CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1L’arbitrage est probablement le moins bien connu des modes alternatifs de résolution des conflits (Marc). À cela on peut avancer deux raisons. La première est sa synonymie avec le contrôle du respect des règles sportives, qui connote le terme et l’accapare presque exclusivement. La seconde est le fait que l’arbitrage juridique s’exerce en général dans une certaine discrétion, ce qui est certes conforme à sa nature mais ne milite évidemment pas en faveur de la notoriété de la pratique.

2Longtemps limité au domaine du droit privé international, il a progressivement pris une place importante dans la vie judiciaire de nombreux pays et se développe en particulier régulièrement en France. Son terrain d’application principal est le droit commercial, mais il concerne aussi désormais les litiges entre professionnels de nature civile.

3L’arbitrage consiste pour des personnes, au lieu de s’en remettre à la justice, à choisir le ou les juges appelés à trancher un différend – présent ou à venir – qui les oppose, à s’entendre par avance sur les principes qui régleront la décision et à accepter celle-ci, quel qu’en soit le sens, en renonçant à recourir en aval à une procédure classique.

4S’il n’est pas une instance judiciaire mais un «?mode juridictionnel?», l’arbitrage n’est cependant pas une procédure clandestine. Il est en effet prévu dans le Livre IV du Code de procédure civile, qui établit sa légitimité et organise ses grandes lignes en définissant les matières qu’il peut concerner et celles qui lui échappent, comme l’état des personnes ou le droit de la famille.

5Son encadrement processuel est toutefois assez léger car le législateur a voulu que la liberté des parties soit aussi large que possible.

6Dans sa forme la plus courante, l’acte d’arbitrage est anticipé, les futurs plaideurs étant convenus par un acte appelé «?clause compromissoire?» qu’en cas de litige ils y recourraient. Mais il peut aussi être adopté après la naissance du litige, les parties en cause s’engageant alors sur un accord d’arbitrage dit «?compromis?». Il va de soi que les deux parties doivent être d’accord sur le principe du recours à un arbitrage, celui-ci ne pouvant être imposé à aucune d’elles.

7Trois avantages sont couramment reconnus à la pratique. Sa rapidité d’abord, qui permet de sortir d’une situation de blocage dans laquelle aucune des parties en cause ne peut plus agir. Dans bien des cas, et en matière commerciale ou industrielle en particulier, l’attente de l’inscription de l’affaire au rôle d’un tribunal, du déroulement de la procédure et des recours éventuels pourrait mener les plaideurs à la ruine. La discrétion représente le deuxième des atouts de l’arbitrage. Compte tenu de leur statut et de la nature des différends qui les opposent, lesquels peuvent présenter le caractère d’un secret commercial, économique ou industriel, les requérants ont parfois le souci de ne pas faire la moindre publicité à l’affaire qui les oppose. Mais il permet également de faire juger une affaire par des personnes, à la fois experts et juges, dont la compétence est reconnue dans un domaine où les connaissances d’un magistrat seraient peut-être insuffisantes, et d’aboutir ainsi à une décision équitable en droit et en fait.

Pierre Grelley
Sociologue et linguiste de formation, Pierre Grelley a exercé pendant vingt ans la fonction de documentaliste dans le secteur social, puis a assuré la valorisation des recherches au sein du Gip « Mission de recherche Droit et Justice ». Il est un collaborateur régulier de la revue Informations sociales et fait partie de l’équipe des rédacteurs de la rubrique « Contrepoints ».
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/06/2012
https://doi.org/10.3917/inso.170.0037
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