1Né à Paris en 1875, mort en 1957 en Normandie, Georges Hébert fut entre ces deux dates officier de marine, ce qui le conduisit à voyager dans la plupart des colonies françaises. Au cours de ces voyages, il constata la forme physique remarquable des indigènes et s’interrogea sur les raisons de celle-ci alors qu’aucune formation particulière ne leur était imposée en la matière. L’hypothèse qu’il forgea à partir de ses observations l’amena à l’idée de la « méthode naturelle », consistant à pratiquer des exercices liés à l’activité quotidienne ordinaire : la marche, la course, le saut, le grimper, le lever de charges, la quadrupédie, le lancer d’objets, l’équilibre, la défense et la natation.
2Dans la douzaine d’ouvrages qu’il publie entre 1907 et 1936, il définit une doctrine prônant, au-delà de la seule éducation physique, une pédagogie intégrale concernant aussi bien l’entretien et l’amélioration du corps que l’éducation morale à travers une valorisation de valeurs dites « viriles » comme la volonté ou le courage, toutes qualités devant permettre, selon une de ses formules restée célèbre, « d’être fort pour être utile ». Globalement, les idées d’Hébert sont à rapprocher du mouvement naturiste en vogue au début du XXe siècle : l’éducation physique naturelle est la première étape du développement d’un mode de vie et de pensée naturiste qui rapprocherait l’homme de la nature, à l’inverse de la vie « civilisée » qui l’en éloignerait [*].
3L’intérêt pour les propositions d’Hébert ne sort qu’autour des années 1950 du cercle des spécialistes de l’éducation physique pour devenir un sujet de débat public en France, au moment où la matière trouve sa place parmi les disciplines scolaires et reçoit à ce titre le soutien de l’État, ce qui pose du même coup la question des méthodes et des lieux de son enseignement. Jusque-là, des échanges – qui, pour se dérouler dans un milieu restreint, n’en avaient pas été moins vifs – avaient opposé les unes aux autres des institutions et des groupes idéologiques sur les questions de la finalité du sport et de son rapport à la science. Dans un article de la revue Staps, le sociologue et historien du sport Jacques Defrance [1] analyse ces débats qu’il interprète comme un révélateur particulièrement fécond de la sociologie de la culture des Années folles et des transformations qui caractériseront les conceptions du sport à l’avènement de la IVe République.
Notes
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[*]
Une analyse de la méthode prônée par Hébert et de ses fondements théoriques est proposée par Sylvain Villaret et Jean-Michel Delaplace dans un article de la revue Staps, 2004/1, n° 63.
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[1]
La signification culturelle de l’hébertisme. Étude de sociologie de la culture des années 20 et 30, visio.univ-littoral.fr/revue-staps/pdf/194.pdf