1La revue Territoires, qui avait pour sous-titre La Revue de la démocratie locale, a publié son premier numéro en 1990. Mais cette naissance était en fait une renaissance. Pendant près de trente ans, la revue avait été connue sous le nom de Correspondances municipales (CM).
2C’est au début des années 1960 que CM est devenue une revue régulière pour apporter un soutien technique aux élus minoritaires de gauche, élus dans des municipalités communistes. Cette situation résultait d’une politique dite « de la main tendue » du parti communiste envers les organisations de gauche, notamment catholiques, afin de tenter de limiter l’érosion de son influence aux élections municipales depuis le début des années 1950. Constatant que ces alliances n’offraient que des strapontins et des rôles de figuration, Roger Beaunez, animateur du Mouvement de libération du peuple, entreprit de fédérer et d’outiller ces élus minoritaires en renforçant leurs compétences militantes par la maîtrise technique des questions financières et juridiques.
3La revue est l’émanation d’un réseau associatif, dont les membres, à commencer par son comité de rédaction bénévole, sont issus de la haute Fonction publique. Ils militent, la nuit, en se baptisant « technocrates de progrès ». On trouve parmi eux Jean-Louis Bianco et Jean-Pierre Duport. Peu à peu, le lectorat s’étend aux techniciens municipaux, aux administrateurs et directeurs de Maisons des jeunes et de la culture, de Foyers de jeunes travailleurs et de centres sociaux. En 1975, Georges Gontcharoff démissionne de son poste d’enseignant et en devient le rédacteur en chef pendant une quinzaine d’années. Durant cette période qui précède et accompagne l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, la revue consacre ses numéros thématiques à des thèmes très techniques (finances locales, stratégies de gestion des services publics) ou plus généraux (la pauvreté, l’habitat, la décentralisation) ou, encore, renvoyant à la militance politique comme les Groupes d’action municipale (Gam) qui portèrent l’arrivée de la gauche non communiste aux commandes de bon nombre de communes.
4La revue fait partie du réseau l’Association pour la démocratie et l’éducation locale et sociale (Adels), qui mène des opérations de formation et d’édition sur le développement local. Elle s’appuie sur des expériences pionnières de gestion municipale, comme celle menée à la fin des années 1960 à Grenoble, dont Hubert Dubedout est le maire (il prendra en main la politique de la Ville au début des années 1980). À noter aussi la proximité politique avec le Parti socialiste unifié (PSU) animé par Michel Rocard, une formation très mobilisée sur les thématiques de la décentralisation, du pouvoir régional et du développement local. Un colloque sur ce thème rassemble en 1982 700 agents de développement pour présenter leurs diverses expérimentations. Quand CM devient Territoires en 1990, le changement de titre s’accompagne d’une modernisation de la maquette, qui intègre impression couleur et photos, et d’une professionnalisation de l’équipe. Surtout, les animateurs de la revue prennent acte d’un changement de lectorat : les élus ont été peu à peu remplacés par des militants de mouvements sociaux et des professionnels de divers secteurs. Cette formule vivra jusqu’en 2011.
5Elle s’arrête du fait de difficultés financières et peut-être, aussi, pour ne pas s’être ouverte à l’édition en ligne.
6Article réalisé à partir d’un entretien avec Georges Gontcharoff, le 5 juin 2013.
7Voir : http://www.adels.org/
