1Beaucoup de raisons justifient qu’on s’intéresse de façon prioritaire à la protection sociale. Il y a d’abord l’importance qu’elle revêt dans la vie quotidienne des Français à qui elle permet d’être correctement soignés et remboursés de leurs soins de santé, secourus s’ils subissent des accidents de la vie et assurés d’un revenu minimum lorsqu’ils ne pourront plus vivre de leur travail. Mais il y a aussi le poids de son financement, qui représente 600 milliards d’euros chaque année, soit presque un tiers du total des richesses produites par les agents économiques dans le pays. Si elle n’est pas toute la protection sociale à elle seule, la Sécurité sociale, la « Sécu », est à travers ses branches spécialisées l’outil essentiel de sa mise en œuvre. Elle constitue un symbole égalitaire et une institution à laquelle les Français sont d’autant plus attachés qu’ils savent qu’elle n’a que peu d’équivalents dans le monde. Largement ouverte à l’ensemble de la population, elle distribue en effet ses prestations avec une certaine générosité et permet à beaucoup de bénéficier d’une qualité de vie normale.
2En période économiquement difficile, ses mérites sont toutefois contestés par certains qui voient en elle un dispositif dispendieux que ses détracteurs considèrent comme un mode d’assistance, voire d’assistanat que le pays n’aurait plus les moyens de maintenir.
3Dans l’ouvrage qu’il vient de publier [*], Bertrand Fragonard, qui a successivement dirigé la branche Famille et la branche Maladie de la Sécurité sociale avant de gérer la délégation au Revenu minimum d’insertion (RMI), plaide avec vigueur pour l’institution dont il souligne le rôle essentiel dans le maintien de la cohésion nationale. Si des économies doivent évidemment être recherchées, dit-il, c’est donc à travers une meilleure gestion plutôt qu’au moyen d’une réduction des objectifs, la situation qui serait générée par une telle politique risquant de se révéler au final socialement et économiquement catastrophique.
4La question se décline fréquemment dans l’opinion autour d’une série de faux débats sur le coût de l’institution et ses faiblesses, que l’auteur inventorie avant de passer en revue les grands types de réponses qui sont données par les tenants des trois courants de pensée majoritaires qui s’expriment sur le sujet, respectivement baptisés « Gauche résistante », « social-démocrate » et « libéral ».
5Les grands principes qui ont guidé les fondateurs du régime de la Sécurité sociale n’ont rien perdu de leur pertinence et de leur validité. Il convient donc, dit B. Fragonard, de les défendre par l’adoption de réformes justes et efficaces menées sans crispation ni a priori.
6Deux scénarios semblent se dégager dans cette optique, celui de l’amélioration du contexte macroéconomique, qui générerait des recettes dynamiques permettant un retour à l’équilibre de gestion, et celui d’une politique plus volontariste supposant des réaffectations de moyens d’un risque à un autre pour renforcer le soutien à des besoins sociaux émergents ou actuellement moins bien pris en compte.
Notes
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[*]
Fragonard B., 2012, Vive la protection sociale !, Paris, Odile Jacob.