1La Fédération nationale des centres sociaux et socioculturels de France (FCSF), qui célèbre cette année son centième anniversaire, a adopté en 2019 une résolution affirmant sa volonté de s’engager dans les dispositifs de politique sociale menés par le gouvernement, en se gardant de « devenir de simples opérateurs administratifs ». Pour cette organisation, qui rassemble plus de 1 250 structures et 57 fédérations et unions locales, les centres sociaux doivent rester des lieux où chaque habitant doit pouvoir venir librement et où la dimension de l’« accès aux droits », qui est de plus en plus prégnante, doit être « coconstruite avec les usagers, les partenaires et les collectivités ». Leur mission est d’accompagner et former les populations et non pas de résoudre leurs problèmes en agissant à leur place.

2La crise ouverte par la pandémie de Covid-19 a rendu l’action des centres d’autant plus délicate que les déplacements et les contacts en présentiel ont été très limités par des dispositions sanitaires contraignantes, alors même qu’ils devenaient de plus en plus nécessaires pour permettre aux personnes les plus vulnérables d’accéder à une information mise à jour et aux processus pertinents pour exercer leurs droits.

3Au-delà de ses nombreux avantages, la dématérialisation du service public a généré des phénomènes comme « l’illectronisme », l’incapacité à utiliser couramment les outils de communication numérique. C’est une inhabilité qui touche les populations les plus fragiles du fait de l’âge, du déficit culturel, de l’isolement, de la pauvreté, de l’absence de domicile ; l’exclusion numérique renforce alors l’exclusion sociale.

4Afin de lutter contre cette fracture numérique en tentant d’en réduire les causes, des centres sociaux pilotes et expérimentaux baptisés « centres connectés » ont été créés à partir de 2017 dans des quartiers prioritaires de la région Hauts-de-France. Ils ont adopté une pédagogie active mobilisant les moyens et les méthodes nécessaires, de la mise à disposition d’équipements jusqu’à la réalisation de tutoriels, dans le cadre d’une animation territoriale inventant sa pratique en lien avec ceux à qui elle est destinée.

5Un bilan rapide mais éclairant de l’activité de ces centres connectés a été réalisé par la fédération Nord-Pas-de-Calais des centres sociaux [1]. Il souligne que si, au début de la pandémie, le numérique a été un outil indispensable pour maintenir la coordination professionnelle entre les travailleurs sociaux, il s’est aussi révélé très efficace par la suite pour développer les solidarités de proximité que le projet appelait. Effet peut-être induit par la nécessité dans un contexte exceptionnel, les travailleurs sociaux se sont félicités d’une baisse sensible des résistances à l’usage des outils informatiques parmi les personnes concernées par le projet – un espoir réel, à leurs yeux, de réduire la fracture numérique.