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État souverain, puissance publique ou administration technique ? L’intervention technologique de l’État ne peut être saisie que si on la rapporte à la conception même de l’État, ou du moins à la forme qu’il prend, et donc à la légitimation qu’il donne à son intervention. Rappelons que le mot « État », dérivé du latin status, ne s’est introduit dans les langues européennes qu’à la fin du XVe siècle ; jusque-là, le terme n’est pas utilisé de façon isolée. C’est Machiavel qui l’emploie pour la première fois avec une majuscule et dans son sens moderne dans Le Prince (1513), qui s’ouvre ainsi : « Tous les États, toutes les dominations qui ont tenu ou tiennent encore les hommes sous leur empire ont été et sont ou des républiques ou des principautés. » Par la suite, le juriste Jean Bodin développe, dans Les Six Livres de la République (1576), une véritable philosophie de l’État en théorisant l’idée de souveraineté : « République est un droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun, avec puissance souveraine ». « Il n’y a pas d’État sans souveraineté », affirme-t-il, idée reprise et enrichie, notamment par Thomas Hobbes. La souveraineté devient la clé de voûte de l’État moderne. Les premières technologies qu’il manie sont donc des moyens d’exercer cette souveraineté, à savoir les technologies militaires pour défendre son territoire, voire pour l’élargir par la colonisation. D’autant qu’à la notion de souveraineté, le jésuite espagnol Francisco Suarez ajoute pour sa part, dans so…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 29/06/2018
- https://doi.org/10.3917/ris.110.0061

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