

358On trouvera dans ces deux volumes quantité d?analyses où les procédés juridiques lui permettent de classer les institutions. Je souligne son étude sur les privilèges (tome 1, p. 2[0]7 [228]) où il montre des inégalités résultant de la nature des choses – (ainsi les distances à parcourir pour aller à une assemblée) – et celle sur les contrats de tarifs (tome II, notamment p. 229 [229]) où il enseigne en quoi ils ne sont pas des lois mais du droit privé, à savoir par exemple parce qu?ils sont annulables pour vices du consentement.

359Pour qui connaît les œuvres principales de M. S., cette publication intéressera surtout par de tels détails.

360E. L.

II. ? Systèmes juridiques et moraux / A. ? Des systèmes juridiques et moraux en général / B. ? Systèmes juridiques des sociétés indifférenciées à base de clans totémiques

Edwin Sidney Hartland . — Primitive Law, Londres, Methuen, 1924, VII-222 p. petit in-16 [230].

361Le regretté vétéran de nos séances, l'auteur de la Legend of [Perseus] [231], de la Science of Fairy Tales [232], de tant d?autres livres, et qui a suivi avec tant de dévouement le développement de nos études sociologiques, en France, était de métier un juriste. Il nous lègue, dans l'Anthropological Series de Methuen, un charmant petit manuel de « droit primitif », destiné aux étudiants et aux lecteurs éclairés. Il est écrit dans cet excellent et technique langage de juriste anglais, mais, à l'anglaise aussi il est plein de faits pittoresques, bien choisis, il est presque exclusivement composé de faits, essentiellement descriptif ; il est aussi agréable qu?instructif pour les non initiés. Clair, plein de bon sens et de sens de faits [sic], il fait grâce de toute théorie, et surtout de toutes ces discussions sur les « bases » du droit, la nature des sanctions, l'individualité des législateurs, et le communisme primitif, etc., qui encombrent les autres manuels. Il faut s?en servir en même temps que de l'autre petit manuel que l'auteur publie dans la même collection, intitulé Primitive Society. The Beginnings of the Family and the Reckoning of Descent [233]. À eux deux ils forment un tout, aussi satisfaisant que possible dans le plan choisi, de sociologie juridique, dite primitive, prenant l'ensemble des lois coutumières des « sauvages », et montrant à chaque pas comment elles ont fourni « la matière première » dont les lois dites civilisées ont été fondues.

362Sur les grandes lignes, nous sommes d?accord avec M. Hartland . Ses deux petits livres sont d?ailleurs infiniment moins polémiques que les autres manuels de même genre, celui de M. Robert Lowie , Primitive Society [234], par exemple, moins paradoxaux que celui des PP. Wilhelm Schmidt et Wilhelm Koppers . Il s?est tenu dans les honnêtes limites de ce qui est acquis de son temps et a fait grâce au lecteur des controverses trop relevées ou trop risquées.

363Nous résisterions [sic] à cette distinction : Loi et Société qui divise des choses indivisibles. Mais il est clair que M. H. n?a voulu que distinguer l' « organisation » sociale, à ce stade de la vie des sociétés, essentiellement politi[que] – domestique, et non pas politique d?une part, domestique de l'autre – de la vie juridique publique et privée moins organique, plus diffuse.

364Le présent volume étudie donc dans un certain désordre – le droit public, criminel, privé, la procédure.

365L?expression « Constitutional Law » (I) n?est pas très heureuse pour désigner au fond soit l'absence de constitution tribale (Andaman, Yatagan*, [tribu australienne, Eskimaux] Leçon X [235]) la faiblesse de cette constitution en Australie, en Polynésie, en Amérique, opposée à la force des clans. Mais la façon dont M. H. suit l'évolution jusqu?aux royaumes (Dahomey, Aztecs, Gallois, etc.) est élégante et juste. Le chapitre VIII « Législation » expose le rapport entre la coutume assez bien décrite (cf. Introduction, p. 4), sa fondation mythique (p. [200] sq. [236]) et les cas assez rares d?innovation. Le chapitre V, « International Relations » est bien court, et la guerre et la paix y sont même assez mal illustrées. – Le droit criminel est étudié sous le juste titre de sanctions (VI) et les rapprochements avec les vieux droits des îles Britanniques s?imposait. – La procédure (VII) étudiée est surtout criminelle, et plus spécialement l'ordalie [ordeals]. – Le droit privé est l'objet de deux chapitres, dont l'ordre est purement anglais « Droits personnels et responsabilités personnelles » (III [237]) un peu désordonné pour un Français, où se mêlent l'exogamie, le mariage, la vengeance du sang, la nature et la contagion des tabous [238], et « Propriété et possession [239] » (IV) auxquels il faut ajouter : l'héritage, l'échange, et la monnaie, simplement effleurés (le nom du potlatch lui-même n?est pas prononcé).

366L?ensemble est à peu près complet. Il manque plutôt de proportions. L?importance de la division de la société en générations, en classes d?âge, sociétés des hommes, sociétés secrètes, confréries n?est pas reconnue.

367Quelques fautes d?impression (les Agui pour les Agni (d?Afrique de l'Ouest) Dharma pour Dharna [240], Sikiva pour Sukwa [241]) devront être corrigées dans ce manuel. Les faits sont souvent schématiques à l'excès, mais toujours exacts (il faudra cependant corriger la phrase mal venue sur les Eskimos Polaires (en est-il d?autres qui ne chassent pas le renne ?) et qui provient de [Steensby ].

368M. M.

C. ? Systèmes juridiques des sociétés différenciées à base de clans totémiques

Robert Wood Williamson . — The Social and Political Systems of Central Polynesia, Cambridge, Cambridge University Press, 1924, 3 vol., vol. I, XXVIII-438 p., vol. II, 496 p., vol. III, 488 p., in-8o, index [242].

369M. Williamson est venu à la sociologie et à l'ethnologie après une brillante carrière d?homme des lois, d?homme des bois ; il n?est pas seulement, comme nous, hélas un ethnologue en chambre, il a travaillé sur le terrain ; et nous avons rendu compte de son excellente esquisse des Mafutu de [N]ouvelle-Guinée. Cette fois c?est une compilation sociologico-ethnologique dont M. W. nous dote. Elle sera sûrement très utile et utilisée. Une excellente bibliographie des documents concernant les peuples de ce que M. W. appelle la Polynésie centrale, un index remarquable en rendent précieux le maniement. Et il faut ajouter que presque toutes les sources imprimées ont été consultées, tous les documents produits, souvent textuellement. C?est un instrument de travail précieux. Et cet effort est considérable. Reste à savoir s?il est couronné de succès. L?utilité et la b[eau]té de la collection étant hors de doute, le but proposé est-il atteint ? C?est cette réponse que M. W. et peut-être nos lecteurs attendent sans doute de nous, et bien franche.

370La façon de définir le problème le rend peut-être insoluble. M. W. pose une double question : d?ethnologie proprement dite – celle de l'origine et des migrations exactes des différents peuples polynésiens centraux ; celle de leur organisation sociale ou plutôt juridique –, ou plus exactement politique et domestique dont M. W. tente de faire le tableau complet et de dresser l'histoire. Enfin par méthode il ne s?agit que de ce que M. W. appelle les Polynésiens centraux ; c?est-à-dire qu?il exclut tout ce qui est au nord ou au sud de l'Équateur et des tropiques [du Cancer et du Capricorne] les Hawaïens et les Néo-[Zé]landais et les [...] et les îles où on voit les transitions entre les Polynésiens et les Micronésiens. Il se prive ainsi de deux termes de comparaison essentiels, et même de trois : les Maoris, type de société polynésienne à chefs, sans rois, les Hawaïens qui ont formé peut-être la société polynésienne la plus unifiée et la plus considérable. Enfin, toute la chaîne d?îles qui relie de façon presque continue les rameaux orientaux des Polynésiens à la souche occidentale des Malayo-Polynésiens, ne comprend pas que des Polynésiens ou Mélanésiens, et des dégénérescences nombreuses et en tous sens qui ont pu se produire dans des îles à la fois séparées et plus ou moins densément peuplées, et entre lesquelles des migrations constantes à la recherche de pays meilleurs ou de liberté ou pour cause d?exil, ont établi les plus invraisemblables croisements. (Nous connaissons le fait pour les gens des P[...]. L?identité d?institutions ne prouve pas la communauté d?origines, ni la diversité ne prouve [l'existence] de souches différentes. C?est l'inférence inverse qui est la vraie, parce qu?elle est fondée sur un fait : si une migration est acceptée historiquement, ou une filiation prouvée, nous en tiendrons compte et ne croirons pas à des évolutions ou à des divergences spontanées. À notre avis rien n?est plus imprudent que cette méthode qu?a mise à la mode notre regretté William Halse Rivers , qui consiste à faire l'histoire des Sociétés avec une série d?hypothèses sur leur histoire sociale. Nous croyons que l'Histoire est une chose respectable, mais il faut rester sur son étroit terrain. L?unité de la race polynésienne, celles de la langue, de la civilisation matérielle, morale polynésiennes ne font pas de doute et sont amplement prouvées, chacune par des ordres de faits qui relèvent d?elles. Mais hors de là nous ne sommes encore certains de rien. Les linguistes ont encore à dresser les cartes et les tableaux et les filiations probables des langues et des dialectes. Les variations d?arts et de techniques ont de même à être classées. Des sortes de mystères comme celui de l'entrelac [243] néo-zélandais devront être percés. D?autres resteront opaques. Et tout cela ne donnera que des probabilités. Celles que donne l'histoire qu?on peut extraire de la comparaison des mythes, des légendes, régimes politiques, monarchies, chefferies – clan local – clan totémique ou non – comme tente M. W. sont bien faibles, dans la mesure où elles ne concluent pas d?accord avec les autres, et surtout à l'unité des peuples polynésiens et au contraire à différencier plusieurs couches [ou] vagues successives (I, p. 26-36). Les R[arotongan], les T[angoroans], etc., des uns et des autres – empruntant dans le premier cas le nom d?une île, dans le second celui d?un dieu – tout cela ne nous dit rien qui vaille. Nous aimons encore mieux les vieux systèmes de comparaison des légendes généalogiques. Cela c?est de l'histoire ; ou plutôt ce qu?on peut bâtir d?histoire avec cela est au moins fondé sinon dans les faits, du moins dans la façon dont ils sont représentés, et doit correspondre à quelque chose. Tout ce que l'on peut accepter sinon croire, c?est que les gens à Kava (genre de boisson enivrante qui remplace évidemment le bétel indien) forment la dernière de ces migrations. Même nous considérerons comme assez vains les efforts faits systématiquement avec énergie par M. W. dans chacun de ses chapitres pour constituer l'histoire des diverses institutions, par exemple de la descendance utérine ou du clan lo[cal] ici et là, à Samoa surtout. Quelques-uns de ces efforts sont pourtant réussis, mais ne mènent à rien.

371On nous excusera d?insister à tant de reprises. Mais les études d?ethnologie courent en ce moment un assez grave danger du fait de cette recherche constante de l'hypothèse historique. L?observation, l'analyse approfondie des documents existants ont fait place pour nombre d?historiens pressés, et pour des parties assez grandes du public, même savant, à des comparaisons hâtives de documents, insuffisants presque toujours, et encore plus souvent insuffisamment critiqués. Prenons un exemple : l'hypothèse de Rivers de dual people un peu meilleure que celle de M. Félix Gräbner de la Zw[e]iklassenkultur – en Mélanésie et en Polynésie ; elle est absolument sans fondement. Les soi-disant « moitiés » sont les deux phratries mélanésiennes, et elles ne sont autres que les deux clans primaires originaux, et même elles groupent les clans secondaires qu?on a trouvés à leur intérieur, chaque fois que la recherche a été suffisante. Or, cette hypothèse tache encore (I, p. 302, 303) l'ouvrage de M. W. et infecte une partie des théories et de l'histoire ethnologique. M. W. va même jusqu?à supposer que ce dual people est affilié aux « Proto Samoans ». Et d?autres dresseront d?autres échafaudages. Leur emploi gâche même les plus beaux problèmes : par exemple celui de la race et de la civilisation mélanésiennes.

372C?est contre ces méthodes que nous protestons. D?autres sont plus sûres. Un élément polynésien est visible dans toutes les races des îles Mélanésiennes au moins sur les côtes. Les langues mélanésiennes – non pas les langues papoues qui résistent encore à l'[a]nalyse – sont une branche des langues malayo-polynésiennes – enfin l'archéologie préhistorique – l'anthropologie préhistorique – les quelques fouilles faites montrent des crânes mélanésiens à l'île de Pâques, des poteries mélanésiennes, même protopacifiques – [...] M. Hubert signalait cela dès 1902. Voilà des preuves, voilà des faits. – Gardons-nous de mêler la sociologie à toute cette histoire, et de mêler celle-ci à nos recherches.

373Toute cette discussion ne concerne en réalité que l'une des tendances du livre de M. W. Et c?est même à ces tendances prématurées que nous en avons. Au fond, M. W. a suivi les principes que nous préconisons. Abstraction faite de cette manie historique, il a fait dans la plus grande partie du livre œuvre longue, saine, et utile de sociologue, et de spécialiste de tout ce qui concerne l'organisation sociale, politique et domestique des Polynésiens centraux. Le droit criminel et le droit religieux sont laissés de côté, pour un ouvrage futur semble-t-il. Comme c?est plutôt un tableau complet des faits et des sources, un pareil recueil ne se prête naturellement pas à une discussion théorique – puisqu?il est bien et soigneusement fait. – Il n?y a qu?à indiquer les résultats obtenus.

374Ils concernent d?abord l'organisation domestique à laquelle est consacrée une partie du tome II (p. 86-[123] [244]). Naturellement les renseignements sont fort inégaux et on ne peut comparer ce que nous savons de la famille, du clan et du totémisme à Samoa avec ce que nous savons des autres îles. Et cela conduit M. W. à attribuer à ceux-ci une valeur peut-être excessive. – Même cela le fortifie dans son hypothèse d?un peuplement par une des couches des migrations, à partir des Samoa – hypothèse qui n?a d?ailleurs rien d?invraisemblable. D?une manière générale, M. W. [voit] de la parenté classificatrice plutôt du type de Fiji et de Tonga que du type Hawaïen et de la parenté appelée par Lewis Henry Morgan « panachée ». Des restes importants de descendance utérine (chap. XVI) marqués surtout à Samoa et Tonga, et surtout dans les castes de chefs ; une position remarquable de la sœur et du frère, surtout dans ces castes, suivant qu?elle ou lui sont aînés (II, chap. XIX, p. 214 sq. [245]). – Sur l'exogamie (chap. XVII), M. W. expose sciemment les faits : [f]ait observer que les cas de mariage entre frères et sœurs sont des usages royaux, et heureusement ne sépare pas l'exogamie du clan. Il reste également dans le vrai quand il ne sépare pas le totémisme du clan (chap. XIX), mais quoiqu?il discute bien les faits, [il] a décidément confondu sous ce nom trop de simples notions... morphologiques avec de véritables cultes de clan [246] ; cependant les observations (II. p. 317 sq.) sur la relation entre le culte des morts (tortues et poissons) et le totémisme, une sorte de totémisme mortuaire, sont parfaitement exactes. On retrouve ce trait dans presque toutes les civilisations du Pacifique océanien et américain.

375Toute cette discussion de l'organisation domestique est trop séparée de celle de l'organisation du clan, toujours local et rarement totémique en Polynésie, [qui] n?en est pas moins une unité non seulement politique, mais domestique. Là où nous semblons bien informés, c?est le cas de Samoa – (bonne analyse II, p. 6 sq.) comme [...] Maori, des clans Malais ou Malgaches et du village malais ou malgache. – M. W. s?est sur ce point, com[me] sur bien d?autres privé [de] nombreux points d?appui en renonçant à comparer les Polynésiens centraux avec des autres Malayo Polynésiens (il y revient cependant par force, ex. 11, p. 45, etc.) Quoique l'analyse de M. W. soit fine et exacte (par exemple celle du [ngati ? [247]]) cette notion d?un groupe domestique manque un peu.

376De même l'analyse du village et de « l'acte politique » si importante qu?elle soit (vol. I. chap. XII, XIII, vol. II, chap. XIV, XV) manque en clarté, faute de ces comparaisons. La comparaison entre le [...] et les institutions du malgache s?impose. C?est à ce propos (II, chap. XXVIII [248]) et à celui de la chefferie et royauté que M. W. a fourni le plus gros effort, dans l'ensemble non sans succès (voir surtout [chap. XV [249]]) une bonne étude du mara[e] du sanctuaire, centre de la vie du groupe. Les difficiles questions du « district », à Samoa, etc., sortent éclairées suffisamment. Seulement là aussi ([chap. XI [250]]) la volonté bien arrêtée de M. W. de faire, avec des documents exclusivement traditionnels, par conséquent seulement à peine historiques l' « histoire du peuplement » et de la division des peuplements de ces îles, complique tout, obscurcit souvent et rend peu de résultats. Cependant même sur ce point, ce sont d?excellents matériaux que M. W. a rassemblés et mis à pied d?œuvre. On pourra peut-être un jour, quand on aura toutes ces histoires de clan, apercevoir ce qu?il y a d?histoire derrière.

377Le IIIe volume est, à notre avis, excellent, suffisamment complet, et joint aux bonnes parties de la description des « aires politiques » constitue un excellent tableau de la chefferie de la classe des chefs (chap. XXXII), de leur nature religieuse (chap. XXX, XXXl) de leurs pouvoirs (chap. XXXII) de leur administration de la justice (chap. XXIX) leur contrôle des [propriétés] foncières [251], et le contrôle (moral, économique et religieux) des vivres (chap. XII) les tributes qui [252] en suivent (chap. XLII). Nous considérerons comme un acquis la belle collection des faits concernant les « noms » et « titres » des chefs, la nomination et l'héritage à ces noms (chap. XXXIV-XXXVIII). C?est une question difficile, généralement laissée de côté par les ethnographes et les « comparants ». Sur ce point encore, les Polynésiens apparaissent proches d?autres civilisations, et cette notion de la « divinité » du titre (chap. X[XXVI]II, p. 227 [253]) ne leur est pas spéciale. En tout cas, même presque mutilée de toute l'étude de leur nature religieuse, cette théorie des noms et titres est capitale. Si celle des noms propres avait été poussée davantage (chap. III, p. 163 [254]) même les analyses de généalogies royales du volume I eussent pu être éclairées. Ici encore des comparaisons avec les coutumes Maori eussent été décisives.

378M. W. a suivi un ordre purement géographique. Il n?a pas essayé d?autre part de montrer pourquoi dans certaines îles s?est développée une certaine royauté, [pourquoi] dans certaines autres, on en est resté à la chefferie. L?étude logique et sociologique eût pu sur ce point avantageusement remplacer l' « histoire sociale » à la Rivers .

379Nous signalons encore un excellent chapitre sur « le caractère social de la guerre ». Là encore les Maoris sont infiniment plus typiques. On verra cela quand nous publierons l'œuvre posthume de Robert Hertz . Et il y avait même plus à extraire des documents de William Wyatt Gill sur la notion de guerre à Man [gera] [255]...

380M. M.

Sans titre [Analyse de Paul Wirz , Die Marind-anim von Höllandisch-Süd-Neu Guinea, Hamburg L. Friederichsen & Co., 1922-1925, 4 t. en 2 vol., in-4o[256]].

381Nous avons étudié à fond (voir plus haut « Sociologie religieuse ») les documents d?ordre religieux que M. Wirz a publiés sur l'une des plus importantes populations de la Nouvelle-Guinée hollandaise, les Marind-Anim. Les renseignements d?ordre juridique ne sont ni aussi sensationnels, ni aussi satisfaisants. Les intérêts et les talents de M. W. sont plutôt anthropo-géographiques, techniques, esthétiques et religieux. Cependant, ethnographe professionnel consciencieux et plein de talent, il a su noter un certain nombre de faits importants.

382Le fait que la parenté entre les divers sous-clans d?un Boan est connue exclusivement sous la forme de l'association mythique des [Amai] n?est pas non plus [...]

383I. – Les Marind-Anim sont, on l'a vu, divisés en clans totémiques exogames à descendance masculine stricte, avec sous-clans. Cela est précis. Reste la question des phratries. M. W. appelle « Parentés totémiques » ce que les Marind-Anim appellent « le Boan ». À notre avis, il se trompe complètement ou plutôt s?embrouille faute d?une terminologie juridique, sociologique précise. – Le Boan a un nom, même un cri de ralliement ([Band I, Teil], chap. II. p. 31). D?autre part il est exogame. Donc c?est un clan ou c?est nous qui nous trompons fort. Enfin, il correspond à un culte ou plutôt à un ensemble de cultes. Si cette correspondance n?est pas parfaite et si ce culte et ce totem principal est plus spécialement dévolu à un clan plus représentatif du clan primaire, cela n?a rien que de normal. Et il n?y a que ces deux seuls faits qui séparent le Boan de ce que M. W. appelle clan et à quoi nous réservons le nom de sous-clan. Les sous-clans de M. W. sont des sous-sous-clans peut-être même quelquefois des familles indivises assez larges – dont la ressemblance avec le clan est naturelle dans un pays agricole et à descendance masculine. Nous restons par contre fort incertain sur la nature de la grande division bipartite de la tribu en [Geb-zé] et [Mahu-zé]. (Chez les Marind-Anim ceux-ci sont le Boan principal, nous dirions le clan-chef des Sami-rek, gens du... Sont-ce des phratries ? M. W. discute fort mal le problème. Celui-ci est obscurci d?ailleurs depuis près de vingt ans, sauf en France – par la notion du Système des deux classes, p. 212-213) que William Halse Rivers et MM. Félix Gräbner et Wilhelm Schmidt ont mise à la mode. Il la complique encore de questions historiques et se figure les gens du [Geb-zé] et les gens du [Mahu-zé], venant les uns de la côte, les autres du centre de la Nouvelle-Guinée. Cependant ses conclusions (chap. III, p. 215) sont assez prudentes et nous dirions même justes. Ce sont des restes de phratrie, et nous n?avons même pas besoin d?aller, comme lui, par respect pour des théories qui n?ont pas l'ombre d?un fondement, jusqu?à dire que ce sont des restes d?une organisation à deux clans et des moitiés utérines. Ces remarques ne semblent peut-être avoir d?intérêt pratique que pour ceux qui se serviront et de L?Année sociologique et des documents par ailleurs incomparables de M. W., mais une raison fondamentale nous fait insister. C?est que toutes ces fautes proviennent non pas de M. W. mais d?une certaine méthode qui vicie non pas l'observation, mais la [...] de l'observation et par conséquent l'expression et indirectement l'observation elle-même. M. W. est un méthodique, mais trop pressé quand il s?agit d?histoire. Il adopte de pures hypothèses comme celles de MM. Gräbner et Schmidt comme celle d?une « culture à deux classes », tout simplement parce qu?elle est historique. Il tente donc d?expliquer l'organisation sociale par un mélange d?une civilisation à clans, et d?une autre à deux classes. Il part du principe – d?une opposition entre ces deux civilisations, et, cercle vicieux, y conclut en même temps. L?ethnographe ne doit ni faire ni accepter d?hypothèses, historiques moins que d?autres. Elles sont réservées à la comparaison et déparent même les faits les mieux enregistrés.

384II. – D?ailleurs c?est sur ce point des observations concernant le régime intérieur des groupes domestiques et politico-domestiques que les représentations de M. W. présentent le plus de lacunes. Sa nomenclature familiale (chap. I, p. [...]) est conçue et exposée suivant des procédés primaires. Rien n?assure qu?elle est ni complète ni exacte. Et après s?être donné tant de peine à propos des « deux classes » et des « surclasses » il ne se rend pas compte qu?il se trouve en présence d?une parenté par groupes ou classificatoire et d?un type parfaitement défini ethnographiquement, le type pour ainsi dire typiquement mélanésien où tout se compte à partir de l'individu, de l'ego, et de la date de sa naissance, plutôt qu?à partir des souches et des générations. Cette parenté se marque fort nettement par les interdits concernant les « sœurs aînées » de groupe contrastant avec une espèce de droit général sur les femmes cadettes (non sœurs de fait).

385III. – Mais M. W. oppose, apporte trois autres faits capitaux. D?abord une très bonne description de la société des hommes et même à un certain degré de la société des femmes, ou plutôt des classes (chap. I, p. [...]) d?âges de femme. Celles-ci jouent d?ailleurs un rôle considérable dans la société Marind-Anim [...] dans le rituel et surtout les drames rituels (chap. IV, p. [...]) une part inusitée à ce stade de civilisation. Le rapport entre ces divers grades, les diverses initiations, tatouages, fêtes, droits et surtout modes du port des cheveux sont marqués. Les chasses aux têtes et le mariage forment épisodes. Le fait le plus saillant de la vie du jeune homme dans la maison des hommes paraît être la pédérastie qu?exerce à son égard son parrain (rarement parent) appelé [...] (chap. 1, p. 42, 44). Le parrainage des filles ne semble pas avoir les mêmes effets (cf. 77). Et les Marind-Anim expliquent remarquablement que ces coutumes ont pour effet de diminuer les rapports prématrimoniaux de sexe à sexe. Plus tard les [relations] sexuelles, en particulier dans les fêtes et les rites spermatiques les soirs de noces, sont presque autant qu?en Australie un privilège des initiés des deux sexes.

386IV. – Les initiations successives des jeunes gens des deux sexes sont faites au cours de fêtes, plus ou moins grandes, données par l'oncle maternel (chap. I, p. 47 ; IV, p. [...]). Celui-ci n?est nullement le futur beau-père. Mais ces fêtes sont des potlatch réguliers avec leurs expositions de nourriture, l'obligation à les rendre, les séries d?engagement réciproques qu?elles constituent (chap. IV, p. [...]) les rivalités et les consommations exagérées, le rituel de l'attaque de la maison des hommes par les visiteurs, rituel régulier en Nouvelle-Guinée. M. W. [ne] les identifie pas comme tels (chap. 1, p. 124, 127, 128 ; p. 36, 30, 42, 63, 77, etc.). La fête du porc (chap. II ou IV, p. 3 [257]) [...] celui qui tue le cochon pour son fils est particulièrement typique. Et il ne nous en donne au fond que le [...]. C?est qu?il ne connaît pas cette institution dont l'étude n?est pas classique et dont l'extension en Mélanésie a été reconnue ici pour la première fois. Si son attention avait été mieux éveillée, il nous aurait peut-être apporté des documents capitaux. Car tel est l'intérêt qu?une saine théorie peut avoir pour l'observation.

387V. – La chasse aux têtes qui, chez les Marind-Amin, avait atteint le développement que l'on sait apparaît des observations de M. W. sous un jour nouveau. Elle n?est plus ici [...] de vendetta, mais une sorte d?initiation des jeunes hommes et guerriers, un culte d?une sorte de divinité (Sob Naz [...], etc.) et enfin est surtout une sorte de luxe du culte privé, non pas du culte public. Tout enfant [...] doit recevoir en plus de ses noms, prénoms (secret et totémique) et titres ([...] d?âge) un prénom [...] essentiel, le « nom de tête » qui est celui de la victime de la chasse que son père organise (chap. I, p. 36 ; cf. chap. III, p. 48). Il s?agit très nettement de la constitution d?une espèce de double en même temps que le crâne sert de gage [?] de vie. Le culte de ce crâne ne dure d?ailleurs qu?autant que l'intéressé. Nous ne voulons pas dire que cette interprétation Marind-Amin ait une valeur pour d?autres tribus, mais elle est fort [...] et rattache singulièrement ce culte à ceux des Nagas d?Assam, et généralement à ceux des scalps d?Amérique du Nord.

388[...]

389Sur d?autres points de droit les renseignements de M. W. sont peu circonstanciés. Le fonctionnement intérieur du clan et de la tribu semble se faire sans chef. – Il est également possible que la tribu [...] et qu?elle n?ait pas une autre hiérarchie que celle des classes d?âge. – Le droit criminel est aussi ou très décomposé ou très sommaire – ou insuffisamment observé par M. W., nous ne savons pas.

390La partie technologique du livre est excellente et il n?est publié même qu?un fragment de tout l'énorme matériel que l'auteur a collectionné, classé, analysé en professionnel de la musicographie. Les observations esthétiques sont éparses entre les diverses catégories. Celles qui concernent la musique et la danse sont remarquables, et celles qui concernent la décoration des objets et les représentations dramatiques, la décoration symbolique des acteurs religieux sont excellentes.

391D?excellentes pages sont vouées à l'étude statistique, morphologique, de la nation Marind-Amim, à la répartition géographique, aux extraordinaires effets du contact avec les Européens sur la substance vitale elle-même de cette nation qui décline rapidement, devant M. W. presque de trois cinquièmes en dix ans.

392Mais nous n?en finirons pas de citer toutes les parties intéressantes de ce livre. Ce serait un modèle si tout y était égal, surtout en précision philologique et juridique et si la documentation puissante qui l'appuie avait pu être plus complètement publiée.

393M. M.

Francis La Flesche . — « The osage tribe. Rite of the Chiefs. Sayings of the ancient men », Thirty-sixth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1914-1915, Washington Government Printing Office (1023), 1921, p. 37-602, index. Du même auteur : « The osage tribe. The rite of virgil », Thirty-nineth Annual Report of the Bureau, American Ethnology, 1917-1918, Washington Government Printing Office, 1925, p. 31-636, index [258].

394M. La Flesche dont l'œuvre, en particulier concernant les [Omaha], est bien connue des lec[t]eurs ; son autorité vient de son origine indienne et de sa compétence d?ethnographe professionnel [259]. Il est même étonnant que l'on se permette de tant discuter certaines de ses assertions. – Il s?est consacré depuis à une autre tribu Siou[x]*, les Osages – devenus l'un des peuples les plus riches de la terre, et qui ont conservé une étrange quantité de leurs coutumes, de leurs traditions, et une remarquable fraîcheur de souvenirs, de présence d?esprit. Les documents ici publiés sont incomparables ; Pris au dictaphone, transcrits, traduits d?abord littéralement, puis littérairement, notés musicalement par Miss Alice C. Fletcher quand il y a lieu, ils sont d?une supériorité absolue, supérieure – dirions-nous – à celle de documents enregistrés par des Osages seuls. Il faudra bien des volumes de ce genre avant [que le] simple tableau de la vie juridique, religieuse des Osages soit complet. Mais des faits enregistrés donnent une matière si riche à réflexion qu?ils font plus réfléchir que bien des théories. Ainsi cette difficulté à rendre en anglais le texte littéral, littéralement traduit, complet, cette difficulté d?expliquer à chaque instant, surtout dans les traductions elles-mêmes, les « technicités » d?expression. Par exemple les chants 1, 2, p. 485, traduction p. 509, éclairent et compliquent tout ce que nous savons de la notion de wakan.

395Nous ne rendrons pas compte du premier de ces volumes. Il est consacré aux rites tribaux. D?abord un rituel tribal qui forme l'un des degrés supérieurs de l'initation et du culte incarné dans la société des « Petits Vieux ». « Le Rituel des Chefs, dit M. L. F. expose et répète l'histoire » allégorique de l' « organisation de la tribu » : comment à un « contrôle militaire » succéda (le mythe est interprété [a interprété ?] sans doute l'histoire à l'envers) le pouvoir civil des chefs de clans qui firent régner la paix, formulèrent les rites que les esprits leur révélèrent et établirent les « deux divisions symboliques » de la tribu, eau et terre, et produisirent les talismans des divers clans des deux divisions. Il finit par un rituel d?actions de grâce [rendu] au pouvoir qui réside dans les quatre vents, et dans l'union du ciel et de la terre (phratries). – Un deuxième rituel (Audition des dires des Anciens Chefs [260]) est le rituel du septième degré, qui est encore tribal, mais administré par des clans chacun à son tour et pour soi (chap. XXXVI, p. 154 sq.), les clans de la guerre de chaque phratrie jouant le rôle des principaux officiants. Mais les « petits vieux » y apparaissent divisés seulement en phratries. – Il a pour objet « la vie dans l'abstrait » (la longue vie), les nourritures et la pipe, etc. Ces renseignements détaillés nous permettent de donner une idée de l'ensemble du rituel, et nous dispensent de répéter les principes à propos du deuxième ouvrage.

396Le second ouvrage (Thirty-ninch Annual Report of the Bureau of American Ethnology) est consacré à un autre de ces rites, celui de la « veille ». Il est compté comme quatrième ou comme deuxième degré d?initiation, suivant la tradition des divers clans. Il est à la fois un rituel de clan et un rituel tribal. Il est à la fois régulier et facul[ta]tif « pour le succès » dans « l'entreprise commune tribale ». Nous avons les traditions des divers clans participants, et celles des motifs des différents emplois. Même M. L. F. nous donne deux versions différentes du grand chant solennel, pièce centrale du ritu[el], tel qu?il est psalmodié par deux clans différents de chacune des phratries et divisions (p. 148 à 153, p. 164 à 172). C?est la première fois que nous avons un pareil éclaircissement sur un problème important : la façon dont deux rituels, en particulier oraux, appartenant à des clans opposés (cf. p. 177) se répètent presque trait pour trait, et sont cependant différents et complémentaires. Nous voyons aussi ailleurs comment des chants « p[ro]priété » d?un clan sont employés pour un culte public de tous les clans et pour transmettre telles ou telles qualités des totems aux initiés, assurer tels ou tels succès à la tribu (voir sur la nécessité de la présence des quatre divisions primitives, les commentaires p. 209 [261] [...] individus par exemple voir le vers 4 de la p. 2[3]8) (rituels pour la veuve qui remplace son mari dans la « Société des Petits Vieux »). Enfin, tous les commentaires des chants – ainsi que leur traduction littérale, souvent paraphrasée (et un peu trop souvent différents de la traduction libre) montrent l'importance, et même, on peut le dire, la profondeur, la complication et le nombre des valeurs symboliques, métaphysiques prê[t]ées au geste et au mot.

397Nous nous permettons de signaler un fait qui n?intéresse peut-être que nous parce que nous ne pourrons sans doute jamais revenir sur la question. À tout ce que Durkheim et moi avons extrait des auteurs concernant la classification chez les Sioux (L?Année sociologique, vol. VI, 1903 [262]), il faut ajouter les innombrables renseignements qu?ajoutent M. L. F. et ses informateurs Osages. Notre thèse est philologiquement démontrable.

398M. M.

D. ? Systèmes juridiques tribaux

Ludovic-Marie-Julien, dit Louis Tauxier . — Nouvelles notes sur le Mossi et le Gourounsi, Paris, Émile Larose, « Études soudanaises », 1924, 206 p., in-8o, bibliogr. Du même auteur, Nègres Gouro et Gagou (Centre de la Côte-d?Ivoire), Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, « Études soudanaises », VI, 1924, 369 p., in-8o[263].

399M. Tauxier est un des plus zélés, des plus féconds et des plus faciles ethnographes, parmi le corps distingué des administrateurs de la Côte-d?Ivoire et du Soudan. Ses livres Le Noir du Soudan, Le Noir du Yatanga, Le Noir du Bandouhou forment une sorte d?enquête ethnographique relativement complète d?une partie de ces régions [264]. Au premier de ces ouvrages, il ajoute ces Nouvelles notes sur le Mossi et le Gourounsi. Les Gouro et Gagou ont pour objet des tribus relativement peu connues jusqu?ici. Leur observation constitue une des parties les plus neuves de l'ensemble de l'œuvre de M. T.

400Les deux notes sur les « Origines Mossi et Gourounsi » (Nouv. Notes, p. 1-59) sont une espèce de discussion pied à pied du Survey, de l'espèce d?histoire – recensement que Maurice Delafosse avait tenté. Tous ces districts sont peuplés d?un bariolage de tribus, parlant une variété de dialectes. Toute leur histoire est tragique et mouvementée : celle des tribus les plus intactes, comme celle des tribus décimées. Ces dernières subsistent parmi quatre grosses confédérations régnantes comme « on trouve des prunes dans le pudding ». L?histoire de ces tribus peut être écrite. Delafosse et M. T. y versent des documents, des documents à notre avis insuffisants, et cette histoire est prématurée. La collection de renseignements est la chose urgente.

401Dans cet ouvrage, nous apprécions plus les notes sommaires sur la [...]. Celle-ci due en grande partie à la monographie que M. [Fernand Froger ] (1909) a laissée dans les archives du [cercle de Ouagadougou] [265]). Ces tribus sont peu connues. La dernière pose des problèmes ethnographiques importants que M. T. expose. En général, les renseignements sur le droit, surtout sur la famille, en particulier indivise, et sur le droit criminel des tribus, sont intéressants. Les incursions de M. T. sur le domaine linguistique ne se composent pas toutes de vocabulaires toujours utiles, sinon excellents ; quand elles vont jusqu?à la comparaison elles ne sont pas toujours heureuses.

402Les Gouros et Gagou p. [27] sont négrilles métissés (Nègres Gouro et Gagou, p. 48). M. T. a le mérite d?avoir établi sans conteste un fait connu (poids moyen des hommes, 42,625 kg). Leur langue ou du moins leur langage connu est de la famille Mondé. Ils sont assez nombreux (15 000, divisés en 5 tribus). L?assimilation doit être ancienne, et leur industrie et leur agriculture ne se distinguent de celles des grands Noirs que par certaines lacunes (p. 128-129). Ils vivent en assez gros villages, composés de cases de divers types dont une grosse hutte ronde qui leur est particulière. La famille est d?un type intermédiaire entre l'indivi[du] et la famille paternelle et un clan exogame totémique, local (p. 135) avec sacrifice de totems – institution assez rare. Seule, le nom totémique semble manquer. (Nous disons semble parce que le vocabulaire gagou de M. T. ne nous permet pas de vérifier (ex. [...], p. 70 buffle, [doué (en Gagou)], p. 336 antilope) [doué ou dué en Gagou (p. 336, n. 2)] est du type soudanais et nègre fruste [...] collection de cartes (livre IV, chap. II) Gagou. Le cycle de l'araignée et celui de la petite biche s?y retrouvent. Les autres fables sont plutôt plus savoureuses et plus variées que les équivalentes Gouro.

403M. T. n?a fait qu?un court séjour chez les Gagou. Il a séjourné beaucoup plus de temps en pays Gouro. Mais ceux-ci forment une grande confédération de près de 83.000 membres et M. T. les divise lui-même en quatre groupes dont les [Kanga-Bonou [266]] forment un État parmi les Baouli*.

404Qu?est-ce que M. T. appelle Tribu ? Son travail a donc été encore comme une sorte de revue assez rapide et les quatre monographies ne sont encore que des recueils d?indications. Que veut dire un Kossibisou, p. 130 [267] ? [Commentaire en marge.]

405Comme dans ses autres travaux, M. T. a mieux fait attention à l'organisation sociale et surtout domestique qu?à aucun autre fait même juridique. Car, par exemple, on voudrait savoir. [...]. De même, quoique la différence entre les Gouro et les autres « grands nègres » soit surtout [...] d?industrie, plus fruste là où elle est incomplète dans de nombreuses parties, il est impossible d?apercevoir si les Gouros sont peuple refoulé et dégénéré, ou un reste en Haute-Volta de nègres primitifs : par exemple quand, comme les Gagous ils mangent le gibier avec la peau, et ne savent pas préparer celle-ci. Quoique l'enquête sur la religion soit plus poussée, elle est également relativement sommaire. M. T. identifie (cf. 271) assez soigneusement le totémisme de clan et non de famille (p. 158 [268]) comme étant dit utérin, [...] [269]et individuel (p 192, etc.) avec des sacrifices à l'animal totem. Sur les sociétés secrètes et sur la notion d?âme (la belle âme vengeresse, p. 221, 223). [O]n trouvera des indications plutôt que des études sur la divination, les grands dieux. Ce ne sont qu?observations superficielles.

406Comme dans ses autres travaux, les Gouro ont nettement et le clan et la grande famille indivise [sic] ; la famille matrimoniale joue un rôle presque nul et le lien matrimonial reste faible. M. T. se sert à ce propos, toujours, de sa mauvaise nomenclature, famille totale, famille globale (p. 238-243). Les faits les plus nouveaux ne sont pas reconnus – mais il n?y a pas ici de faute de M. T. concernant le système des dons, presque de potlatch, à l'occasion du mariage (p. 162, 165 ; p. 240, 259). Les institutions Gouros coïncident étrangement avec celles des Bantous méridionaux. – L?organisation politique comporte les Chefs de terre et de guerre – p. 172, etc.).

407La meilleure partie de ce livre consiste dans un recueil de 75 fables Gouros, d?un type africain normal (cycle de l'araignée, du lièvre de Guinée [270], de l'homme [271]). Quelques notes les accompagnent, intéressantes, sur la fable chantée (p. 267), sur la corne d?abondance (p. 287), gâchée par un commentaire [sur] tous les « primitifs et semi-primitifs ». Les devinettes et proverbes sont par contre insuffisamment étudiés. L?une de ces dernières (p. 315 No 6) est défigurée par les fautes d?orthographe, le [« Le lingam et le Yoni [272] »]).

408Et cependant tout cela est utile, et mieux vaut une observation médiocre que l'ignorance absolue.

409M. M.

William Carlson Smith. — The Ao Naga Tribe of Assam. A Study in Ethnology and Sociology, Introduction John Henry Hutton , Publication du Gouvernement de l'Assam, Londres, Macmillan, 1925. XXVII-244 p. Index. Bibliogr. in-8o[273].

410L?un des plus grands inconvénients que présente l'interruption de L?Année sociologique de 1913 à 1923 est que nous sommes forcés de supposer comme connues de nos lecteurs des choses qui ne le sont pas. En particulier nous n?avons pu entretenir le public français des admirables monographies que, depuis celles dont nous rendîmes compte dans le tome XII, 1re série, le gouvernement de l'Assam a publiées, en particulier sur les tribus du groupe Kachin ou du groupe Naga. Ces ouvrages, dus à des sociologues ethnographes et fonctionnaires comme MM. Thomas Callan Hodson ou John Henry Hutton , ou James Philip Mills , ont posé tant de questions importantes pour la théorie et l'histoire de ces sociétés qu?ils méritent d?urgence une étude d?ensemble : celle-ci est d?ailleurs implicitement contenue dans les introductions et conclusions que M. Hutton a [annexées] à ses livres (Angami Nagas [274] ; S[e]ma Nagas [275]) et à celui de M. Mills (Lhota Nagas [276]). Pour une foule de questions ce sont des faits typiques qui ont été rassemblés ; structure du village, chasse aux têtes ; i[n]terdictions et expiations, totem, tabou, organisation domestique, tribale ; potlatch ; vie économique, prennent dans ces pays des formes solides, extrêmement caractéristiques, encore facilement observable[s] et de plus dans ces livres, bien observées. De telle sorte que c?est une foule de faits qu?il faudrait entrer dans le corps des doctrines, illuminées par des comparaisons, et dont l'entrée dans ce corps entraînerait, à notre avis, certaines modifications des doctrines courantes.

411Le dernier volume est consacré aux Ao Nagas. Quoique M. S[mith] soit un sociologue professionnel, maintenant, professeur à l'Université de Los Angeles – qu?il ait dirigé sur place l'École des missionnaires, chez les Naga, nous ne pouvons dire qu?il a produit le meilleur ouvrage de la collection. M. Mills et un autre auteur vont d?ailleurs publier des monographies de cette même tribu et nous attendrons cette [p]ublication pour mettre la question au point. – La description de la religion est sommaire (p. 74-[96]). – Des remarques générales sur la religiosité, un catalogue des dieux comprenant un dieu « humain », et un dieu de l'au-delà qui donne des fêtes au ciel, etc. – mais dont les mythes ne sont pas décrits – et les cultes ne le sont que fort superficiellement (sacrifices, p. 82-86 – dieux de la végétation), sur le culte des pierres, surtout levées, M. Smith est bien loin de ce que nous ont appris MM. Hutton et Mills. Le rituel funéraire et l'au-delà sont étudiés très fragmentairement – comme le système des interdictions (p. 109 sq.) et la magie (voir p. 98 les rites concernant le transfert d?objets mobiliers).

412La description juridique est également abrégée. Nous sommes loin des nomenclatures de parenté (voir p. 50 et les deux phratries), des analyses de fonctionnement du clan ; du village de M. M. Mills et Hutton . Pas plus qu?eux M. S. n?a reconnu le potlatch (voir p. 12, 44, 68, etc., des faits y ayant trait). Sur la chasse aux têtes, et comment elle augmente la substance spirituelle de l'individu et de la famille, on trouvera de bonnes remarques (p. 70 sq.) De temps en temps, l'éditeur, M. Hutton a ajouté ses remarques ou même ses contradictions.

413Mais cette partie descriptive n?est pas ce qui a le plus intéressé M. S. ; sociologue et ethnologue plus qu?ethnographe, son gros travail (chap. VI) est consacré à une œuvre ambitieuse : déterminer la « place des Nagas dans la famille humaine ». – Beau sujet qui mérite une discussion, et dont il faut ici, apprécier le traitement. Un peu partial comme point de vue. Comme on le verra à propos des travaux de M. Erland Nordenskiold concernant l'Amérique du Sud et un domaine plus précis, la technique en particulier. Nous n?aimons pas beaucoup ces façons de considérer des ensembles historiques d?une [...] et à partir d?une section très restreinte des faits à observer. L?étude d?une famille de peuples, [...] après tout géographiquement et non pas historiquement déterminée est préférable à l'étude de plusieurs familles de peuples à partir de l'un d?entre eux choisi en somme par hasard plutôt que par raison. Nous préférons donc, en bonne méthode, le travail de M. Hutton (Introduction à Mills Lhota Nagas, p. XV, XXIX) sur l'ensemble [...] [277]des traits spécifiques (chasse aux têtes, aversion du lait, bouclier quadrangulaire, etc.). M. S. en parle et il n?y ajoute pas grand-chose, par exemple, les considérations concernant la maison sur pilotis p. 129 sont bien légères. L?addition principale consiste à rapprocher superficiellement les Nagas (p. 155 sq.) des Dayaks de Bornéo, des [Bontoc Igorot] des Philippines (auxquels il manque quatre « traits »). – Tout cela (avec des développements anthropologiques élémentaires (p. 112 sq. [278]) pour arriver à conclure après tout le monde qu?au point de vue de la race et au point de vue du genre de civilisation technique et des institutions, les Nagas en général – et non pas les seul Ao Nagas – doivent être branchés sur la souche malayo-polynésienne. – Ce qui ne veut pas dire que ceci permette de trancher la question concernant leur histoire (p. 166-178). Ainsi il est trop aisé de négliger le caractère évidemment Tibéto-Birman des lang[a]ges, et nous ne saurions souscrire à l'affirmation tranchante de M. Hutton qu?en ces matières d?origines historiques, le lang[a]ge est un mauvais guide. Quant à nous, il est un des seuls sûrs. Même en admettant qu?il change, qu?on en change, qu?il soit métissé gravement [...] [279]de M. Hutton, « les traits » ethnographiques sont encore moins solides, et prouvent moins. Car si certaines institutions, comme certaines formes de clan, voyagent péniblement, d?autres comme la chasse aux têtes, [...] voyagent. Et les formes du bouclier, de la monnaie, de la maison encore mieux.

414Les chapitres les plus intéressants concernent : les changements résultant des contacts avec les peuples plus avancés (VII [280]) pleins d?observations personnelles importantes et sur la « désorganisation » et la « réorganisation » actuelles (cf. p. 215 sq.). Les conclusions générales (chap. VIII) sont moins précises. Toutes ces questions d? « intraculture » sont vraiment à l'ordre du jour.

415Les généralités ne sont d?ailleurs pas le fort de M. S. et ses comparaisons sociologiques sont souvent rapides et risquées (ainsi p. 52 des Nagas avec les Fuégiens).

416M. M.

Granville St John Orde Browne . — The Vanishing Tribes of Kenya. A Description of the Manners & Customs of the Primitive & Interesting Tribes Dwelling on the Vast Southern Slopes of Mount Kenya & their Fast Disappearing Native Methods of Life, Londres, Seely, Service & Co., 1925, 284 p., in-8o[281].

417Le major Browne a été pendant longtemps commissaire dans ces tribus Bantu peu connues du sud du Mont Kenya, voisines des Akamba de Gutmann et des Kikuyu de Routledge. Ces tribus sont en voie de s?[européaniser] rapidement et – pour cela – de s?assimiler plus ou moins avec les deux autres grands groupes. La description de ces processus sociaux (chap. I, préface, chap. XXIV) n?est pas une des moins intéressantes parties du livre. M. B. qui est le dernier Européen qui ait pu observer ces tribus : Chuko*, Embu, Mwimbe, etc., à l'état à peu près natif, n?a pas négligé le présent, qu?il faut noter pour les sociologues de l'avenir, sinon pour les « anthropologistes sociaux » du présent. Et l'autobiographie du chef (Petit Br[a]s, chap. XXI) est même, à notre gré, trop courte.

418Le reste du livre est un excellent tableau, où les tribus sont un peu mêlées, où les détails sont peu poussés, mais dont l'ensemble est sûrement juste. La religion n?est que fort sommairement décrite et mêlée à la magie comme elle l'est probablement en fait. Elle semble chez toutes ces tribus fort fruste, mais d?un type Bantou normal. Très souvent l'auteur revient sur la parenté des représentations religieuses, la faiblesse des croyances, l'incuriosité religieuse de ces tribus (par ex. p. 96, croyances concernant la mort).

419Le droit fait la même impression, si l'auteur est correct (chap. IV). Il va même jusqu?à décrire le droit criminel comme absent parce qu?il ne comprend pas que la compensation est un moment de ce droit. En tout cas, nous sommes en présence d?une organisation juridique et politique purement Bantou.

420Les chapitres de technologie et d?art sont écourtés.

421M. M.

E. ? Systèmes moraux et juridiques nationaux

Joseph Declareuil . — Rome et l'organisation du droit, Paris, Bibliothèque de synthèse historique, « L?évolution de l'humanité », no 19, La Renaissance du Livre, 1924, 452 p., index [282].

422L?ouvrage que M. Declareuil nous offre sous ce titre est un manuel du droit romain, clair, complet (autant qu?il faut l'être en 490 p.), informé ; écrit dans une langue alerte, encore que parfois un peu trop recherchée. La principale critique qu?on puisse lui adresser, c?est précisément d?être un manuel de droit romain, alors que le caractère de la collection [dont] il fait partie offrait à l'auteur – puisqu?elle s?adresse par définition à un public de non-juristes – l'occasion assez rare d?examiner le droit romain sous un angle un peu différent, de grouper, non pas toutes, mais les principales institutions romaines, tant publiques que privées, autour de quelques idées essentielles. La tentative n?était pas sans risque : de toute façon elle eût été intéressante.

423Si l'on prend l'ouvrage tel qu?il est, il se distingue de la plupart des autres manuels de droit par deux traits. Le premier concerne le plan. M. D. divise ses explications en deux parties historiques : le premier livre est consacré aux coutumes anciennes et à la formation du droit classique, le second au droit du Bas-Empire et aux réformes de Justinien. C?est là une formule originale. La plupart des auteurs adoptant soit un plan résolument dogmatique, soit un plan historique tripartite (ancien droit, droit classique, Bas-Empire). À dire vrai, cette nouvelle division bipartite ne me paraît pas des plus heureuses. Elle n?évite pas le risque qu?entraîne tout fractionnement par périodes, de couper le développement des institutions, et d?autre part, s?il est vrai que l'organisation de l'État se soit profondément modifiée à partir de Dioclétien, et que cette modification ait entraîné de grands changements en matière de procédure et par là sur le droit privé, il n?est pas moins certain que les influences helléniques s?étaient dès auparavant puissamment exercées, et que le VIIe siècle de la Ville constitue, pour l'ensemble des institutions, une période donc aussi décisive que le IIIe de l'ère chrétienne.

424Le second trait qui frappe dans cet ouvrage est le faible emploi qui y est fait du droit comparé. Il est très exceptionnel qu?un rapprochement soit suggéré entre les institutions romaines et celles des peuples parvenus à un degré analogue du développement. Nul n?est forcé d?être sociologue, et M. D. peut n?avoir pas les mêmes raisons théoriques que nous, ici, de prôner la méthode comparative. Il n?en est pas moins à peu près unanimement reconnu aujourd?hui que, à étudier les institutions d?un peuple isolément, on risque d?en fausser le caractère. En ce qui concerne particulièrement le droit romain ses traits distinctifs ne ressortent nettement que si on le confronte avec d?autres législations. Son prestige n?a pas à en souffrir, tout au contraire.

425H. L.-B.

M. J. Macauliffe. — Gaelic Law. The Berla Laws ; ou The Ancient Irish Common Law (Extrait du Book of Aicill), Dublin, Hodges, Figgis & Cie, 1924, 117 p. [283].

426Les Berla Laws gaéliques sont les lois écrites dans le dialecte poétique et archaïque dit Berla Feiné, dues à l'activité juridique des bretons ou juges, lesquels dans la classification sociale de l'Irlande appartenaient à l'ordre ou à la confrérie des filids, c?est-à-dire des poètes. Ces lois, écrites dans un dialecte abscons et généralement inintelligible, sont surchargées de commentaires qui ne réussissent pas à leur donner la limpidité qui leur manquait. M. Macauliffe s?est appliqué à débrouiller l'un des recueils de ces lois, le Livre d?Aicill ; il n?a pas prétendu en donner une traduction nouvelle et différente de celle qui figure au IIIe volume des Ancient Laws of Ireland [284], mais en présenter une paraphrase simplifiée et intelligible. Nous doutons que le public irlandais, en dehors des spécialistes, soit capable de comprendre ces articles de lois sans commentaires. Or, le commentaire de M. M. réduit à un très petit nombre de notes, expliquant pour la plupart les termes irlandais conservés dans le texte anglais, me paraît tout à fait insuffisant.

427Le livre d?Aicill se compose de deux parties, l'une, attribuée au roi Cormac mac A[i]rt et rédigé dans sa retraite d?Aicill près de Tara, à l'usage de son fils Cairpré, se compose de 14 articles discontinus, dont le dernier comprend une série de 44 exemptions au principe juridique de la compensation complète en cas de dommage non intentionnel. Cette partie daterait de la fin du IIIe siècle. La deuxième partie, attribuée à Cennfa[e]ladh, fils d?Aicill, se compose de 10 articles qui constituent des nouvelles à divers chapitres de la loi : constitutions, famille, dommages aux personnes, aux propriétés, loi maritime, procédure, etc. Elle daterait de la fin du VIIe siècle. Ce sont deux épisodes de la lutte entre les légistes, qui cherchent à garder le monopole de la jurisprudence et l'État, qui cherche à l'absorber et à en faire la loi, d?où est sortie la loi écrite irlandaise. La rédaction du Senchus Mor en fut un autre.

428Tandis que le Senchus Mor, dont nous avons parlé l'an dernier à propos du livre de M. Bryant [285], est plutôt un code de droit civil, le livre d?Aicill est un code de droit criminel. Mais il faut s?entendre, car il n?y est pas question de peines ; la vie de l'offenseur n?y court de risques que de la part de l'offensé, dont la société légitime la défense et excepte du talion les coups qu?il porte à qui l'attaque. On ne lit pas sans surprise que l'offenseur fait prisonnier ne peut être mis à mort que par la personne dont il est le prisonnier et que si celle-ci se fait aider indûment, l'aide est sujette à diverses sortes de sanctions. Les dommages aux biens et aux personnes, les accidents dommageables causés par des animaux domestiques, ou résultant de l'emploi d?outils, donnent lieu à des compensations, qui varient avec le dommage, avec la qualité de l'endommagé, avec la responsabilité du défendeur. La responsabilité n?est pas limitée à l'auteur du dommage ; elle s?étend par solidarité à sa famille, à son roi ; cette solidarité se limite de diverses manières, en particulier par le rachat. C?est le système de pénalité d?un droit tribal ou domestique, où les dommages se soldent par accords entre familles concurrentes. Il est mis en jeu par des actes individuels, pratiques, comme la prise de gages, ou mystiques, comme le jeûne. Une édition populaire d?un pareil code si obscure qu?elle soit est peut-être capable, comme l'espère l'auteur, d?en montrer l'intérêt.

429Ce droit fonctionne dans une société morcelée, où les individus deviennent des étrangers en passant du territoire de la tribu dans le territoire voisin, et ne recouvrent quelques droits que par des contrats particulières [sic] ; où le droit d?aubaine est appliqué dans toute sa rigueur et toute son étroitesse. Le livre d?Aicill contient un texte classique, qui n?est pas plus clair, sur la famille irlandaise, dont l'élément solide paraît être une parcelle foncière appartenant solidairement au groupe d?individus qui constitue une famille. À côté des familles libres il y a des désencadrés, sortis des familles ou qui n?y sont pas entrés. Ceux-ci sont des sortes de serfs, qui peuvent avoir des tenures avantageuses en troupeaux, qui peuvent tenter des hommes libres lesquels se disqualifient par la possession de ces tenures. Un des traits les plus remarquables de cette société est son caractère ploutocratique ; la richesse y qualifie ; la perte de richesse y disqualifie même des rois (11 . 2).

430H. H.

Edward Washburn Hopkins . — Ethics of India, New Haven, Yale University Press, 1924, XIV-265 p., petit in-8o, index [286].

431Un livre général sur le « Développement » de l'Éthique dans l'Inde est le bienvenu pour le profane, pour le sociologue et même pour l'indologiste. – M. Hopkins qui est un des vétérans des études sanscrites a écrit un livre clair sur ce sujet : les développements des formules éthiques de la littérature morale, et, au travers, des idées morales, sinon une analyse approfondie de la morale, de la moralité hindoue. Le livre tient moins. M. H. s?est borné à tout ce qui est exprimé littérairement, plus ou moins idéalement et théoriquement et ce n?est que par ce moyen qu?il essaya de voir quelle fut la tonalité morale des civilisations dans l'Inde, du caractère hindou ; à plus forte raison n?a-t-il pas essayé de voir quelle fut la réalité morale, ni s?il y a en eu une uniforme dans l'Inde. M. H. était parfaitement préparé à cette œuvre, car il est un spécialiste du sanscrit classique et surtout épique.

432Les chapitres sont divisés suivant les époques et les traditions littéraires, plutôt que suivant l'histoire des faits, l'Éthique du Veda, plus précisément des Rig Veda, où M. H. distingue heureusement les deux couches nécessaires. Par éthique ce sont les notions de péché et de loi que M. H. entend. Peut-être la mention des quelques rares rituels d?expiation de cet âge intermédiaire eût-elle donné une sensation plus précise ? Peut-être l'idée de rta, vérité, réalité, rite et droit et d?arrta, mensonge, non-être, impiété, injustice, eût-elle mérité davantage d?attention. Par Panthéisme archaïque, M. H. entend le temps où a été rédigé le reste du corpus védique. Nous ne savons s?il est tellement séparé de l'autre, et par exemple la doctrine de la vérité (p. 55-56) date évidemment des temps Indo-Iraniens, et même de plus tôt. Au contraire, certaines doctrines, celle des nourritures, des mangeurs et du manger (à laquelle il n?est fait qu?allusion p. 61) prépare bien d?autres choses, le Vishnouisme par exemple. Nous croyons, nous, que toutes ces périodes littéraires ne sont pas autant que le croit M. H. des périodes séparées par des temps, mais beaucoup plus séparées qu?on ne croit par les origines, les milieux où elles ont pris naissance, auxquels la littérature sanscrite, la tradition brahmanique, ce qui revient au même, les a empruntés (cf. p. 76). Ce ne sont pas là chicanes que nous objecterons à M. H. C?est un point de vue d?histoire sociale que l'histoire littéraire – la seule vraiment possible dans l'Inde ancienne – ne satisfait pas. Signalons d?ailleurs l'excellente page (p. 83) sur les deux attitudes – action, retrait – de la mentalité hindoue, et le chapitre sur l'éthique des livres de la Loi (V) [Ethics in the Legal Literature] en particulier celle de l'action et de la domination de soi (p. 132). Mais on ne saurait trop répéter qu?il y a dès lors, dans ces deux attitudes, deux morales normalement contradictoires parce qu?elles sont celles de groupes opposés : une morale des séculiers, nobles et brah[m]anes et hommes libres vivant dans le monde, et une morale des contemplatifs, des ascètes, et déjà des réguliers. Ici se place la seule grave lacune de ce petit ouvrage. L?importance du jaïnisme n?est pas suffisamment reconnue, la place qui lui est mesurée (p. 150-151) et passim) est insuffisante. Et M. H. passe au bouddhisme, dont il ne résume que la morale ancienne jusqu?au temps d?Açoka. Les développements ultérieurs du bouddhisme ne sont pas même mentionnés. Que le « Lotus de la Bonne Loi » après avoir rythmé la moralité d?une partie de l'Inde, rythme encore une partie de celle du monde oriental, agit même encore à distance sur la nôtre – on ne s?en douterait pas. Cette sublime littérature est pourtant contemporaine du développement brahmanique auquel M. H. consacre un de ses meilleurs chapitres (VII) : la formation de l'idée d?une pitié basée sur la morale, un autre chapitre ([VIII]) résume distinctement les « aberrations morales » [Ethical Aberrations], surtout celle du brahmanisme et de ses sectes. – Le livre se termine par une sorte de jugement éthique et historique à la fois (IX) intitulé Pro et Contra, qui répond aux questions du jour, et aussi aux opinions en effet injustes et en partie erronées de M. John Mackenzie (Hindu Ethics [287]). Celui-ci a en effet exagéré l'illogisme et a complètement méconnu la « spiritualité » hindoue. Mais cette conclusion un peu dialectique, à partir d?une morale occidentale ou plutôt américaine, n?est pas la meilleure venue.

433On peut se servir avec sécurité du livre. Il est exact dans ce qu?il dit. Un tout petit nombre de détails y pourrait être discuté. Mais c?est dans ce qu?il ne dit pas qu?il est fautif. Nos idées à nous, épousées par M. H. restreignent singulièrement la sphère de la morale. La « sagesse » de l'Inde a peut-être été la plus vaste et la mieux formulée de toutes et ce que M. H. appelle éthique n?en est qu?une partie, étroite et mal limitée. Il n?est pas sûr que la notion du bien et du mal dans la conduite soit exclusivement morale, stricto sensu, au sens en somme chrétien du mot. – Il n?est pas sûr non plus qu?il y ait une seule morale hindoue, sujette aux variations normales à des évolutions et des régressions. L?Inde est immense dans le temps et dans la masse, et cette masse est et a été depuis plus de trois mille ans infiniment bariolée. Là comme ailleurs, plus qu?ailleurs, il faut considérer les divers milieux et leurs divers contacts historiques si l'on veut bien décrire la vie complexe et riche d?une des plus fortes populations du monde. Cette étude des milieux changeants n?est pas impossible. Même dans l'épopée que M. H. connaît bien, on peut voir à côté de l'œuvre touffue des Machiavels antiques celle des plus magnifiques mystiques. La sensation du milieu moral, cause de la moralité, et de son expression littéraire, la morale fait défaut à ce livre.

434M. M.

Adolf. Dirr — « Aus dem Gewohnheitsrecht der kaukasischen Bergvölker », Zeitschrift für vergleichende Rechtswissenschaft. Einschliesslich der Ethnologischen Rechts- und der Gesellschaftsforschung. — 41er Bd. 1, 1925, p. 1-128 [288].

435Cette importante étude, basée principalement sur une documentation russe, contient des renseignements du plus vif intérêt sur diverses institutions chez les montagnards du Caucase. La multiplicité des coutumes locales est par elle-même instructive. L?auteur en entend la portée par des comparaisons frappantes avec le droit albanais et le droit arabe.

436Les principales institutions étudiées sont l'hospitalité et l'homicide.

437L?hospitalité présente au Caucase tous les traits d?une institution juridique. La transformation de l'étranger–ennemi en hôte–ami s?y opère par le moyen de cérémonies compliquées où la communion alimentaire (et sans doute autrefois la communion sexuelle) joue un rôle prépondérant. Une fois admis, l'hôte est fortement intégré dans le groupe et jouit d?une puissante protection. Si c?est un « quanly » [qanly] (homme recherché pour la vengeance du sang), non seulement il ne doit pas être livré, mais l'honneur exige que celui qui l'a reçu sous son toit épouse sa cause.

438Les informations nombreuses et précises données par M. Dirr sur l'homicide confirment la distinction fondamentale bien connue qui limite le caractère criminel de cet acte à l'homicide inter-tribal. Le meurtre commis au sein d?un groupe est une affaire intérieure dont le règlement n?intéresse pas les autres groupes. Il demeure même impuni dans le cas du meurtre d?un enfant par le père ou la mère. L?étude des conditions dans lesquelles l'homicide donne bien à vengeance du sang fait apparaître, comme l'avait déjà montré Maksim Maksimovitch Kovalewsky [289], une trace certaine de matriarcat (p. 69).

439Les règles concernant la vengeance du sang sont décrites avec précision. Elles sont dominées par la nécessité de trouver un « qanly », un débiteur du sang. Pour déterminer ce « qanly » le procédé le plus couramment employé est la conjuration. Le nombre des conjureurs est souvent fort élevé. Le montant du wergeld l'est généralement aussi et met en jeu par là même la responsabilité du groupe tout entier.

440L?étude contient donc d?intéressants éléments utilisables pour une théorie de la peine comme pour une théorie de l'hospitalité. Chemin faisant, bien d?autres points y sont traités, notamment la répression de l'adultère (p. 70-84).

441H. L.-B.

III. ? L?organisation domestique et matrimoniale par MM. M. Mauss, P. Fauconnet et E. Lévy / A. ? La famille

Ernest Jones . — « Mother – right and the sexual ignorance of savages », lu devant la British Psycho-Analytical Society le 19 novembre 1924, The International Journal of Psycho-analysis (dir. : Sigmund Freud , éd. : Ernest Jones). — Vol. VI, Part. 2, avril 1925, p. 109-130 [290].

442Cet article est assez bien informé de la position sociologique de la question du droit utérin (distribution de la ligne de descendance et des lignes d?héritage et d?autorité (p. 113) et de la descendance dite miraculeuse ; puis il tourne court : M. Jones rattache cette dernière au thème psycho-analytique de la jalousie du fils contre le père, du « désir comprimé » [repressed desire] du fils envers sa mère, bref au « complexe Œdipe ».

443Il revient à une vue plus saine quand il montre le progrès que marque la reconnaissance de la descendance et du droit paternels. – Mais nous ne pouvons appeler cela ni de la psychologie ni de la sociologie. C?est de la psychanalyse et nous sommes peut-être trop arriérés pour la comprendre.

444M. M.

Alfred Reginald Radcliffe-Brown. — « The mother?s brother in South Africa », lu devant la British Association for the Advancement of Science, South African Branch, le 9 juillet 1924, 1924, The South African Journal of Science. — Comprising the report of the South African Association for the Advancement of Science, vol. XXI, novembre 1924, p. 542-555 [291].

445Importante discussion sous un petit volume à propos de faits surtout sud-africains (quelques faits [H]ottentots des Tonga des Fiji) – (sociétés personnellement connues de lui.) M. Radcliffe-Brown (qui a pu vérifier sur place en particulier les hypothèses de M. Henri Alexandre Junod à propos des Ba Thongs* [292]) ne soulève rien moins qu?une question générale ; celle de la position spéciale qu?occupe, dans un nombre vraiment très grand de sociétés, l'oncle utérin. D?après lui, la relation singulière, des droits et d?abus plus ou moins réciproques, du frère de la mère avec son neveu chez les Bantu du Sud en particulier, ne dériveraient nullement du fait que les sociétés Bantu seraient passées par une phase de l'organisation en clans à descendance utérine, mais bien d?une autre cause, beaucoup plus générale et indépendante. Dans un certain nombre de nomenclatures classificatoires de parenté, le titre que porte l'oncle utérin se traduit par « mâle mère » [fa?e tangata : male mother] (plus exactement le mère – on dirait encore plus précisément, étant donnée l'impossibilité de transcrire par notre l'article l'article et le mot bantu, le maternel. La mère étant la maternelle.

446Les parentés classificatoires, observe justement M. B., distinguent fortement les sexes et le lignage. Le frère de mère serait essentiellement celui des membres de la même souche et de la même génération que la mère : sa position de mâle parmi les maternels (si on peut dire) serait la plus singulière. Il est la personne par laquelle le neveu utérin a accès aux ancêtres du côté de sa mère, qui leur sacrifie pour lui, etc. : il est aussi celui à qui le neveu peut prendre des biens, etc. Il est celui dont on attend de l'indulgence – une mère en un mot. Il est celui dont le neveu attend qu?il lui donne, pour acheter (terme impropre) une femme, le bétail qu?il reçut lui autrefois en échange de sa sœur, mère du jeune homme.

447Tout cela est e[x]act. Et à Tonga, à Fiji, comme chez les Bantu méridionaux, cela coïncide en effet avec une presque parfaite descendance masculine, et s?explique sans avoir besoin de recourir à une hypothèse de parenté utérine antérieure, simplement par l'opposition et la coexistence des sexes, des générations et des lignages. Nous nous accorderions presque complètement avec les thèses générales (p. 554) qui expliquent tout cela.

448Nous nous accorderons moins avec la partie négative : que l'oncle maternel n?est pas en principe, même dans les sociétés visées ici, un représentant d?un clan maternel. Ce dernier apparaît au contraire de façon très précise chez les Ba Thonga et les Ba[l]la. C?est lorsque le paiement dû à la famille de la femme n?est pas achevé. Alors les enfants du mariage appartiennent à la famille de la mère. – Donc, à notre avis, en Afrique N. et S. comme à Fiji et ailleurs, nous avons affaire à une double descendance, fonctionnant suivant les cas. Nous ne concéderons donc pas à M. B. que la position de l'oncle utérin est entièrement explicable sans descendance utérine, organisation segmentaire utérine. Mais il a raison de refuser de croire que les Bantu – en tant que tels, soient nécessairement passés par une phase où ils ne comptaient leur descendance qu?en ligne utérine.

449Au surplus cette question de l'antériorité logique et historique de cette descendance n?a nullement à nos yeux l'importance qu?on lui attribue très généralement quand on l'admet ou quand on la critique. – Nous reviendrons sur ce sujet à propos d?autres recherches dans le tome prochain de L?Année sociologique.

450M. M.

Les codes de la Russie soviétique. I. Code de la famille, traduit par Jean Patouillet  ; Code civil, traduit par J. Patouillet et Raoul Dufour , préface J. Patouillet, introduction Édouard Lambert (p. 1-45), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents », t. 9, 1925, XVI-260 p., in-8o[293].

451L?introduction par Édouard Lambert indique certaines caractéristiques de ces Codes.

  • 1 / Leurs défauts de forme.
  • 2 / La réaction contre les formules techniques.
  • 3 [294] / L?association des organes administratifs à la mise en œuvre du droit (par exemple la méthode simple, expéditive d?imposition de pensions alimentaires d?attente).
  • 4 / L?omission du principe de la liberté des conventions.
  • 5 / La limitation des droits par leur destination sociale.
  • 6 / La transformation du droit de la famille. Le mariage n?est plus une union des fortunes donc aucune théorie de régime matrimonial. Les époux sont égaux entre eux et pour l'éducation des enfants. Le mariage se conclut sans pièces justificatives, par simple déclaration signée par les parties « qu?elles contractent librement mariage et qu?il n?existe aucun des empêchements » légaux (parenté, bigamie). Le divorce se réalise par consentement mutuel devant le fonctionnaire d?état civil ou sur demande en justice et après appréciation. La filiation de fait est reconnue comme base de la famille. Il n?est fait aucune différence entre la parenté en mariage et la parenté hors-mariage. La famille comprend les parents en ligne directe, les frères et sœurs, le conjoint. Entre parents majeurs les liens sont très réduits : il n?y a pas d?héritiers réservataires, l'obligation alimentaire est limitée au minimum d?existence, c?est-à-dire aux salaires minima des contrats collectif régionaux.

452E. L.

B. ? Le mariage. La condition de la femme

Charles Appelton . — « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage. III. L?origine de l'exogamie », extrait de la Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger, T. XLVIII, numéro suivant octobre-novembre-décembre 1924, p. 241-254, Paris, de Boccard, 20 p., in-8o. Du même auteur, « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage. III. L?origine de l'exogamie (suite) », Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger, t. XLIX, janvier-février-mars, 1925, p. 1-17 [295].

453C?est une revue des théories, avec des conclusions personnelles. Faits, exposés des interprétations et critiques sont surtout empruntés à Sir James George Frazer . Contre John Ferguson MacLennan , l'objection décisive est que la pénurie de femmes expliquerait une exogamie de fait, mais non une prohibition d?endogamie. Durkheim induit en erreur par les premiers travaux de Frazer, se serait radicalement trompé et sur la nature du totémisme et sur celle des classes matrimoniales ; quant au tabou du sang menstruel, il explique bien les « vitances » [296], les interdits entre les sexes, mais pas l'exogamie, puisque toutes les femmes sont soumises à la menstruation. Lewis Henry Morgan et Sir James George Frazer dérivent justement tout le système de l'exogamie et des classes matrimoniales d?une aversion pour les unions entre frères et sœurs utérins, entre fils et mère ; Frazer a raison de ne pas vouloir expliquer cette aversion par un pressentiment des inconvénients qu?aurait, pour la race, l'accouplement habituel de très proches parents. Mais il pousse très loin le scepticisme en déclarant qu?elle reste inexpliquée et, peut-être définitivement inexplicable. – La théorie d?Edward Alexander Westermarck , convenablement modifiée et complétée, est une explication plausible et plus vraisemblable que les autres de l'origine mystérieuse de l'exogamie. Entre commensaux habituels, coéduqués, il n?y a plus d?attrait sexuel, parce que l'instinct sexuel est surexcité par l'inconnu. Faisant antithèse au désir très vivement ressenti pour les personnes étrangères ce manque d?attrait se confond avec une répulsion. Le primitif, ignorant la cause naturelle de cette répulsion, lui assigne des causes surnaturelles. D?autre part, pendant des millénaires, les commensaux ont été des proches parents, l'inappétence sexuelle étant ainsi normale entre parents, ceux qui ont ressenti une appétence anormale ont été châtiés comme criminels. Il est à remarquer qu?Appelton ne cite que la première édition de 1891 du livre de M. Westermarck [297].

454P. F.

C. ? La morale sexuelle

Edward George Paul Bousfield . — Sex and Civilization, Londres, Kegan Paul & Co., 1925, VIII-294 p. in-8o. Samuel Jessner , Körperliche und seelische Liebe, Gemeinverständliche wissenschaftliche Vorträge über das Geschlechtsleben. Leipzig, Curt Kabitzsch, 1924, 445 p. in-8o. Havelock Ellis , Moderne Gedanken über Liebe und Ehe, Leipzig, Curt Kabitzsch, 1923, 119 p., in-12o[298].

455Il semble bien que les publications sur les problèmes de la vie sexuelle soient plus abondantes en langues allemande et anglaise qu?en français. L?influence du Freudisme y est sans doute pour quelque chose : on paraît le vulgariser plus dans les pages germaniques ou anglo-saxones que chez nous. Mais, en outre, ces pays se préoccupent davantage de réformer la vie sexuelle et les rapports des sexes d?après des principes scientifiques. De trois auteurs, l'un, M. Jessner , est Dozent für Sexualllehre, à l'Université de Königsberg. Des universités américaines ont également des chaires pour l'enseignement de la théorie des sexes, de l'hygiène et de la morale sexuelles. Dans ces pages, l'éducation sexuelle est à la mode. Biologie, psychologie, psychoanalyse [sic] jouent d?ailleurs un rôle de premier plan : les faits sociaux sont étudiés moins en eux-mêmes que comme des conséquences fâcheuses d?idées énoncées sur la sexualité. Il y a un féminisme de médecins et de psychoanalystes qui apparaît comme une revanche rationnelle contre les erreurs séculaires dont la sexualité a été l'objet.

456Contrairement à nos habitudes, nous signalons cette traduction allemande de la brochure de Havelock Ellis , dont nous avons omis de mentionner l'original. Elle paraît à la librairie qui publie en allemand le grand ouvrage de M. E. dont M. Arnold Van Gennep est en train de nous donner une version française (Éditions du Mercure de France [299]). L?auteur apporte ici les conclusions pratiques de ses recherches. Il combat les fausses conceptions de la pureté, de la continence qui ont mis obstacle, surtout chez la femme, à l'épanouissement de la vie sexuelle. La femme a droit à l'amour. La procréation n?est que la fin animale du mariage ; elle doit être limitée et contrôlée. La libre et pleine satisfaction de l'instinct sexuel a d?autres fins, plus hautes, plus proprement humaines ; on doit en attendre un enrichissement spirituel, surtout pour la femme, la régression de la haine et le triomphe de la paix. Nous sommes obligés d?avouer que, si les tendances générales de l'auteur apparaissent clairement, si l'on voit bien quels préjugés et quelles habitudes il combat, il nous reste malaisé de comprendre comme il résout le problème essentiel : les rapports de l'amour, libéré des préjugés traditionnels, et du mariage. Ce plein épanouissement de la vie sexuelle, ce n?est pas, pour lui, l'amour libre, c?est le mariage réformé. Quelles devront être les conditions du mariage pour qu?il produise tous les effets spirituels qu?il en attend ? Je n?arrive pas à apercevoir clairement quel est, sur ce point, la pensée de l'auteur, sa pensée de derrière la tête.

457Le traité de M. Jessner est un bon livre de vulgarisation, dont la première moitié est biologique et médicale, la seconde morale. La doctrine morale est, en somme, conservatrice, sauf, bien entendu, en ce qui concerne le mystère dont la tradition voilait les questions sexuelles : tout livre de ce genre réclame l'enseignement de l'hygiène et de la morale sexuelle aux adolescents et aux femmes. Le titre du livre indique l'esprit de cette morale : idéaliser la vie sexuelle par l'union, sans l'amour, des éléments corporels et spirituels. Il serait sans intérêt de résumer ici ce qu?écrit notre auteur sur l'évolution de la pudeur ou du mariage. Une seule observation, qui n?est d?ailleurs plus une critique. Il y a une disparité – inévitable et non imputable à l'auteur – entre la première et la seconde partie de l'ouvrage. L?anatomie, la physiologie, l'étude des perversions sexuelles et des maladies vénériennes, l'endocrinologie et la psychoanalyse se raccordent bien aux conclusions sur l'hygiène et la diététique sexuelles ; et [des] chapitres homogènes permettent, au point de vue moral, des critiques fondées de préjugés, de traditions, d?habitudes. Mais la partie positive de la morale sexuelle tout ce qui concerne l'institution du mariage notamment, n?a, en somme, avec tout cela que des rapports assez lâches. Un pareil livre fournit un témoignage remarquable de l'originalité de faits sociaux, de l'insuffisance de la biologie et de la psychologie à les expliquer et aussi, malheureusement, de notre extrême ignorance à leur endroit.

458M. Bousfield développe brillamment l'idée que les infériorités de la femme, physiques et psychiques, sont acquises et non naturelles, sociales et non biologiques. Il y a eu des périodes historiques d?hégémonie féminine. Les revendications féministes actuelles ne vont pas au fond des choses. Accorder à la femme les droits civils et politiques ne la relève pas de la déchéance où la civilisation l'a plongée. Cette thèse curieusement renouvelée par le freudisme dont M. B. s?inspire en prétendant le dépasser (car il relève, dans les écrits de M. Freud , la persistance d?un préjugé inconscient sur la supériorité du mâle). C?est en lui interdisant la libre expansion de son énergie érotique que la civilisation a abaissé la femme. L?homme dépense une partie de la sienne, sous une forme concentrée, dans l'acte sexuel normal, sans gaspillage de temps ni de force ; ce qui lui permet de réserver pour d?autres emplois, pour les formes supérieures de l'activité spirituelle, une large part de cette énergie érotique. La femme, au contraire, sous la contrainte des coutumes qui la dénaturent dès la première enfance, est condamnée pour toute sa vie à une forme infantile de sexualité. Malgré les apparences, cette vie sexuelle, quoiqu?elle demeure marquée et précisément parce qu?elle est inhibée, absorbe la majeure partie de son temps et de son énergie totale. L?exagération des caractères qui la distinguent de l'homme et qui sont à tort considérés comme des caractères sexuels secondaires, par suite, une infériorité physique et psychique sont les conséquences de cette sexualité intense et refoulée. Ce qui fait l'intérêt du livre, c?est l'analyse subtile du machiavélisme inconscient avec lequel la civilisation, système d?artifices masculins, crée et entretient cette différenciation excessive et cette infériorité de la femme, et lui suggère le sentiment [que le] remède ne peut consister qu?en une réforme radicale des mœurs et de l'éducation. C?est dès la première enfance que la fille doit être libérée d?une civilisation qui lui interdit la vie sexuelle normale : de cette libération, l'épanouissement complet de ses facultés humaines, l'expansion de son activité spirituelle seraient les suites immédiates.

459P. F.

IV. ? Organisation des groupes secondaires (classes) / V. ? L?organisation politique / A. ? De l'État en général par M. J. Ray

Westel Woodbury Willoughby . — The Fundamental Concepts of Public Law, Tagore Law Lectures 1923, New York, Macmillan, 1924, XVII-499 p. [300].

460L?auteur distingue deux points de vue : celui du juriste, qui considère l'État comme l'instrument de la création et de l'application du droit ; celui du moraliste, qui cherche le fondement de la contrainte exercée sur les individus. L?étude des questions morales sera faite dans un autre ouvrage ; celui-ci ne s?occupe que des notions proprement juridiques. Il comprend deux parties : dans la première, l'auteur examine les concepts fondamentaux du droit public (les principaux sont les concepts d?État et de souveraineté) ; dans la seconde, il étudie leur application dans la jurisprudence américaine et anglaise.

461Ce plan appelle des réserves sur lesquelles il convient d?autant plus d?insister que M. Willoughby lui-même s?applique à accuser, comme un élément essentiel de sa méthode, la différence des points de vue et la pureté de l'analyse juridique abstraite sur laquelle il fait porter son principal effort (p. V, p. 10). Il est certes légitime de distinguer des attitudes, et même de les prendre successivement pour saisir les aspects divers des notions. Mais le danger est grand d?affirmer, au début d?une recherche comme celle-là, l'indépendance et la supériorité de l'analyse purement abstraite. Lorsqu?on suit le progrès de l'exposé, d?ailleurs très attachant, de M. W. on est amené à constater que, sur des points capitaux, l'analyse présentée comme purement abstraite, part en réalité des faits. Ainsi l'auteur oppose son attitude à celle de l'École historique, il ne nie pas que la loi puisse dériver des usages ; mais il insiste sur ce fait que « l'usage ne devient loi au sens strictement légal ou positif qu?à partir de l'instant où il est accepté par le pouvoir politique » (p. 136). L?auteur est amené par là à considérer comme critère de la loi (ou du droit, law) l'existence de la sanction ; celle-ci peut d?ailleurs n?être pas effective : il suffit que l'autorité se prétende « politiquement supérieure » aux personnes à qui elle commande (p. 148). On voit comment l'auteur, après avoir touché du doigt la solution – à la suite de John Austin , car c?est à travers une théorie qu?il atteint le fait – s?en écarte pour se réfugier dans une formule abstraite, où le mot « politiquement » réintroduit tout le mystère et toute la difficulté (voir aussi, p. 174, comment la distinction de l'État et du gouvernement est rattachée à « l'existence » permanente de l'État : on voit dans ce passage comment l'auteur, discutant une doctrine d?Albert Venn Dicey , ne peut plus s?en tenir, comme il paraît le désirer, à des « entités »).

462Le goût de M. W. pour la pure analyse abstraite donne au lecteur d?autant plus de regrets qu?il empêche peut-être l'auteur de tirer tout le parti possible de sa connaissance approfondie des jurisprudences américaine et anglaise. Les décisions de justice apparaissent dans son livre tardivement, comme des illustrations, tout au plus comme la confirmation des thèses précédemment exposées. De plus elles sont mises à peu près sur le même plan que des opinions d?auteur. Il faut reconnaître que le tour des décisions des jurisprudences anglo-saxonnes suggère parfois cette assimilation. Mais justement il nous semble que l'utilisation de cette mine si riche que constitue la jurisprudence, si riche et généralement négligée, demanderait une critique préalable : les décisions de justice contiennent des éléments forts différents ; elles appartiennent aussi à des groupes distinctifs ; et l'on est surpris par exemple de trouver juxtaposées sans observation dans le livre de M. W. les décisions américaines de la Cour suprême et les décisions anglaises du Banc du roi.

463Ces réserves faites, il faut reconnaître que le souci de précision et les pénétrantes facultés d?analyse de l'auteur l'ont conduit à des résultats déjà fort intéressants. Un grand nombre de développements – l'ouvrage est un cours professé à l'Université de Calcutta – sont consacrés à l'éclaircissement de notions et de termes ambigus. M. W. a soin de noter (p. 24) un fait capital : c?est que les mots dont on se sert pour désigner une doctrine ont une valeur qui ne dépend pas strictement de leur sens même, mais aussi des idées et des sentiments qu?ils évoquent indûment dans bien des cas : « Stephen A. Douglas obtient de puissants appuis pour sa doctrine concernant l'esclavage en lui donnant le titre séduisant de ?souveraineté populaire?. De même on peut être bien sûr que dans l'expression ?argent libre? [free silver] le mot ?libre? a eu une influence tout autre que celle que sa signification réelle dans la formule en question pouvait lui donner. »

464On trouve dans l'ouvrage de M. W. beaucoup de faits qui viennent à l'appui de cette idée. Il n?est pas douteux que dans la théorie de la personnalité juridique [Legal Personality], l'emploi du mot personne qui évoque l'idée de personne physique a joué un grand rôle et contribue à déformer la notion (p. 31 sq.). De même, M. W. a grandement raison de remarquer qu?il est fâcheux qu?on se serve du terme de souveraineté à la fois en droit interne et en droit international, pour désigner des choses fortes différentes ; il vaudrait certes beaucoup mieux employer en droit international le mot « indépendance » [Independency] (p. 283). Et la portée de cette remarque n?est pas purement académique : l'emploi du mot souveraineté implique, au moins en principe, une « omnicompétence » applicable en tous lieux et à toutes personnes (p. 400) ; et si, dans le monde civilisé cette prétention hardie n?est plus guère soutenue, encore est-il certain qu?elle exerce plus ou moins confusément sur beaucoup d?esprits sa périlleuse influence.

465Un bref compte rendu ne peut faire entièrement justice à l'auteur ; car, si le plan général du livre et l'intention persistante de réserver à l'analyse abstraite la primauté donnant lieu à de graves objections, il n?y en a pas moins dans l'ouvrage de M. W. un grand nombre d?indications précieuses sur les principaux problèmes du droit public. Nous signalerons en particulier l'analyse très poussée de la notion d?État fédéral (p. 183 sq.), l'étude de la distinction traditionnelle entre les gouvernements de facto et de jure (p. 370 sq.), la dénonciation de la confusion trop fréquente entre les idées d?exterritorialité et d?extraterritorialité [exterritoriality/extraterritoriality] (p. 394 sq.). Enfin, nous rappelons que, sur presque toutes les questions importantes du droit public, des décisions de la jurisprudence anglo-saxonne sont abondamment citées, ce qui ne manque pas de fournir une substantielle matière à la réflexion.

466J. R.

B. ? Types d?organisation politique / VI. ? Le droit de propriété. Le droit contractuel

Halfred C. Brown. — La lutte judiciaire du capital et du travail organisés aux États-Unis. Le boycottage, le picketing et la grève de sympathie en tant qu?instruments du contrat collectif de travail et de la boutique syndiquée. — Préface Édouard Lambert (p. I-XIII), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents », t. 6, 1924, XII-469 p., in-8o[301].

467La préface oppose à la construction logique, française, allemande, l'investigation économique du droit américain. La loi française du [2]5 ma[rs] 1919 a édifié une théorie de convention collective du travail avec jeu d?adhésions, retraits, actions individuelles, collectives. En droit anglo-saxon, ce prétendu contrat est un « agrément entre ?gentlemen? » mais qui ont « le couteau entre les lèvres ».

468Le patronat est armé par la jurisprudence américaine contre les mesures ouvrières jugées illégales par l'action en dommages-intérêts de common law, par des actions mi-réparatrices, mi-pénales empruntées à l'article 7 du [S]herman [Antitrust] Act [1890], par un moyen préventif, l'injonction, par laquelle la Cour interdit l'établissement de la continuation de telles mesures de grèves, sous menace non seulement d?astreintes, mais de sanctions plus énergiques, notamment la contrainte par corps. C?est le « gouvernement par injonction ».

469Les armes jurisprudentielles atteignent, en tout cas visent les auteurs matériels d?incidents de grève, les organisations, leurs adhérents qui n?ont pas démissionné après avoir eu ou dû avoir connaissance des faits incriminés.

470Un des instruments de réaction contre la contrainte syndicale a été fourni par l'analyse des éléments économiques dont se compose la valeur patrimoniale qu?est une industrie ou un commerce. L?intérêt au maintien ou au développement de relations contractuelles, de la clientèle d?ouvriers, fournisseurs, acheteurs est apparu comme une propriété protégée comme la propriété immobilière ou mobilière.

471Mais contre cette jurisprudence anti-ouvrière de 1921, il y a des résistances dès 1921 ; le juge Brandeis de la Cour suprême oppose la jurisprudence anglaise, les législations des Dominions australien et canadien ; le juge de district Amidon rappelle que le Clayton Act de 1914 s?inspire dans sa section 20 du Trade Disputes Act [1906] anglais, mais ajoute qu?il n?a pas été « obéi d?aussi bon cœur ». Il est frappant que des formules du Clayton Act ont été introduites dans l'article 427 du traité de Versailles sur la demande d?hommes tels que Samuel Gompers , l'une dans son texte original – le travail ne doit pas être considéré comme une marchandise ou un objet de commerce – l'autre dans une forme simplifiée et clarifiée : l'affirmation du droit du syndicat à l'existence et à la liberté de poursuivre ses buts économiques.

472E. L.

A. A. Al-Sanhoury. — Les restrictions contractuelles à la liberté individuelle de travail dans la jurisprudence anglaise. Contribution à l'étude comparative de la règle de droit et du standard juridique (t. 4 de la série des « Décisions régulatrices de la politique du travail et du commerce des juges anglais », avec une préface de Édouard Lambert ), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents, t. 10 », 1925, 361 p., in-8o[302].

473Le standard s?oppose au principe abstrait, il est une « grande ligne de conduite » (j?écrivais en 1899 : « Au lieu d?un prétendu principe scientifique une simple règle de conduite ») [303].

474Le standard essentiel est ici celui de rationalité, c?est-à-dire qu?il faut juger si telle cause de non-concurrence dans un contrat de travail ou dans un contrat de cession de fonds de commerce est raisonnable.

475Dans les pays anglo-saxons, par l'influence du cas, et la compénétration dans les jugements de l'économique et du juridique s?élabore une jurisprudence dite sociologique (école du doyen Roscoe Pound ), elle est une adaptation du cas, du précédent ; le cas est considéré comme pénétré de rationalité, d?opportunité. Sur les plateaux de la balance le juge pèse les situations. Par exemple, dans le louage de services le patron a une situation économique sociale très avantageuse vis-à-vis de l'employé. Au contraire, dans une cession de fonds de commerce l'acheteur et le vendeur sont à égalité : chacun s?efforcera d?obtenir les clauses les plus favorables, et il est bien que l'acquéreur se protège contre la concurrence du vendeur – d?où une plus grande liberté de contrat ici que là. Ces directives et d?autres sont appliquées à chaque cas. Puis : les considérants juridiques sont inséparables de considérants de fait. La relation est juridique si elle est juste. Le droit se fait par une série d?expériences contrôlées et, s?il y a lieu, corrigées par les tribunaux.

476Les solutions de ces tribunaux sur ces problèmes ne sont pas très dissemblables de celles des juges anglais. Ils valident les clauses de non-concurrence à portée limitée, annulent les interdictions absolues. Mais ce langage est plus formel, et il arrive qu?une clause est rangée dans une des catégories parce que le juge veut la valider ou l'annuler. Par la séparation du fait et du droit, par le jeu des notions abstraites, nombreux arrêts, surtout ceux de cassation, peuvent être lus sans qu?on connaisse l'importance des intérêts en conflit.

477Le livre de M. Sanhoury inspire à M. Maurice Hauriou des rapprochements avec nos jurisprudences sur l'abus du droit et sur l'excès et le détournement de pouvoir (« Police juridique et fonds du droit », Revue trimestrielle de droit civil, 1926, p. 265 [304]).

478Ce livre confirme le droit collectif, le contrat défini [comme] « les créances, les jugements de valeur qui s?élaborent autour de nos promesses et qui nous obligent », la liberté de contracter définie [comme] une liberté d?être juge et partie sous le contrôle du pouvoir ; il me faut conclure comme en 1899 « la société avec ses lois telles qu?elle se les représente fait le contrat ». Le standard est cette représentation, [...] créance, l'action, remplaçant la possession, nous vivons davantage dans le devenir. Je comprends d?ailleurs trop que ces réflexions sont aujourd?hui inutiles et que, si M. Édouard Lambert les rappelle dans sa préface, il est naturel que M. S. ne les connaisse pas.

479Le livre de M. S. invite à reprendre l'étude du contrat envisagé comme un jugement. Par exemple, les spéculations du commerce sont comme des paris sur les débouchés, de sorte que dire que le change international dépend des offres et demandes de marchandises et de capitaux équivaut à dire qu?il est la mesure commerciale d?un pays, qu?il est la résultante d?une série de jugements.

480E. L.

Max Judd Wassermann. — L?œuvre de la Federal Trade Commission. La dernière phase de la législation américaine contre les trusts, la spéculation illicite et les pratiques commerciales déloyales, Préface Édouard Lambert (p. XXIII-XLIII), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents », t. 13, 1925, XLIII-583 p. [305].

481Woodrow Wilson délivre en 1914 son message sur les trusts qui aboutit aux « trade commission » et « Clayton Act ».

482La Federal Trade Commission devait, sur les principes généraux du pouvoir législatif, et étant donné l'insuffisance de l'action judiciaire, faire quant aux trusts la part du technique, et du juridique, distinguant bons et mauvais trusts. Ses pouvoirs s?étendent aux sociétés commerciales, sauf les transports en commun et les banques soumis depuis 1887 et 1913 à des régimes spéciaux. Elle doit restaurer la concurrence. La section 5 du « Trade Commission Act » déclare illégales toutes méthodes déloyales de concurrence. La Commission est un organe dénonciatif avec pouvoir de police. Elle a aussi des pouvoirs de juridiction, elle est un premier degré de juridiction et en même temps un expert. Elle avertit les sociétés, puis, s?il le faut, rend un arrêt – sauf recours ; ces arrêts ne sont d?ailleurs exécutoires qu?après homologation [sic].

483Devant elle la question des monopoles a cédé la première place à celle des procédés de concurrence et des pratiques commerciales tendant à restreindre la liberté du commerce.

484On assiste là, selon les uns à une évolution vers la prédominance du pouvoir exécutif sur le « gouvernement des juges », selon d?autres à une concentration du pouvoir en face des trusts.

485Les actes de juridiction de la commission visent soit les pratiques déloyales, soit les atteintes à la concurrence. Elle connaît même des fraudes dont les cours ne connaissent pas l'existence, tel l'emploi de fausses étiquettes.

486Ses décisions relatives aux pratiques commerciales déloyales visent notament : la contrefaçon, la réclame mensongère, les tromperies sur le prix de vente, les rabais secrets, la corruption d?employés, l'espionnage commercial, etc. Son activité, de par les collaborations de juristes et d?économistes, a été heureuse.

487Ses décisions sur les atteintes à la concurrence visent notamment : le boycottage, les remises commerciales, les contracts for exclusive dealing, les coalitions...

488Son action a été souvent compromise par le Common Law mis en œuvre par les tribunaux.

489La Commission a assuré l'organisation économique de la guerre en procédant à des enquêtes pour la tarification des prix et en mettant en valeur des brevets et marques ennemis.

490Elle fait des rapports au Congrès pour recommander la législation à élaborer, sur la base notamment des rapports que les sociétés d?affaires ont à lui remettre annuellement. Elle a enquêté sur le commerce international, ce qui a abouti à la loi Webb du 10 avril 1918 favorable aux associations pour l'exportation.

491Sous son inspiration aussi ont été promulgués à l'égard du beef trust et des elevators, le Packers and Stockyards Act et le Grain Futures Act. Les spéculations des Packers ont compris l'élevage aux États-Unis. Le Packers... Act du 15 août 1921 donne ici pouvoir d?intervention au secrétaire de l'agriculture.

492Le Future[s] Trading Act du 24 août 1921 plaçait les bourses de commerce sous le contrôle fédéral et frappait certaines transactions de taxes prohibitives. Déclaré inconstitutionnel il fut remplacé par le Grain Futures Act du 21 septembre 1922 ; ici encore l'organisation de contrôle est dirigée par le secrétaire de l'agriculture.

493Depuis 1919, la Commission recourt aux Trade Practice Sumittals, invitation aux chefs d?une branche d?industrie de se réunir sous la présidence de la Commission pour discuter de certaines pratiques. C?est une procédure d?élévation morale des « businessmen ».

494Le livre se termine sur une crise de la Commission en 1925. Son personnel a été modifié, des commissaires ont été nommés, hostiles au contrôle, ses procédures de publicité sont réduites.

495Ce livre de droit administratif et commercial et d?hygiène sociale est aussi une histoire des mœurs.

496E. L.

VII. ? Le droit pénal par MM. H. Hubert et J. Plassard

Louis Gernet . — « Sur l'exécution capitale », Revue des Études grecques, T. XXXVII, no 169, janvier-mars, 1924, p. 261-293 [306].

497À propos d?un livre de M. Antonio Demetriou Kéramopoullos [307] dont le point de départ est la découverte d?une tombe du VIIe siècle en céramique, où se trouvent les squelettes de 17 condamnés ayant subi le supplice de l'αποτυμπανισμος. C?était une sorte d?exposition au pilori jusqu?à ce que mort s?en suive. M. Gernet établit que ce supplice était réservé aux voleurs et aux brigands pris sur le fait, que ce n?était pas une peine religieuse et qu?il participe de la justice populaire. Il fait un classement des peines, de leurs origines et de leurs applications.

498H. H.

Marcel Nast . — « Les lois sociales et la répression pénale », Revue internationale de droit pénal, vol. II, no 12, 1925, p. 113-123 [308].

499L?auteur prend l'expression « lois sociales » dans son sens le plus strict de lois « qui créent et imposent, soit aux pouvoirs publics soit aux individus, des devoirs particuliers, dits devoirs sociaux, en vue de remédier aux misères humaines » [et de les prévenir, ou] « de secourir les déshérités de la vie et tous ceux qui ont éprouvé un dommage anormal, ou encore d?éviter l'exploitation de ceux qui peinent et travaillent par ceux qui les emploient ». On peut faire rentrer dans cette définition toute la législation ouvrière, la législation protectrice des femmes et des enfants et celle concernant les victimes de la guerre. M. Nast étudie les rapports des lois sociales, ainsi comprises, et de la répression pénale.

500L?application de ces lois est, pour la collectivité de capitale importance : elles tendent à prévenir les troubles et les révoltes, en assurant aux faibles une protection ; elles contribuent à conserver le corps social, en diminuant la mortalité ; elles luttent contre le déclassement résultant de la déchéance physique et morale ; elles développent le sentiment de leurs devoirs sociaux chez les individus. Il importe non seulement que ces lois soient appliquées, mais encore qu?elles le soient sainement : les dépenses occasionnées par les institutions sociales sont très lourdes ; il ne faut pas qu?elles soient détournées de leur but en profitant à des paresseux, des exploiteurs ou des malins. Or, si le droit pénal est le droit sanctionneur le plus énergique de tous les autres droits, il est tout particulièrement le droit sanctionneur des lois sociales : l'expérience a montré que si les sanctions civiles suffisent normalement à assurer l'application des lois de droit privé, la répression peut seule garantir celle des lois sociales. M. N. distingue, dans les rapports des lois sociales et de la répression pénale, trois points de vue, qu?il développe successivement.

501En premier lieu, la répression intervient pour assurer directement l'application des lois sociales. Pour celles de ces lois dont l'application relève de l'autorité publique (lois de bienfaisance et d?assistance par exemple, les sanctions administratives et parlementaires sont habituellement efficaces. Mais, pour les lois dont l'application incombe aux particuliers, c?est-à-dire pour la plupart des lois dites « ouvrières », la répression pénale est une nécessité. Un trait particulier de cette dernière est de mettre en jeu une responsabilité pénale du fait d?autrui, l'employeur étant parfois condamné en raison de délits commis par ses préposés. Sans cette exception au principe de la person[n]alité des peines, la répression ne serait que trop souvent inefficace et illusoire (p. 118 et la bibliographie citée à la note 1).

502En second lieu, il a été malheureusement constaté à maintes reprises que la promulgation d?une loi sociale nouvelle a pour conséquence l'apparition de nouvelles formes de criminalité. Les avantages que la loi organise pour des malheureux ou des victimes risquant d?être exploités par de fausses victimes ou de faux malheureux (par ex. : simulations en matière d?accidents du travail et de maladies professionnelles, avec les complicités médicales qu?elles peuvent entraîner). Quelquefois le droit pénal commun donne les armes suffisantes pour lutter contre cette poussée de criminalité engendrée par un élan social généreux : ce sera le plus souvent dans les textes sur le faux, ou l'escroquerie qu?il les faudra chercher. Mais quelquefois la création d?incriminations nouvelles sera nécessaire ; c?est ce qui a été fait, par exemple, dans la loi française sur la répartition des dommages de guerre.

503Enfin, non seulement une loi sociale peut engendrer une criminalité nouvelle spécifiquement adaptée aux mesures qu?elle institue, mais encore elle peut provoquer une recrudescen[c]e de crimes ou délits ordinaires qui sont perpétrés en vue de tourner ses dispositions. Par exemple, les lois sur la protection des mineurs employés dans l'industrie peuvent entraîner des falsifications d?état civil ; celle qui oblige les employeurs à reprendre leurs ouvrières après leur couches peut avoir pour contre-coup d?activer la propagande anti-conceptionnelle. Il s?agit là d?infractions ordinaires, qui n?ont de particulier que leurs mobiles ; elles n?appellent donc point d?intervention spéciale du législateur, mais une vigilance accrue de la part de la magistrature répressive.

504J. P.

Pierfranco Bunocore . — « Les crimes de la foule dans le projet du nouveau Code pénal italien », Revue internationale de droit pénal, vol. II, no 14, 1925, p. 133-136 [309].

505La criminalité des foules a été depuis longtemps étudiée sous ses aspects psychologiques (voir la bibliographie citée par Georges Vidal et Joseph Magnol Cours de droit criminel et de science pénitentiaire, 7e éd., 1927, no 406, p. 524, n. 1 [310]). Elle présente en effet un caractère propre tenant à l'hétérogénéité de la foule ; ce caractère la différencie nettement des autres formes de criminalité collective et notamment de la criminalité de la secte ou de l'association de malfaiteurs, lesquelles impliquent un accord préalable et un but concerté en commun. Mais si l'étude psychologique des phénomènes de criminalité des foules a été poussée assez loin, par contre leur systémisation juridique est encore imprécise ou inexistante dans la législation, la doctrine et la jurisprudence des différents pays. (Sur les inconvénients de cette lacune, voir Vidal et Magnol, op. cit., no 406, p. 526, qui souhaitent une intervention du législateur français en la matière.) On est généralement d?accord pour admettre que les crimes des foules, étant commis sous des impulsions impérieuses et violentes, sont des crimes d?occasion, à propos desquels la responsabilité des individus doit être atténuée. (Sauf la distinction à faire entre les meneurs et les menés, les actifs et les passifs (voir Scipio Sighele , Folla delinquente a setta delinquente, Scuola positiva, 1897, p. 471-481 [311])). Cette notion de responsabilité atténué au cas de criminalité des foules remonte d?ailleurs à l'Ancien droit (Daniel Jousse , II, p. 625, part III, liv. II, tit. XXV, § 8, no 243 [312]). Elle s?est manifestée à plusieurs reprises à l'époque contemporaine, autant dans la sphère scientifique que sur le terrain pratique (Actes du congrès anthropologique de Bruxelles de 1892, rapport de M. Gabriel Tarde et discussion, p. 73 à 90, 374 à 384 [313] ; Enrico Ferri , Difese penali, Turin, Bocca, 1899, p. 221-247 [314] ; « Procès de Decazeville, assassinat de M. Watrin », Causes criminelles et mondaines, de 1886, p. 136 et s. [315] ; « La Bagarre d?Aigues-Mortes », Causes criminelles et mondaines, de 1893, p. 445 et s. [316]).

506La jurisprudence italienne faisait, pour les crimes de foule, bénéficier les inculpés du vice partiel d?intelligence prévu à l'article 47 du Code pénal. Dans le projet du nouveau code pénal, à l'article 22, parmi les circonstances qui indiquent « moins de disposition au crime de la part du criminel », figure le « fait d?avoir agi sous la suggestion d?une foule ameutée. » L?exposé des motifs marque nettement que ce texte est l'aboutissement logique de l'évolution, en la matière, de la jurisprudence italienne.

507J. P.

VIII. ? L?organisation judiciaire. La procédure / IX. ? Le droit international. La morale internationale par M. J. Ray

Sanford Darley Cole . — « Some notes on codification of international law », in Report of the Thirty-Third Conference, Riddarhuset et Riksdaghuset, Stockholm, 8-13 septembre 1924, The International Law Association, Londres, Sweet & Maxwell, 1925, p. 348-355 [317].

508Il est très notable que le mouvement de codification, après avoir gagné la plupart des États, s?étende aujourd?hui aux systèmes juridiques qui n?ont pas un caractère national. Il y a quelques années une codification du droit canonique voyait le jour. Et de plusieurs côtés on travaille actuellement à une codification du droit international. Une commission de la Société des Nations prépare cette œuvre. D?autre part, l'Association de droit international, depuis son congrès de 1921 tenu à La Haye, a mis la question à son ordre du jour et nommé une « Commission de codification ».

509M. Cole , secrétaire de cette commission a joint au rapport présenté au Congrès de Vienne, en 1924, quelques réflexions sur l'état de la question. L?une d?elles au moins est fort importante. Il est curieux que le travail de codification du droit international ait commencé par des efforts appliqués à des questions particulières (par exemple l'intéressant projet de Lord George Grenville Phillimore sur la souveraineté, projet annexé au rapport de la Commission [318]). M. C. indique avec raison qu?une des premières choses à faire serait d?étudier le plan général du code projeté, ses subdivisions et ses rubriques. Il rappelle, après [Sir Thomas Erskine ?] Holland , que pour les modernes un Code est plus qu?un « Digeste » [Digest] : c?est un ensemble systématique. Si donc, il est en quelque sorte fatal que la codification commence par ces parties du droit sur lesquelles l'accord est dès maintenant possible, du moins est-il utile qu?on prenne depuis le début une certaine idée de l'ensemble. Et nous ajouterons qu?il y a dans ce domaine un effort considérable à accomplir ; car ce n?est pas seulement le plan qui doit être médité, c?est toute la technique de rédaction qui doit être fixée, si l'on veut que les chapitres spéciaux qui s?élaboreront successivement puissent s?insérer, sans trop de retouches, dans l'ensemble.

510J. R.

Quatrième Section / Sociologie criminelle et statistique morale par MM. M. Mauss et P. Fauconnet / I. ? De la criminalité en général / II. ? La criminalité suivant les pays, les conditions économiques, les confessions religieuses, l'âge et le sexe

Stephen Meredyth L. Edwardes. — Crime in India. A Brief Review of the More Important Offences included in the Annual Criminal Returns with Chapters on Prostitution & Miscellaneous Matters, Londres/Milford, Oxford University Press, 1924, VIII-169 p., in-8o, index [319].

511Ce livre de vulgarisation plutôt que de science, et d?administration ou d?histoire anecdotique (Miscellanea, chap. V) plutôt que de théorie, n?en est pas moins fort utile, dû à un administrateur. Il présente sous forme fort claire la statistique morale et criminelle, vue surtout du côté criminel, de l'Inde, en particulier entre 1917 et 1921. La division principale en trois classes : offenses contre l'État, la personne et la propriété (chap. I, II, III), se ressent naturellement de l'origine et des buts de ce travail. Et sûrement il est grave d?additionner tout ce qui vient devant la police d?État, et les cours d?État (voir Criminel Tribes, p. 99 sq.), en ne tenant compte des tribus, des nations, des castes que par voie d?anecdotes. Mais enfin, c?est un commencement, et sain d?intention et d?information. Nous avons quelque chose d?un [aperçu] de la criminalité dans l'Inde. – L?histoire et la description de la prostitution dans l'Inde est un chapitre utile, et qui n?a été précédé que par un article de William Crooke (Encyclopaedia of Religion and Ethics [320]).

512M. M.

Lewis Edward Lawes . — Man ‘s Judgment of Death. An Analysis of the Operation and Effect of Capital Punishment Based on Facts, not on Sentiment. — Londres et New York, G. P. Putnam?s Sons, 1924, 146 p., in-8o, ill. [321].

513L?auteur a été vingt ans directeur de prisons et a assisté à plus de cent exécutions. D?abord partisan de la peine de mort, il a changé d?avis et donne ici ses raisons. On trouvera, aux pages 61 sq. un sommaire des conclusions auxquelles le conduit l'étude des statistiques de l'homicide aux États-Unis. Les tableaux sont donnés en appendice. Le taux de l'homicide est plus élevé et croît plus vite dans les États qui n?ont pas aboli la peine capitale.

514P. F.

III. ? Formes diverses de la criminalité et de l'immoralité / IV. ? Le système répressif / Cinquième section / Sociologie économique / I. ? Études générales. Méthode / A. ? Traités et manuels

Leonard Halford Dudley Buxton . — Primitive Labour, Londres, Methuen, 1924, VIII-272 p., petit in-8o, index [322].

515Ce livre est de vulgarisation et de généralisation et il est dû à un débutant, élève de M. Robert Ranulphus Marett et de M. Henry Balfour d?Oxford, et déjà lecteur en Anthropologie somatique à l'Université [d?Oxford]. Il n?y a donc pas lieu de lui demander plus qu?il ne prétend être : clair, simple, suffisamment instructif et composé de faits assez bien choisis, connus et exposés – bien que souvent connus et exposés d?une façon sommaire.

516Ce qui fait le plus défaut à ce livre c?est le plan. L?auteur y parle essentiellement des conditions géographiques du travail humain dans les sociétés dites primitives et préhistoriques. Il consacre à celles-ci toute la seconde partie de son travail (p. 73 sq.), et c?est par rapport à ces conditions qu?il classe les types de travail (Europe occidentale néolithique, toundra, forêt du nord, plaines et déserts, forêts tropicales, clairières) et cette étude est presque entièrement faite sur l'Asie que M. Buxton a visitée. Cela n?est pas sans intérêt. Loin de nous la pensée que le travail ne soit pas aussi l'adaptation d?une société au sol qui la fait vivre ; ou plutôt du sol à une société, et ne dépende pas intimement de celui-ci par conséquent.

517Mais cette étude des rapports et des conditions est hors de proportion avec une autre étude généralement nécessaire.

518Les chapitres sur la division du travail, sur la classification des types de travail et sur les plus anciens arts ne sont rien vis-à-vis d?une véritable technologie, dont M. B. n?a même pas le sens, bien qu?il n?eût eu pour nous satisfaire qu?à se servir du catalogue du Musée Pitt Rivers , et de l'enseignement qu?il a reçu de M. Balfour à Oxford. – C?est une histoire technique de l'homme qu?il nous faut.

519Les chapitres sur la division du travail, sur la structure physique de l'homme sont de simples aperçus de manuel.

520M. M.

Sixième section / Morphologie sociale par MM. M. Mauss, A. Demangeon et M. Halbwachs / I. ? Bases géographiques de la vie sociale

Sans titre.— [Analyse de Jean Brunhes , La géographie humaine, I, Les faits essentiels groupés et classés. Principes et exemples, 574 p., II. Monographies. Liaisons avec les disciplines voisines, index, p. 575-974 ; III, illustrations hors texte, p. 1-163, 3e éd., Alcan, 1925 [323]].

521(L?Année sociologique, vol. XII, 1913, p. 818 [324]).

522Durkheim a dit ce qu?il faut penser de la Géographie humaine de M. Brunhes à propos de la 2e édition de ce gros et populaire ouvrage. Nous ne le répéterons pas et n?avons rien à changer à ses observations. Mais M. B. dans cette 3e édition poursuit sa tâche et persévère dans ses erreurs. Notons d?abord simplement les additions.

523D?abord, tous les chapitres ou à peu près sont mis au courant – et des faits et des travaux ; autant qu?il est possible dans un manuel, il est tenu compte des choses et des idées les plus récentes, et les derniers chemins de fer, le traité de Versailles eux-mêmes sont l'objet de développements. L?effort bibliographique s?étend à toute la géographie économique, historique, et même physique, voire à la sociologie et à l'histoire, et il est considérable. On y trouvera de tout, depuis des extraits de journaux et des réimpressions de comptes rendus de géographes, jusqu?à des statistiques de commerces internationaux. Généralement cette bibliographie est critique, à ce t[i]tre elle sera utile, généralement elle est bienveillante et louangeuse, non sans excès. Mais elle n?est ni choisie ni exhaustive. Par exemple, le travail d?Otis T. Mason sur les méthodes primitives de transport ne figure pas (I, p. 170), ni ceux de Clark Wissler ne sont utilisés, pour ne mentionner que des ethnologues américains ayant traité précisément et largement les problèmes sur lesquels M. B. s?exerce à l'aventure (II, p. 758 sq.) Ainsi encore le mot d? « écologie » (p. [...] [325]) que les sociologues et géographes américains ont emprunté aux zoologues n?est même pas prononcé.

524De même le tableau des faits n?est que partiellement à jour et partiellement complet, même pour les questions où, comme en géographie, ce sont des chiffres [...] à se procurer et les derniers qui importent (ex. p. 566 une statistique arrêtée à 1909 [326]). Ces additions constantes qui malgré tout augmentent à la valeur de l'édition, s?ajoutent à celles de paragraphes et de chapitres entiers. Ainsi une géographie médicale (chap. XI) qui manque simplement de proportions et d?érudition ; ainsi encore une théorie en deux pages de la « signification constructive de l'économie destructive » (p. 520-522).

525Enfin, à tout ce premier volume, au fond peu changé, M. B. a ajouté un second volume de monographies, échantillons de la méthode appliquée à des problèmes précis et non plus au système général. La plupart ont paru ailleurs, y compris la plus probante, celle de M. Isaiah Bowman , sur ce que M. B. appelle fort poétiquement et drôlement « îles humaines » (oasis) (il emploie souvent ce mot) en haute Cordillère [327] ; ou celle de Val d?Anniviers dans les Alpes. Celles du sens d?une route en pays neuf (chap. IX) est un simple récit de voyage entre [Annam et Laos (de Vinh-Benthuy, Annam à Thakhek, Laos)] ; une anecdote personnelle. Une monographie très sommaire des oasis de Mzab* est inédite. Mais celle-là, particulièrement, prouve mal le cas. Car, les Berbères vivent pour des raisons exclusivement militaires au sommet de leur falaise, loin de l'eau, du bois et des champs irrigués, et leur structure mérite [le nom] que lui a bien donné Marcel Mercier  : La civilisation urbaine au Mzab, 1922 [328]. – Sont encore neufs deux chapitres X [et XI] de la théorie générale « Par delà les faits essentiels » et l' « Esprit géographique ». M. B. y étudie la place de la géographie humaine par rapport aux autres sciences géographiques et par rapport aux autres sciences humaines. C?est ici encore plus que dans le reste du livre, et cette fois encore plus que dans les éditions précédentes, que s?aggrave l'esprit du système.

526M. B. exagère en somme le malentendu fondamental. Il l'aggrave encore par rapport aux autres « géographes humains » de l'École française auxquels d?ailleurs il ne rend pas, même à Paul Vidal de La Blache , l'hommage qu?il leur doit même dans son plan de géographie [humaine].

527De ceux-ci, M. Albert Demangeon , M. Jules Sion , à plus forte raison, M. [...] ou M. Raoul Blanchard , nous nous sentons plus proches, parce qu?ils sont plus méthodiques, plus critiques, moins amoureux de généralités.

528Pour eux une société, un groupe historique, est comme pour nous quelque chose de [...]. Ils ont le sens du réel social. Ils ne l'évaporent pas en mots. Ils n?appellent pas « facteur psychologique » (p. 881 sq.) des facteurs comme le fait que des villages maritimes méditerranéens sont tous au fon[d], de petites villes militaires. Mais ces exagérations de M. B. nous permettent une fois de plus de préciser notre point de vue. Le seul point où nous divergeons c?est que, selon nous, ils exagèrent l'importance des conditions géographiques de la vie sociale ; ils s?attachent trop à notre avis à la considération de l'adaptation d?un milieu social donné à un milieu géographique donné sans un sens suffisant de la nature spécifique de ce milieu social. Nous ne voyons aucune différence entre leur travail et le nôtre sauf sur un point. Le sens des faits démographiques, technologiques et économiques, historiques et constitutionnels, qui constitue le sociologue complet est chez eux limité par leur abstraction du fait d?adaptation. C?est pourquoi nous préférons grouper tous ces faits avec ceux que l'emplacement [...] que Durkheim a constitué la discipline que nous proposons d?appeler « morphologie sociale ». Mais nous tenons moins au mot qu?à la qualité du travail. Nous ne verrons même pas d?inconvénient à ce que M. B. (Harry Elmer Barnes , History of the Social Sciences, p. [55-105 [329]]) veuille bien annexer à La géographie humaine notre travail sur les « Variations saisonnières des groupements d?Eskimos » [330]. Il est cela en effet, en partie, s?il est plus. Tout ce que nous demandons c?est qu?on reconnaisse la légitimité de ce plus, et qu?on veuille excepter de faciles déclamations contre les généralités des sociologues.

529Il nous serait trop facile de rendre la pareille, de protester contre les généralités de ce livre, de même contre un certain organisme. « Un nœud de circulation qui est un muscle à fibres serrées » – (III, fig. 257, [p. 135]) voilà les symboles d?une gare de triage. Nous pourrions aussi proposer de nombreuses [...] erreurs. Elles tachent encore cette édition d?une livre dont le succès prouve la nécessité. Quelques-unes relèvent de notre compétence. Ex. : p. 463, 863, les paragraphes sur l'anthropophagie où pas un mot n?est exact ; des lapsus « l'âge de bronze » « aux temps néolithiques [331] », p. 515 ; la mention du « cr[ân]e du dernier Maori » en Tasmanie (p. 46[4] [332] [...]). Gérardmer, Raon-l'Étape, Busang (p. 212 [333]), marchés en plaine – les tribus de porteurs au Congo (p. 904).

530C?est un vœu sincère. Car les discussions courtoises d?une société savante sont souvent inutiles. Ainsi M. B. n?a tenu compte, ni ici ni ailleurs, des observations qui lui furent présentées à propos des « toits de France », et surtout pas de la remarquable communication que fit en réponse M. Hubert , sur les « aspects » d?un paysage d?une nation comme la France.

531Il vaut mieux finir en disant quel énorme travail il y a derrière ce manuel. M. B. a voué sa vie aux « Archives de la planète » où il dispose de puissants moyens. Il a rassemblé sur la géographie humaine, et le[s] techniques d?adaptation au sol, en particulier rurales et traditionnelles, des dizaines de milliers de clichés dont certains sont de vrais chefs-d?œuvre de choix et de rendu. Des documents précieux sont là, pour toujours sauvés. Un choix de ces figures, et surtout photographies forme le IIIe volume. Les cartes et les cartons nombreux (des 2 premiers et du 3e volume). Ils sont généralement également utiles, mais nécessitent une critique soutenue et des échantillons de ce labeur, la carte souvent matérialise simplement l'hypothèse.

532M. M.

Sans titre. — [Analyse de Jean Brunhes , La géographie humaine, 3e éd., 3 vol., Alcan, 1925 [334].]

533M. B[runhes] s?est donné le rôle d?une sorte de prophète, et dans son enthousiasme accole de plus en plus à tout le titre de géographique : les métaux rares et précieux le sont géographiquement (1, p. 501), tout devient géographique, même un trust – instable – dû à un séquestre du traité de Versailles (p. 512). La géographie historique et l'économique, la géochimie et l'ethnographie, et la préhistoire et l'histoire des Religions, et l'[épidémi]ologie (répartition des maladies [335]), ce qui n?est pas géographique le devient. Ainsi M. B. marque comme un succès pour la « Géographie humaine » (chap. XI.) Or, il ne s?agit que de l'esprit de précision. L?erreur fondamentale est donc aggravée. Et nous ne cesserons pas de protester. Il faut souligner cette faute logique fondamentale et situer exactement ces doctrines mal faites. M. B. confond décidément une méthode d?étude et de description avec une science.

534Quand on considère théoriquement un fait social, on doit en effet, comme il est vrai et naturel, le localiser. On doit le situer dans l'espace de même que dans le temps (cette addition montre déjà qu?il s?agit purement de méthode).

535Si l'on veut donc, tout fait social est un fait géographique comme il est un fait historique ou statistique. Mais c?est tout. La méthode géographique ou plus exactement cartographique en linguistique, en folklore, en ethnologie ont fait leurs preuves, comme celle de l'histoire comparée, parce qu?elles correspondent à la nature des faits. Elle est un procédé sûr de comparaison, car elle oblige à être complet et nuancé, à rechercher les foyers et les aires de « diffusion ». Mais elle ne [...] en presque rien [...] et les nœuds de cette ondulation qu?est une institution, par exemple, un couteau, une fête, un costume ou un instrument [...] phénomène qu?elle permet de décrire à la terre, aux conditions géographiques proprement dites. Elle les rattache à un milieu social donné qui est bien étendu en effet à un point de sol et par rapport à ce point du sol, son climat, ses matériaux, ses moyens d?existence auxquels elle s?adapte. Mais elle ne donne que l'une des précisions, et si l'on veut, l'un des moments de la série. La série elle-même, c?est tous les facteurs dont l'institution est faite, plus une dont elle est fonction. Le lieu n?est que l'un des éléments qui la font varier et les variations locales de l'institution ne prouvent qu?une chose, que les milieux sociau[x] dont nous composons ne sont pas homogènes – intrinsèquement, et que les sociétés voisines ne sont pas homogènes par rapport aux autres. L?étude des variations suivant le lieu, consiste simplement à appliquer la méthode des variations concomitantes en sociologie. Elle est excellente. Il faut donc l'employer. Mais on ne réduit pas plus ainsi la sociologie à la géographie que l'emploi de la méthode quantitative ne réduit la sociologie à la mathématique.

536[M. M.]

Camille Vallaux . — Les sciences géographiques, Paris, Alcan, 1925, VIII- 413 p., in-8o[336].

537On aurait tort si l'on entreprend la lecture du livre de M. Vallaux sur les sciences géographiques, de se laisser arrêter par la longueur des développements abstraits, par l'abus des spéculations transcendantales, par les tendances parfois paradoxales et casuistiques du raisonnement. Sous ces apparences spéculatives et un peu aériennes, il y a du fort bon grain, comme dans toute œuvre de méditation sincère.

538Il s?agit de définir la géographie, ce qui n?est point facile, semble-t-il. Elle emprunte tant d?éléments à d?autres sciences que certains n?hésitent pas à la traiter de parasite. Mais quelle est la science qui n?a pas besoin des autres ? Et que d?emprunts mutuels ne se font-elles pas les unes aux autres, de plus en plus nombreux à mesure que leur domaine s?étend et se creuse ? En réalité, la géographie n?en possède pas moins son domaine propre, bien à elle, ses propres procédés, son propre esprit. « Son objet essentiel consiste dans les connexions superficielles des trois états de la matière, et dans les actions et réactions réciproques du milieu terrestre et du monde vivant ». Les hommes ne lui appartiennent pas individuellement, mais groupés et par masses, en tant que les sociétés humaines subissent le déterminisme des faits physiques et que d?autre part elles opèrent sur la surface de la terre des transformations matérielles. Rien n?est plus contraire à l'esprit qui doit la vérifier que d?en faire une sorte d?épopée de l'action humaine à la surface de la terre et de faire de l'espèce humaine une fin en soi. Il faut l'affranchir de ces tendances finalistes et la considérer comme une science explicative des faits de surface. Cette explication n?a de valeur géographique que si elle considère le lieu de la surface terrestre où se trouvent les phénomènes et où se passent les événements étudiés ; de là, le caractère de localisation de toutes les explications géographiques et le rôle important que jouent les cartes pour exprimer ces localisations.

539Ces objets et ces procédés de recherche imposent à la géographie, comme un devoir primordial, l'établissement de la définition des régions qui doivent servir de cadres à l'explication des choses et aux synthèses descriptives. Nous pensons, plus fermement encore que M. V., que cette œuvre nécessaire, la plus originale peut-être de la géographie, est l'une des plus difficiles de sa mission. Il existe évidemment certaines grandes régions naturelles qui sont aussi de grandes régions humaines, parce que leurs conditions physiques s?imposent énergiquement nécessairement à la vie humaine ; ce sont les zones terrestres, équatoriale, tropicale humide, désertique, méditerranéenne, tempérée, polaire ; ce sont aussi les massifs montagneux où l'altitude dicte ses lois à la vie. Mais à l'intérieur de ces grandes zones, comment déterminer les régions géographiques ? Et, si on les a déterminées, peut-on espérer voir tous les faits géographiques venir s?y grouper en concordance ? Il faut une extrême prudence pour diviser la surface terrestre en unités géographiques élémentaires. Il est vain de vouloir tracer sur la surface un réseau de compartiments où tout territoire trouverait une place ; certains territoires échappent à toute classification ; certaines marquetteries régionales, construites par des géologues, sont plutôt des œuvres d?imagination que des représentations de la réalité géographique. Au reste, il faut prendre garde que les véritables régions géographiques n?ont pas de limites fixes ; leurs limites se déplacent d?autant plus facilement que le développement de la civilisation rend l'homme plus mobile. Le travail du géographe consiste par l'analyse des faits de surface, à définir les régions, c?est-à-dire chacun des morceaux de la surface où la synthèse des éléments de la description aboutit à une explication.

540Parmi les sciences voisines de la géographie, il en est une, la sociologie, avec laquelle il semble qu?il y ait des contestés de frontières. Son nom même est assez vague pour expliquer l'extension indéfinie de son domaine. Si elle prétend absorber toutes les sciences sociales, c?est à la fois l'ethnographie, l'économie politique, la science du droit, la science des religions, et bien d?autres encore, qui doivent s?y fondre. Mais déjà bien des sociologues ont demandé de pareilles ambitions. En tout cas, il existe une partie de la sociologie dénommée par Durckheim [sic] morphologie sociale, à laquelle son parrain donne pour tâche de constituer et de classer les types sociaux, en se basant sur le milieu physique ; elle doit, selon lui, décrire les genres de vie, les modes d?habitat, les densités de population, les formes politiques, les formes de pensée et de croyance. Il n?est pas douteux que ce domaine est celui-là même que revendique, au moins en partie, la géographie humaine. Dès lors, comment distinguer et départager les deux sciences ?

541Nous pensons comme M. V. qu?il ne faut pas, sur le même terrain en friche où travaillent les deux sciences, vouloir tracer des démarcations impératives. « Des recherches sur le même terrain, faites selon des méthodes différentes ne font pas double emploi ; elles peuvent au contraire, recevoir de la diversité des méthodes un stimulant nouveau. » Cela dit pour calmer les esprits incandescents de chaque parti, il paraît sage de considérer qu?en réalité le cœur même du domaine sociologique est fort écarté du cœur du domaine géographique. Car, tandis que « les impulsions spirituelles collectives », les mentalités sociales sont essentiellement l'objet des recherches de la sociologie, la géographie humaine s?attache avant tout à l'étude des états matériels collectifs de l'humanité, genres de vie et établissements humains, toutes choses concrètes et visibles à la surface de la terre.

542Le livre de M. V. contribue à préciser ces définitions et ces méthodes de recherche dont tous les géographes font l'objet de leurs méditations. On le lira avec curiosité dès qu?on aura brisé son enveloppe quelque peu métaphysique. À cette curiosité, il se prêtera, chemin faisant, à des étonnements devant certaines témérités paradoxales. Est-il vrai que la géographie présente un « renversement des procédés logiques d?ordinaire suivis par les sciences d?observation » et qu?elle commence ses investigations non pas par l'analyse, mais par le groupement, par la synthèse ? Si les géographes procédaient ainsi, ils agiraient contrairement à tout esprit d?observation scientifique. Il ne nous paraît pas exact de dire que « l'observation instantané[e] d?un groupement humain à un seul moment de la durée ne peut avoir aucun sens ». Toute observation de détail bien faite possède, au contraire, sa valeur propre. Dans la géographie, comme dans les autres sciences, il importe, pour commencer, de diviser les difficultés en autant de parties qu?il est requis afin d?isoler les faits élémentaires. C?est seulement quand on aura observé un à un beaucoup de cirques, de méandres et de dunes qu?on pourra préciser les lois de l'érosion glaciaire, fluviale ou éolienne. De même, on devra observer un à un beaucoup de villages, beaucoup de maisons, beaucoup de champs, beaucoup d?ateliers afin d?avoir une notion générale des modes d?habitat et des types de travail.

543Pourquoi aussi faire tant de grief à la géographie d?avoir été et d?être encore une discipline pratique, visant à des connaissances utilitaires ? Il n?y a pas le moins du monde de contradiction entre le caractère utilitaire d?une discipline et le caractère explicatif qui est le signe distinctif d?une science. Il faut souhaiter que les deux tendances se pénètrent l'une l'autre parce que plus une connaissance est pratique, plus elle sollicite l'esprit à l'explication et parce que plus elle est explicative, plus son rôle pratique se trouve rehaussé.

544M. V. aime le paradoxe jusqu?à se contredire lui-même. Tout le monde pense que la carte joue un rôle capital en géographie, soit comme moyen de représentation généralisée, soit comme moyen de découverte explicative. Or, pour M. V., la carte impitoyable, surtout la carte bien faite, retarde l'explication scientifique ; pour lui, le développement de la géographie explicative aurait été enrayé par la représentation cartographique ; la carte nous aurait valu une marée montante du particulier qui aurait empêché la géographie de percevoir directement son objet : entrave néfaste dont il faut s?affranchir. Pareille condamnation serait méritée si jamais quelque géographe de bon sens tenait la carte comme l'égale de l'étude directe de la nature, ce qui n?est pas le cas. Et M. V. le sait bien, car après avoir bien châtié la carte ; il montre combien il l'aime, « représentations systématisées, dit-il à propos de certaines cartes, qui font entrevoir des faits de détail ». Et quand il songe au perfectionnement de sciences comme la géologie, la météorologie, l'hydrographie et la biogéographie, il leur conseille d?adorer ce qu?il a voulu brûler ; il leur conseille de faire des cartes tout comme fait la géographie.

545M. V. en veut beaucoup à la notion d?économie destructive. Cette notion est, selon lui, une invention des économistes, les pelés, les galeux, d?où vient tout le mal ; c?est leur cerveau qui a élaboré le concept abstrait, né hors des choses. Il n?a pas de peine à montrer qu?on a exagéré l'importance du déboisement, surtout dans les pays qui, par leurs conditions naturelles, n?ont jamais été favorables au développement des forêts, tels les rivages de la Méditerranée et les côtes atlantiques de l'Europe. Cependant on ne peut nier le gaspillage de forêts dont les États-Unis ont donné le spectacle durant un siècle, ni les vastes défrichements de forêts dont l'Europe occidentale et centrale fut le théâtre durant les colonisations agricoles du Moyen Âge. Et de même, comment ne pas être frappé de ce que les recherches de M. Henry Perrier de La Bâthie sur la végétation de Madagascar nous ont appris sur les dévastations de la flore et de la faune de l'île depuis l'époque lointaine où l'homme est venu la peupler ? Nous voyons par lui comment les feux de brousse ont détruit ou appauvri la végétation spontanée et nous comprenons pourquoi « la flore des pays déboisés par le feu c?est-à-dire des sept huitièmes de l'île, est d?une pauvreté désolante ». On peut ne pas aimer l'expression d?économie destructive [337]. Mais, pour le fait lui-même, seules des études régionales, faites sur place par des hommes compétents, permettent d?affirmer ou de nier son existence.

546A. D.

II. ? De la population en général par M. M. Halbwachs

George Udny Yule . — « The growth of population and the factors which control it, The presidential address of Mr. G. Udny Yule, for the session 1924-1925, delivered to the Royal Statistical Society, November 18th, 1924 (with Proceedings) », Journal of the Royal Statistical Society, January 1925, vol. LXXXVIII, new series, Part I, p. 1-58, bibliogr. [338].

tableau im3
Source : Ms 96 [1], Bibliothèque du Musée de l'Homme, Paris.

547Les statisticiens d?Angleterre et d?Amérique attachent, on le sait, une très grande importance à la recherche de courbes théoriques destinées à représenter des séries de données empiriques. L?étude très remarquable présentée par M. Udny Yule à la Société de statistique de Londres, remarquable aussi bien au point de vue de l'élaboration mathématique que de la documentation positive, nous donne l'occasion d?examiner d?un peu près une application de cette méthode.

548Critiquant la loi connue de Thomas Robert Malthus , M. Y. dit que, des faits actuellement connus on peut conclure, au contraire qu?une population renfermée dans une aire déterminée ne s?accroît pas en progression géométrique. Mais quelle est la forme véritable de la loi de population ? Partons de l'idée que le taux d?accroissement ne peut pas être constant, et qu?il doit être une fonction quelconque de la population qui existe à un moment donné. Pierre-François Verhulst [339], qui publia trois mémoires sur ce sujet en 1838, 1845 et 1847, proposait, pour exprimer que le taux diminue quand la population s?accroît, la formule très simple : m –  kp où p est la population, m et k des constantes. Tout récemment Raymond Pearl et Lowell J. Reed [340], étudiant le mouvement de la population aux États-Unis, arrivent au même résultat. M. Y. écrit ainsi la formule de Verhulst  :

tableau im4

549Expliquons cette formule, dont toutes les lettres représentent des notions importantes qui interviendront dans la suite de l'étude. y est la population ; t est le temps compté à partir d?une origine qui est le temps = 0. L est une constante ; c?est la valeur limite de la population (dont la population s?approche et qu?elle ne dépassera pas). a et b toutes deux autres constantes. a détermine l'échelle horizontale ; c?est l' « intervalle standard » : on en compte 10 égaux, sur la ligne des abscisses, entre le point de départ de la courbe et son point d?arrivée. Plus a est grand, plus la courbe est aplatie. Le point d?inflexion (où la tangente à la courbe laisse celle-ci de part et d?autre) est celui que traverse la courbe quand elle arrive à la moitié de la hauteur qu?elle atteindra. Il correspond au point de l'abscisse, l'autre est l'ordonnée et a 5 intervalles standard à sa droite, et 5 à sa gauche. Il est le temps qui s?écoule entre le temps = 0 et le temps où la courbe passe par le point d?inflexion. Si on choisit le point d?inflexion pour définir le temps zéro, il disparaît. Si, d?autre part, on prend pour intervalle standard l'unité de temps, a = 1. Si enfin on prend la valeur limite de la population comme unité de population (du nombre des habitants, mesuré en ordonnée) on obtient la forme plus simple :

tableau im5

550On sait que e-x c?est-à-dire,

tableau im6

551entre comme facteur de décroissance dans la formule d?un grand nombre de faits physiques dont le taux de décroissance est proportionnel à la vitesse avec laquelle la décroissance a lieu. ex tend vers 0. Le dénominateur tend donc vers 1, y′ aussi, c?est-à-dire que la population tend vers la population limite, évidemment. Mais ce qui est intéressant, et ce qu?exprime la courbe qui représente cette fonction, et que M. Y. appelle la courbe logistique [logistic curve for growth of population], c?est qu?elle tend vers cette valeur limite en augmentant, d?abord lentement, puis de plus en plus vite, jusqu?à ce qu?elle atteigne le point d?inflexion, pour augmenter ensuite de moins en moins vite, et s?aplatir à mesure qu?elle approche de la valeur limite.

552Il s?agit maintenant de voir si cette courbe peut représenter avec un degré d?approximation suffisant, les faits, c?est-à-dire les chiffres de la population tirés des recensements. Ne retenons qu?une des méthodes appliquées à cette fin par M. Y. On peut choisir trois recensements dont le second soit à égale distance dans le temps de deux autres, par exemple : 1801, 1851 et 1901, et de faire passer la courbe (une partie de la courbe) par les points qui correspondent à certains nombres. On construit alors le reste de la courbe suivant la formule théorique, ce qui permet de déterminer la valeur limite et le point d?inflexion. Mais, surtout, on mesure les écarts entre les points (empiriques) qui représentent les chiffres des autres recensements (pour chacune des années conquises entre 1801 et 1851, par exemple, mais aussi, si on a des données antérieures, pour ces données, et de même, si on a des données postérieures à 1901). La somme des écarts nous permet de mesurer le degré d?approximation avec lequel la courbe représente les données.

553On a trouvé que divers segments de la courbe représentaient de façon très approchée les populations de l'Angleterre, des États-Unis, et de la France. Pour l'Angleterre, il en résulterait que la valeur limite de la population s?élève à 91 2[11] 000 : le point d?inflexion (milieu du chemin parcouru avant d?atteindre cette valeur limite) se placerait en 1936 ; l'intervalle standard serait à 61 années. Pour les États-Unis, la population limite s?élèverait à 197 274 000 ; le point d?inflexion aurait été atteint en 1914 ; l'intervalle standard serait de 31,9 années, c?est-à-dire que l'accroissement y serait plus rapide qu?en Angleterre (parce que la population des États-Unis parcourrait environ le dixième du cycle total en 32 ans au lieu de 61). Pour la France, la population limite serait de 44 810 000. Le point d?inflexion a dû être traversé vers la fin de 3e quart du XVIIIe siècle, si bien que toute l'évolution de la population française au XIXe siècle se placerait sur la seconde moitié de la courbe logistique, et qu?on est très près de la population limite. L?intervalle standard est de 51 à 58 ans, c?est-à-dire que la France aurait parcouru le cycle plus vite que l'Angleterre. Le faible taux d?accroissement actuel s?expliquerait par le fait que la population de la France est bien plus rapprochée de la population limite (de ce pays) que la population anglaise.

554On peut représenter maintenant ces trois séries de données (pour les trois pays) sur un même diagramme, en prenant comme point d?origine (des abscisses) le point qui correspond à l'inflexion, pour unité de population, la population limite, et comme unité de temps (abscisse) l'intervalle standard (suivant la formule 2). Chacune des courbes empiriques vient alors se placer sur un segment de la courbe théorique avec une approximation très grande – mais tantôt entièrement à gauche du point d?inflexion (Angleterre et États-Unis), c?est-à-dire dans la première moitié du cycle, tantôt entièrement à droite (France), c?est-à-dire dans la seconde moitié, et tout près de la limite. On voit ainsi qu?en un siècle les États-Unis ont parcouru la première moitié du cycle, tandis que l'Angleterre, dans le même temps, n?en a parcouru que le second quart.

555Il ne s?ensuit pas d?ailleurs, se hâte de remarquer M. Y., que la population des États-Unis et de l'Angleterre doivent évoluer, dans le siècle qui va venir, exactement de la même façon que la population française dans le siècle écoulé, pas plus que la population française n?a évolué, de 1570 à 1750, comme la population américaine de 1790 à 1910. L?essentiel est que la même courbe théorique permette de représenter très exactement, par ses divers segments, les trois évolutions observées.

556Arrêtons-nous après cette première partie de l'étude de M. Y., qui d?ailleurs se suffit. On est un peu étonné de ce que l'auteur, cherchant la loi d?évolution d?une population enfermée dans une aire limitée, ait réuni dans une même étude les populations de la France et de l'Angleterre, et la population des États-Unis, qui disposait de tant d?espaces vides, et s?est accrue surtout par l'immigration. D?autre part, étant donné que, d?après M. Y., les populations de France et d?Angleterre ont parcouru, avec une rapidité relativement grande, une bonne partie du cycle, au XIXe siècle, parce que la révolution industrielle leur a donné un nouvel élan, on ne comprend pas bien que la France ait gardé une telle avance sur l'Angleterre. Mais laissons ces points, et tenons-nous en au résultat, assez saisissant en effet, qu?a obtenu M. Y., lorsqu?il a réussi à replacer, très exactement, ces trois courbes empiriques sur divers segments de la courbe théorique.

557À vrai dire, il n?y est parvenu qu?en appliquant un de ces procédés d?ajustement qui impliquent toujours quelque arbitraire. Nous avons expliqué ce que représentent ces constantes L, a et b de la formule (1). a, c?est l' « intervalle standard », en réalité l'échelle des abscisses. Il n?en parle même pas dans les trois pays, parce qu?on lui donne les valeurs respectives 61 ; 31, 9 ; et 51. Il mesure la rapidité plus ou moins grande avec laquelle ces populations parcourent les mêmes segments du cycle supposés égaux. Mais, cette rapidité, on ne la connaît point par les recensement (puisqu?il ne s?agit pas en réalité des mêmes segments). On a donc choisi ces nombres, parce qu?ils permettaient de construire une courbe empirique dont la forme s?approchât de la forme théorique. Ils ne sont pas invraisemblables, mais ils sont choisis arbitrairement. Il en est de même de L, ou de la valeur limite de la population pour chacun de ces pays, qu?on ne connaît évidemment pas d?avance (ne parlons pas de b, c?est-à-dire de la distance dans le temps qui s?écoule entre le temps zéro et le temps où la courbe traverse le point d?inflexion, qu?on suppose égale à 0, dans le dernier diagramme). C?est donc parce qu?on a donné à a et L, dans les trois cas, des valeurs différentes, qui, nous le répétons, ne sont pas invraisemblables, mais qui ne résultent en rien des données empiriques, et qu?on n?a choisies que parce qu?elles permettaient l'ajustement, que les courbes empiriques, ainsi modifiées d?avance par deux changements d?échelle, s?ajustent en effet à la courbe logistique. Nous disons, par deux changements d?échelle : c?est qu?en effet a détermine l'échelle des abscisses, et L l'échelle des ordonnées. Or, on sait qu?en modifiant une de ces deux échelles, ou les deux, on parvient souvent à transformer extrêmement la forme d?une courbe, jusqu?à la rendre superposable à une autre qui présentait un tout autre aspect. Lorsqu?on nous dit que la courbe empirique qui représente la population d?un pays a une allure telle qu?on peut en déduire que la population parcourt le cycle avec telle vitesse, c?est-à-dire que l'intervalle standard comprend tant d?années et que la population limite s?élève à tel chiffre, il ne faut pas oublier que c?est précisément parce que l'on a choisi cet intervalle standard, et cette population limite, qu?on a pu donner à la courbe cette allure.

558M. Y. se défend d?extrapoler, soit en avant, soit en arrière. En avant : n?est-il pas vrai que M. Arthur Lyon Bowley [341], par une méthode analogue, prévoyait que la population de la Grande-Bretagne ne dépasserait pas 49 millions, et atteindrait ce chiffre en 1971, tandis que M. Edwin Cannan [342] fixait cette population à une limite qui est dès maintenant dépassée ? En arrière : car on attribuerait à l'Angleterre, en 1751, une population de 4 023 000, alors qu?on l'évalue en fait à 6 300 000 à cette date. Il n?en est pas moins vrai qu?un des résultats les plus curieux où parvient M. Y., c?est que la population de la France en était, au début de XIXe siècle, au même point où en est la population de l'Angleterre aujourd?hui. Mais il y a ceci, de nature à nous rendre perplexe quelque peu, que, alors les deux parties de la courbe théorique, séparées par le point d?inflexion tout symétrique et en certain sens, comme le sont les deux parties, inférieure et supérieure, d?un S majuscule, ou comme le sont les deux parties de la pente d?une montagne qui s?élève d?abord doucement, puis plus vite, pour s?incliner et finir à peu près en plateau, il n?y a aucune des trois courbes empiriques qui traverse le point d?inflexion, et où se retrouve cette symétrie, puisque l'une est tout entière à droite, et les deux autres, tout entières à gauche dudit point. Ces courbes, d?ailleurs, ne couvrent que des segments limités du cycle : 3 dixièmes 75 pour les États-Unis, moins de 2 dixièmes et demi pour la France, moins de 2 dixièmes pour l'Angleterre. Les statisticiens sont venus trop tard, ou trop tôt ; trop tard, sans quoi nous aurions les chiffres de la population au XVIIIe et au XVIIe siècle ; trop tôt, parce qu?ils n?ont pas encore tous les chiffres de la population du XXe. Or il faudrait l'un ou l'autre, afin de pouvoir suivre le mouvement de la population pendant un cycle entier.

559Venons-en à la suite de cette étude, qui est presque indépendante de la première : car, bien que l'auteur parle d?étudier « les facteurs qui déterminent la forme de la courbe », en réalité il ne sera guère plus question de la courbe, mais, seulement, du fait que le taux d?accroissement de la population diminue de façon continue depuis plus de cinquante ans. – Si l'on ne tient pas compte de l'émigration et de l'immigration, il n?y a, dit M. Y., que deux facteurs qui puissent modifier le taux de la population : le taux de mortalité et le taux de natalité. Le premier tend-il à croître et l'autre à décroître à mesure qu?augmente la densité de population ? En d?autres termes, quand la population augmente trop, est-ce le frein répressif, comme le pensait Malthus , ou est-ce le frein préventif qui joue ?

560Sans doute, quand on étudie le taux de mortalité dans différentes régions d?un même pays, on trouve qu?il est en rapport avec la densité de la population. Mais, dans les pays civilisés depuis plus d?un demi-siècle. La mortalité augmente-t-elle à mesure que la population devient plus dense ? Il faut répondre : non. Rien n?est plus frappant, en effet, que la diminution universelle du taux de mortalité dans les pays occidentaux, depuis 5 ans. Tandis que la population augmentait Dans plusieurs de ces pays, en Angleterre, en Norvège, en Suède, en Danemark, en France, en Belgique, elle se manifeste depuis bien plus de cinquante ans, le plus souvent, la mortalité a baissé de moitié et même de plus en soixante ou quatre vingt ans. Durant toute cette période, la mortalité ne contrôle pas la population ; c?est, dit M. Y., « une variable indépendante ».

561En revanche, durant la même période, le taux de la natalité a diminué dans tous les pays de l'Europe occidentale et aux États-Unis. Dans plusieurs de ces pays la baisse ne se manifeste qu?à partir de 1871-1880 ou de 1881-1890 mais en Suède et en Finlande il y a eu un premier mouvement de baisse très marqué de 1750 à 1830, qui, interrompu quelque temps, a repris vers 1860-1870. En France on note un mouvement lent et presque continu de baisse de la natalité depuis 1820. Aux États-Unis, Walter Francis Willcox , dans « The nature and significance of the changes in the birth and death rates in recent years » (Quarterly Publications of the American Statistical Association, vol. XV, 1916 [343]) a calculé, pour chaque recensement, le rapport du nombre des enfants de moins de 5 ans à 1 000 femmes âgées de 16 à 44 ans [344]. Ce rapport a diminué de façon continue et rapide depuis 1810, avec un seul relèvement en 1860, et est passé de 976 à 508. Ainsi ce taux de natalité semble bien contrôler la population.

562D?autres données confirment cette thèse. Malthus dirait que le nombre des mariages et des naissances baisse, et que le taux de mortalité augmente, dans les périodes de dépression. Or, depuis 1850, on ne constate pas qu?il y ait eu une relation de ce genre entre le taux de la mortalité et les cycles économiques. Le taux de mortalité ne tend pas à varier en sens inverse du mouvement du commerce. Au contraire, durant la période 1859-1908, les périodes prospères ont, dans l'ensemble, un taux de mortalité plus élevé que les périodes de dépression. Au reste durant les années 1921-1922-1923, les plus mauvaises qu?ait traversées l'industrie anglaise, la mortalité a été plus faible qu?elle ne le fut jamais et d?atteindre, en baisse, des chiffres « record ». Heureusement, M. Y., reprenant et complétant les résultats de son étude : « On the changes in the marriage and birth-rates in England and Wales », etc. (Journal of the Royal Statistical Society, vol. LXIX, 1906, p. 88-132 [345]), observe que le taux de nuptialité suit de façon remarquable les variations du commerce, et le taux de natalité également (avec deux années de retard).

563Ainsi, les progrès de la médecine et de l'hygiène, en réduisant la mortalité, tendraient à accroître la densité de la population. Mais la diminution de la natalité exerce une influence plus grande, en sens contraire : c?est la natalité qui contrôle la population.

564Toute cette seconde partie de l'étude poursuivie par M. Y. est vraiment solide. Un des graphiques, le plus [curieux] qu?il ait établi, est bien celui qu?on trouvera page 29. L?auteur y a représenté par quatre courbes, de 1860 à 1900, ces variations du taux de mortalité, du commerce extérieur, des taux de nuptialité et de natalité, en calculant, pour chaque année, « l'écart de la moyenne des onze dont cette année est le centre [346] ».

565On y aperçoit très clairement les relations que nous venons d?indiquer ; c?est une très bonne application d?une méthode à la fois précise et ingénieuse.

566Mais il faut retenir les réflexions finales de M. Y. : la limitation de moyenne subsistance ne suffit certainement pas à expliquer que l'accroissement de la population se ralentisse à ce point, étant donné, surtout, que, contrairement à ce qui se vérifiait du temps de Malthus , il est toujours possible à ces pays, dans nos sociétés, de faire venir de l'étranger une partie de ce qui leur manque.

567Il est d?ailleurs absurde d?admettre que 45 millions d?habitants seulement (population limite) puissent vivre sur le sol de la France. « Quelles sont donc les conditions qui ont déterminé ce fait, que la population française approche de sa limite dès le début du XIXe siècle ? » On sait que M. Y., après avoir écarté le facteur : limitation des subsistances, facteur économique qui n?est point propre, en effet, à rendre compte d?un phénomène morphologique, invoquerait volontiers un facteur ou une loi biologique. Il rappelle les expériences faites récemment sur les mouches Drosophila, qui, enfermées dans une bouteille à demi remplie de lait, se sont multipliées avec une vitesse décroissante, à mesure que « la densité de leur population » augmentait. Nous ne nous demanderons pas – cela nous mènerait un peu loin – jusqu?à quel point on peut assimiler une population humaine à une population animale (extrême, comme certains auteurs, à une population de cellules). Mais, écartant l'explication biologique, aussi bien que l'explication économique, pourquoi ne pas rentrer dans le domaine de la morphologie sociale ? Il y a peut-être, dans chaque société, étant donné sa densité et sa « forme », une représentation de l'espace que cette société tend à occuper, et qui expliquerait suffisamment que, lorsque l'espace disponible diminue, la société réduise son volume. Cette représentation s?imposerait aux divers membres de cette société. Elle déterminerait les dimensions du groupe familial. Elle pourra varier, d?ailleurs, en même temps que la société change de forme, et il y aurait lieu de rechercher les causes de ces variations. Elle ne serait pas la même pour un groupe urbain que pour un groupe rural, pour un état de civilisation où les hommes se déplacent et émigrent beaucoup, que là où la population est sédentaire. Et c?est dans cette voie, nous semble-t-il, qu?il serait intéressant de poursuivre ces recherches, et c?est en ces termes qu?il faudrait noter le problème où les problèmes de la population.

568M. H.

Thomas Henry Craig Stevenson. — « The laws governing population », opening a discussion before the Royal Statistical Society, December 16, 1924, the President in the Chair, Journal of the Royal Statistical Society, New series, vol. LXXXVIII, Part 1, January 1925, p. 63-76 [347].

569D?après l'auteur, c?est au commencement du XXe siècle que la baisse de la natalité (dans 14 États européens) a commencé. C?est « un tournant dans l'histoire de l'Europe ». Cependant si l'on se reporte aux diagrammes qu?il a établis, on remarque que la natalité diminue nettement à partir de 1881-1885 dans la population européenne prise d?ensemble, et dans la plupart des États envisagés. La diminution est, il est vrai, nettement plus forte depuis 1900, exceptionnellement forte durant ces dix années antérieurement à 1914.

570M. H.

Major Greenwood . — « The vital statistics of Sweden and Wales : An essay in international comparison », lu devant la Royal Statistical Society, May 20, 1924, Journal of the Royal Statistical Society, vol. LXXXVII, Part IV, July 1924, p. 493-531 [348].

571L?auteur a comparé les taux de mortalité en Suède, d?une part, en Angleterre et dans le pays de Galles de l'autre, de 15-20 ans à 55-65 ans, à deux périodes : 1846-1850 et 1906-1910.

572Il a observé ceci : il y a soixante-dix ans, la mortalité depuis l'enfance jusqu?à 35 ans était plus forte en Angleterre qu?en Suède, particulièrement pour les adolescents. À partir de 35 ans, le taux de mortalité anglais s?abaissait en comparaison du taux suédois, et, au-delà de 40 ans, il devenait inférieur, pour les hommes, de 10 à 15 % à ce qu?il était en Suède. Le taux de mortalité des femmes était, pour tous les âges, plus élevé en Angleterre qu?en Suède. Dans la dernière décade, la situation s?est entièrement retournée. Au-dessous de 30 ans pour les hommes et de 36 ans pour les femmes, la mortalité est maintenant moindre en Angleterre qu?en Suède. Aux âges plus élevés, la balance est moins favorable à l'Angleterre, et, après 40 ans, le taux de mortalité anglais est supérieur de 25 à 50 % au taux suédois. Le taux de mortalité des « jeunes adolescents » anglais a diminué extraordinairement : il est inférieur de moitié à ce qu?il était il y a soixante-dix ans. En Suède, le taux de mortalité, pour les adolescents, n?a guère changé ; en revanche, aux âges plus élevés, il a diminué de 50 %.

573Le fait signalé est sans doute curieux. Ce qui en obscurcit la portée, c?est que les deux pays comparés sont bien différents. En 1862, la répartition de la population suédoise entre la ville et la campagne est la suivante : 116 habitants des villes pour 1 000 habitants des campagnes, tandis qu?en Angleterre et dans le pays de Galles on compte, en 1851, 1 006 habitants des villes pour 1 000 habitants des campagnes. Sans doute, depuis cette époque, la population urbaine suédoise a augmenté. En 1913, elle représente 30 % de la population totale. Mais, en Angleterre, la proportion est de 75 %. Il en résulte que la densité de la population n?est pas la même dans les deux pays. « Les parties de la Suède les plus peuplées, a-t-on objecté à M. Greenwood , peuvent se comparer aux parties de l'Angleterre les moins peuplées. » Sir Arthur Newsholme a comparé les taux de mortalité dans les districts sud-ouest de l'Angleterre, qui se rapprochent de la Suède à certains égards, et la Suède, et il a trouvé, dans ce cas, que, au-delà de 40 ans, la balance était moins défavorable à l'Angleterre qu?il ne résultait de la comparaison globale entre les deux pays. On trouverait d?ailleurs d?autres résultats encore si l'on comparait les taux de mortalité dans les grandes villes anglaises et suédoises, à Londres et à Stockholm : la balance apparaîtrait, là encore, moins défavorable à l'Angleterre, d?après M. [S. ?] de Jastrzebski. De tels rapprochements n?ont en effet d?intérêt que si les groupes étudiés sont vraiment comparables.

574À un autre point de vue encore, la situation de la Suède dans la période envisagée paraît bien exceptionnelle. Pendant soixante ans, il n?est aucun pays de l'Europe occidentale, sauf l'Irlande, où l'on trouve une proportion d?émigrants plus élevée. Entre 1861 et 1906, il y a eu en Suède près d?un million d?émigrants. Tandis que la population suédoise a augmenté dans le même temps, de 3 860 000 à 5 522 000, la population anglaise est passée de 20 millions à 36 millions, soit un taux d?accroissement presque double. Il est possible que par suite du départ d?un si grand nombre d?hommes jeunes et vigoureux (la plupart des émigrants n?a pas plus de 35 ans) le taux de mortalité ait augmenté parmi les hommes qui restaient en Suède. Mais cela n?explique point, cependant, que le taux de mortalité [ait] diminué, en Suède, au-delà de 40 ans.

575Quand on cherche la cause d?un fait, c?est une bien mauvaise méthode que de battre les buissons, en quête d?une ou plusieurs explications vraisemblables. M. G. consacre les paragraphes successifs de son étude à l'histoire récente de la Suède, au problème de l'habitation en Suède, aux coutumes du peuple en Suède, à la législation industrielle suédoise, à l'alcoolisme en Suède, à l'histoire de la phtisie en Suède, etc. Chemin faisant, il observe que l'introduction de l'industrie en Suède (quelle que soit l'avance de l'Angleterre à cet égard) a pu exercer une influence sur le taux de mortalité, étant donné surtout que la législation industrielle y est moins développée qu?en Angleterre. La consommation d?alcool peut-être a diminué, mais le nombre des ivrognes a augmenté. L?entravement dans les logements n?est guère moindre en Suède qu?en Angleterre, sous tous les rapports, le progrès paraît plus grand ici que là. Le climat est plus rigoureux en Suède, etc. Que tirer de telles remarques, qui ne s?appuient d?ailleurs point sur des données quantitatives ? Quelle part faire à chacun de ces facteurs ? Comment choisir entre toutes ces hypothèses ? A priori, et sans avoir pris un contact direct avec ces faits qu?il s?agit d?expliquer, n?importe qui, d?ailleurs, pourrait les formuler. C?est sans doute le signe qu?aucune d?entre elles ne se rapproche d?un type d?explication vraiment scientifique.

576La cause d?un fait morphologique doit se chercher dans un autre fait également morphologique. Il est étrange que l'auteur n?ait pas songé à mettre en rapport les variations de la mortalité dans un pays ou dans une région avec d?autres variations morphologiques : nombre des mariages, âge des époux au moment du mariage, nombre des divorces, naissances, nombre des enfants, grandeur moyenne des familles, densité de la population. Remarquons que tous les facteurs invoqués par lui s?accompagnent cependant de variations de ce genre, qu?ils pourraient donc tous s?exprimer en termes morphologiques, et que, sous cet angle seulement, ils se prêteraient à la mesure. S?agit-il du passage de la vie rurale à la vie industrielle ou urbaine ? Un groupe rural, comme un groupe urbain, possède une nature et des propriétés démographiques qui lui sont propres, et qui varient d?ailleurs quantitativement, suivant que la population s?industrialise ou s?urbanise plus ou moins. C?est à ces propriétés et à elles seules qu?il faudrait s?attacher. S?agit-il de l'alcoolisme ? À supposer qu?on ne puisse compter le nombre des tavernes, bars, etc., le nombre des hommes qui les fréquentent, le temps qu?ils y passent, il reste que les familles d?alcooliques se distinguent des autres par leur degré de cohésion (divorces, durée du mariage), par le nombre des mort-nés, des enfants morts en bas âge, et la durée de vie des enfants, etc. S?agit-il de la race ou du climat ? Les statistiques suédoises de la natalité et de la mortalité, qui remontent au milieu du XVIIIe siècle, permettraient certainement de définir le degré moyen de résistance aux diverses causes de mort, aux différents âges, et aussi l'influence de variations saisonnières de la température sur l'organisme humain, dans la population installée en Suède. Un groupe ethnique se distingue d?autres par des caractéristiques morphologiques. Quant aux saisons, elles s?accompagnent aussi de variations dans le nombre des naissances, de mariages et de morts, si bien que, sans observer les variations de la température, on pourrait reconnaître qu?un groupe passe périodiquement par tels états morphologiques (qui correspondraient en fait aux diverses saisons). Suivant que tel de ces états (qui correspondrait à l'hiver) durerait plus ou moins longtemps, on reconnaîtrait, sans sortir du domaine de faits morphologiques, que l'hiver dure plus ou moins longtemps, c?est-à-dire que le climat est plus ou moins rigoureux.

577Sans aller jusque-là, il est certainement regrettable que l'auteur, étudiant les variations de la mortalité entre 15-20 ans et 55-6[5] ans, n?ait apporté ni utilisé aucune donnée sur la mortalité avant 15 ans. La mortalité dans un groupe d?âge résulte peut-être de la mortalité dans le groupe d?âge précédent. Si, en Angleterre, il y a soixante ans, la mortalité, de 15 ans à 35 ans, était plus élevée qu?en Suède, cela tient peut-être [au fait] qu?il mourait moins d?enfants en bas âge, et que parmi ceux-ci, un grand nombre n?étaient pas assez vigoureux pour attendre 35 ans. Si, de 15 jusqu?à 35 ans, à présent, la mortalité est moins élevée en Angleterre qu?en Suède, et si elle est plus élevée au-delà, cela peut tenir à ce que l'hygiène de l'enfance, et aussi de l'adolescence, en Angleterre, permettra à un plus grand nombre d?enfants et de jeunes gens d?atteindre et de dépasser l'âge de 35 ans, alors qu?il n?en est pas de même en Suède. Action sélective du climat en Suède il y soixante ans ? Progrès de l'hygiène et de la médecine en Angleterre aujourd?hui ? Sont-ce là des causes ? Non, mais du point de vue morphologique, la réduction de la mortalité des enfants et des adolescents en Angleterre serait la cause ou l'une des causes de l'augmentation de la mortalité au-delà de 30 ans. Quant à la réduction de la mortalité des enfants, elle est peut-être en rapport avec la diminution du nombre de naissances. C?est ce qu?il faudrait rechercher. Au-delà de ces données morphologiques, en tout cas, le sociologue n?a pas à remonter.

578M. H.

Hugo Schröder . — Das Problem der Unehelichen, Leipzig, Kabitzsch, Monographien zur Frauenkunde und Eugenetik, Sexualbiologie und Vererbungslehre, 8, 1924, 76 p., in-8o[349].

579Nous avons eu l'occasion, dans un volume précédent (L?Année sociologique, vol. XI, 1910, p. 744 [350]) d?expliquer que certains faits étudiés dans des ouvrages démographiques, qui traitent de la population, présentent en réalité un mélange de deux sortes de phénomènes dont les uns relèvent de la statistique morale, les autres, de la morphologie sociale, et nous donnions comme exemple, entre autres, les naissances illégitimes. Le présent ouvrage nous permettra de préciser le sens de cette distinction.

580L?auteur a étudié les naissances illégitimes en Allemagne, où elles sont particulièrement nombreuses. Il s?est demandé jusqu?à quel point elles donnent une idée du degré de moralité ou d?immoralité d?un peuple. Il lui a semblé que, dans bien des cas, comme la diminution du nombre des naissances illégitimes résulte de la multiplication des fraudes extraconjugales et des avortements, elle serait plutôt le signe d?un abaissement de la moralité. Il n?en est pas moins vrai que la conception hors mariage demeure un acte immoral, partout où elle n?est pas sanctionnée par les lois, et qu?elle heurte les croyances du groupe.

581Mais faut-il appeler naissances illégitimes celles qui résultent de la conception non pas hors mariage, mais avant le mariage ? Considérera-t.on comme illégitimes toutes les naissances qui ont lieu sept mois ou moins [après] le mariage ? À Berlin, en 1900, 45 % des premiers-nés étaient illégitimes en ce sens, et, dans la population rurale du Danemark, 39 %. Pourtant, la loi, ne fait pas de distinction entre les enfants conçus avant ou pendant le mariage, et l'opinion, quand elle remarque qu?un enfant naît un peu trop avant terme, ne réagit que faiblement. L?acte des parents a-t-il été, cependant, immoral ? Il faut distinguer. Schnapper Arndt pensait que le « coitus anticipé » était le vestige d?antiques coutumes matrimoniales qui se seraient fidèlement conservées dans les milieux paysans. Si les deux parents avaient l'intention ferme de se marier, il se peut que, dans certaines régions au moins, l'acte ait été en effet conforme à la coutume. L?immoralité de l'acte est alors, en tout cas, très atténuée. Il en est de même, lorsque les deux parents naturels voudraient se marier, et que la loi, s?inspirant, comme en Bavière jusqu?en 1867, d?un esprit néomalthusien, rend le mariage difficile. Il n?en est plus de même quand la conception même est la cause qui détermine les parents à se marier. Sur l'aspect moral de la natalité illégitime, l'auteur n?insiste pas davantage. Il s?en tient à remarquer que le meilleur moyen de limiter les naissances illégitimes, ce serait de faire en sorte que jeunes gens et jeunes filles se marient le plus tôt possible. C?est trop évident, bien que ce ne soit pas tout à fait une lapalissade. De ces observations nous pouvons conclure qu?en effet, mais en un autre sens que ne l'entendait M. Schröder, le nombre des enfants illégitimes n?exprime pas nécessairement le degré de moralité sexuelle d?un groupe.

582Plaçons-nous, maintenant, à un autre point de vue. De 1915 à 1920 on nous dit qu?en Allemagne les naissances illégitimes représentent de 11 à 13 % de l'ensemble des naissances. C?est une proportion élevée. Mais supposons que l'enfant illégitime ne se distingue des autres que parce que l'opinion le sous-estime, ou le considère avec une certaine défaveur : la morphologie sociale n?aurait pas à s?en occuper, puisqu?elle étudie seulement les faits qui modifient les dimensions, la structure et les mouvements internes du corps social. Mais il n?en est rien, et les naissances illégitimes relèvent aussi de cette étude. D?abord, les causes qui déterminent les variations du nombre des naissances illégitimes dans un groupe sont de nature morphologiques. On remarque que la proportion d?illégitimes augmente très régulièrement à mesure qu?on passe de villes peu peuplées à de grandes et à de très grandes villes. Elle est en rapport avec la densité de la population. D?autre part, ce n?est pas la population industrielle, c?est la population rurale qui fournit le plus gros contingent d?illégitimes : or ces deux populations différent au point de vue de la fécondité, et il semble bien qu?il y ait un rapport entre la fécondité d?un groupe, et le taux des illégitimes dans ce groupe. Enfin, et cela rend compte, peut-être, de l'opposition qu?il peut y avoir entre les deux observations précédentes, le plus grand nombre des mères d?enfants illégitimes, en Prusse, étaient des domestiques de la ville et de la campagne (42 % de l'ensemble). Il est regrettable qu?on ne nous indique point la proportion des mères d?enfants illégitimes de chaque catégorie professionnelle. Mais on ne veut guère douter que les naissances illégitimes soient particulièrement nombreuses dans la classe des domestiques. Or elle se distingue des autres en ce que ses membres n?ont point de domicile propre et habitent chez leur patron, ce qui engendre une caractéristique morphologique. Il faut ajouter qu?une forte proportion des mères d?enfants illégitimes sont des filles sans parents (des orphelines), détachées et séparées de tous les autres groupes, et qu?il se rencontre aussi, parmi elles, un grand nombre de déracinées (en particulier des filles venues de la campagne) : toutes situations qui s?expriment par des changements de dimensions des groupes, et par des déplacements de telle ou telle de leurs unités.

583Si nous considérons maintenant non plus les causes, mais l'effet, c?est-à-dire les enfants illégitimes eux-mêmes, il apparaît, d?abord, qu?ils ont un taux de mortalité spécifique. Ce taux est élevé, le double du taux de mortalité des enfants légitimes. Cependant (c?est une des parties les plus poussées de l'étude de M. S.) ils ne paraissent pas plus mal constitués, physiquement, que les légitimes, pas plus qu?ils ne leur sont inférieurs au point de vue intellectuel. Comment s?explique cette mortalité élevée ? M. S. a distingué les diverses conditions dans lesquelles ils se trouvent après leur naissance. D?abord, il arrive que l'enfant ne soit pas séparé de sa mère, et qu?ils forment à eux deux une famille incomplète, incomplète en ce sens que la mère a rompu tout lien avec ses parents et ne vit pas avec le père naturel. Un tel groupe réduit, isolé dans l'espace, est le moins propre à protéger la vie de l'enfant. « Mieux vaut, pour un tel illégitime, que sa mère meure. » D?autre part, l'enfant peut être confié à la garde d?étrangers, mis en nourrice (c?est le cas du plus grand nombre), ou placé dans un orphelinat. Mais alors, il est exposé à des déplacements plus ou moins fréquents. Or, plus les illégitimes changent ainsi de milieu et de résidence, plus ils donnent prise aux causes de mort, quand même, par intervalles, ils seraient repris par la mère, ou par les parents de celle-ci. Ils ont plus de chances de vivre, au contraire, lorsqu?ils sont élevés dans la famille des parents de leur mère, soit auprès de celle-ci, soit loin d?elle, ou lorsqu?ils restent sans en bouger dans un établissement d?orphelins. On le voit, ce qui détermine le taux de mortalité des enfants illégitimes, ce n?est pas l'illégitimité de leur naissance, c?est l'étendue plus ou moins grande du groupe auquel ils sont rattachés, et c?est la fréquence des déplacements auxquels ils sont exposés de groupes à groupes ; mais ce sont là et ce ne sont que des caractères morphologiques.

584De fait, l'illégitimité, caractère ou fait moral, n?importe pas ici. Entre un enfant qui est légitime par le mariage de ses parents naturels, très peu de temps après sa naissance, ou qui est élevé par sa mère dans la famille de ses parents, ou par la famille seule, et un enfant qui vit dans sa famille légitime, il n?y a, morphologiquement, pas de différence pour un observateur qui examinerait cette unité sociale du dehors. Il n?y en a pas une très grande non plus entre un illégitime qui vit avec sa mère, et elle seule, d?une part, et d?autre part, un légitime dont la mère est également isolée. Il y en a une bien grande au contraire, entre un illégitime qui vit avec sa mère, ou qui, placé chez des étrangers, se déplace plus ou moins fréquemment, et un légitime qui ne quitte pas les siens. Là où la statistique morale ne voit qu?une catégorie, la morphologie sociale en distinguerait plusieurs : elle trouverait d?ailleurs que, de son point de vue, il n?y a guère de différences entre certains enfants illégitimes et des enfants légitimes de veuves sans parents, de femmes divorcées, séparées, vivant seules ou en concubinat, alors qu?entre ceux-ci et ceux-là, la statistique morale ne découvrirait aucun rapport.

585On trouvera indiqués dans cet ouvrage quelques faits peu connus, par exemple que la mortalité des illégitimes ne dépasse celle des légitimes qu?à partir de la troisième semaine (c?est le moment où, d?ordinaire, l'enfant est séparé de sa mère, et cela confirme ce qui est dit plus haut de l'influence des déplacements), que les prostituées donnent un contingent d?enfants illégitimes insigifiant, qu?en moyenne un illégitime sur dix a une chance d?être légitimé, les filles plus que les garçons, dans les villages et petites villes plus que dans les grandes villes.

586M. H.

Sir Alexander Morris Carr Saunders . — K. B. E., Population, Londres, Oxford University Press, Humphrey Milford, 1925, 111 p., in-12o ; Walter Francis Willcox , « Methods of estimating the population of the United States », Metron. Rivista internazionale di statistica (Rovigo, Ferrara), vol. V, no 1, 1-VI, 1925, p. 27-37 ; H. I. Van Zanten, « Quelques données démographiques sur les Israélites à Amsterdam », Metron. Rivista internazionale di statistica, vol. V, no 1, 1-VI, 1925, p. 38-68 [351].

587À rapprocher de deux études antérieures, l'une de M. Corrado Gini  : « Alcune ricerche demografiche sugli Israeliti di Padova », in Atti e Memorie della R. Academia di scienze, lettere ed arti in Padova, 1916 [352], l'autre de M. Israele Zoller , sur les Juifs à Trieste, publiée dans Metron. Rivista internazionale di statistica, vol. III, p. 521 sq. [353]. M. van Zanten disposait de données moins détaillées que ces deux auteurs, parce que les chiffres des mariages, des naissances et des décès, pour les Juifs d?Amsterdam, ne sont publiés que depuis 1894. D?un travail, sur la morbidité et la mortalité des Juifs d?Amsterdam, publié (en hollandais) par le Dr Jacob Sanders en 1918 [354], il résulte que la mortalité des Juifs était [inférieure] à la mortalité des non-Juifs à Amsterdam, de 1901 à 1913 : 11,63 ‰ au lieu de 13,55 pour les non-Juifs. M. V. Z. remarque que la différence entre ces deux groupes a diminué depuis, bien que la mortalité des juifs demeure toujours moindre : 11,13 ‰ au lieu de 11,68 pour les non-Juifs, de 1918 à 1923. D?autre part « la natalité parmi les Juifs a été moins élevée que parmi les non-Juifs dans le cours des vingt-cinq dernières années, et que la différence va s?accroissant. [...] les familles nombreuses sont moins nombreuses parmi les Juifs que parmi les non-Juifs ». Il est regrettable qu?on n?ait pas étudié spécialement durant cette période les conditions démographiques des Juifs portugais, qui forment un groupe plus fermé que les autres, et ne se marient guère qu?entre eux, alors que, sur l'ensemble des Juifs mâles, 87,4 % seulement se sont mariés avec des Juives en 1920 (au lieu de 96,1 en 1899).

588M. H.

Henri Bunle . — « Démographie de l'Afrique française du Nord au début du XXe siècle », Journal de la Société de Statistique de Paris, nos 7-8-9, juillet-août-septembre, 1924, p. 278-296, et no 10, octobre 1924, p. 347-364 [355].

589Les méthodes par lesquelles ont été rassemblées les données sont de valeur inégale dans les trois régions étudiées : « Au Maroc, la statistique démographique est encore dans l'enfance. La Tunisie a effectuée, en 1921, le premier recensement de sa population. Depuis 1920 seulement, la déclaration des naissances et des décès y est obligatoire ; mais la loi y est appliquée depuis trop peu de temps pour que [...] les statistiques du mouvement de la population sont d?ailleurs rudimentaires... L?Algérie semble mieux partagée. Les recensements de la population y sont régulièrement étendus, depuis 1856, à toute la population. Les naissances et les décès y sont, en principe, enregistrés depuis 1882 pour la natalité du pays. Toutefois [...] une partie des statistiques est, actuellement, assez incertaine ».

590Sous ces réserves, ou peut admettre que, de 1901 à 1921, la population totale de l'Afrique du Nord s?est accrue d?au moins 1 million et demi d?habitants, soit un taux moyen annuel d?augmentation d?environ 0,6 %. On ne peut évaluer l'accroissement de la population musulmane marocaine. En Algérie et en Tunisie, le nombre des musulmans a augmenté de plus de 1 million en vingt ans, soit chaque année 0,85 % de l'effectif initial. Les Européens (non compris les Israélites algériens naturalisés français) auraient passé de 700 000 en 1901 à près d?un million vingt ans plus tard. Le[ur] taux annuel d?accroissement ressort à 1,7 % (double de celui des musulmans), malgré le ralentissement de la période 1911-1921... Les éléments européens et israélites en présence se mélangent fortement par les mariages mixtes... (un cinquième du nombre total des mariages mixtes, tandis que les mariages entre Français et Musulman n?en représentent qu?un centième). La proportion des mariages mixtes est de 1 sur 5 environ en Tunisie et en Algérie. Ainsi, dit M. Bunle , « se forme une race nouvelle, dont les caractéristiques démographiques sont intermédiaires entre celles des éléments originaux [...] ».

591M. H.

III. ? Mouvements migratoires / IV. ? Groupements urbains et ruraux / V. ? Géographie économique / Septième section / Divers / I. ? Le langage. L?écriture / A. ? Le langage / B. ? L?écriture / II. ? Technologie par M. H. Hubert

Reginald Campbell Thompson . — The Assyrian Herbal. A Monograph on the Assyrian Vegetable Drugs. — The Subject Matter of which was communicated in a paper to the Royal Society, March 20, 1924, London, Luzac & Co., 1924, XXXVII-294 p., in-8o, index. [356].

592Il est vraisemblable qu?une civilisation comme l'assyro-babylonienne s?était constituée un jardin botanique bien planté. Elle s?est constitué également une botanique qui voisine avec sa pharmacopée. Nous avons un nombre assez considérable de tablettes énumérant des noms de plantes. M. Campbell les a réunies et élucidées. Il a identifié environ 250 plantes, se servant dans ce travail critique des indications d?usage médical qu?il avait pour quelques-unes, mais surtout de renseignements qui nous sont donnés sur la classification botanique assyro-babylonienne et des similitudes de noms entre les dialectes sémitiques ou méditerranéens. Les jardiniers babyloniens paraissent avoir multiplié les variétés puisque nous avons plusieurs noms pour les mêmes espèces (assa faetida, ricin, fécules, pavots, anthémis, cyprès). Ils ont emprunté des noms à des dialectes voisins, ce qui dénote l'importation d?espèces ou de variétés. Surtout ils ont fourni des plantes et des noms de plantes aux civilisations méditerranéennes. Il a dressé une liste de 25 noms que de nouveaux textes amèneront un jour à allonger. La proportion de noms fournis aux autres civilisations est intéressante, étant d?environ 10 %.

593H. H.

Amélia Hertz . — « Histoire de l'outil en fer d?après les documents égyptiens, hittites et assyro-babyloniens », L?Anthropologie, vol. XXXV, no 1-2, 1925, p. 75-95 [357].

594Le titre promet plus qu?il ne donne. Il paraît être question du fer dans les textes des pyramides, et d?objets en fer, parmi lesquels il y aurait des outils ; mais il semble qu?il s?agisse seulement de fer météorique. Le fer forgé tiré des mines cappadociennes de Kiswadna apparaît avec la XVIIIe dynastie et dans la correspondance des rois mitanniens et hittites avec les pharaons. Il s?agit alors de bijoux, d?objets religieux et d?armes de grand luxe. C?est seulement au IXe siècle qu?est mentionné dans les documents écrits l'outil de fer proprement dit, dans les annales du roi assyrien Tukulti Nounourta II (890-884 [avant J.-C.]) ; il y est question d?outils de pionniers en fer. L?usage commun du fer entraîne l'exploitation en grand des mines ; le prix du métal baissa ; les trois faits réagirent l'un sur l'autre.

595H. H.

III. ? Esthétique / Généralités et systèmes esthétiques par M. H. Hubert

Charles Boreux . — L?art égyptien, Paris et Bruxelles, Mâcon, imprimerie Protat frères, Paris et Bruxelles, Librairie nationale d?art et d?histoire, G. Van Oest (éd.), « Bibliothèque d?histoire de l'art », 1926, 63 p., et planches, p. II-LXIV, in-8o[358].

596M. Boreux n?a pas craint de risquer la banalité en mettant en lumière l'unité et la continuité de l'art égyptien. Au fait, il la risquait à peine, car quelques auteurs se sont appliqués à y distinguer des écoles provinciales, obéissant à des inspirations diverses. Il y eut en Égypte deux arts, un art populaire, assez libre et vivant au compte duquel on peut mettre tous les écarts, un art officiel, au service de la religion et du culte des morts, éminemment traditionnel et, dès qu?il y eut une Égypte, obéissant à une seule inspiration et se conformant à une même esthétique. Depuis les premières dynasties thinites jusqu?à la mort de l'ancienne Égypte, la grandeur, la majesté, le calme des attitudes, la simplicité des reliefs ont suggéré aux Égyptiens le sentiment du beau et ils ont aimé sans doute qu?on leur parlât avec un langage qui ne changeait pas trop. La continuité est plus évidente dans l'architecture qui a produit quelques-uns de ces chefs-d?œuvre classiques sous les Ptolémées et sous les Antonins. L?histoire de la sculpture est plus mouvementée. M. B., par exemple, explique avec beaucoup de clarté et de finesse l'influence esthétique de la révolution dont [Akhenaton] fut l'instigateur.

597H. H.

Ornemantique / Arts plastiques / Arts musical et oraux / Précisions sur les dénominations / Annexe

tableau im7
Précisions sur les dénominations

Notes

  • [1]
    [Z AD 41 D. 4.]
  • [2]
    Cf. 1925, compte rendu, C. K. Ogden _ex "Ogden, Charles Kay"_ and I. A. Richards _ex "Richards, Ivor Armstrong"_, The Meaning of Meaning, Sv. Ranulf _ex "Ranulf, Svend"_, Der Eleatische Satz vom Widerspruch, et E. Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der Symbolischen Formen, I. Die Sprache, 1923, p. 256-260 ; A. Meillet _ex "Meillet, Antoine"_, « Linguistique et Sociologie », in L?Année sociologique, nouv. série, t. I, 1925, p. 942. [Note de Mauss _ex "Mauss, Marcel"_.]
  • [3]
    [2 AP 4-1. B. B 3 d. 2.]
  • [4]
    [Sir. J. G. Frazer, 1890, The Golden Bough. A Study in Comparative Religion, 2 vol. ; 1900, 2e éd., revue et augmentée, 3 vol. ; 1911-1915, 3e éd. revue et augmentée, 12 vol., Londres, Macmillan ; trad. franç. : 1924, Le Rameau d?Or, édition abrégée, traduit par Lady Frazer, Châteauroux, Société d?imprimerie et d?édition, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 726 p. ; 1925-1935, Le Rameau d?Or. Études comparées d?Histoire des religions, en douze volumes, 3e éd. revue et augmentée, préface Lucien Lévy-Bruhl, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner.]
    Discussion de p. 289 s. intérêt.
  • [5]
    [F. Schelling _ex "Schelling, Friedrih Wilhelm Joseph von"_, 1856, « Einleitung in die Philosophie der Mythologie », vol. I, Sämmtliche Werke, 2te Abtheilung, Stuttgart et Augsburg, J. G. Cotta, cité par Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der Symbolischen, vol. 2, p. 8.]
  • [6]
    [Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der Symbolischen Formen, vol. 2 : Dritter Abschnitt, Kapitel III : « Kultus und Opfer », p. 270-285.]
  • [7]
    [Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der Symbolischen Formen, vol. 2 : Zweiter Abschnitt, Der Mythos als Anschauungsform Aufbau und Gliederung der räumlich-zeitliche Welt im mythischen Bewusstsein, Kapitel 1, § 1 et 2, p. 120-149.]
  • [8]
    [« In einem schlechten und treulosen Weibe wohnt, nach der Vorstellungsweise der vedischen Theologie, der ?gattentötende Körper? – in einem unfruchtbaren Weib der ?Körper (tanu) der Sohnlosigkeit? », cité par Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der symbolischen Formen, vol. 2, p. 72, n. 2 ; « Näheres hierüber bei Oldenberg », Religion des Veda, S. 478 ff.]
  • [9]
    [J. J. M. de Groot, 1892-1910, The Religious System of China, its Ancient Forms, Evolution, History and Present Aspect, Manners, Customs and Social Institutions connected therewith, Leyden, E. J. Brill. vol. I-III, Stud. der Bibl. Warburg, cité par Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der symbolischen Formen, vol. 2, p. 56, n. 1.]
  • [10]
    [« Der Mythos als Lebensform Entdeckung und Bestimmung der subjektiven Wirklichkeit im mythischen Bewusstsein » (Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der symbolischen Formen, vol. 2, p. 191-246).]
  • [11]
    [Die bisherigen Betrachtungen haben, gemäss der allgemeinen Aufgabe, die die « Philosophie der symbolishen Formen » sich stellt, den Mythos als eine Energie des Geistes darzustellen gesucht : als eine in sich geschlossene Form der Auffassung, die in aller Verschiedenheit des objektiven Vorstellungsmaterials sich behauptet (Cassirer _ex "Cassirer, Ernst"_, Philosophie der symbolischen Formen, vol. 2, p. 289).]
  • [12]
    [2 AP 4-1. D. 4]. [La préface de la 7e édition contient des passages de la 1re édition ; ceux-ci sont signalés dans l'ouvrage par les crochets.]
  • [13]
    [Cette phrase de Seignobos _ex "Seignobos, Charles"_ figure dans la préface de la 1re édition publiée en 1897, p. XI.]
  • [14]
    [2 AP 4-1. B. B 3. d. 1]. Pour la traduction anglaise de Tiersoziolgie, voir F. Alverdes _ex "Alverdes, Friedrich"_, 1927, The Social Life in the Animal World, Londres, Kegan Paul, Trench, Trubner & Co., « International Library of Psychology, Philosophy and Scientific Method », 216 p.]
  • [15]
    [F. Alverdes _ex "Alverdes, Friedrich"_, 1925, Tiersoziologie, Leipzig, C. L. Hirschfeld, chap. VII, « Zur Sozialbiologie des Menschen », p. 132-138.]
  • [16]
    [2 AP 4-1. B 3. c. 1.]
  • [17]
    [Dans la première série de L?Année sociologique, on trouve deux instances de Huntington _ex "Huntington, Ellsworth"_ : Henri Jeanmarie _ex "Jeanmarie, Henri"_, 1913, analyse de Ellsworth Huntington, Palestine and its Transformation, Londres/Boston, Constable/Houghton Mifflin, 1911, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 821-826 ; Notice bibliographique, 1913, Ellsworth Hungtington, 1910, « Problems in Exploration – Central Asia », The Geographical Journal, no4, avril, t. XXXV, p. 395-419, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 836. ]
  • [18]
    [E. Huntington _ex "Huntington, Ellsworth"_, 1924, The Character of Races as Influenced by Physical Environment, Natural Selection and Historical Development, New York, Londres, C. Scribner?s Sons, 393 p.]
  • [19]
    [H. Ten Kate est un anthropologue suisse qui vit à Genève et a participé à une enquête lancée par Huntington _ex "Huntington, Ellsworth"_ en 1913 sur la distribution de la population dans les différentes civilisations. Ten Kate a répondu à la lettre de Huntington en lui fournissant un tableau de données qui figure dans la publication ici analysée (cf. p. 160) ; il est intitulé « Distribution of some characteristics of highest civilization » (aucune source n?est citée). Pour les résultats de l'enquête de Huntington, ainsi que pour les noms des collaborateurs, se reporter à l'annexe de Civilization and Climate, « Contributions to the map of civilization », p. 297-314.]
  • [20]
    [Le lecteur se référera aux cartes portant sur la civilisation nord-américaine. La cote s?applique à la baie d?Hudson, au Canada et aux îles arctiques (Huntington _ex "Huntington, Ellsworth"_, Civilization and Climate, p. 264 sq.)]
  • [21]
    [Dr Scott Nearing _ex "Nearing, Scott"_, 1914, « The geographical distribution of american genius », Popular Science Monthly, 85, août, p. 189-199, cité par Huntington _ex "Huntington, Ellsworth"_, Civilization and Climat, p. 302.]
  • [22]
    [Cf. M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1925, analyse de Clark Wissler _ex "Wissler, Clark"_, 1923, Man _ex "Man, Edward Horace"_ and Culture, New York/Londres, Crowell, « Crowell's Social Science Series », George G. Harrap & Co., IX-371 p., in L?Année sociologique, nouv. série, t. I, p. 295-300, repris in Œuvres, II, p. 509-513 : « La théorie de la culture selon Wissler ».]
  • [23]
    [2 AP 4-1 B. [3. c.].]
  • [24]
    [Walter E. Roth _ex "Roth, Walter Edmund"_, 1915, « An inquiry into the animism and folklore of the Guiana Indians », Thirtieth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1908-1909, paru en 1915, Washington DC, Government Printing Office, p. 107-386, glossaire.]
  • [25]
    [Cf. chap. XXXV, « Births and childhood », p. 693-701.]
  • [26]
    [Cf. Frederik Paul Penard _ex "Penard, Frederik Paul"_ et Arthur Philip Penard _ex "Penard, Arthur Philip"_, 1907-1908, De Menschetende Aarbidders der Zonneslang, 3 vol., Paramaribo, H. B. Beyde.]
  • [27]
    [Cf. chap. XXXVII, « Recognition of time, season, number, distance », p. 715-720.]
  • [28]
    [Cf. chap. I, « Fire, stone, timber and primitive tools », p. 69-77 ; chap. XXXII « trade and Barter », p. 632-637.]
  • [29]
    [Cf. chap. XIX, « Hammocks », p. 381-399 (syn. hamaca, hamake, haemac).]
  • [30]
    [Cf. chap. IX, « Basketry and plattwork », p. 137-143 ; chap. XVIII, « Domestic implements and requisites », p. 273-377.]
  • [31]
    [Cf. chap. XVII, « Domestic implements and requisites », « § Claypots, pans, water vessels, etc. », p. 306.]
  • [32]
    [Cf. chap. VII, « Pottery », p. 130-136.]
  • [33]
    [Cf. chap. XXIV, « String figures, tricks, and puzzles », p. 500-550.]
  • [34]
    [Cf. chap. V, « Beads and beadwork », p. 119 sq. ; chap. XXI, « Body deformation, decoration, ornaments, clothes », p. 412-449.]
  • [35]
    [Cf. chap. XVI, « Narcotics and stimulants », p. 240-247.]
  • [36]
    [Il s?agit précisément de gravures et peintures sur pierre. Cf. chap. XXIX, « Travel overland. Rock engravings » (§ 780-781), p. 604-606 ; Rock Painting (§ 782), p. 606-607.]
  • [37]
    [2 AP 4-1. B. B 3. e. 3.]
  • [38]
    [Cf. chap. VIII, « The ?reproachful letter? dream », p. 117-136, in W. H. R. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, 1923, Conflict and Dream, préface, Grafton Elliot Smith _ex "Smith, Grafton Elliot"_, Londres, Kegan Paul, Trench, Trubner & Co., New York, Harcourt Brace & Co., « International Library of Psychology, Philosophy and Scientific Method », XI-195 p.]
  • [39]
    [L?article sur la parenté classificatoire est paru en annexe de Social Organisation ; il a été publié pour la première fois en 1907. Voir W. H. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, « On the origin of the classificatory system of relationships », in Thomas Northcote Whitridge (dir.), avec Henry Balfour _ex "Balfour, Henri"_, Alfred Ernest Crawley _ex "Crawley, Alfred Ernest"_, et al., Anthropological Essays presented to E. B. Tylor _ex "Tylor, Edward Burnett"_ in honour of his 75th Birthday, Oct. 2, 1907, notice par Andrew Lang _ex "Lang, Andrew"_, Oxford, Clarendon Press, p. 307-323.]
  • [40]
    [W. J. Perry _ex "Perry, William James"_, 1923, The Children of the Sun. A Study in the Early History of Civilization, Londres, Methuen, XV-551 p., 16 cartes.]
  • [41]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1925, analyse de Grafton Elliot Smith _ex "Smith, Grafton Elliot"_, 1924, Elephants and Ethnologists, Londres, Kegan Paul & Co., VIII-135 p. ; W. J. Perry _ex "Perry, William James"_, 1923, The Children of the Sun. An Enquiry into the early History of Civilization, Londres, Methuen, XIV-551 p. ; W. J. Perry, 1924, The Growth of Civilization, Londres, Methuen, VI-224 p., in L?Année sociologique, nouv. série, t. I, p. 330-342, repris in Œuvres, II, p. 513-523 : « La théorie de la diffusion unicentrique de la civilisation ».]
  • [42]
    [W. H. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, 1914, History of the Melanesian Society, 2 vol., Cambridge, Cambridge University Press.]
  • [43]
    [Rivers _ex "Rivers, William Halse"_ se réfère à la structure sociale et au contexte social des tribus élémentaires et sauvages (rude savage tribe, p. 3), ainsi qu?à l'organisation sociale des peuples de culture élémentaire (rude, p. 5).]
  • [44]
    [W. H. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, 1914, Kinship and Social Organisation, Londres, Constable & Co., no 36, Series of monographs by writers connected with the London School of Economics, VII-96 p.]
  • [45]
    [W. H. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, 1907, « On the origin of the classificatory system of relationships », in Thomas Northcote Whitridge (dir.), avec Henry Balfour _ex "Balfour, Henri"_, Alfred Ernest Crawley _ex "Crawley, Alfred Ernest"_, et al., Anthropological Essays presented to E. B. Tylor _ex "Tylor, Edward Burnett"_ in honour of his 75th Birthday, Oct. 2, 1907, notice par Andrew Lang _ex "Lang, Andrew"_, Oxford, Clarendon Press, p. 307-323.]
  • [46]
    À propos de la notion de clan River[s]. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_ a été l'inventeur d?une appellation nouvelle de ce qu?on appelle très généralement clan, qu?il propose d?appeler sept ou sib. (p. 29). Cette appellation est en ce moment fort usitée, surtout en Amérique, à la suite de succès du manuel de M. Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_ Primitive Society. Nous saisissons cette occasion pour protester. Nous ne tenons pas plus au mot clan qu?à aucun autre. Mais le c[h]oix fait a été particulièrement malheureux. S?il est un mot dont le sens est parfaitement clair en histoire du droit, c?est bien celui de sib, sippe (geom.). Il signifie avec précision la grande famille (d?agnats ou de cognats) non pas le clan ; celui-ci était à peu près disparu de Germanie, ou confondu avec la tribu, Stamm. Dans les droits anglo-saxons-britanniques, la distinction s?était justement conservée, du « clan », et du « sib » « joint family » irlandaise [i.e. ? ou de ?] servir de ce mot sib. C?est gâcher un terme qui désigne nettement un autre groupement que le clan ; c?est aussi montrer une ignorance caractéristique du droit auquel on l'emprunte, et même une certaine absence de sens juridique. [Note de Mauss _ex "Mauss, Marcel"_.]
  • [47]
    [Sisi ? / Siri ?]
  • [48]
    [Cf. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, Social Organization, App. III : « The dual organization », p. 205 sq.]
  • [49]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1925, analyse de Grafton Elliot Smith _ex "Smith, Grafton Elliot"_, 1924, Elephants and Ethnologists, Londres, Kegan Paul & Co., VIII-135 p. ; W. J. Perry _ex "Perry, William James"_, 1923, The Children of the Sun. An Enquiry into the early History of Civilization, Londres, Methuen, XIV-551 p. ; W. J. Perry, 1924, The Growth of Civilization, Londres, Methuen, VI-224 p., in L?Année sociologique, nouvelle série I, p. 330-342, repris in Œuvres, II, p. 513-523 : « La théorie de la diffusion unicentrique de la civilisation ».]
  • [50]
    [Vosa signifie ici « tribu » dont vosa turanga et vosa dhauravou.]
  • [51]
    [A. M. Hocart _ex "Hocart, Arthur Maurice"_, 1915, « The dual organization in Fiji », in Man _ex "Man, Edward Horace"_, vol. XV, no 3, p. 5, cité par Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, Social Organisation, n. 1, p. 30.]
  • [52]
    [A. R. Radcliffe-Brown, 1913, « Three Tribes of Western Australia », The Journal of the Royal Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, vol. XLIII, p. 143.]
  • [53]
    [2 AP 4-1. B B. 3. e. 1.]
  • [54]
    [John Arnott MacCulloch _ex "MacCulloch, John Arnott"_, 1918, « Celtic Mythology » in The Mythology of all Races, vol. III, Part I, avec « Slavic Mythology » de Jan Máchal _ex "Máchal, Jan"_ et « Baltic Mythology » de Louis Herbert Gray _ex "Gray, Louis Herbert"_, New York, Copper Square Publishers, 398 p., bibliogr.]
  • [55]
    [Nous n?avons pas de piste sur cette auteur. À titre d?hypothèse, il pourrait être Daniel Garrison_ex "Garrison*"_ Brinton _ex "Brinton, Daniel Garrison"_ dont l'œuvre est connue de Mauss _ex "Mauss, Marcel"_. Cf. M. Mauss, 1899, analyse de D. G. Brinton, 1897, Religion of Primitive Peoples, American Lectures on the History of Religions, ser. 2, New York, Londres, G. P. Putnam?s Sons, XIV-264 p., in L?Année sociologique, vol. II, p. 197-201, repris in Œuvres, I, p. 116-120 : « La religion des peuples primitifs selon Brinton ». Mauss cite Garrison Brinton également dans ses cours d?ethnographie (1926-1939), « 8. Phénomènes moraux », Manuel d?ethnographie, avertissement et préface Denise Paulme _ex "Paulme, Denise"_, Paris, Payot, 1967, p. 202.]
  • [56]
    [§ The procedures at the Asklepieia, in Jayne _ex "Jayne, Walter Addison"_, The Healing Gods of Ancient Civilizations, p. 276-278. Il s?agit d?une discussion sur les cures imputées d?une ferveur religieuse [religious fervor], impliquant les sacrifices animaux, chants, etc. [oblations to the gods offerings, cultic usage].]
  • [57]
    [2 AP 4-1. B. B 3. e. 1.]
  • [58]
    [Cf. chap. 1, « About husbands and wives », p. 17 sq. Sur la p. 28 est décrite une histoire d?accusation d?adultère entre un homme laid, sa femme qui est belle et la visite de celle-ci avec un voisin.]
  • [59]
    [Folk-Lore, a Quarterly Review of Myth, Tradition, Institution and Custom, organe de la Folk-Lore Society (incorporating The Archaelogical Review and The Folk-Lore Journal), Londres, A. R. Wright (dir.), 1890.]
  • [60]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 1.]
  • [61]
    [2 AP 4-1. D. 1 C.]
  • [62]
    [2 AP 4-1. D. 1.]. [À la séance du 15 décembre 1920 (Assemblée générale), Henri Hubert _ex "Hubert, Henri"_ et Paul Rivet proposent Henri Martin _ex "Martin, Henri"_ comme membre titulaire de l'Institut français d?anthropologie. H. Martin obtient sa nomination à la séance du 19 janvier 1921. Voir compte rendu sommaire des séances de l'Institut français d?anthropologie, extrait de L?Anthropologie, t. XXX, 1920, p. 587, et celui du t. XXXI, 1921, p. 115. Voir aussi la séance du 18 mai 1921, communication d?H. Martin, 1921, Sur la répartition des ossements humains dans le gisement de La Quina (Charente), avec observations de M. l'abbé Breuil _ex "Breuil, Abbé"_, in L?Anthropologie, t. XXXI, p. 340-342.]
  • [63]
    [2 AP 4-1. D. 1. b.]
  • [64]
    [O. Montelius _ex "Montelius, Oscar"_, 1903-1923, Die ältere Kulturperioden im Orient und in Europa, 2 vol. Comprend : I : Die Methode (1903) ; II : Babylonien, Elam, Assyrien (1916-1923), Stockholm, Selbstverlag des Verfassers (K. L. Beckmans), 445 p.]
  • [65]
    [2 AP 1-7. D. 1. e.]
  • [66]
    [2 AP 4-1. D. 1. f.]
  • [67]
    [La diaspora juive dans l'ouvrage se réfère aux tribus Falacha de la province de Sémèn.]
  • [68]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 2.] [L?ouvrage de Selbie _ex "Selbie, William Bootbbie"_ est tiré de deux cours donnés à Oxford sous les auspices de la Wilde Foundation, cours destinés aux étudiants de théologie.]
  • [69]
    [H. Delacroix _ex "Delacroix, Henri Joachim"_, 1922, La Religion et la foi, Alcan, XII-463 p., in-8°.]
  • [70]
    [R. R. Marett _ex "Marett, Robert Ranulphus"_, 1914, The Threshold of Religion, 2e éd., Londres, Methuen, XXXII-224 p.]
  • [71]
    [En outre le culte des ancêtres, les Lango d?Ouganda ont le culte de Jok, un grand dieu (high God) dont la présence se sent partout ; c?est la déité de l'air, le créateur du ciel et de la terre et la source de vie de tous.]
  • [72]
    [Les deux chapitres précédents portent notamment sur la conversion (illumination spirituelle, la suggestion, la volonté de convertir) et la psychologie des enfants et des adolescents.]
  • [73]
    [2 AP 4-1. B. B 3. b. 1.]
  • [74]
    [P.-D. Chantepie de La Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, 1904, Manuel d?histoire des religions, traduction sur la 2e édition allemande, sous la dir. de Henri Hubert _ex "Hubert, Henri"_ et Isidore Lévy _ex "Lévy, Isidore"_, introd. H. Hubert, p. V-XLVIII, Paris, A. Colin, in-8°, LIII-714 p. Ont participé à la traduction : Charles Fossey _ex "Fossey, Charles"_, Robert Gauthiot _ex "Gauthiot, Robert"_, Henri Hubert, Paul Bettelheim _ex "Bettelheim, Paul"_, P. Bruet_ex "Bruet, P.*"_, I. Lévy, Alexandre Moret _ex "Moret, Alexandre"_, L. Lazard.]
  • [75]
    [« Zur Geschichte der Religionsgeschichte », in Chantepie de la Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, Lehrbuch des Religionsgeschichte, vol. 1, p. 1-22.]
  • [76]
    S/Tolem [ajouté en margé : « Sous-totem » ?]
  • [77]
    [Semitische Völker in Vorderaisien (le Proche-Orient).]
  • [78]
    [Le chapitre de C. Snouck-Hurgronje est intitulé : « Der Islam. 1o Die Araber vor dem Islam. Muhammad. 2o Die politische Entwicklung. Das Kalifat. Spaltungen. 3o Die Redaktion des Quarans. 4o Das Gesetz. 5o Die Dogmatik. 6o Die Mystik », in Chantepie de la Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, Lehrbuch des Religionsgeschichte, vol. I, p. 648-756.]
  • [79]
    [« Prädeistische Vorstellungen und Riten », in Chantepie de La Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, Lehrbuch des Religionsgeschichte, vol. II, p. 281-296.]
  • [80]
    [Le chapitre de Brückner _ex "Brückner, Alexander"_ « Slaven und Litauer », comporte 18 sections. Cf. Chantepie de La Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, Lehrbuch des Religionsgeschichte, vol. II, p. 506-539.]
  • [81]
    [Cf. Maurice Cahen _ex "Cahen, Maurice"_, 1921, « Le mot ?Dieu? en vieux scandinave », dans Études sur le vocabulaire du vieux scandinave, La libation, cité par Chantepie de La Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, in Lehrbuch des Religionsgeschichte ; il s?agit de la thèse complémentaire pour le doctorat de M. Cahen, présentée en 1921 à la Faculté des lettres de Paris et publiée chez Champion la même année, coll. « Linguistique publiée par la Société de linguistique de Paris X ». Les « Runes » renvoie à un art divinatoire des peuples nordiques.]
  • [82]
    [J. A. MacCulloch _ex "MacCulloch, John Arnott"_, 1927, R. L. Stevenson_ex "Stevenson, Thomas Henry Craig,"_ and the Bridge of Allan, with other Stevenson Essays, Glasgow, J. Smith & Son, 95 p.]
  • [83]
    [E. Lehmann _ex "Lehmann, Eduard"_, « Erscheinungs- und Ideenwelt der Religion. § 1 : Das religiöse Leben ; § 2 : Natur und Geister ; § 3 : Der Mensch ; § 4 : Götter und Gottheit ; § 5 : Der Kultus ; § 6 : Mythologie und Theologie ; § 7 : Weltanschauung und Menschenlos ; § 8 : Die Frömmigkeit », in Chantepie de La Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, Lehrbuch des Religionsgeschichte, vol. 1, p. 23-28.]
  • [84]
    [E. Andermann, « Die Religion der Naturvölker », in Chantepie de La Saussaye _ex "Chantepie de la Saussaye, Pierre Daniel"_, Lehrbuch des Religionsgeschichte, vol. I, p. 131 sq.]
  • [85]
    Des mots en marge ill. [ajouté en marge.]
  • [86]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 3.]
  • [87]
    [R. H. Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_, 1920, Primitive Society, New York, Boni and Liveright, 463 p.]
  • [88]
    [Cf. W. W. Gill _ex "Gill, Révérend William Wyatt"_, 1876, Myths and Songs from the South Pacific, Londres, Henry S. King, 328 p., index.]
  • [89]
    [Dans le sténographe on lit « Mangera ».]
  • [90]
    [1913, L?Année sociologique, vol. XII : A. Le système totémique, p. 91-104 ; B. Systèmes religieux à totémisme évolué, p. 104-128 ; C. Systèmes religieux tribaux, p. 128-160.]
  • [91]
    [R. Hertz, 1909, « La prééminence de la main droite. Étude sur la polarité religieuse », Revue philosophique, 34e année, t. 68, juillet-décembre., p. 553-580, repris in Sociologie religieuse et folklore (1928), avant-propos Marcel Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, préface Georges Balandier _ex "Balandier, Georges"_, Paris, PUF, « Bibliothèque de sociologie contemporaine », 1970, p. 84-109.]
  • [92]
    [Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_, Primitive Religion, p. 163.]
  • [93]
    [Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_ affirme ici l'inexistence du totémisme chez les Semang (péninsule malaise), chez les habitants des îles Adaman (Inde), enfin chez la tribu Paviotro du Nevada (États-Unis) (R. Lowie, Primitive Religion, p. 113-114). Les termes de « Boy » ou de « Demara » ne se trouvent pas dans l'étude de Lowie ; par ailleurs, aucune référence n?y est faite aux Damara : peuple vivant dans les vastes régions du centre et du sud de la Namibie où ils sont concentrés dans les montagnes.]
  • [94]
    [Discussion sur Freud _ex "Freud, Sigmund"_, in R. Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_, Primitive Religion, p. 156.]
  • [95]
    [Grace Helen Kent _ex "Kent, Grace Helen"_ et Aaron Joshua Rosanoff _ex "Rosanoff, Aaron Joshua"_, 1910, A Study of Association in Insanity, extraits du The American Journal of Insanity, vol. LXVII, nos 1 et 2, Balitmore, Lord Baltimore Press, 142 p., cités par R. Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_, Primitive Religion, p. 335.]
  • [96]
    [2 AP 4-1. B. 3. e. 3.]
  • [97]
    [R. E. Enthoven _ex "Enthoven, Reginald Edward"_, 1920-1922, Tribes and Castes of Bombay, 3 vol., Bombay, Government Central Press.]
  • [98]
    [W. Crooke _ex "Crooke, William"_, 1896, Popular Religion and Folk-Lore of Northern India, 2 vol., Westminster, Archibald Constable, cité par Enthoven _ex "Enthoven, Reginald Edward"_, The Folklore of Bombay, p. 12.]
  • [99]
    [Sir James _ex "James, William"_ Macnabb Campbell _ex "Campbell, Sir James Macnabb"_ semble diriger le Gazetteer of the Bombay Presidency, 1877-1901, Bombay, Government Central Press, 27 vol. Les sources publiées dans cette revue ont aidé à mener à bien une enquête ethnographique officielle sur les Provinces : Bombay, Madras, Bengal, la province unie [United-Provinces], Pendjab, Birmanie, la province centrale, Assam. Cf. Enthoven _ex "Enthoven, Reginald Edward"_, Tribes and Castes of Bombay, vol. 1, Appendix : Ethnographic questions, p. 377-380.]
  • [100]
    [Cf. Les cérémonies spéciales en honneur de Shiva (Rudra) : Laghurudra, Maharudra, Enthoven _ex "Enthoven, Reginald Edward"_, The Folklore of Bombay, p. 337.]
  • [101]
    [Enthoven _ex "Enthoven, Reginald Edward"_, The Folklore of Bombay, chap. I, « Worship of natural objects. The sun ». p. 29-40.]
  • [102]
    [Cf. Enthoven _ex "Enthoven, Reginald Edward"_, The Folklore of Bombay, chap. VI, « Totemism and animal worship » sur les castes et tribus de Deccan, Konkan, Karnatak, p. 208 sq..]
  • [103]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 3.]
  • [104]
    [« The Nicobarese are a Mongolian people, whose language has agglutinative affinities with the tongues of the Talaings of Burma and the Cambodians among civilized peoples, and of a number of the aboriginal tribes found in Malaya and Sumatra » G. Whitehead _ex "Whitehead, George"_, In the Nicobar Islands, p. 52).]
  • [105]
    [L?organisation sociale se fonde essentiellement sur le « Village Hall » (une grande maison sur la plage appartenant à la communauté), le Tu-het (un groupe de maisons), et l'El-panem (une maison privée). L?auteur mentionne aussi l'existence des talika (huttes).]
  • [106]
    [« Scare devils » : « These consist of bamboos, which are daubed with soot and red paint, and to which are tied leaves or bits of cloth ; and very immature cocoa-nuts or sour fruits may be struck on them » (cité par Whitehead _ex "Whitehead, George"_, In the Nicobar Islands, p. 128, fig.)]
  • [107]
    [« Vocabulaire inédit » ? « The following folk-tales communicated by Car Nicobarese children are of special value to the folk-lore student. In several cases, they follow a track widely different from the usual Legends, and where they deal with well-worn stories they present them in a hitherto unknown and varied garb. The tales, so Mr. Whitehead _ex "Whitehead, George"_ informs me, are all familar to the Car Nicobarese, and most of the matter has been taken from the school children?s essays. Where necessary, footnotes have been added by Mr. Whitehead or myself to elucidate the text.), note de Richard C. Temple_ex "Temple, Sir Richard C."_, R. C. T. » (Whitehead, In the Nicobar Islands, p. 239).]
  • [108]
    [Whitehead _ex "Whitehead, George"_, In the Nicobar Islands, appendix A : « Folk-tales of the Car Nicobares », réunis par le P. G. Whitehead, avec une introduction de Sir R. C. Temple_ex "Temple, Sir Richard C."_, et notes par Temple, p. 239-267 ; appendix B : Translation from the car nicobarese of « A song in Praise of a Pig » sung to a dance at the Ossuary Feast (Ka-na-an Ha-un), p. 268-269.]
  • [109]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 2.]
  • [110]
    [Cf. XII. Tabellarische Zusammenstellung, in Vatter _ex "Vatter, Ernst"_, Der australische Totemismus, p. 152-153. Comprend : I. Wesensart des Totem. II. Verhältnis von Mensch und Totem. III. Tabu. IV. Individual- und Geschlechtstotemismus, Subtotems. V. Soziologie des Totemismus.]
  • [111]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1901, analyse de Frank Byron, 1899, « The place of totemism in the evolution of religion », Folk-Lore, vol. X, no IV, décembre, p. 369-383, in L?Année sociologique, vol. IV, p. 163-164.]
  • [112]
    [É. Durkheim _ex "Durkheim :[Durckheim], Émile"_, 1902, mémoire original, « Sur le totémisme », in L?Année sociologique, vol. V, p. 82-121, repris in Journal sociologique, PUF, 1969, p. 315-352.]
  • [113]
    [Sir George Grey _ex "Grey, Sir George"_, 1841, Journal of Two Expeditions of Discovery in Northwest and Western Australia during the years 1837, 1838 and 1839, Londres, T. & W. Boone, 3 vol. Du même auteur, 1840, A Vocabulary of the Dialects of Southwestern Australia, Londres, T. & W. Boon, XXII-140 p.]
  • [114]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 2.]
  • [115]
    [Chap. XII, « Chief Edenshaw », p. 165-176. Le deuxième fils de Edenshaw s?appelle Henry Edenshaw_ex "Edenshaw, Henry (fils)"_ ; il est devenu un homme d?affaires très connu.]
  • [116]
    [Mauss _ex "Mauss, Marcel"_ se réfère aux Tanu Haade étudiés par Harrison _ex "Harrison, Charles"_ : « The people of this clan were very fond of bathing in the sea, and were called ?the people who live under the salt water? » (Ch. Harrison, Ancient Warriors, p. 50 sq.).]
  • [117]
    [Cf. chap. VIII, The Sa-ag-ga or Shaman ?, p. 98 sq.]
  • [118]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1925, « Essai sur le don. Forme et raison de l'échange dans les sociétés archaïques », in L?Année sociologique, nouv. série, t. 1, p. 30-186, repris in Sociologie et anthropology, p. 143-279.]
  • [119]
    [2 AP 4-1. D. 5.]
  • [120]
    [S. Freud _ex "Freud, Sigmund"_, 1913, Totem und Tabu. Einige Übereinstimmungen im Seelenleben der Wilden und der Neurotiker, Leipzig, Hugo Heller, p. 70-71.]
  • [121]
    [S. Freud _ex "Freud, Sigmund"_, 1913, Totem und Tabu, p. 84-85.]
  • [122]
    « Das Spiegelbild der Innenwelt muss im animistischen Zeitalter jenes andere Weltbild, das wir zu erkennen glauben, unsichtbar machen » (Totem und Tabu, dritte univeränderte Auflage, p. 114). [Note de D. Essertier _ex "Essertier, Daniel"_. C?est lui qui souligne.]
  • [123]
    [2 AP 4-1. B. 3. c.1 .]
  • [124]
    [Cf. Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, II. Band, III. Teil, 2, Die Kopfjaden, p. 48 sq.]
  • [125]
    [F. Gräbner _ex "Gräbner, Fritz"_, 1905, « Kulturkreise und Kulturschichten in Ozeanien », Zeitschrift für Ethnologie. Organ der Berliner Gesellschaft für Anthropologie, Ethnologie und Urgeschichte, 36, Heft 1, p. 28-53 ; P. W. Schmidt _ex "Schmidt, Père Wilhelm"_, 1909, « Die Soziologische und religiös-ethische Gruppierung der australischen Stämme », Zeitschrift für Ethnologie. Organ der Berliner Gesellschaft für Anthropologie, Ethnologie und Urgeschichte, 41, p. 328-380 ; « Diskussion », ibid., p. 84-90, cités par Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, II. Band, III. Teils, 7, p. 212, n. 1.]
  • [126]
    [Cf. Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, II. Band, III. Teils, 5, Tod und Begräbnis, p. 120 sq.]
  • [127]
    [Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, I. Band, II. Teils, 4, a) Mythenkreis der Geb-zé : Die Majo-Mythen : Wie Jawi durch Todeszauber (Kambara) getötet wurde, p. 67-69 ; Wie die Kokospalme entstand, p. 69-71.]
  • [128]
    [É. Durkheim _ex "Durkheim :[Durckheim], Émile"_ et M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1903, mémoire original, « De quelques formes primitives de classification. Contribution à l'étude des représentations collectives », in L?Année sociologique, vol. VI, p. 1-72, repris in É. Durkheim, Journal sociologique, p. 395-461, et dans M. Mauss, Œuvres, II, p. 13-89].
  • [129]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1913, analyse de C. G. Seligmann, 1910, The Melanesians of British New Guinea, Cambridge, Cambridge University Press, et Richard Neuhauss _ex "Neuhauss, Richard"_, 1911, Deutsch Neu-Guinea, Berlin, Dietrich Reimer, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 116-124. Du même auteur, 1913, analyse de C. G. Seligmann, 1910, Melanesians of British New Guinea, Cambridge, Cambridge University Press ; Richard Neuhauss, 1911, Deutsch Neu-Guinea, 3 vol., Berlin, Dietrich Reimer ; Robert Wood Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, 1912, The Mafulu. A Mountain People of British New Guinea, Cambridge, Cambridge University Press, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 371-374, repris in Œuvres, III, p. 33-34 et 92-95 : « Organisations tribales mélanésiennes ». Voir également É. Durkheim _ex "Durkheim :[Durckheim], Émile"_, 1910, notice bibliographique collective, le P. J. de Marzan_ex "Marzan, Père J. de*"_, 1907, « Le Totémisme aux îles Fiji », Anthropos, t. II, p. 400-405 ; W. H. R. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, « Totemism in Fiji », 1908, Man _ex "Man, Edward Horace"_, no 75, p. 133-136, et C. G. Seligmann, 1908, « Note on the Totemism in New Guinea with reference to ?Man? nos 75 et 84 », Man, VIII, no 89, p. 162-163, in L?Année sociologique, vol. XI, p. 105-106.]
  • [130]
    [Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, I. Band, II. Teils, 2, Die Dema-nakari, p. 20-24.]
  • [131]
    [Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, II. Band, III. Tiels, 3, Die Zauberei, p. 63-98.]
  • [132]
    [2 AP 4-1. B. 3. e. 1.]
  • [133]
    [W. H. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, 1923, Psychology and Politics, and other essays. With an appreciation by Charles Samuel Myers _ex "Myers, Charles Samuel"_, London, Kegan Paul, Trench, Trubner & Co., New York, Harcourt Brace & Co., « International Library of Psychology, Philosophy and Scientific Method », VII-180 p.]
  • [134]
    [« On the hau suru (?exalted stone?) sacrifices were burnt, and on this were sometimes round stones, sometimes stone carved heads, sometimes small stone statues, into which the dead man?s double (adaro) went, and in which it resided. [...] Sometimes these stones, stone statues, and stone figures of birds and fish were near the dolmen on the heo itself » (Fox_ex "Fox, Charles E."_, The Threshold of the Pacific, p. 218).]
  • [135]
    [Cf. Fox_ex "Fox, Charles E."_, The Threshold of the Pacific, chap. XIX, « Beliefs about animals », chap. XX, « A cult of trees », p. 265-280.]
  • [136]
    [W. H. R. Rivers _ex "Rivers, William Halse"_, 1922, Presidential Address, « The unity of anthropology », Journal of the Royal Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, vol. LII, p. 12-25. Publication à titre posthume (l'auteur est mort le 4 juin 1922).]
  • [137]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 1.]
  • [138]
    [Le monothéisme se définit par « the purposive functioning of an inherent type of thought and emotion » (Radin _ex "Radin, Paul"_, Monotheism among Primitive Peoples, p. 67).]
  • [139]
    [J. R. Walker_ex "Walker, James R."_, 1917, « The sun dance and other ceremonies of the Oglala division of the Teton Dakota », in Anthropological Papers of the American Museum of Natural History, vol. XVI (1921), part II, p. 53-221, en particulier, p. 57, 79 et 152-153.]
  • [140]
    [P. Radin _ex "Radin, Paul"_, 1924, Monotheism among Primitive Peoples, p. 48-49. Cf. P. Radin, 1920, The Autobiography of a Winnebago Indian, Berkeley, University of California Publications in American Archaeology and Ethnology, vol. XVI, no 7, 15 avril, p. 381-473 ; P. Radin, 1914, « The Peyote culte of the Winnebago Indians », in Journal of Religious Psychology, 7, p. 1-22).]
  • [141]
    [K. T. Preuss _ex "Preuss, Konrad Theodor"_, 1921, Religion und Mythologie der Uitoto, Textaufnahmen und Beobachtungen bei einem Indianerstamm in Kolumbien, Südamerika, Göttingen, Vandenhoeck and Ruprecht (Druck von Hubert _ex "Hubert, Henri"_), vol. I, Einführung und Texte (Erste Hälfte), p. 166 sq., cité par Radin _ex "Radin, Paul"_, Monotheism among Primitive Peoples, p. 32.]
  • [142]
    [2 AP 4. B. 1-B. 3. b. 1.]
  • [143]
    [W. C. Farabee _ex "Farabee, William Curtis"_, 1922, Indian Tribes of Eastern Peru, introduction Louis John de Milhau _ex "Milhau, Louis John de"_, Cambridge, The Museum, « Papers of the Peabody Museum of American Archeaology and Ethnology, Harvard University, vol. X », XV-196 p., pl., carte, bibliogr., index. La première partie de cet ouvrage est consacrée aux Arawaks (Arawakan Stock, p. 1-78) et comporte des études sur plusieurs de ses tribus : Macheyenga*, Campa*, Piro* et Mashco*. Farabee étudie d?autres souches dans les chapitres suivants : Pano, Jivaro, Witoto*, Miranha* et Tupi.]
  • [144]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1925, analyse de Theodore Koch-Grünberg, 1917, Vom Roroima zum Orinocco (Ergebnisse einer Reise in Nordbrasilien und Venezuela, etc.), Berlin, D. Reimer, vol. 1, Schilderung der Reise, X-406 p., in-8° ; vol. II et IV (non parvenus) ; vol. III, 1923, Ethnographie, XII-446 p., in-8o (avec cartes et planches) ; vol. V, 1914, Typen Atlas, 28, p. 180, pl. in-8°. Du même auteur, 1923, Zwei Jahre bei den Indianern Nordwest-Brasiliens, Stuttgart, Strecker und Schröder, XII-416 p., in-8°, in L?Année sociologique, nouv. série, t. I, p. 420-423.]
  • [145]
    [Cf. Farabee _ex "Farabee, William Curtis"_, « Medecine men », in The Central Caribs, p. 72-76, en particulier, § The Kenaima, p. 74-76.]
  • [146]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 1.]
  • [147]
    [« Nê » : « Un génie d?essence supérieure qui n?a rien de commun avec la nature humaine. Il procure aux hommes aussi bien les bonnes que les mauvaises aventures », cité par Roux _ex "Roux, Henri"_, « Deux tribus de la région de Phongsaly », p. 428-430.]
  • [148]
    [2 AP 4-1. D. 1] [« Système religieux ».]
  • [149]
    [« Ogdoade » signifie un groupe de huit choses ou de huit personnes. Dans le gnosticisme, on trouve l' « ogdoade valentinienne », ogdoade composée successivement de l'abîme et la sigé [le silence], l'intellect et la vérité, le verbe et la vie, l'homme idéal et l'Église. Paul Émile Littré _ex "Littré, Émile"_, Dictionnaire de la langue française, 1880, Chicago, Encylopædia Britannica, 1982, p. 4265.]
  • [150]
    [Voir le tiré à part de H. Hubert _ex "Hubert, Henri"_, 1920, communication sur La numération sexagésimale en Europe à l'âge du bronze, extrait du procès-verbal de la séance du 16 juin 1920, sous la présidence de M. Marcellin Boule _ex "Boule, Marcellin"_, in Comptes rendus sommaires des séances de l'Institut français d?anthropologie, publiés sous la rubrique de « Variétés » comme extraits de la revue L?Anthropologie, t. XXX, p. 578-580.]
  • [151]
    [Il peut s?agir ici du célèbre cheval solaire de Trundholm.]
  • [152]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 1.]
  • [153]
    [2 AP 4. 1. n.]. [Metzger _ex "Metzger, Émile"_ cite R. Hertz, 1907, mémoire original, « Contribution à une étude sur la représentation collective de la mort », in L?Année sociologique, vol. X, p. 48-137, repris in R. Hertz, 1928, Mélanges de sociologie religieuse et folklore, avant-propos M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, introduction Alice Hertz, Paris, Alcan, Bibliothèque de philosophie contemporaine, « Travaux de L?Année sociologique », nouvelle édition intitulée, Sociologie religieuse et folklore, préface Georges Balandier _ex "Balandier, Georges"_, Paris, PUF, « Bibliothèque de sociologie contemporaine », 1970, p. 1-83. Pour Metzger, la crainte que les morts apparaissent aux vivants avec des intentions hostiles explique les cérémonies funéraires, le culte des morts et des ancêtres, comme le montrent les travaux récents de l'ethnographie et de la sociologie tels que celui de Hertz (Metzger, « La mutilation des morts », p. 258).]
  • [154]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 2.]
  • [155]
    [Róheim _ex "Róheim, Géza"_, « The pointing bone », « Fig. 1. Sketch map showing distribution of customs connected with the pointing bone in Australia », p. 112 sq.]
  • [156]
    [R. Hertz, 1907, « Contribution à une étude sur la représentation collective de la mort », in L?Année sociologique, vol. X, p. 48-137, repris in Sociologie religieuse et folklore, p. 1-83.]
  • [157]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 2. Sir J. G. Frazer, 1924, The Belief in Immortality and the Worship of the Dead, 3 vol., vol. I : The Belief of the Aborigines of Australia, The Torres Straits Islands, New Guinea and Melanesia, « The Gifford Lectures », conférences données à l'University of St. Andrews en hiver 1911 et 1912 ; la conférence intitulée « The Fear and Worship of the Dead » constitue 12 conférences en 1911 tenues à Trinity, College, Cambridge, répétées et mises à jour pour le cours à St. Andrews ; vol. II : The Belief among the Polynesians, le chapitre premier forme deux conférences données à Royal Institution en 1916, les autres chapitres ont été préparés pour les cours à Trinity College, Cambridge en 1921 et 1922, revues et augmentées ; vol. III : The Belief among the Micronesians, conférences faites à Trinity College, Cambridge, semestre de Lent, 1924, revues et augmentées.]
  • [158]
    [Sir. J. G. Frazer, 1888, « Taboo », in The Encyclopaedia Britannica. A Dictionary of Arts, Sciences, and General Literature, Thomas Spencer _ex "Spencer, Sir Walter Baldwin"_ Baynes _ex "Baynes, Thomas Spencer"_ et William Robertson Smith _ex "Smith, William Robertson"_ (dir.), 9e éd., Edinburgh, Adam and Charles Black, t. XXIII, p. 15-18, et « Totemism », ibid., t. XXXIII, p. 467-476.]
  • [159]
    [Sir J. G. Frazer, 1910, Totemism and Exogamy. A Treatise on Certain Early Forms of Superstition and Society, Londres, Macmillan, 4 vol., cartes, index.]
  • [160]
    [Le volume III de The Belief in Immortality présente le mythe d?un homme qui se marie avec un poisson et celui de la fille appelée Kwap qui est la prétendue créatrice des îles Palao, p. 264 sq. Le lecteur se reportera aussi au volume I, « Old women in myths of origins », p. 64.]
  • [161]
    [Cf. Frazer, The Belief in Immortality, vol. II, chap. VII, « The belief in immortality among the Hawaiians », p. 375-431.]
  • [162]
    [Cf. Frazer, The Belief in Immortality, vol. II, chap. I, « The belief in immortality among the Maoris », p. 1-51, § 4, « The beliefs of the Maoris concerning the Souls of the living », p. 19-37.]
  • [163]
    [Charles Le Gobien, 1700, Histoire des isles Marianes, Paris, N. Pepie, cité par Frazer, The Belief in Immortality, vol. III, p. 269, n. 1 ; voir aussi : « Discussion », § 3, The ancient inhabitants and their mode of life, ibid., p. 369-281. Frazer cite aussi Louis-Claude Desaulces de Freycinet _ex "Freycinet, Louis-Claude Desaulces de"_, 1829, Voyage autour du monde. Historique, Paris, Pillet aîné.]
  • [164]
    [Cf. Frazer, The Belief in Immortality, vol. II, chap. III, « The belief in immortality among the Samoans », p. 148-218.]
  • [165]
    [Se reporter à notre bibliographie où sont recensés les titres d?Elsdon Best _ex "Best, Elsdon"_ (1898-1914) cités par Frazer, in The Belief in Immortality, vol. II, § 3, The Beliefs of the Maoris concerning the Souls of the living, p. 10-19, et § 4, The beliefs of the Maoris concerning the Souls of the dead, p. 19-37.]
  • [166]
    [La phrase en gras peut être placée après « Maoris ».
  • [167]
    [Frazer, The Belief in Immortality, vol. III, p. 216.]
  • [168]
    [Nous n?avons pas trouvé trace d?une publication concernant un quatrième volume.]
  • [169]
    [2 AP 4. D. 1. 0.]. « Magie ».
  • [170]
    [H. Hubert _ex "Hubert, Henri"_, 1904, « Magia », in Ch. Daremberg _ex "Daremberg, Charles"_ et Ed. Saglio _ex "Saglio, Edmond"_ (dir.), 1873-1919, Dictionnaire des Antiquités grecques et romaines d?après les textes et les monuments, Paris, Hachette, vol. III, p. 1494-1521.]
  • [171]
    [Adj. manthique, nf. mantique : gr. mantikos : « divination » ; pratiques divinatoires, Étude sémiologique des mantiques. Hopfer écrit : « Mantik brauchen auch die Götter selbst 3 Verhalten der Philosophenschulen zu ihr 605. »]
  • [172]
    [« Lécanomancie » est un terme d?antiquité ; il s?agit de la divination qui se pratiquait en jetant dans un bassin plein d?eau des pierres précieuses et des métaux, et en observant le son que ces objets produisaient quand ils touchaient le fond. P. É. Littré _ex "Littré, Émile"_, 1880, Dictionnaire de la langue française, vol. III, Chicago, Encylopædia Britannica, 1982, p. 3476-3477.]
  • [173]
    [L?élémont « Oo- » est du grec « ôon », « œuf », « Ovo- » du latin. Le terme de « Oologie » signifie traité de l'œuf, considéré par rapport à la génération. L? « Oomancie » renvoie à la prétendue divination s?opérant sur les nuages que forment les blancs d?œuf jetés dans l'eau. Alfred Souviron _ex "Souviron, Alfred"_ (dir.), [1868], Dictionnaire des termes techniques. De la science, de l'industrie, des lettres et des arts, Paris, Jules Hetzel, p. 374.]
  • [174]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 3.]
  • [175]
    [2 AP 4-1. B. 3. e. 2.]
  • [176]
    [Cf. M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1901, analyse de Walter William Skeat _ex "Skeat, Walter William"_, 1900, Malay Magic. Being an Introduction to the Folkore and Popular Religion of the Malay Peninsula, préface Charles Otto Blagden _ex "Blagden, Charles Otto"_, Londres, Macmillan, XIV-685 p., L?Année sociologique, vol. IV, p. 156-158, repris in Œuvres, II, p. 383-388 : « Magie malaise »].
  • [177]
    [2 AP 4-1. B. 3. e. 3.]
  • [178]
    Carnaval drôlement défini. Carnaval Mi-Carême 423 Seysse[l] en Génevois, fautes 762 ? [ajouté en marge]
  • [179]
    [« Seysésel (Genevois). À Carnaval on se masquait, on se jouait des farces ; notamment un loustic armé d?un pinceau trempé dans de la bouillie de maïs badigeonnait les figures ; ici cela s?appelait les gaudes » (Van Gennep _ex "Van Gennep, Arnold"_, « Le cycle cérémonial du Carnaval et du Carême en Savoie », p. 762).]
  • [180]
    [2 AP 4-1. D. 1. l.] [« Rituels ».]
  • [181]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_ en collaboration avec H. Hubert _ex "Hubert, Henri"_, 1899, « Essai sur la nature et la fonction du sacrifice », in L?Année sociologique, vol. II, p. 29-138, repris in Mélanges d?histoire des religions, p. 1-130, et in Œuvres, I, p. 193-307.]
  • [182]
    [Hugo Gressmann _ex "Gressmann, Hugo"_, 1905, Der Ursprung der Israelitisch-Jüdischen Eschatologie, in Forschungen zur Religion und Liter. des A. und N. T., Göttingen.]
  • [183]
    [Le sténographe y ajoute « qui l'ont lu ont fait ».] M. B.
  • [184]
    [Syn. asam, Asam, ascham (franç.).]
  • [185]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 1.]
  • [186]
    [2 AP 4-1. B. 3. Il peut s?agir de (en toutes lettres) : « Philosophisch-theologische Lehranstalt ». Au cours de nos recherches, nous n?avons pas pu vérifier ce titre qui semble être une revue.]
  • [187]
    [2 AP 4-1. D. 1. m.]
  • [188]
    [2 AP 4-1. B/C. B 3. d. 1.]
  • [189]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 2.]
  • [190]
    [R. Hertz, 1913, analyse de Willhelm Volz _ex "Volz, Wilhelm"_, 1909-1912, Nord-Sumatra, Berlin, D. Reimer, 2 vol., XX-395 p. et XIX-428 p., in-8° ; Johannes Gustav Warneck _ex "Warneck, Johannes Gustav"_, 1909, « Die Religion der Batak », Religionsurkunden der Völker, IV, 1, Leipzig, Dieterich, VI-136 p., in-4° ; Edwin H. Gomes_ex "Gomes, Edwin H."_, 1911, Seventeen Years among the Seas Dyaks of Borneo, Londres, Seeley, 342 p., in-8°, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 273-276 ; R. Hertz, 1913, analyse de Gottfried Simon _ex "Simon, Gottfried"_, 1910, Islam und Christentum im Kampf um die Eroberung der animistischen Heidenwelt, Berlin, Warneck, XII-475 p., in-8o ; et Joh. Warneck, 1912, 50 Jahre Batakmission, Berlin, Warneck, 301 p., in-8°, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 313-315.]
  • [191]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 2.]
  • [192]
    [Joh. Sieber _ex "Sieber, Johannes"_, 1921-1922, « Märchen und Fabeln der Wute », Zeitschrift für Eingeborenen-Sprachen, Herausgegeben von Carl Meinhof _ex "Meinhof, Carl"_ Mit Unterstützung der Hamburgischen Wissenschaftlichen Stiftung [devient Zeitschrift für Kolonialsprachen], Jahrgang XII, p. 53-72, 162-239.]
  • [193]
    [Cf. Joh. Sieber _ex "Sieber, Johannes"_, 1925, Die Wute, chap. XII : « Die sozialen und politischen Verhältnisse. a) Die Familie. b) Sozialer Organismus. c) Die politische verfassung », p. 56-62. Au chap. XVI, on lit : « Geistige Betätigung. a) Mythologie », p. 90.]
  • [194]
    [2 AP 4-1. D. 9.]
  • [195]
    [Nietzsche _ex "Nietzsche, Friedrich"_ dit de Jésus « Un fondateur de religion peut être insignifiant. Une allumette, rien de plus ! », Loisy _ex "Loisy, Alfred Firmin"_ reprend le mot à son compte dans De la méthode en histoire des religions, p. 36-37, précisant Nietzsche, Wille zur Macht, Aphor. 178, cité par Couchoud _ex "Couchoud, Paul Louis"_, « L?énigme de Jésus », p. 50.]
  • [196]
    [Ms 96 [1]. Cf. A. Loisy _ex "Loisy, Alfred Firmin"_, 1920, Les Actes des Apôtres, Paris, Émile Nourry, 963 p., index.]
  • [197]
    [2 AP 4-1. D.]
  • [198]
    [E. Meyer _ex "Meyer, Eduard"_, 1921, Ursprung und Anfänge des Christentums, I. Die Evangelien, II. Die Entwicklung des Judentums und Jesus von Nazareth, Stuttgart und Berlin, J. G. Cotta, 340 p. et 462 p.]
  • [199]
    [2 AP 4-1. D.]
  • [200]
    [2 AP 4-1. D.]
  • [201]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 2.]
  • [202]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 2. Cf. Jean Baruzi _ex "Baruzi, Jean"_ (thèse présentée par), 1925, « Saint Jean de la Croix et le problème de la valeur noétique de l'expérience mystique », séance du 2 mai 1925, Bulletin de la Société française de philosophie, 25e année, mai-juin, no 2-3, mai-juin, p. 25-88. Faisant partie de la discussion : MM. Maurice Blondel _ex "Blondel, Maurice"_, Henri Delacroix _ex "Delacroix, Henri Joachim"_, Lucien Laberthonnière _ex "Laberthonnière, abbé Lucien"_, Raymond Lenoir _ex "Lenoir, Raymond"_, Édouard Le Roy _ex "Le Roy, Édouard"_.]
  • [203]
    [2 AP 4-1. B.]
  • [204]
    [A. Houtin _ex "Houtin, Albert"_, 1925, Une grande mystique, Madame Bruyère _ex "Bruyère, Cécile"_, abbesse de Solesmes, 1845-1909, Paris, Alcan, 316 p.]
  • [205]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 3.]
  • [206]
    [Cf. Blondel, « I. Le problème de la Mystique », p. 51-52.]
  • [207]
    2 AP 4-1. B. 3. a. 1.
  • [208]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 2.]
  • [209]
    [Cf. M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1926, « Parentés à plaisanteries », in Annuaire de l'École pratique des hautes études. Section des sciences religieuses, 1928, texte d?une communication présentée à l'Institut français d?anthropologie en 1926, repris in Œuvres, III, p. 109-124.]
  • [210]
    [2 AP 4-1. D. 5]. [À la page 18, Dumézil _ex "Dumézil, Georges"_ cite Durkheim _ex "Durkheim :[Durckheim], Émile"_, 1902, mémoire original, « Sur le totémisme », in L?Année sociologique, vol. V, p. 99. Dumézil s?y réfère également (p. 64 et conclusion) à H. Hubert _ex "Hubert, Henri"_ et M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1899, « Essai sur la nature et la fonction du sacrifice », in L?Année sociologique, vol. II, p. 29-138, repris in Mélanges d?histoire des religions, p. 102.]
  • [211]
    [Lesbos, aujourd?hui Mitylène, est une grande île de la mer Égée. Selon Hérodote, « Les Lacédémoniens furent d?avis de les recevoir aux conditions qu?ils proposaient. Ce qui les y détermina principalement fut que les Tyndarides (Castor et Pollux) avaient été de l'expédition des Argonautes. Ils reçurent donc les Minyens, leur donnèrent des terres et les distribuèrent parmi leurs tribus. Ceux-ci se marièrent aussitôt et donnèrent à d?autres les femmes qu?ils avaient amenées de Lemnos » (Hérodote d?Halicarnasse, 1786, Histoire d?Hérodote, traduction de Henri Larcher _ex "Larcher, Henri"_, revue et augmentée des notes des principaux commentaires et d?un index par Jean-Baptiste-Louis Humbert _ex "Humbert, Jean-Baptiste-Louis"_, Paris, Garnier frères, 1879, vol. 1, livre IV, § CXLV, 438 p., note p. 407). Lemnos, appelée aujourd?hui Lemno, est une grande île de la mer Égée.]
  • [212]
    [1 AP 4-1. D. 1. 3.] [« Contes ».]
  • [213]
    [Il peut s?agir ici de la légende celte : Oidheadh Chlainne Lir [L?histoire tragique des enfants de Lear] ; les trois fils du roi Lir s?appellent Aodh, Fiachra et Conx. James _ex "James, William"_ MacKillop _ex "MacKillop, James"_, 1998, Dictionary of Celtic Mythology, Oxford, Oxford University Press, p. 311-312.]
  • [214]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 1.]
  • [215]
    [Dans l'ouvrage de Qvigstad _ex "Qvigstad, Just Knud"_, le terme norvégien de stalue se réfère aux géants, vêtus de métal, et dotés de pouvoirs magiques. L?auteur traduit ce mot en allemand par Stallos.]
  • [216]
    [2 AP 4-1. E. 3. a. 3.] [Le volume deux est paru l'année suivante : P. Colum _ex "Colum, Pedraic"_, 1925, Tales and Legends of Hawaii, II. The Bright Islands, New Haven, Yale University Press, XIV-234 p., 5 fig., 2 cartes.]
  • [217]
    [La série Fornander Collection of Hawaiian Antiquities and Folk-lore est publiée par Bernice Pauahi _ex "Pauahi, Bernice"_ du Bishop Museum of Honolulu.]
  • [218]
    [2 AP 4-1. E. 3. a.] [Les observations de Mauss _ex "Mauss, Marcel"_ sont reprises dans Œuvres, III, p. 553-556.]
  • [219]
    [« Les plus anciens textes bouddhiques se composent de morceaux versifiés dits gâthà, reliés par des morceaux en prose, plus ou moins brefs, qui les éclairent. Plus on remonte dans le passé, plus la place de la prose semble petite, mais toujours il y a de la prose. Pareille disposition expliquerait immédiatement l'aspect singulier des gâthà de l'Avesta. Il n?aurait subsité que la partie expressive, rigoureusement formulée, et par la suite versifiée, d?une prédiction dont la partie d?exposé courant, libre et sans forme arrêtée, aurait disparu. Dès lors l'incohérence du texte est chose naturelle : elle tient à ce que les liaisons n?ont pas été transmises. Si l'hypothèse est admise, elle facilite l'explication : là où les strophes ont une suite, c?est qu?elles étaient peu séparées, ou même ne l'étaient pas ; là où il y a hiatus, c?est qu?un exposé libre en prose était prévu entre les strophes conservées » (p. 40). « Les strophes ne se suivent qu?à condition de supposer entre elles un fil qui les relie. Ce fil était le texte en prose, plus ou moins informe, plus ou moins improvisé qui précédait les parties poétiques et qui s?intercalait entre elles. [...] Ce sont des strophes faisant partie d?un même ensemble, ce ne sont pas des hymnes suivis » (Meillet _ex "Meillet, Antoine"_, « Trois conférences sur les gâthá de l'Aveste... », p. 51-52).]
  • [220]
    [2 AP 4-1. D. 1. i.] [« Sociétés religieuses ».]
  • [221]
    [Cf. H. Hubert _ex "Hubert, Henri"_, 1904, analyse d?Adolf von Harnack _ex "Harnack, Adolf von"_, 1902, Die Mission und Ausbreitung des Christentums in den ersten drei Jahrhunderten, Leipzig, Hinrichs, XII-561 p., in-8°, in L?Année sociologique, vol. VII, p. 355-363.]
  • [222]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 1.] [Ce sont des conférences faites dans les églises aux États-Unis lors des cinq dernières années. Les extraits ont été présentés à Oxford (Hibbert Foundation) et certains ont paru dans The Atlantic Monthly and The Hibbert Journal.]
  • [223]
    [Lake _ex "Lake, Kirsopp"_ fait observer dans son étude que le protestantisme devient plus moderne et libéral.]
  • [224]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 2.]
  • [225]
    [Sa diffusion ?]
  • [226]
    [2 AP 4. C. 1. b.] [« Du droit et de la morale. Théorie générale sur le droit ».]
  • [227]
    [F. Gény _ex "Gény, François"_, 1915, Science et technique en droit privé positif. Nouvelle contribution à la critique de la méthode juridique, II, Seconde partie, Élaboration scientifique du droit positif (L?irréductible « droit naturel »), octobre 1915, Paris, Sirey, chap. VI « Le système critique (idéaliste et formel de R. Stammler _ex "Stammler, Rudolf"_ », p. 127-190.]
  • [228]
    [Stammler _ex "Stammler, Rudolf"_, 1914-1924, Rechtsphilosophische Abhandlungen und Vorträge, vol. I, chap. 2, « Privilegien und Vorrechte. Rede (1903) », p. 205-230.]
  • [229]
    [Stammler _ex "Stammler, Rudolf"_, 1914-1924, Rechtsphilosophische Abhandlungen und Vorträge, vol. 2, chap. 34, « Über die rechtlichen Folgen von Vertragsbruch und Ausstand nach Abschluss eines Tarifvertrages. Gutachten (1920) », p. 225-254.]
  • [230]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 2.]
  • [231]
    [E. S. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, 1894-1896, The Legend of Perseus. A Study of Tradition in Story, Custom and Belief, Londres, D. Nutt, « Grimm Library 2-3, 5 ». 3 vol., in-16.]
  • [232]
    [E. S. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, 1891, The Science of Fairy Tales. An Inquiry into Fairy Mythology, 2e éd., 1925, Londres, Methuen & Co., « The Contemporary Science Series », XII-372 p.]
  • [233]
    [E. S. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, 1921, Primitive Society. The Beginnings of the Family and the Reckoning of Descent, Londres, Methuen, 180 p., bibliogr., index.]
  • [234]
    [R. H. Lowie _ex "Lowie, Robert Harry"_, 1920, Primitive Society, New York, Boni & Liveright, 463 p.]
  • [235]
    [Cf. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, Primitive Law, chap. I, « Constitutional law », p. 10-47. L?ouvrage de Hartland ne comporte pas de chap. X.]
  • [236]
    [Cf. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, Primitive Law, chap. VIII, « Legislation », p. 200-216, en particulier, p. 200-204.]
  • [237]
    [Cf. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, Primitive Law, chap. III, « Personal rights and liabilities », p. 48-84.]
  • [238]
    [Discussion sur des tabous dans ce contexte, Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, Primitive Law, p. 80-84.]
  • [239]
    [Cf. Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, Primitive Law, chap. IV, « Property, ownership, inheritance, barter, money », p. 85-116.]
  • [240]
    [« ?When a debtor is caused to pay by the advice of friends or kinsmen, by friendly remonstrances, by constant following, or by (the creditor) starving himself to death, it is termed moral suasion.? In India this proceeding of sitting Dharma, as it was called, probably owed its origin to the Brahmans, in whose hands it would be a most potent weapon to bring to book a recalcitrant debtor. For the person of a Brahman was sacred, and to cause his death would be to draw down upon the debtor?s head spiritual penalties of an awful kind » (Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_, Primitive Law, chap. VII, « Procedure », p. 186). Le Dharna reflète l'aspect rituel du suicide en Inde ancienne : on « faisait se suicider (Dharna) un créancier devant la porte de son débiteur afin de faire accuser celui-ci d?homocide et charger son Karma de valeurs négatives (comme cela se pratiquait de même en Chine ancienne) » (Frédéric Louis _ex "Louis, Frédéric"_, 1987, « Suicide », Dictionnaire de la civilisation indienne, Paris, R. Laffont, p. 1033).]
  • [241]
    [Nous n?avons pas trouvé ces termes dans le livre d?Hartland _ex "Hartland, Edwin Sydney"_.]
  • [242]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 3. « Section : sociologie religieuse ». Mauss _ex "Mauss, Marcel"_ cite cet ouvrage dans le texte suivant.]
  • [243]
    [Le singulier du terme « entrelac » apparaît au XXe siècle.]
  • [244]
    [Cf. Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, t. II, chap. XVI, Matrilineal Descent, p. 87-123.]
  • [245]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, chap. XIX, « Special relationships : Observations », et « Special relationship matters and terms (preliminary and Samoa), p. 214 sq.]
  • [246]
    [Cf. Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, t. II, chap. XXII, « Clan badges », p. 317-328. L?auteur discute ici les représentations figuratives aussi bien sur le corps (tatouages) que sur les canoës, les meubles, etc.]
  • [247]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, chap. XIV, « Social and local grouping » : « 1. The smallest unit was the domestic family household governed by one of its members, who was its official head, the bearer of the name of the family, in consultation more or less with other members » (ibid., p. 6-7). Williams précise quatre formes d?habitation : 1. le foyer domestique ; 2. le village ; 3. le district-village [village district] composé de plusieurs villages ; 4. le district composé de plusieurs districts-villages. Williamson discute le ngati qui est la tribu, le hapu, sous-groupe de la tribu et l'ariki, qui fédère plusieurs ngati.]
  • [248]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, chap. XXVIII, « Council Meetings », chap. XXV, « The Chiefs ».]
  • [249]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, chap. XV, « Social and local grouping (The Marae as a social centre) », p. 60-86. D?après Williamson, le marae un objet religieux, cérémonial et, d?une certaine manière, un objet séculier central en tant que signe visible et forme de reconnaissance pour consigner le titre et la relation sociale : une sorte d?acte familial [family deed], ibid., p. 60.]
  • [250]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, vol. I, chap. XI, « Political areas and systems (other eastern Islands) », p. 381-409.]
  • [251]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, chap. XXXIX, « Land tenure and control (preliminary and Samoa) », chap. XL, « Land tenure and control (other islands) », chap. XLI, « Control of food supply ».]
  • [252]
    [En marge à gauche on lit « corr. s/sr III ».]
  • [253]
    [Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, vol. III, chap. XXXVIII, « Some beliefs as to names and titles », p. 214-228.]
  • [254]
    [Cf. Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, The Social and Political Systems of Central Polynesia, vol. III, chap. XXXV, « Testamentary appointments to family names and titles », p. 164-169.]
  • [255]
    [W. W. Gill _ex "Gill, Révérend William Wyatt"_, 1876, Myths and Songs from the South Pacific, préface Friedrich Max Müller _ex "Müller, Friedrich Max"_, Londres, Henry S. King, XXIV-328 p. Du même auteur, 1876, Life in Southern Isles, or, Scenes and Incidents in the South Pacific and New Guinea, Londres, Religious Tract Society, VIII-360 p. ; 1880, Historical Sketches of Savage Life in Polynesia, with illustrative clan songs, Wellington (Nouvelle-Zélande), VIII-232 p. ; 1885, Jottings from the Pacific, Londres, Religious Tract Society, 248 p., cités par Williamson _ex "Williamson, Robert Wood"_, 1924, The Social and Political Systems of Central Polynesia, vol. II, chap. XXIV, « Social character of war », p. 346 sq.]
  • [256]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 3. « Notes de lecture pour L?Année sociologique signées M. M. ».]
  • [257]
    [Wirz _ex "Wirz, Paul"_, Die Marind-anim, I. Band, II. Teils, 1, Die animistischen Vorstellungen, p. 1-5 ou II. Band, IV. Teils, 3, Ein Schweinefest in Domandeh, p. 22-39.]
  • [258]
    [2 AP 4-1. B. 3. c.]
  • [259]
    [Cf. M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1913, analyse de Francis La Flesche _ex "La Flesche, Francis"_ et Alice C. Fletcher_ex "Fletcher, Alice C."_, 1911, « The Omaha Tribe », Twenty-seventh Annual Report of the Bureau of American Ethnology (1905-1906), Washington, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 104-110, repris in Œuvres, II, p. 100-103 : « Divisions sociales et classification chez les Omaha » et Œuvres, III, p. 89-92 : « Les Omaha ».]
  • [260]
    [« Hearing of the sayings of the ancient men », in La Flesche _ex "La Flesche, Francis"_, 1921, « The Osage Tribe. Rite of the Chiefs. Sayings of the ancient men », part. 1, Thirty-sixth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, p. 152.]
  • [261]
    [« The Six Songs. § Songs of the Rising of The Buffalo Bull Men », in La Flesche _ex "La Flesche, Francis"_, « The Osage Tribe. The Rite of Virgil », p. 205 sq. Thirty-nineth Annual Report of the Bureau of American Ethnology. Les quatre divisions initiales des Osages : Wa-zha?-zhe, Hon?-ga Wa?-tse-ga-wa, Cin?-dse-a-gthe, Hon?-ga U-ta-non-dsi. Puis une organisation à deux divisions, l'une du ciel (Tsí-zhu) et l'autre de terre (Hon-ga).]
  • [262]
    [É. Durkheim _ex "Durkheim :[Durckheim], Émile"_ et M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1903, mémoire original, « De quelques formes primitives de classification. Contribution à l'étude des représentations collectives », in L?Année sociologique, vol. VI, p. 1-72, repris in Durkheim, Journal sociologique, p. 395-461, et in Mauss, Œuvres, II, p. 13-89.]
  • [263]
    [2 AP 4-1. B. 3. a. 3.]
  • [264]
    [L. Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, 1912, Le Noir du Soudan. Pays Mossi et Gourounsi. Documents et analyses, Paris, Émile Larose, « Études soudanaises », 796 p. Du même auteur : 1917, Le Noir du Yatenga. Mossis – Nioniossés – Samos – Yarsés – Silmi-Mossis – Peuls, Paris, Émile Larose, « Études soudanaises », 790 p., bibliogr. ; 1921, Le Noir de Bondoukou. Koulangos – Dyoulas, Abrons –, etc., Paris, Ernest Leroux, « Études soudanaises », 771 p., pl.]
  • [265]
    [Cf. Fernand Froger _ex "Froger, Fernand"_, 1909, Codification des coutumes indigènes des Bousansé, travail resté inédit et faisant partie des Archives du cercle de Ouagadougou, et avec des notes prises par Louis Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, par interrogation, auprès de quelques Boussansé, en 1909, cité par Tauxier, Nouvelles notes sur le Mossi et le Gourounsi, Appendix XIV, « Notice sur les Boussansé », p. 162, n. 1. Froger a aussi publié, en 1910, Étude sur la langue des Mossi. (Boucle du Niger), suivie d?un vocabulaire et de textes, Paris, G. Leroux, XVI-259 p. ; ce titre figure dans la bibliographie de Tauxier.]
  • [266]
    [« Le Kanga-Banou est fondamentalement un Gouro, mais métissé d?éléments Youré et par conséquent Baoulé indéniables », in Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, Nègres Gouro et Gagou, p. 207, n. 1.]
  • [267]
    [Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_ donne des statistiques sur les Gagou, en particulier, sur la tribu Boka située entre Sinfra et Oumé. Il écrit que dans le village de Duagobo, il y a 614 habitants divisés en 5 grands groupes familiaux dont un les Kouassinousé (en Kouassibinous). Tauxier, Nègres Gouro et Gagou, p. 130.]
  • [268]
    [L?auteur décrit l'organisation sociale comme étant fondée sur l'existence des tribus, villages, familles globales et personnes. Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, Nègres Gouro et Gagou, p. 158).]
  • [269]
    [« Chez les Gouro, il existe deux groupements familiaux : un petit groupement familial et un grand groupement familiale qui est la kiriba et dont le chef est le kiribakenndé », Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, Nègres Gouro et Gagou, p. 129. « La famille offre [...] deux groupements : le petit groupement père-fils et la grande famille totale ou globale », ibid., p. 192. L?auteur écrit aussi « Groupement du père et des fils mariés ».]
  • [270]
    [Sur l'usage du terme lapin et de lièvre d?Afrique, Lepus capensis, voir Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, Nègres Gouro et Gagou, p. 268, n. 2.]
  • [271]
    [Les cycles dans l'étude de Nègres Gouro et Gagou portent sur l'Araignée, le Léopard, l'Homme et l'Enfant Terrible.]
  • [272]
    [26e fable, in Tauxier _ex "Tauxier, Ludovic-Marie-Julien, dit Louis"_, Nègres Gouro et Gagou, p. 287.]
  • [273]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 2.]
  • [274]
    [J. H. Hutton _ex "Hutton, John Henry"_, 1921, The Angami Nagas, with some Notes on Neighbouring tribes, publication du gouvernement de l'Assam, Londres, Macmillan, 480 p.]
  • [275]
    [J. H. Hutton _ex "Hutton, John Henry"_, 1921, The Sema Nagas, avant-propos de Henry Balfour _ex "Balfour, Henri"_, publication du gouvernement de l'Assam, Londres, Macmillan, XVIII-463 p., cartes, bibliogr.]
  • [276]
    [J. P. Mills _ex "Mills, James Philip"_, 1922, The Lhota Nagas, introd. et notes par J. H. Hutton _ex "Hutton, John Henry"_, publication du gouvernement de l'Assam, Londres, Macmillan, XXXIX-255 p., cartes.]
  • [277]
    [Si les coutumes, l'organisation sociale et le folk-lore reflètent la diversité des origines des Naga et ceux-ci ont des traits communs avec d?autres tribus de l'Assam, les Naga demeurent cependant une unité raciale distincte [a racial unit in themselves]. Hutton _ex "Hutton, John Henry"_, introduction à Mills _ex "Mills, James Philip"_, Lhota Nagas, p. XV.]
  • [278]
    [Il peut s?agir ici des pages « 1-12 » (Smith, The Ao Naga Tribe of Assam, Part I, General, Introductory. Origins and Migrations, p. 1-6) ou de page « 112 » (ibid., Parti IV, Religion, p. 113-173).]
  • [279]
    [On peut proposer ici : « (notes) » de M. Hutton _ex "Hutton, John Henry"_ [...] Cf. Smith, The Ao Naga Tribe of Assam, chap. VI, « The place of the Ao Nagas in the Human Family », § Language, p. 115-119, n. 3 et 1 de Hutton. Voir aussi p. 204 sur l'influence de contact avec des étrangers ou langues indigènes et le développement du patois.]
  • [280]
    [Smith, The Ao Naga Tribe of Assam, chap. VII, « Changes through contacts with more advanced peoples », p. 177-200.]
  • [281]
    [2 AP 4-1. B. 3. e. 2.]
  • [282]
    [4 AP 4. C. 1. c.] [« Systèmes juridiques et moraux ».]
  • [283]
    [2 AP 4-1. D. 1. p.] [« Sociologie juridique ».]
  • [284]
    [William Nelson Hancock _ex "Hancock, William Nelson"_, Thaddeus O?Mahony, Alexander George Richey _ex "Richey, Alexander George"_, Robert Atkinson _ex "Atkinson, Robert"_ (dir.), 1873, Ancient Laws of Ireland, Senchus mor (conclusion) Being the Corus Berla or Customary Law and The Book of Aicill, published under the direction of the Commissioners for Publishing the Ancient Laws and Institutions of Ireland, vol. III, Dublin, CIXXI, 600 p., index.]
  • [285]
    [H. Hubert _ex "Hubert, Henri"_, 1925, analyse de Sophie Bryant _ex "Bryant, Sophie"_, 1923, Liberty, Order and Law under Irish Rule. A Study in the Book of Ancient Laws of Ireland, Londres, Harding & Moore, XXIII-399 p., in-8°, in L?Année sociologique, nouv. série, t. I, p. 612-615.]
  • [286]
    [2 AP 4-1. B. 3. c. 3.]
  • [287]
    [J. MacKenzie _ex "MacKenzie, John"_, 1922, Hindu Ethics. A Historial and Critical Essay, Oxford, Oxford University Press, XII-267 p.]
  • [288]
    [2 AP 4-1. C. 1. c.] [« Systèmes juridiques et moraux ».]
  • [289]
    [Maksim Maksimovitch Kovalevskii _ex "Kovalewsky :[Kovalevskii], Maksim Maksimovitch"_, 1890, Zakon i obitchai na Kavkaz [La loi et la coutume au Caucase], t. II, Moscou, Imprimerie de A. I. Mamontov, 304 p.]
  • [290]
    [2 AP 4. B. - 1. B. B 3. b. 1.]
  • [291]
    [2 AP 4-1. B. 3. d. 2.]
  • [292]
    [Cf. H. A. Junod _ex "Junod, Henri Alexandre"_, 1912, The Life of a South African Tribe, vol. I : The Social Life, Neuchatel, Attinger frères, p. 253.]
  • [293]
    [2 AP 4-1. C. 1. d.] [« L?organisation domestique et matrimoniale. A. La famille ».]
  • [294]
    [Au total, l'introduction de Lambert _ex "Lambert, Édouard"_ comporte sept sections dont la troisième manque ici : « III. L?association de la loi et de la jurisprudence. – Règles mécaniques et directives générales. – Les rapports entre l'organisation judiciaire et le rôle atribué aux tribunaux dans l'élaboration du droit ».]
  • [295]
    [2 AP 4-1. C. 1. d.] [« L?organisation domestique et matrimoniale. B. Le mariage ». Voir aussi Ch. Appelton _ex "Appelton, Charles"_, 1924, « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage. III. L?origine de l'exogamie. Le tabou de la belle-mère », Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger, t. XLVIII, avril-mai-juin, p. 86-96. Du même auteur, 1916, « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage. I. L?hypothèse d?une promiscuité primitive », Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger, t. XL, mars-avril, p. 69-82, et (suite et fin) ibid., mai-juin, p. 154-172.]
  • [296]
    [Appelton _ex "Appelton, Charles"_, 1924, « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage », § II. Obligation de vitance destinée à prévenir les rapports incestueux, Revue générale du Droit..., p. 243-244.]
  • [297]
    [E. A. Westermarck _ex "Westermarck, Edward Alexander"_, 1891, The History of Human Marriage, Londres, Macmillan, XIX-644 p.]
  • [298]
    [2 AP 1. C. 1. d.] [« L?organisation domestique et matrimoniale. C. La morale sexuelle ».]
  • [299]
    [H. Ellis _ex "Ellis, Havelock"_, 1908-1935, Études de psychologie sexuelle, 19 vol., éd. franç., revue et augmentée par l'auteur, trad. par A. Van Gennep _ex "Van Gennep, Arnold"_, Paris, Société du Mercure de France (Collection d?auteurs étrangers).]
  • [300]
    [2 AP 4-1. C. e.]
  • [301]
    [2 AP 4-1. C. I. e.]
  • [302]
    [2 AP 4-1. C. 1. e.]
  • [303]
    [E. Lévy, 1899, « Le contrat et la responsabilité », Revue critique de législation juridique, 28, p. 361-398, repris in E. Lévy, 1926, La vision socialiste du droit, sous le titre de « La confiance », Paris, Giard, « Collection internationale des juristes populaires », p. 41-94.]
  • [304]
    [M. Hauriou _ex "Hauriou, Maurice"_, 1926, « Police juridique et fond du droit. À propos du livre d?Al-Sanhoury : Les restrictions contractuelles à la liberté individuelle du travail dans la jurisprudence anglaise et à propos des travaux de l'Institut de droit comparé de Lyon », Revue trimestrielle de droit civil, t. XXV, no 2, avril-juin, p. 265-312.]
  • [305]
    [2 AP 4-1. C. 1. e.]
  • [306]
    [2 AP 4-1. C. 1. q.] [« Sociologie juridique ».]
  • [307]
    [Il s?agit probablement de A. D. Kéramopoullos _ex "Kéramopoullos, Antonios Demetriou"_, 1923, Ho Apotympanismos, Symbole archaiologike eis ten historian tou poinikou dikaiou kai ten laographian, Athens, Typografion « Estia », Bibliotheke tes en Athenais archaiologikes Hetaireias 22, 144 p.]
  • [308]
    [2 A P4.1.C.19.]
  • [309]
    [2 AP 4-1. C. 1. e.]
  • [310]
    [G. Vidal _ex "Vidal, Georges"_, J. Magno, 1927, Cours de droit criminel et de science pénitentiaire, 7e éd., refondue et mise au courant de la législation et de la jurisprudence, premier fascicule, Paris, Rousseau, p. 1-576.]
  • [311]
    [S. Sighele _ex "Sighele, Scipio"_, 1897, Folla delinquente a setta delinquente, Firenze, Tipografia cooperativa, 11 p., extrait de La Scuola positiva nella dottrina e nella giurisprudenza penale, a. 7, n. 8, cité par Vidal _ex "Vidal, Georges"_ et Magnol _ex "Magnol, Joseph"_, Cours de droit criminel et de science pénitentiaire, p. 525, n. 2.]
  • [312]
    [Daniel Jousse _ex "Jousse, Daniel"_, 1771, Traité de la justice criminelle de France, t. II, Paris, Debure père, 848 p., IIIe partie, livre II, titre XXV : « Des sentences, Jugements & Arrêts », art. IV : « Les causes qui peuvent diminuer la peine », § VIII, no 243 : « La multitude des délinquants », p. 243.]
  • [313]
    [Dans la fonction de Président d?honneur, G. Tarde _ex "Tarde, Gabriel"_ participe au IIIe Congrès international d?anthropologie criminelle, à Bruxelles, 7-14 août 1892 ; G. Tarde, 1892, « Les crimes des foules », Archives de l'anthropologie criminelle et des sciences pénales, t. VII, no 41, p. 353-386. Voir aussi, « Le IIIe Congrès international d?anthropologie criminelle », Bruxelles, 7-14 août 1892, compte rendu, ibid., no 41, p. 465-591. Le Congrès a eu pour thème : « De la criminalité chez l'homme dans ses rapports avec la biologie et la sociologie ». Toute l'école italienne s?est abstenue.]
  • [314]
    [E. Ferri _ex "Ferri, Enrico"_, 1899, Difese penal e studi di giurisprudenza, Torino, Bocca, « Nuova Collezione di opere giurdiche no 90 », XIX-469 p., cité par Vidal _ex "Vidal, Georges"_ et Magnol _ex "Magnol, Joseph"_, Cours de Droit criminel et de Science pénitentiaire, p. 526, n. 1.]
  • [315]
    [Albert Bataille _ex "Bataille, Albert"_, 1887, Causes criminelles et mondaines de 1886, Paris, E. Dentu, XVI-414 p., chap. XI, « La grève de Decazeville. Assassinat de M. Watrin_ex "Watrin*"_ », p. 136-176.]
  • [316]
    [Cité par Vidal _ex "Vidal, Georges"_ et Magnol _ex "Magnol, Joseph"_, 1927, op. cit., p. 526, n. 3. Cf. Albert Bataille _ex "Bataille, Albert"_, 1894, « La Bagarre d?Aigues-Mortes », in Causes criminelles et mondaines de 1893. Le procès de Panama [et autres], Paris, E. Dentu, chap. X, p. 445-474.]
  • [317]
    [2 AP 4-1. C. 1. e.] [« Le droit international ».]
  • [318]
    [Lord Phillimore _ex "Phillimore, Lord George Grenville"_, président du Conseil exécutif de l'International Law Association, 1925, « Sovereignty. Chairman?s Draft », The International Law Association : Report of the Thirty-Third Conference, Riddarhuset et Riksdaghuset, Stockholm, 8-13 septembre 1924, Londres, Sweet & Maxwell, p. 345-347.]
  • [319]
    [2 AP 4-1. B. 3. e. 2.]
  • [320]
    [James _ex "James, William"_ Hastings (dir.), 1908-1926, Encyclopaedia of Religion and Ethics, 12 vol., Edinburgh, T&T Clark, index.]
  • [321]
    [2AP 4-1. C. 2.]
  • [322]
    [2 AP 4-1. - B. 3. e. 2.]
  • [323]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 2.]
  • [324]
    [É. Durkheim _ex "Durkheim :[Durckheim], Émile"_, 1913, analyse de Jean Brunhes _ex "Brunhes, Jean"_, 1912, La géographie humaine. Essai de classification positive. Principes et exemples, 2e éd., revue et augmentée, Paris, F. Alcan, XV-802 p., in-8°, in L?Année sociologique, vol. XII, p. 818-821, repris in Textes, I, p. 229-232.]
  • [325]
    [Cf. Classification récapitulative des études de géographie humaine, in Brunhes, La géographie humaine, p. 924 sq.]
  • [326]
    [Source : D?après les Coal Tables, 1908-1090, Londres, 1910, p. 54 (en tonnes), cité par Brunhes, La géographie humaine, p. 566.]
  • [327]
    [Cordillère de Vilcapampa (Pérou) ou Cordillère maritime.]
  • [328]
    [Marcel Mercier _ex "Mercier, Marcel"_, 1922, La civilisation urbaine au Mzab, Étude de sociologie africaine, Alger, E. Pfister, Paris, Geuthner, 276 p., 12 pl. hors texte, 12 fig., in-8°.]
  • [329]
    [J. Brunhes, « Human Geography. V. The Discussions Raised by the First Synthetic Works on Human Geography and Some of its Most Opportune Tasks », in Harry Elmer Barnes _ex "Barnes, Harry Elmer"_ (dir.), 1925, The History and Prospects of Social Sciences, chap. II, New York, A. A. Knopf, p. 91, n. 103.]
  • [330]
    [M. Mauss _ex "Mauss, Marcel"_, 1906, mémoire original, avec Henri Beuchat _ex "Beuchat, Henri"_, « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimos. Étude de morphologie sociale », in L?Année sociologique, vol. IX, p. 39-132, repris in M. Mauss, Sociologie et anthropologie, p. 389-477.]
  • [331]
    [L?auteur écrit : « L?âge du bronze même a précédé, aux temps néolithiques, l'âge du fer » (Brunhes, La géographie humaine, p. 515).]
  • [332]
    [Brunhes, La géographie humaine, p. 464, n. 2.]
  • [333]
    [« Raon-l'Étape, Gérardmer, Bussang ». Brunhes, La géographie humaine, p. 212.]
  • [334]
    [2 AP 4-1. B. 3. b. 2.]
  • [335]
    [Brunhes, La géographie humaine, chap. XI, « L?esprit géographique. 2. La géographie des maladies infectieuses (endémiques ou épidémiques) dans ses rapports nouveaux avec la géographie humaine », p. 858 sq.]
  • [336]
    [4 AP 4-1. D. 4.]
  • [337]
    [C. Vallaux _ex "Vallaux, Camille"_, 1925, Les sciences géographiques, chap. IX, « L?économie destructive », p. 233-274. Pour définir l'expression d? « économie destructive », Vallaux s?appuie sur l'usage qu?en a fait Brunhes dans La géographie humaine (2e éd., p. 345.)]
  • [338]
    [2 AP 4-1. D. 2.]
  • [339]
    [P. F. Verhulst _ex "Verhulst, Pierre-François"_, 1838, Notice sur la loi que la population suit dans son accroissement, Correspondance mathématique et physique publiée par A. Quetelet _ex "Quetelet, Adolphe"_, t. X (also numbered t. II of the third series), p. 113-121 ; P. F. Verhulst, 1845, « Recherches mathématiques sur la loi d?accroissement de la population », Nouveaux mémoires de l'Académie Royale des Sciences et Belles-Lettres de Bruxelles, t. XVIII, p. 1-38. Mémoire lu le 30 novembre 1844 ; P. F. Verhulst, 1847, « Deuxième mémoire sur la loi d?accroissement de la population », ibid., t. XX, p. 1-32, lu le 15 mai 1846.]
  • [340]
    [R. Pearl _ex "Pearl, Raymond"_, L. J. Reed_ex "Reed, Lowell J."_, 1920, « On the rate of growth of the population of the United States since 1790 and its mathematical representation », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 6, no 6, 15 juin, p. 275-288 ; R. Pearl, L. J. Reed, 1922, « A further note on the mathematical theory of population growth », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 8, no 12, 15 décembre, p. 365-368 ; R. Pearl, L. J. Reed, 1923, « On the mathematical theory of population growth », Metron, vol. III, no 1, 1-VII, p. 6-19 ; R. Pearl, L. J. Reed, 1923, « Predicted growth of New York and its environs », New York, Committee on the Plan of New York and its Environs, 42 p.]
  • [341]
    [Arthur Lyon Bowley _ex "Bowley, Arthur Lyon"_, 1924, « Births and population in Great Britain », Economic Journal, vol. 34, p. 188-192.]
  • [342]
    [Edwin Cannan _ex "Cannan, Edwin"_, 1895, « The probability of the cessation of the growth of population in England and Wales during the next century », Economic Journal, vol. 5, p. 505-515.]
  • [343]
    [W. F. Willcox _ex "Willcox, Walter Francis"_, 1916, « The nature and significance of the changes in the birth- and death-rates in recent years », Quarterly Publications of the American Statistical Association, new series, vol. XV, no 113.]
  • [344]
    [« The ratio at each Census of children under 5 years of age to 1,000 women aged 16 to 44 » (Yule _ex "Yule, George Udny"_, « The Growth of Population and the Factors which Control it », p. 26).]
  • [345]
    [U. G. Yule _ex "Yule, George Udny"_, 1906, « On the changes in the marriage and birth-rates in England and Wales during the past half century, with an inquiry as to their probable causes », Journal of the Royal Statistical Society, vol. LXIX, Part 1, mars, p. 88-132.]
  • [346]
    [Fig. 10, « Oscillations (deviations from 11-year means) in the death-rate, foreign trade, the marriage-rate and the birth-rate » (Yule _ex "Yule, George Udny"_, « The Growth of Population and the Factors which Control it », p. 29).]
  • [347]
    [2 AP 4-1. D. 2.]
  • [348]
    Ibid.
  • [349]
    [2 AP 4-1. D. 2.]
  • [350]
    [M. Halbwachs, 1910, analyse de Georg von Mayr _ex "Mayr, Georg von"_, 1909, Statistik und Gesellschaftlslehre, 3e Band : Sozialstatistik (Moralstatistik, Bildungsstatistik, Wirtschaftsstatistik, Politische Statistik), 1re Lieferung, Tübingen, J. C. B. Mohr, III-260 p., in L?Année sociologique, vol. XI, p. 732-745. Du même auteur, 1910, analyse de Gottlieb Schnapper-Arndt, 1908, Sozialstatistik, Vorlesungen über Bevölkerungslehre, Wirtschafts- und Moralstatistik, ein Lesebuch für Gebildete, insbesondere für Studierende, herausgegeben von Dr Leon Zeitlin _ex "Zeitlin, Leon"_, Leipzig, W. Klinkhardt, XXII-642 p., ibid., p. 745-750.]
  • [351]
    [2 AP 4-1. D. 2.]
  • [352]
    [Corrado Gini _ex "Gini, Corrado"_, 1916, « Alcune ricerche demografiche sugli Israeliti di Padova », in Atti e Memorie della R. Academia di scienze, lettere ed arti in Padova, CCCLXX, 1915-1916, n.s., vol. XXXII, Padova, cité par Zoller _ex "Zoller, Israele"_, 1924, « La Communità israelitica di Trieste (studio di demografia storica) », Metron. Rivista internazionale di statistica, vol. III, no 3-4, 1-II, p. 523. La revue Metron. Rivista internazionale di statistica (Rovigo, Ferrara) est bimestrielle, multilingue et publiée par l'Institut de statistique et de recherche sociale (Istituto di statistica e ricerca sociale, università degli studi di Roma, « La Sapienza », Facoltà di scienze statistiche demografiche ed attuariali), institut dirigé par Corrado Gini.]
  • [353]
    [Dott I. Zoller, 1924, « La Communità israelitica di Trieste (studio di demografia storica) », Metron. Rivista internazionale di statistica, vol. III, no 3-4, 1-II, p. 521-555.]
  • [354]
    [Dr J. Sanders, 1918, Ziekte en sterfte bij Joden en niet-Joden te Amsterdam (Morbidité et mortalité parmi les Juifs et les non-Juifs à Amsterdam), Rotterdam, Hengel, 128 p.]
  • [355]
    [2 AP 4-1. d. 2.]. [Voir aussi la communication originale de H. Bunle, 1924, « Démographie de l'Afrique française du Nord au début du XXe siècle », Procès-verbal de la séance du 21 mai 1924, Journal de la Société statistique de Paris, no 6, juin, p. 216-219.]
  • [356]
    [2 AP 4-1. D. 1. r.] [« Technologie ».]
  • [357]
    [2 AP 4-1. D. r.] [« Technologie ».]
  • [358]
    [2 AP 4-1 D. 1. s.] [ « Sociologie esthétique ».]
  1. Première partie / Mémoires originaux / Deuxième partie / Analyses / Première section / Sociologie générale / I. ? Traités, manuels, philosophie sociale / A. ? Traités / B. ? Manuels / par M. P. Fauconnet
    1. Henry Pratt Fairchild . — Elements of Social Science. An Introduction to the Study of Life in Human Society, New York, Macmillan, 1924, 484 p., in-8o.
  2. C. — Philosophie sociale / II. — Psychologie et sociologie / A. — Psychologie sociale / B. — Philosophie des valeurs / C. — Logique et théorie de la connaissance / par M. M. Mauss
    1. Ernst Cassirer . — Philosophie der Symbolischen Formen, vol. 2 : Das Mythische Denken. — Vorwort, p. VII-XIV, Berlin, Bruno Cassirer, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1925, XVI-320 p., in-8o. / Cf., du même. — Sprache und Mythos. Ein Beitrag zum Problem der Götternamen. — Leipzig/Berlin, B. G. Teubner, Studien der Bibliothek Warburg, Herausgegeben von Fritz Saxl , 1924, 87 p., in-8o, index. — Die Begriffsform im mythischen Denken, Leipzig/Berlin, B. G. Teubner, Studien der Bibliothek Warburg 1, 1922, II-62 p., in-8o.
  3. III. ? Histoire des doctrines par M. P. Fauconnet
    1. Charles Seignobos . — Histoire politique de l'Europe contemporaine. Évolution des partis et des formes politiques (1814-1914). — (1897), 7e éd. entièrement refondue, t. I, Paris, Colin, 1924, XIV-596 p., in-8o.
  4. IV. ? Questions de méthodologie / A. ? La statistique par. MM. M. Halbwachs et M. Mauss / B. ? Méthode comparative et méthode historique
    1. Friedrich Alverdes . — « Über vergleichende Soziologie » [Au-delà d?une sociologie comparative], Zeitschrift für Völkerpsychologie und Soziologie. — 1925, I, 1, p. 21-33. Du même auteur. — Tiersoziologie [Sociologie animale], Leipzig, C. L. Hirschfeld, « Forschungen zur Völkerpsychologie und Soziologie », vol. 1, édité par Richard Thurnwald , 1925, 155 p., in-8o, index, bibliogr..
  5. V. — Civilisation. Histoire et philosophie de la civilisation / A. — Philosophie de la civilisation / B. — Théorie de la civilisation et types de civilisation / par MM. H. Hubert et M. Mauss
    1. Ellsworth Huntington . — Civilization and Climate (1915) (3e éd., réécrite et augmentée de nombreux chapitres), New Haven, Yale University Press, 1924. 453 p., in-8o, index.
  6. C. ? Civilisation préhistorique / D. ? Ethnologie et Civilisations inférieures
    1. Walter Edmund Roth . — « An introductory study of the arts, crafts, and customs of the Guiana Indians », Thirty Eighth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1916-1917, Washington Government Printing Office, 1924 (paru en 1925) p. 23-743, in-4o, index.
    2. William Halse Rivers . — Social Organization, Londres, Kegan Paul, « History of Civilization », 1924, XIV-226 p., in-8o, index.
  7. E. ? Grandes civilisations
    1. Walter Addison Jayne . — The Healing Gods of Ancient Civilizations, New Haven, Yale University Press, 1925, XI-569 p., pl., in-8o, index, bibliogr..
    2. Ada M. Goodrich-Freer (pseudonyme de Mrs Hans Henry Spoer). — Arabs in Tent and Town. An Intimate Account of the Family Life of the Arabs of Syria, their manner of Living in Desert and Town, their Hospitality Customs, & Mental Attitude, with a description of the Animal Birds, Flowers & Plants of their Country, New York, Londres, G. P. Putnam?s Sons, Seeley, Service & Co., 1924, 325 p., in-8o, index.
  8. VI. ? Race et Société par MM. M. Mauss et H. Hubert
    1. Alfred Cort Haddon . — The Races of Man (1909), Cambridge, Cambridge University Press, 1924, V-184 p., petit in-8o, bibliogr., index.
    2. Lothrop Stoddard . — Racial Realities in Europe [1881], Londres, Scribner, 1924, III-252 p., in-8.
    3. Henri Martin . — Recherches sur l'évolution du Moustérien dans le gisement de La Quina (Charente), vol. IV : L?enfant fossile de La Quina, Angoulême, Imprimerie ouvrière, 1926, 159 p., fig..
  9. Deuxième section / Sociologie religieuse / I. ? Traités généraux, philosophie religieuse, psychologie religieuse, histoire des religions par MM. H. Hubert et M. Mauss
    1. Oscar Montelius . — La Grèce préclassique, 1re partie, Stockholm, Kungl. Vitterhets-, Historie- och Antikvitets Akademien, 1924, 180 p., planches.
    2. Reallexikon der Vorgeschichte. Unter Mitwirkung zahlreicher Fachgelehrter herausgegeben von Max Ebert , Berlin, Walter de Gruyter, 1924-1926, vol. I-VII, 32 fasc. parus, in-4o.
    3. Albert Kammerer . — Essai de l'Histoire antique d?Abyssinie. Le Roy aume d?Aksum et ses voisins d?Arabie et de Méroé, Paris, Paul Geuthner, 1926, 198 p. 45, pl., 4 cartes, 191 p., in-8o, index.
    4. William Bootbbie Selbie . — The Psychology of Religion, Oxford, Oxford University Press, « Oxford Handbooks of Theology », 1924, 310 p., in-8o, index.
    5. Pierre Daniel Chantepie de La Saussaye . — Lehrbuch des Religionsgeschichte, 4e éd. complètement remaniée, publiée par MM. Alfred von Berthelot et Eduard Lehmann , avec la collaboration de MM. Bernhard Ankermann Alexander Brückner , Ludwig A. Deubner , Wilhelm Grönbech , 1925, 2 vol., vol. I, VIII, 756 p. ; vol. II, 752 p., index.
    6. Robert Harry Lowie . — Primitive Religion, New York, Boni & Liveright, 1924, XIX-346 p., in-8o, bibliogr., index.
    7. Reginald Edward Enthoven . — The Folklore of Bombay, Oxford, Clarendon Press, 1924, 353 p., in-8o, index.
  10. II. ? Systèmes religieux des systèmes inférieurs par M. M. Mauss
    1. George Whitehead . — In the Nicobar Islands. The Record of a Lengthy Sojourn in Islands of Sunshine & Palms amongst a People Primitive in their Habits & Beliefs & Simple in their Manner of Living, with a Description of their Customs and Religious Ceremonies & an Account of their Superstitions, Traditions & Folk-lore. — Préface Sir Richard C. Temple, Londres, Seely Service, 1924, 276 p., in-8o, index.
  11. A. ? Les systèmes totémiques par MM. M. Mauss et D. Essertier
    1. Ernst Vatter . — Der australische Totemismus, Mitteilungen aus dem Museum für Völkerkunde in Hamburg, X, Hambourg, 1925, 158 p., in-4o (dont trois cartes et trois cartons) [Mit 3 Kartenskizzen im Text und einer Karte]109.
    2. Charles Harrison . — Ancient Warriors of the North Pacific. The Haidas, their Laws, Customs and Legends, with some historical Account of the Queen Charolotte Islands, Londres, H. F. & G. Witherby, 1925, 222 p., in-8o, index.
    3. Sigmund Freud . — Totem et Tabou. Interprétation par la psychanalyse de la vie sociale des peuples primitifs [Totem und Tabu : einige Übereinstimmungen im Seelenleben der Wilden und der Neurotiker], Leipzig, Hugo Heller, 1913, 149 p., traduit de l'allemand avec l'autorisation de l'auteur par le Dr Samuel Jankélevitch , 1 vol., Paris, Payot, 1924, IX-221 p..
  12. B. ? Systèmes religieux à totémisme évolué Pygmées, Malayo-Polynésiens, Mélanésiens par M. M. Mauss
    1. Sans titre. [Analyse de Paul Wirz , Die Marind-anim von Höllandisch- Süd-Neu Guinea, Hamburg L. Friederichsen & Co., 1922-1925, 4 t. en 2 vol., in-4o, I-II Teils [tomes] regroupés en I Band [volume], III-IV Teils, en II Band].
    2. Charles E. Fox. — The Threshold of the Pacific. An Account of the Social Organization, Magic and Religion of the People San Cristoval in the Salomon Islands, Londres, Kegan Paul, « History of Civilization », 1924, XVIII-379 p., in-8o, index.
  13. Amérique du Nord
    1. Paul Radin . — Monotheism among Primitive Peoples, Being the Seventh « Arthur Davis Memorial Lecture ». — Delivered before the Jewish Historical Society at University College on Sunday, April 27, 1924. Nisan, 23, 5684. Forward by Israel Zangwill , Londres, Allen & Unwin, 1924, 70 p., in-8o.
  14. Amérique du Sud
    1. William Curtis Farabee . — The Central Caribs, University of Philadelphia, The University Museum, « Anthropological Publications, vol. X », 1924, 299 p., in-4o, pl., index.
  15. Eskimos / Afrique / C. ? Systèmes religieux et tribaux
    1. Henri Roux . — « Deux tribus de la région de Phongsaly (Laos septentrional) », Bulletin de l'École française d?Extrême-Orient, 1924, XXIV, 24e année, janvier-juin, no 1-2 (1925), p. 373-501.
  16. D. ? Systèmes religieux primitifs décomposés / III. ? Systèmes religieux nationaux par M. H. Hubert
    1. Franz Rolf Schröder . — Germanentum und Hellenismus Untersuchungen zur germanischen Religionsgeschichte, Heidelberg, zur Germanischen Carl Winter, « Germanische Bibliothek, II. Abt. 17 », 1924, 160 p., in-8o.
  17. IV. ? Systèmes religieux universaux / V. ? Systèmes religieux des groupes secondaires (sectes, etc.)
    1. Heinrich H. Maurer. — « Studies in the Sociology of Religion, American Journal of Sociology, I. The Sociology of Protestantism, vol. XXX, novembre 1924, no 3, p. 257-286 ; II. Religion and American Sectionalism. The Pennsylvania German, vol. XXX, janvier 1925, no 4, p. 408-438 ; III. The Problem of a National Church Before 1860, vol. XXX, mars 1925, no 5, p. 534-550 ; IV. The Problems of Group-Consensus ; Founding the Missouri Synod, vol. XXX, mai 1925, no 6, p. 665-682 ; V. The Fellowship Law of a Fundamentalist Group, vol. XXXI, no 1, juillet 1925, p. 39-57.
  18. VI. ? Cultes spéciaux / VII. ? Croyances et pratiques dites populaires / VIII. ? Croyances et pratiques concernant les morts par MM. H. Hubert et M. Mauss
    1. Émile Metzger . — « La mutilation des morts. Contribution à l'étude des croyances et rites funéraires des Germains », Mélanges offerts à Charles Andler par ses amis et ses élèves, Université de Strasbourg, Publications de la Faculté des lettres de l'Université de Strasbourg, fasc. 21, Strasbourg, Imprimerie alsacienne, 1924, p. 257-267, in-8o.
    2. Géza Róheim . — « The pointing bone », The Journal of the Royal Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, Vol. LV, janvier-juin, 1925, p. 90-114.
    3. Sir James George Frazer . — The Belief in Immortality and the Worship of the Dead. 3 vol., vol. I. : The Belief among the Aborigines of Australia, The Torres Straits Islands, New Guinea and Melanesia, The Gifford Lectures, St. Andrews (1911-1912), 1913, XXII-496 p., index ; vol. II : The Belief among the Polynesians, Conférences faites à la Royal Institution en 1916 ainsi que des cours donnés au Trinity College, Cambridge 1921-1922, X-447 p. ; vol. III : The Belief among the Micronesians, Londres, Macmillan, 1924, X-326 p., in-8o, index.
  19. IX. ? La magie
    1. Theodor Hopfner . — Griechisch-äegyptischer Offenbarungszauber, seine Methoden, herausgegeben von Dr Carl Wessely , Leipzig, H. Haessel, Studien zur Palaeographie und Papyrusurkunde, XXIII, 1924, 172 p., in-8o, index.
    2. Samson Eitrem (dir.). — Papyri Osloenses. — Fasc. 1, Magical Papyri, Oslo, publiés par Det Norske Videnskaps-Akademi I Oslo (Académie des sciences d?Oslo), 1925 ; Jacob Dybwad (en commission), 152 p. ; et XIII pl. gr., in-8o, index, bibliogr..
    3. Sir Richard Olaf Winstedt . — Shaman, Saiva and Sufi. A Study of the Evolution of Malay Magic, Londres, Constable & Co., 1925, VIII-191 p., in-8o, index.
  20. X. ? Le rituel / A. ? Le calendrier religieux et les fêtes
    1. Arnold Van Gennep . — « Le cycle cérémonial du Carnaval et du Carême en Savoie », I. Analyse géographique et chronologique, Journal de psychologie normale et pathologique, XXIIe année, 15 mai 1925, p. 421-445 ; II. Analyse ethnographique et psychologique, ibid., 15 juillet 1925, p. 584-612 ; III. Documents originaux, ibid., p. 728-767.
  21. B. ? Rites positifs. Cérémonies complètes et rites manuels
    1. Le P. Alexis Médebielle . — L?expiation dans l'Ancien et le Nouveau Testament, vol. Ier : L?Ancien Testament, Rome, Institut biblique pontifical, « Scripta Pontificii Instituti Biblici », 1924, 307 p., in-8o, index.
    2. Karl von den Steinen. — Die Marquesaner und ihre Kunst, Studien über die Entwicklung primitiver Südseeornamentik nach eigenem Reiseergebnissen und dem Material der Museen. — Bd. 1 : Tatauierung. — mit einer Geschichte der Inselgruppe und einer vergleichenden Einleitung über den polynesischen Brauch, Berlin, Dietrich Reiner (Ernest Vohsen), 1925, VIII-200 p. (avec planches, dessins et deux cartes), in-4o.
    3. Wilhelm Schmidt . — Ethnologische Bemerkungen zu theologischen Opfertheorien, Jahrb. d. Missionshauses St.-Gabriel, Post Mödling bei Wien, 1922, 67 p., voir d. Philos.-theol. Lehranstalt., I. 1924, p. 1-67.
  22. C. ? Rites positifs (suite). Mécanismes rituels divers
    1. Albert Heintze . — Die deutschen Familiennamen geschichtlich, geographisch, sprachlich [1882], [Les noms de famille allemands aux points de vue historique, géographique et linguistique]. — Sechste verbesseste Auflage hrsg. von Paul Cascorbi-Halle, Verlag der Buchhandlung des Waisenhauses, 1925, VIII-396 p., in-8o.
  23. D. ? Rites oraux
    1. Marcel Jousse. — « Études de psychologie linguistique Le style oral rythmique et mnémotechnique chez les Verbo-moteurs », Archives de Philosophie, Vol. 2, cahier IV, 1924, Mesnil (Eure), Imprimerie Firmin-Didot et Cie, Paris, Gabriel Beauchesne, éditeur, p. 1-235 (p. 435-669), in-8o.
  24. E. ? Objets et lieux de culte / XI. ? Représentations religieuses par MM. H. Hubert, M. Mauss et Ph. de Félice / A. ? Représentations religieuses d?êtres et de phénomènes naturels
    1. Dr Johannes Winkler . — Die Toba-Batak auf Sumatra in gesunden und kranken Tagen. Ein Beitrag zur Kenntnis des animistischen Heidentums, Stuttgart, Chr. Belser, 1925, IV-234 p., in-8o, index.
    2. Johannes Sieber . — Die Wute : Lebenshaltung, Kultur und religiöse Weltanschauung eines afrikanischen Volksstammes, Berlin, Dietrich Reimer, 1925, XII-114 p., in-8o.
  25. B. ? Représentations d?êtres sacrés (dieux, âmes, etc.)
    1. Paul Louis Couchoud . — « L?énigme de Jésus », extrait du Mercure de France, CLXIII, 1923, 68 p..
    2. Alfred Loisy . — Les Actes des Apôtres traduction nouvelle avec introduction et notes, Paris, F. Rieder et Cie, Christianisme, 8, cahiers publiés sous la direction de P.-L. Couchaud, 1925, 304 p., in.16o.
    3. Édouard Meyer . — Ursprung und Anfänge des Christentums ; Dritter Band, Die Apostelgeschichte und die Anfänge des Christentums, Stuttgart und Berlin, J. G. Cotta, 1923, X, 660 p., in-8o.
    4. Louis Coulange [pseudonyme de Joseph Turmel ].— La Vierge Marie, Paris, F. Rieder & Cie, Christianisme, 9, cahiers publiés sous la direction de P.-L. Couchoud , 1925, 158 p., in-16o.
    5. Israël Abrahams . — Valeurs permanentes du Judaïsme, trad. de l'anglais par Germaine Constantin-Weyer, Paris, F. Rieder & Cie, Judaïsme, cahiers publiés sous la direction de P.-L. Couchoud , 1925, 128 p., in-16o.
    6. Rosalind Moss . — The Life after Death in Oceania and the Malay Archipelago, Oxford, Oxford University Press, Humphrey Milford, 1925, XII-247 p., in-8o, index, cartes.
    7. Jean Baruzi . — Saint Jean de la Croix et le problème de l'Expérience mystique, Thèse pour le doctorat ès lettres, Paris, Alcan, 1924, 772 p., in-8o, bibliogr..
    8. Henri Joachim Delacroix . — « Remarques sur ?Une grande Mystique? », Journal de psychologie normale et pathologique, 1925, p. 545-585.
    9. Maurice Blondel . — « I. Le problème de la Mystique » et « II. Mysticisme païen et mysticisme chrétien » ; Victor Delbos , « III. Le mysticisme allemand » ; l'abbé Joannès Wehrlé , « IV. La vie et la doctrine de saint Jean de la Croix » ; Jacques Paliard , « V. L?orientation religieuse de Maine de Biran et le problème de la passivité mystique », in « Qu?est-ce que la mystique ? Quelques aspects historiques et philosophiques du problème », Les Cahiers de la Nouvelle Journée, T. 3, no 3, Paris, Blond & Gay, 1925, 198 p., in-8o.
  26. C. ? Les mythes
    1. Erich Brauer . — Züge aus der Religion der Herero. Ein Beitrag zur Hamitenfrage, Leipzig, R. Voigtländers Verlag, « Erste Reihe : Ethnographie und Ethnologie, no 7 », Institut für Völkerkunde, 1925, 122 p. et 9 cartes, in-8o, bibliogr..
    2. Truman Michelson . — « The mythical origin of the White Buffalo Dance of the Fox Indians », etc., Eleventh Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1918-1919, Washington Government Printing Office, 1925, p. 23-289 ; « The autobiography of a Fox Indian woman », ibid., p. 291-349 ; « Notes on Fox Mortuary Customs and Beliefs », p. 351-496 « Notes on the Fox Society known as ?Those who worship the little Spotted Buffalo? », ibid., p. 497-539 ; « The traditional origin of the Fox Society known as ?The singing around rite? », p. 541-615, 664 p., in-8o, bibliogr., index.
  27. D. ? Légendes et contes
    1. Georges Dumézil . — Le crime des Lemniennes. Rites et Légendes du Monde égéen, thèse complémentaire pour le doctorat ès lettres, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1924, 75 p., in-8o.
    2. Norwegian Fairy Tales from the Collection of Asbjörnsen and Moe. — Traduit par Helen et John Allyne Gade , Scandinavien Classics, vol. XXIV, New York, The American-Scandinavian Foundation, 1924, XIV-247 p., in-8o.
    3. Just Knud Qvigstad . — Lappische Erzählungen aus Hatfjelldalen, texte original norvégien et version allemande, Kristiania, Kristiania Etnografiske Museums Skrifter, Bind 1, Hefte 4, 1924, p. 253-315 ; Lappischer Aberglaube, ibid., Bind 1, Hefte 2, 1920 ; Lappische Sprichwörter und Rätsel, ibid., Band 1, Hefte 3, 1922, p. 138-251, in-4o.
    4. Pedraic Colum . — Tales and Legends of Hawaii, vol. 1 : At the Gateways of the Day, Avec illustrations de Juliette May Fraser , United States of America. Miscellaneous Institutions, Sociétés, etc., The Hawaiian Legend and Folklore commission, 2 vol., New Haven, Yale University Press, 1924, XXVIII-217 p., in-8o, notes bibliogr..
  28. E. ? Les dogmes / F. ? Livres sacrés
    1. Antoine . — « Trois conférences sur les gâthá de l'Aveste faites à l'Université d?Upsal pour la fondation Olaus Petri », Annales du Musée Guimet, « Bibliothèque de vulgarisation, 44 », Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1925, 72 p., in-16o. Cf. Marcel Mauss , Observations à la suite d?une communication de M. Antoine Meillet : « À propos des Gathâs de l'Avesta », Institut français d?anthropologie, 19 mars 1924, L?Anthropologie, t. XXXIV, 1924, p. 296-298.
  29. XII. ? Organisation religieuse par MM. H. Hubert et M. Mauss
    1. Adolf von Harnack . — Die Mission und Ausbreitung des Christentums in den ersten drei Jahrhunderten, Erster Band. Die Mission in Wort und Tat. Zweiter Band. Die Verbreitung, 4e éd., Leipzig, J. C. Heinrichs?sche Buchhandlung, 1924, 2 vol., XI-1000 p., in-8o, 11 cartes, index.
    2. Kirsopp Lake . — The Religion of Yesterday and To-morrow, Londres, Christophers, 1925, 183 p., index.
    3. Sir Charles Alfred Bell . — Tibet. Past and Present, Londres/Milford, Oxford University Press (1re éd., 1924 ; 2e éd., 1926), 3e éd., 1927, XII-326 p., in-8o, index.
  30. Troisième Section / Sociologie morale et juridique par MM. M. Mauss et E. Lévy, et H. Lévy-Bruhl / I. ? Du droit et de la morale / A. ? De la morale / B. ? Théories générales sur le droit. Le juge, la loi et le droit
    1. Rudolf Stammler . — Rechtsphilosophische Abhandlungen und Vorträge. — 2 vol., 1er vol., 1888-1913, 459 p., 2e vol. 1914-1924, 427 p., Berlin, Neudruck der Ausgabe, Charlottenburg, Rolf Heise, 1925, bibliogr., in-8o.
  31. II. ? Systèmes juridiques et moraux / A. ? Des systèmes juridiques et moraux en général / B. ? Systèmes juridiques des sociétés indifférenciées à base de clans totémiques
    1. Edwin Sidney Hartland . — Primitive Law, Londres, Methuen, 1924, VII-222 p. petit in-16.
  32. C. ? Systèmes juridiques des sociétés différenciées à base de clans totémiques
    1. Robert Wood Williamson . — The Social and Political Systems of Central Polynesia, Cambridge, Cambridge University Press, 1924, 3 vol., vol. I, XXVIII-438 p., vol. II, 496 p., vol. III, 488 p., in-8o, index.
    2. Sans titre [Analyse de Paul Wirz , Die Marind-anim von Höllandisch-Süd-Neu Guinea, Hamburg L. Friederichsen & Co., 1922-1925, 4 t. en 2 vol., in-4o].
    3. Francis La Flesche . — « The osage tribe. Rite of the Chiefs. Sayings of the ancient men », Thirty-sixth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, 1914-1915, Washington Government Printing Office (1023), 1921, p. 37-602, index. Du même auteur : « The osage tribe. The rite of virgil », Thirty-nineth Annual Report of the Bureau, American Ethnology, 1917-1918, Washington Government Printing Office, 1925, p. 31-636, index.
  33. D. ? Systèmes juridiques tribaux
    1. Ludovic-Marie-Julien, dit Louis Tauxier . — Nouvelles notes sur le Mossi et le Gourounsi, Paris, Émile Larose, « Études soudanaises », 1924, 206 p., in-8o, bibliogr. Du même auteur, Nègres Gouro et Gagou (Centre de la Côte-d?Ivoire), Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, « Études soudanaises », VI, 1924, 369 p., in-8o.
    2. William Carlson Smith. — The Ao Naga Tribe of Assam. A Study in Ethnology and Sociology, Introduction John Henry Hutton , Publication du Gouvernement de l'Assam, Londres, Macmillan, 1925. XXVII-244 p. Index. Bibliogr. in-8o.
    3. Granville St John Orde Browne . — The Vanishing Tribes of Kenya. A Description of the Manners & Customs of the Primitive & Interesting Tribes Dwelling on the Vast Southern Slopes of Mount Kenya & their Fast Disappearing Native Methods of Life, Londres, Seely, Service & Co., 1925, 284 p., in-8o.
  34. E. ? Systèmes moraux et juridiques nationaux
    1. Joseph Declareuil . — Rome et l'organisation du droit, Paris, Bibliothèque de synthèse historique, « L?évolution de l'humanité », no 19, La Renaissance du Livre, 1924, 452 p., index.
    2. M. J. Macauliffe. — Gaelic Law. The Berla Laws ; ou The Ancient Irish Common Law (Extrait du Book of Aicill), Dublin, Hodges, Figgis & Cie, 1924, 117 p..
    3. Edward Washburn Hopkins . — Ethics of India, New Haven, Yale University Press, 1924, XIV-265 p., petit in-8o, index.
    4. Adolf. Dirr — « Aus dem Gewohnheitsrecht der kaukasischen Bergvölker », Zeitschrift für vergleichende Rechtswissenschaft. Einschliesslich der Ethnologischen Rechts- und der Gesellschaftsforschung. — 41er Bd. 1, 1925, p. 1-128.
  35. III. ? L?organisation domestique et matrimoniale par MM. M. Mauss, P. Fauconnet et E. Lévy / A. ? La famille
    1. Ernest Jones . — « Mother – right and the sexual ignorance of savages », lu devant la British Psycho-Analytical Society le 19 novembre 1924, The International Journal of Psycho-analysis (dir. : Sigmund Freud , éd. : Ernest Jones). — Vol. VI, Part. 2, avril 1925, p. 109-130.
    2. Alfred Reginald Radcliffe-Brown. — « The mother?s brother in South Africa », lu devant la British Association for the Advancement of Science, South African Branch, le 9 juillet 1924, 1924, The South African Journal of Science. — Comprising the report of the South African Association for the Advancement of Science, vol. XXI, novembre 1924, p. 542-555.
    3. Les codes de la Russie soviétique. I. Code de la famille, traduit par Jean Patouillet  ; Code civil, traduit par J. Patouillet et Raoul Dufour , préface J. Patouillet, introduction Édouard Lambert (p. 1-45), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents », t. 9, 1925, XVI-260 p., in-8o.
  36. B. ? Le mariage. La condition de la femme
    1. Charles Appelton . — « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage. III. L?origine de l'exogamie », extrait de la Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger, T. XLVIII, numéro suivant octobre-novembre-décembre 1924, p. 241-254, Paris, de Boccard, 20 p., in-8o. Du même auteur, « De quelques problèmes relatifs à l'histoire du mariage. III. L?origine de l'exogamie (suite) », Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l'étranger, t. XLIX, janvier-février-mars, 1925, p. 1-17.
  37. C. ? La morale sexuelle
    1. Edward George Paul Bousfield . — Sex and Civilization, Londres, Kegan Paul & Co., 1925, VIII-294 p. in-8o. Samuel Jessner , Körperliche und seelische Liebe, Gemeinverständliche wissenschaftliche Vorträge über das Geschlechtsleben. Leipzig, Curt Kabitzsch, 1924, 445 p. in-8o. Havelock Ellis , Moderne Gedanken über Liebe und Ehe, Leipzig, Curt Kabitzsch, 1923, 119 p., in-12o.
  38. IV. ? Organisation des groupes secondaires (classes) / V. ? L?organisation politique / A. ? De l'État en général par M. J. Ray
    1. Westel Woodbury Willoughby . — The Fundamental Concepts of Public Law, Tagore Law Lectures 1923, New York, Macmillan, 1924, XVII-499 p..
  39. B. ? Types d?organisation politique / VI. ? Le droit de propriété. Le droit contractuel
    1. Halfred C. Brown. — La lutte judiciaire du capital et du travail organisés aux États-Unis. Le boycottage, le picketing et la grève de sympathie en tant qu?instruments du contrat collectif de travail et de la boutique syndiquée. — Préface Édouard Lambert (p. I-XIII), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents », t. 6, 1924, XII-469 p., in-8o.
    2. A. A. Al-Sanhoury. — Les restrictions contractuelles à la liberté individuelle de travail dans la jurisprudence anglaise. Contribution à l'étude comparative de la règle de droit et du standard juridique (t. 4 de la série des « Décisions régulatrices de la politique du travail et du commerce des juges anglais », avec une préface de Édouard Lambert ), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents, t. 10 », 1925, 361 p., in-8o.
    3. Max Judd Wassermann. — L?œuvre de la Federal Trade Commission. La dernière phase de la législation américaine contre les trusts, la spéculation illicite et les pratiques commerciales déloyales, Préface Édouard Lambert (p. XXIII-XLIII), Paris, Giard, « Bibliothèque de l'Institut de droit comparé de Lyon. Études et documents », t. 13, 1925, XLIII-583 p..
  40. VII. ? Le droit pénal par MM. H. Hubert et J. Plassard
    1. Louis Gernet . — « Sur l'exécution capitale », Revue des Études grecques, T. XXXVII, no 169, janvier-mars, 1924, p. 261-293.
    2. Marcel Nast . — « Les lois sociales et la répression pénale », Revue internationale de droit pénal, vol. II, no 12, 1925, p. 113-123.
    3. Pierfranco Bunocore . — « Les crimes de la foule dans le projet du nouveau Code pénal italien », Revue internationale de droit pénal, vol. II, no 14, 1925, p. 133-136.
  41. VIII. ? L?organisation judiciaire. La procédure / IX. ? Le droit international. La morale internationale par M. J. Ray
    1. Sanford Darley Cole . — « Some notes on codification of international law », in Report of the Thirty-Third Conference, Riddarhuset et Riksdaghuset, Stockholm, 8-13 septembre 1924, The International Law Association, Londres, Sweet & Maxwell, 1925, p. 348-355.
  42. Quatrième Section / Sociologie criminelle et statistique morale par MM. M. Mauss et P. Fauconnet / I. ? De la criminalité en général / II. ? La criminalité suivant les pays, les conditions économiques, les confessions religieuses, l'âge et le sexe
    1. Stephen Meredyth L. Edwardes. — Crime in India. A Brief Review of the More Important Offences included in the Annual Criminal Returns with Chapters on Prostitution & Miscellaneous Matters, Londres/Milford, Oxford University Press, 1924, VIII-169 p., in-8o, index.
    2. Lewis Edward Lawes . — Man ‘s Judgment of Death. An Analysis of the Operation and Effect of Capital Punishment Based on Facts, not on Sentiment. — Londres et New York, G. P. Putnam?s Sons, 1924, 146 p., in-8o, ill..
  43. III. ? Formes diverses de la criminalité et de l'immoralité / IV. ? Le système répressif / Cinquième section / Sociologie économique / I. ? Études générales. Méthode / A. ? Traités et manuels
    1. Leonard Halford Dudley Buxton . — Primitive Labour, Londres, Methuen, 1924, VIII-272 p., petit in-8o, index.
  44. Sixième section / Morphologie sociale par MM. M. Mauss, A. Demangeon et M. Halbwachs / I. ? Bases géographiques de la vie sociale
    1. Sans titre.— [Analyse de Jean Brunhes , La géographie humaine, I, Les faits essentiels groupés et classés. Principes et exemples, 574 p., II. Monographies. Liaisons avec les disciplines voisines, index, p. 575-974 ; III, illustrations hors texte, p. 1-163, 3e éd., Alcan, 1925].
    2. Sans titre. — [Analyse de Jean Brunhes , La géographie humaine, 3e éd., 3 vol., Alcan, 1925.]
    3. Camille Vallaux . — Les sciences géographiques, Paris, Alcan, 1925, VIII- 413 p., in-8o.
  45. II. ? De la population en général par M. M. Halbwachs
    1. George Udny Yule . — « The growth of population and the factors which control it, The presidential address of Mr. G. Udny Yule, for the session 1924-1925, delivered to the Royal Statistical Society, November 18th, 1924 (with Proceedings) », Journal of the Royal Statistical Society, January 1925, vol. LXXXVIII, new series, Part I, p. 1-58, bibliogr..
    2. Thomas Henry Craig Stevenson. — « The laws governing population », opening a discussion before the Royal Statistical Society, December 16, 1924, the President in the Chair, Journal of the Royal Statistical Society, New series, vol. LXXXVIII, Part 1, January 1925, p. 63-76.
    3. Major Greenwood . — « The vital statistics of Sweden and Wales : An essay in international comparison », lu devant la Royal Statistical Society, May 20, 1924, Journal of the Royal Statistical Society, vol. LXXXVII, Part IV, July 1924, p. 493-531.
    4. Hugo Schröder . — Das Problem der Unehelichen, Leipzig, Kabitzsch, Monographien zur Frauenkunde und Eugenetik, Sexualbiologie und Vererbungslehre, 8, 1924, 76 p., in-8o.
    5. Sir Alexander Morris Carr Saunders . — K. B. E., Population, Londres, Oxford University Press, Humphrey Milford, 1925, 111 p., in-12o ; Walter Francis Willcox , « Methods of estimating the population of the United States », Metron. Rivista internazionale di statistica (Rovigo, Ferrara), vol. V, no 1, 1-VI, 1925, p. 27-37 ; H. I. Van Zanten, « Quelques données démographiques sur les Israélites à Amsterdam », Metron. Rivista internazionale di statistica, vol. V, no 1, 1-VI, 1925, p. 38-68.
    6. Henri Bunle . — « Démographie de l'Afrique française du Nord au début du XXe siècle », Journal de la Société de Statistique de Paris, nos 7-8-9, juillet-août-septembre, 1924, p. 278-296, et no 10, octobre 1924, p. 347-364.
  46. III. ? Mouvements migratoires / IV. ? Groupements urbains et ruraux / V. ? Géographie économique / Septième section / Divers / I. ? Le langage. L?écriture / A. ? Le langage / B. ? L?écriture / II. ? Technologie par M. H. Hubert
    1. Reginald Campbell Thompson . — The Assyrian Herbal. A Monograph on the Assyrian Vegetable Drugs. — The Subject Matter of which was communicated in a paper to the Royal Society, March 20, 1924, London, Luzac & Co., 1924, XXXVII-294 p., in-8o, index..
    2. Amélia Hertz . — « Histoire de l'outil en fer d?après les documents égyptiens, hittites et assyro-babyloniens », L?Anthropologie, vol. XXXV, no 1-2, 1925, p. 75-95.
  47. III. ? Esthétique / Généralités et systèmes esthétiques par M. H. Hubert
    1. Charles Boreux . — L?art égyptien, Paris et Bruxelles, Mâcon, imprimerie Protat frères, Paris et Bruxelles, Librairie nationale d?art et d?histoire, G. Van Oest (éd.), « Bibliothèque d?histoire de l'art », 1926, 63 p., et planches, p. II-LXIV, in-8o.
  48. Ornemantique / Arts plastiques / Arts musical et oraux / Précisions sur les dénominations / Annexe
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/08/2007
https://doi.org/10.3917/anso.041.0075
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