1Les réformes des politiques de l’emploi dans les pays de l’OCDE ont toutes, peu ou prou – avec la bénédiction de la Commission européenne – choisi d’inciter au retour à l’emploi avec des mesures concernant les chômeurs et les bénéficiaires de minima sociaux : diminution des indemnités et des allocations et développement de l’activation, assortie d’obligations et d’un renforcement de l’accompagnement individualisé et contractualisé.
2Depuis 2007, la crise et la montée du chômage dans la plupart des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont mis en lumière certains problèmes dans l’aide apportée aux chômeurs. En France, on relèvera principalement les difficultés dans l’accueil des demandeurs d’emploi, dans un contexte de réforme institutionnelle (avec la création de Pôle emploi), et dans la prise en charge des chômeurs en fin de droits. Pourtant, de nombreuses réformes ont eu lieu dans ce domaine depuis les années 1990, étayées par un discours sur l’efficacité et l’accompagnement « actif » dans la recherche d’un emploi. L’objectif de cet article est d’analyser les tendances de ces réformes, la place et le sens qu’elles accordent à la notion d’accompagnement, dans un cadre géographique large qui inclut la France ainsi que les pays de l’OCDE et de l’Union européenne (UE). Une première partie précisera les fondements conceptuels des réformes menées depuis deux décennies, tandis que la seconde proposera une vision synthétique de leurs principales modalités de mise en œuvre.
Les orientations de réforme des politiques de l’emploi depuis les années 1990?
3Depuis une vingtaine d’années, les politiques de l’emploi ont connu de très nombreuses réformes en France comme dans l’ensemble des pays de l’OCDE. Ces réformes s’appuient sur un paradigme commun, diffusé notamment par les organisations internationales, en particulier l’OCDE et l’UE. En effet, depuis 1997, les pays de l’Union se sont engagés dans un processus de coordination « souple » des politiques de l’emploi dans le cadre de la Stratégie européenne pour l’emploi. Bien que ces politiques demeurent une compétence nationale en vertu du principe de subsidiarité, une certaine convergence est recherchée à travers la fixation d’objectifs et d’outils communs et l’échange d’informations entre pays sur leurs « bonnes pratiques ». Les idées ainsi diffusées accordent une grande importance à la notion d’accompagnement des « parcours », que ce soit pour les chômeurs, les inactifs entrants sur le marché du travail ou les salariés en formation ou reconversion. Plusieurs concepts clés fondent cette approche : activation, Making Work Pay, flexicurité.
L’activation
4Le premier concept clé est celui de l’activation, qui devient prédominant dans le cadre de la Stratégie pour l’emploi de l’OCDE à partir de 1994. La notion d’activation a plusieurs fondements (Erhel, 2008 ; Dang et Zajdela, 2009). Tout d’abord, elle s’appuie sur l’expérience des pays nordiques, en particulier la Suède, qui ont fait des politiques actives de l’emploi un élément clé de la lutte contre le chômage et de la compétitivité économique. De plus, des développements de la théorie économique du chômage dans les années 1980 (voir le modèle Wage Setting Price Setting de Richard Layard et Stephen Nickell en 1986) viennent renforcer l’idée selon laquelle les politiques de soutien au revenu et d’indemnisation du chômage seraient une explication du niveau élevé du chômage dans certains pays de l’OCDE. Dans cette perspective, les politiques de l’emploi doivent prioritairement viser à faire baisser le coût du travail et accroître la concurrence sur le marché du travail, par l’affaiblissement de la protection de l’emploi des travailleurs intégrés et une meilleure employabilité des chômeurs. Non seulement le recours aux politiques passives doit être limité, mais celles-ci doivent viser à inciter au retour rapide à l’emploi (par exemple par la dégressivité des allocations chômage). C’est ce que l’on appelle la logique d’« activation » des politiques de l’emploi.
Making Work Pay
5Ce concept initial, qui au départ concerne principalement les chômeurs, a été ensuite élargi à l’ensemble des personnes se trouvant hors du marché du travail (inactifs, notamment les bénéficiaires de prestations sociales, jeunes…). Le curseur se déplace vers les problématiques d’incitation à l’activité, qui se situent à la frontière entre politiques sociales, politiques de l’emploi et politiques fiscales. En 1997, l’OCDE publie un rapport intitulé Making Work Pay (« la valorisation du travail »), dont les conclusions insistent sur la nécessité d’augmenter le différentiel entre les revenus du travail et les allocations chômage ou minima sociaux, que ce soit par la limitation du niveau ou des conditions de perception de ces revenus de remplacement, ou par des mécanismes fiscaux incitatifs, afin de promouvoir une société plus « active ». En France, le rapport Plein emploi, dirigé par Jean Pisani-Ferry (2000, p. 137), reprend cette perspective et insiste sur « les risques d’une désincitation à l’entrée du marché du travail et d’un enfermement dans la dépendance à l’égard de revenus de transfert ». L’activation dans un sens élargi vise ainsi à promouvoir l’emploi pour tous, quelle que soit sa situation personnelle, sur la base d’un système sociofiscal incitatif et d’un accompagnement renforcé pour les publics les plus éloignés du marché du travail.
6Cette notion est largement reprise par la Stratégie européenne pour l’emploi. Outre la fixation d’objectifs de taux d’emploi (70 % à horizon 2010 pour les 15-64 ans ; 75 % en 2020 pour les 20-64 ans), ses lignes directrices comportent des références explicites à cette logique d’intervention : « Assurer des marchés du travail qui favorisent l’insertion, renforcer l’attrait des emplois et rendre le travail financièrement attrayant pour les demandeurs d’emploi » (Lignes directrices, 2005). Ou encore : « Les États membres devraient réexaminer les systèmes fiscaux, les régimes de prestations sociales et la capacité des services publics à apporter l’aide nécessaire afin d’accroître la participation au marché du travail et de stimuler la demande de main-d’œuvre » (Lignes directrices Europe 2020, adoptées en 2010).
La flexicurité
7La « flexicurité » est un concept plus récent dans les travaux des organisations internationales, OCDE et CE. Il s’appuie sur des modèles théoriques et des exemples empiriques (en particulier celui du Danemark) montrant l’existence d’une complémentarité vertueuse entre flexibilité du marché du travail –?notamment en matière de licenciement?– et protection des salariés, par le biais de politiques actives de l’emploi et de la formation tout au long de la vie (sécurité des trajectoires ou des parcours plutôt que protection de l’emploi).
8La flexicurité est intégrée aux lignes directrices de la Stratégie européenne pour l’emploi et a fait l’objet d’une communication de la Commission en juin 2007 (COM [2007] 359), qui en définit les quatre piliers : « Des arrangements contractuels flexibles, un système de formation tout au long de la vie, des politiques actives de l’emploi efficaces et des systèmes de sécurité sociale modernes ». De manière générale, cette notion renvoie à l’idée selon laquelle il est possible et souhaitable, en termes de performances économiques et de soutenabilité du modèle social européen, de concilier la sécurité des travailleurs (du point de vue de l’emploi et de la protection sociale) avec la flexibilité du marché du travail. Bien qu’elle soit moins centrée sur des incitations financières, la flexicurité englobe l’activation et étend la logique d’accompagnement, au-delà des chômeurs et des inactifs, aux salariés en activité.
Les formes de l’activation et la place de l’accompagnement
9Une comparaison internationale montre que les politiques de l’emploi sont hétérogènes, que ce soit en termes de niveaux de dépenses, de générosité des prestations ou encore de leviers d’intervention. On distingue en général trois grands groupes de pays. Dans les pays anglo-saxons (États-Unis, Royaume-Uni…), les dépenses sont faibles et se concentrent sur le fonctionnement du marché du travail et l’aide au retour à l’emploi (avec des conditions d’indemnisation peu généreuses). Les pays du nord de l’Europe (Suède, Danemark…) interviennent fortement, avec une tradition de recours intensif aux politiques actives de l’emploi (formation, emplois subventionnés dans le secteur public), en complément de prestations généreuses. Enfin, les pays continentaux (France, Allemagne, Belgique, Autriche, Pays-Bas…) sont plus hétérogènes, mais ils ont en commun l’existence de revenus de remplacement assez généreux en cas de chômage ou d’inactivité (préretraites) et des dispositifs de soutien à l’emploi impliquant une baisse du coût du travail (subventions ciblées, formations en alternance). Si les trois tendances de réforme précédemment identifiées sont présentes partout, elles prennent des formes différentes selon les caractéristiques initiales et les traditions nationales des politiques de l’emploi (Barbier, 2006).
Les incitations financières comme base de l’activation
10L’activation a d’abord consisté en un mouvement de réduction des dépenses consacrées à l’indemnisation du chômage, poursuivant un double objectif d’allégement budgétaire et de limitation des effets potentiels de désincitation au travail liés à l’indemnisation. C’est notamment le cas des pays continentaux, où l’assurance-chômage était en général assez généreuse pour les salariés ayant cotisé suffisamment longtemps. En France (dès les années 1990) comme en Allemagne (en 2005), les réformes ont ainsi conduit à une réduction de la durée d’assurance et à un durcissement des conditions d’accès en termes de durée de cotisation. Il en résulte une baisse de la proportion de chômeurs indemnisés. Ces logiques restrictives ont été quelque peu atténuées depuis 2008 pour faire face à la crise. On relève par exemple un retour en arrière sur la durée d’indemnisation pour les plus de 55 ans en Allemagne et, en France, un accord d’extension de la prise en charge des chômeurs en fin de droits (avril 2010), qui prévoit une allocation exceptionnelle pour 325 000 d’entre eux (Erhel, 2010). Toutefois, ces mesures ont un caractère temporaire et ne remettent pas en cause la tendance à la restriction de l’assurance chômage. Ainsi, le gouvernement danois a décidé, en juillet 2010, une réduction progressive de la durée maximale d’indemnisation du chômage, qui va passer de quatre à deux ans, et un durcissement des critères d’éligibilité (52 semaines travaillées au minimum au cours des trois dernières années, contre 26 semaines dans le système antérieur). Cette mesure spectaculaire vise à réduire les déficits publics et constitue, par ailleurs, un prolongement de la logique d’activation qui s’était jusque-là traduite par un renforcement des obligations des chômeurs, sans diminution de la générosité des prestations.
11Conformément à la logique du Making Work Pay, les mesures d’incitation au travail se sont étendues au-delà des chômeurs et s’appliquent aux bénéficiaires de minima sociaux. Cette logique n’est pas nouvelle dans les pays anglo-saxons, qui ont mis en place des systèmes d’impôt négatif visant à augmenter le différentiel entre revenus du travail et allocations. Aux États-Unis, l’Earned Income Tax Credit date de 1975 et a été renforcé en 1993. Au Royaume-Uni, le Working Family Tax Credit (crédit d’impôt pour les familles qui travaillent) a été créé en 1999 ; il est versé tous les mois par l’employeur en complément du salaire (l’impôt sur le revenu est prélevé à la source dans ce pays) en dessous d’un seuil de ressources et pour toutes les familles d’au moins un enfant dont au moins un membre occupe un emploi d’au minimum seize heures par semaine. Depuis 2003, le dispositif a été étendu aux personnes sans enfant (Working Tax Credit). Ce type d’outil est apparu plus récemment dans d’autres régimes de protection sociale. En France, la création de la prime pour l’emploi, en 2001, répond à cet objectif d’incitation au travail en accordant un crédit d’impôt aux ménages dont les revenus du travail sont inférieurs à un certain plafond, de même que celle du Revenu de solidarité active (RSA) en juin 2009, lequel se substitue au Revenu minimum d’insertion (RMI) et à l’Allocation parent isolé (API), et limite la perte d’allocation en cas de reprise d’emploi.
Le renforcement du suivi des chômeurs ou bénéficiaires de prestations sociales
12L’activation passe également par l’instauration d’obligations, pour les chômeurs ou les bénéficiaires de prestations, qui conditionnent la perception des allocations. Cette logique a été développée de manière systématique au Danemark depuis 1994, où les chômeurs ont obligation d’entrer dans un dispositif de formation ou d’emploi aidé, dans le secteur public ou privé, au-delà d’une certaine durée de chômage (aujourd’hui un an). Au Royaume-Uni, les mesures dites de New Deal, créées par Tony Blair en 1998, incluent une dimension d’obligation qui s’impose aux jeunes après six mois de perception des allocations de chômage ainsi qu’aux chômeurs de longue durée après dix-huit mois. Les dispositifs proposés sont variés : emploi subventionné, formation à temps plein, emploi environnemental… Ces mesures ont été réformées récemment (en 2009) afin de proposer un dispositif unique (Flexible New Deal) qui reprend ce principe d’obligation (après 52 semaines de chômage). En France, la perception du RSA a pour contrepartie l’obligation de chercher un travail ou de définir et suivre un projet professionnel visant à améliorer sa situation financière.
13Plus largement, le principe de sanctions (suspension ou réduction des allocations chômage) en cas de non-respect de l’obligation de recherche active d’emploi ou de refus d’un emploi « convenable » s’est généralisé dans les pays de l’OCDE. Toutefois, en dépit d’un renforcement des contrôles, la part des chômeurs sanctionnés demeure très faible (dans le cas français, elle est d’environ 2 % des chômeurs indemnisés).
14Par ailleurs, sans aller jusqu’à obliger les personnes sans emploi à participer à des dispositifs de politique de l’emploi, de nombreux pays ont développé des procédures d’individualisation et de contractualisation visant à les aider au retour à l’emploi. En France, la réforme de l’indemnisation du chômage en 2001, avec la création du Plan d’aide au retour à l’emploi (Pare) et du Projet d’action personnalisé (Pap), correspondait à cette logique. Cependant, cette volonté d’individualisation/contractualisation s’est heurtée au manque de moyens en personnel et ne s’est pas généralisée.
Les réformes institutionnelles dans l’accompagnement des chômeurs
15Outre le développement de logiques d’incitation et d’obligation, les politiques d’accompagnement des chômeurs ont également été affectées par les nombreuses réformes institutionnelles. Deux tendances principales peuvent être relevées : la privatisation et le regroupement des services d’aide aux chômeurs dans des « guichets uniques ».
16L’ouverture de l’accompagnement à des opérateurs privés poursuit principalement deux objectifs : l’amélioration de l’efficacité de l’aide apportée aux chômeurs, d’une part, et la baisse des coûts de l’accompagnement, d’autre part. La concurrence entre le service public de l’emploi (SPE) et les opérateurs privés est censée améliorer l’efficacité de celui-là. Par ailleurs, la spécialisation des opérateurs sur des publics spécifiques peut améliorer la qualité des services, tandis que la flexibilité des systèmes d’appels d’offres permet de mieux s’adapter aux fluctuations conjoncturelles.
17Les formes prises par l’intervention d’opérateurs privés apparaissent variables selon les pays. L’Australie a été pionnière en la matière dès le début des années 1990, en instaurant une logique de sous-traitance à des opérateurs locaux (de statut privé marchand, privé non marchand ou public) rémunérés en fonction de leur efficacité évaluée en termes de placement. Aux Pays-Bas, depuis 2002, l’idée selon laquelle l’emploi temporaire peut constituer un tremplin vers l’emploi stable a conduit à accorder une place très importante aux entreprises de travail temporaire dans l’ouverture du marché du placement. En France, l’ouverture aux opérateurs privés a été soutenue par l’Unedic, avec l’introduction d’un système expérimental de sous-traitance à partir de 2005. Ces expérimentations ont été reconduites et la participation des opérateurs privés semble aujourd’hui acquise.
18Par ailleurs, la logique de regroupement des services d’aide aux personnes sans emploi, dite de « guichet unique », s’est développée. Elle concerne en premier lieu l’aide aux chômeurs, avec le regroupement des services d’indemnisation et des services d’aide au retour à l’emploi, et tend à s’étendre à l’ensemble des bénéficiaires de prestations sociales. Au Royaume-Uni, l’indemnisation et le placement ont fusionné dans les Jobcentres en 1995. En France, la loi de modernisation du marché du travail de janvier 2008 a prévu la fusion entre l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) et l’Unedic, qui a été mise en œuvre en 2009 avec la création de Pôle emploi. Au Danemark, les bureaux municipaux d’aide à l’emploi fusionnent avec les services nationaux.
19Mais cette logique d’intégration ne concerne pas que les chômeurs et s’étend aux bénéficiaires de minima sociaux. Au Royaume-Uni, les fonctions des Jobcentres ont été étendues en 2001 à l’ensemble des inactifs bénéficiaires de prestations sociales, en particulier les parents isolés et les personnes invalides, dans le cadre des Jobcentres Plus. Dans le cadre du RSA français, les bénéficiaires aptes à travailler sont également censés s’inscrire à Pôle emploi afin d’obtenir une aide à la recherche d’emploi et d’accéder à des programmes de formation ou d’emploi aidé.
L’accompagnement des salariés en transition professionnelle
20La démarche d’accompagnement « actif » vers l’emploi est utilisée pour d’autres publics que les chômeurs, suivant en cela le modèle de « flexicurité » et d’accompagnement des transitions. En effet, les salariés en emploi connaissent des mobilités, plus ou moins contraintes, durant leur carrière (mobilité volontaire, congés longs, formation, licenciements…). En France, les principaux services de conseil et d’accompagnement pour les salariés sont le bilan de compétences, créé en 1991, et la formation tout au long de la vie professionnelle (loi du 4 mai 2004, cf. Divay et Perez, 2010). Dans le cadre des plans sociaux, les salariés bénéficient le plus souvent de services de placement afin de faciliter leur reconversion. Cette logique de soutien aux transitions donne lieu à des innovations en matière de politique de l’emploi, tel le contrat de transition professionnelle (CTP), expérimenté depuis 2006 et étendu en 2009. Dans certains bassins d’emploi, le CTP offre la possibilité aux salariés touchés par des licenciements économiques dans des entreprises de moins de 1 000 salariés de suivre un parcours de transition professionnelle, qui comprend des mesures d’accompagnement, des périodes de formation ou de travail au sein d’entreprises ou d’organismes publics, tout en percevant une allocation assez généreuse (égale à 80 % de leur salaire brut moyen perçu au cours des douze mois précédents). Des dispositifs de ce type ont été mis en place dans de nombreux pays européens (centres de mobilité aux Pays-Bas, fondations de travail en Autriche…).
21En pratique, les outils et les structures intervenant dans ces processus d’accompagnement diffèrent selon qu’il s’agit de salariés en emploi souhaitant une mobilité professionnelle ou de salariés licenciés économiques bénéficiant d’un plan social. Néanmoins, une enquête de terrain (Divay et Perez, 2010) montre que l’ensemble des institutions impliquées (Centre interinstitutionnel de bilan de compétences, Fongecif et cabinets d’outplacement) partagent un discours sur l’individualisation du service, l’autonomie du salarié et son adaptation aux « contraintes » du marché du travail. En ce sens, ces services portent également un discours d’activation pour les salariés en transition, rejoignant les orientations à l’œuvre pour les chômeurs.
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23L’activation apparaît ainsi multiforme selon qu’elle met plus ou moins l’accent sur les incitations financières et les sanctions, ou selon la qualité et l’efficacité de l’accompagnement. Les pays anglo-saxons demeurent marqués par la prédominance des incitations financières à court terme, tandis que les pays du Nord (et dans une moindre mesure les pays continentaux) ont privilégié les logiques de parcours professionnels. Néanmoins, au-delà de la diversité des outils et des institutions, il apparaît que le discours sur le retour rapide à l’emploi (quelle que soit sa nature), sur la mobilité, etc., est aujourd’hui prédominant.
24Ces tendances soulèvent de nombreuses questions, à ce jour non résolues. En termes d’efficacité, les évaluations menées ne sont pas toujours concluantes. Par exemple, à propos du recours aux opérateurs privés, les études existantes ne permettent pas de montrer qu’ils ont une efficacité supérieure aux services publics.
25Dans l’ensemble, il n’est pas certain que les coûts de prise en charge des chômeurs aient diminué, les programmes renforcés d’aide au retour à l’emploi étant plus coûteux, surtout dans le cas de recours aux opérateurs privés. Par ailleurs, les pressions pour les résultats exercées sur les conseillers dans les institutions d’accompagnement entraînent des risques de dégradation de leurs conditions de travail, de la qualité du service rendu et, enfin, de l’emploi obtenu puisque ces employés poussent les chômeurs à accepter des emplois de moins bonne qualité.