1Pour la psychologie sociale, les valeurs fondamentales sont des convictions souvent érigées en principes que nous considérons comme les repères essentiels sur lesquels nous nous fondons pour effectuer nos choix les plus importants et qui orientent donc nos actions et notre comportement. Elles se révèlent ainsi décisives pour expliquer l’organisation et le changement au niveau collectif comme individuel.
2Les valeurs suscitent l’intérêt depuis la Grèce antique et les écrits de Platon sur le fondement des gouvernements et de la responsabilité des citoyens. Plus récemment, elles ont alimenté des recherches, débats et polémiques auxquels sont associés, entre de nombreux autres, les noms de Tocqueville, Weber ou Durkheim et, plus près de nous, ceux de Milton Rokeach, Raymond Bourdon, François Bourricaud, Rudolf Rezsohazy.
3Bien que ces valeurs apparaissent à certains comme naturelles et spontanées, elles sont pour une large part un acquis provenant de l’éducation, du milieu socioculturel ou de la religion. Si elles sont repérables individuellement, leurs caractéristiques permettent de les étudier comme des objets collectifs. Elles sont à la fois plus ou moins personnelles et partagées par un groupe ou une société et plus ou moins globales, centrales dans une société et structurantes des comportements.
4Elles sont aussi souvent relatives et, parfois, liées entre elles par un principe de compatibilité ou d’opposition. C’est en travaillant sur ce critère de cohérence que le psychologue israélien Shalom Schwartz [1], professeur de psychologie sociale à l’Université hébraïque de Jérusalem, s’est attaché à rechercher s’il existait des valeurs fondamentales universelles reconnues comme telles dans toutes les cultures. Pendant quarante ans il a mené, avec Wolfgang Bilsky, des recherches au sujet des valeurs personnelles et culturelles, en s’appuyant principalement sur les travaux de Rokeach [2].
5Sa méthode l’a conduit à identifier dix valeurs de base, répondant à diverses motivations : le besoin biologique, d’interaction sociale, de survie et de bien-être au sein des groupes. Il a décrit, au moyen d’un outil de modélisation sophistiqué, les relations de compatibilité et d’antagonisme entre ces valeurs, c’est-à-dire leur structure. Ce modèle a ensuite été confronté aux résultats d’une enquête de validation par questionnaires menée auprès de 65 000 personnes dans 68 pays sur tous les continents, entre 1988 et 2002.
6L’analyse des résultats permet à S. Schwartz d’affirmer qu’il existe une organisation universelle des motivations humaines, même si les individus et les groupes se distinguent nettement les uns des autres sur l’importance qu’ils attribuent à leurs valeurs en termes de hiérarchie ou de priorité.
Notes
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[1]
Shalom Schwartz, 2006, Les valeurs de base de la personne : théorie, mesures et applications, trad. Béatrice Hammer et Monique Wach, Revue française de sociologie, Éd. Ophrys, vol. 47, p. 929-968, à consulter sur Cairn.info.
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[2]
Son approche est notamment présentée dans « Toward a Universal Structure of Human Values », Journal of Personality and Social Psychology, 1987, vol. 53, n° 3.