CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Faire de la stratégie consiste bien souvent à prendre des décisions dans des situations d’incertitude et de complexité élevées. Ces décisions sont « non programmables » (Simon, 1980). D’une part, les informations qu’il serait nécessaire de collecter pour prendre une décision « optimale », sont trop nombreuses, parfois impossibles à obtenir et/ou à traiter, voire biaisées. D’autre part, de nombreuses variables entrent en jeu et il n’est pas toujours possible d’envisager des liens de causalité clairs (Marchesnay, 1993).
A partir des travaux fondateurs de Simon (1947), de nombreux auteurs ont cherché à comprendre comment le dirigeant peut décider dans de tels contextes et la recherche en management stratégique n’a pas été épargnée par les débats sur la rationalisation de l’action collective. Il est même surprenant de constater avec Aggeri et Labatut (2010, p. 23) que la turbulence des environnements auxquels les firmes doivent désormais faire face n’a pas freiné le développement de techniques et outils managériaux revendiquant certaines formes de rationalité, notamment instrumentale.
Deux tendances, qui s’inscrivent dans un mouvement de rationalisation visant à accroître la cohérence et l’efficacité des décisions stratégiques, peuvent ainsi être relevées. Tout d’abord, le développement de la comptabilité par activités (Activity Based Costing) en lien direct avec la construction de la chaîne de valeur et le succès rencontré par les tableaux de bord prospectifs (le Balanced Scorecar…

Français

L’approche de la stratégie par les règles simples, essentiellement développée par Kathleen Eisenhardt, peut être vue comme une réponse aux dangers de la sur-rationalité dans le champ du management stratégique. Cependant, cette approche est actuellement contestée dans ses fondements théoriques. L’objectif de ce papier est de contribuer au débat sur sa robustesse théorique en mobilisant des développements récents sur la théorie de la « simplexité ». Ces travaux montrent en effet qu’il peut être possible et pertinent de répondre à la complexité d’un environnement par des règles simples. La première partie de l’article permet de revenir sur cette approche de la stratégie. Ses liens avec la théorie de la simplexité sont ensuite abordés. Nous montrons que la simplexité offre un cadre théorique susceptible de renforcer la pertinence et l’intérêt des règles simples en management stratégique. Cependant, la mobilisation de la simplexité permet également de mettre en évidence les insuffisances actuelles de l’approche de la stratégie par les règles simples et d’envisager des pistes pour la densifier. Tout d’abord, les questions de la fiabilité, de la spécialisation et de la sélection semblent encore peu abordées. Ensuite, la notion de redondance semble avoir une signification différente dans la théorie de la simplexité. Enfin, les travaux d’Eisenhardt et ses collègues éclairent encore très partiellement les conditions d’émergence et de renouvellement des règles, notamment le rôle joué par la vision stratégique.

Mots-clés

  • complexité
  • décision
  • règle
  • simplexité
  • simplicité
Pascal Aurégan
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Pascal Aurégan est professeur des universités à l’Université de Caen-Normandie (IAE Caen). Ses travaux portent sur les stratégies de rupture et les stratégies fondées sur les règles simples
Albéric Tellier
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Docteur en sciences de gestion, agrégé des Universités, Albéric Tellier est Professeur de Management de l’innovation à l’Université de Caen Normandie. Au sein du centre de recherche NIMEC, il développe des travaux sur les stratégies et l’organisation de l’innovation
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Mis en ligne sur Cairn.info le 25/07/2018
https://doi.org/10.3917/rips1.058.0111
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