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François-Bernard Huyghe et Marc Verzeroli – Le schéma transhumaniste qui se dessine aurait vocation à « nous libérer » du politique. La technologie va-t-elle mettre fin au politique ?Bernard Stiegler – Cette question qui est en effet posée reste généralement ignorée, sinon occultée, par le monde politique et la Commission européenne. Pourtant, le discours est clair – même si le modèle de ces transhumanistes qui sont avant tout des libertariens n’est pas toujours facile à appréhender : ils sont vus comme des anarchistes, des « libertaires », et il y a une branche qui se réclame d’un courant de cette « gauche » qui prétend se débarrasser des institutions et des autorités en général.
Mais pour l’essentiel, les libertariens qui promeuvent le transhumanisme ont extrémisé les modèles ultralibéraux de la révolution conservatrice. Ils se sont appuyés pour cela sur la technologie. Par exemple, Peter Thiel, fondateur de PayPal et premier investisseur dans Facebook, conseille Donald Trump, dont il a organisé la campagne électorale. Le discours qu’il a contribué à construire vise à liquider l’État, la démocratie, la République et en général ce que Platon appelait la politeia. Purement et simplement éliminer le politique, et le remplacer par l’efficacité algorithmique, le calcul, l’autorégulation, les boucles de rétraction et le feedback au service de l’extraction de valeur sur des marchés toujours plus standardisés, tel est le but dont le transhumanisme est la réalisation totale.
Je combats ce modèle parce qu’il est parfaitement irrationnel…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 29/06/2018
- https://doi.org/10.3917/ris.110.0119

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