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« Ne pas être de gauche, c’est un peu comme une adresse postale : partir de soi, la rue où l’on est, la ville, le pays, les autres pays, de plus en plus loin. On commence par soi et dans la mesure où l’on est privilégié et qu’on vit dans un pays riche, on se dit : “comment faire pour que la situation dure ? […] Comment faire pour que l’Europe dure encore ?”, etc. Être de gauche c’est l’inverse. C’est percevoir […] d’abord le pourtour […] : le monde, l’Europe, la France, etc., la rue de Bizerte, moi. C’est un phénomène de perception. On perçoit d’abord l’horizon, à l’horizon. […] Être de gauche, c’est savoir que les problèmes du tiers-monde sont plus proches de nous que les problèmes de notre quartier. »
Cette étonnante boussole pour se repérer en politique précède d’assez loin l’impact qu’auront les réseaux sociaux sur nos démocraties contemporaines. Elle est extraite d’une longue périphrase de L’Abécédaire du philosophe Gilles Deleuze, enregistré en 1988. Dans le contexte des bouleversements technologiques, le présent propos souhaiterait en tirer avantage pour poser une question qui paraît tout aussi contre-intuitive. À condition d’accorder sa prémisse à Gilles Deleuze, est-il possible que nous dussions convenir que nous autres Européens soyons tous devenus « de droite » ?
Pour y répondre, le XXIe siècle peut se réclamer d’un atout dont ne disposaient ni les moralistes du XVIIe ni la longue lignée des observateurs de la folie et des passions humaines au fil des âges…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 29/06/2018
- https://doi.org/10.3917/ris.110.0071

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