CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Les associations d’usagers des services publics s’adressent potentiellement à tous les citoyens qui, à un titre ou à un autre, auront un jour affaire aux services de l’État. C’est dire si peu de Français échappent à leur emprise. Elles permettent en particulier d’assurer leur représentation et leur défense lorsqu’un différend intervient entre un administré et l’administration. Au-delà de cette fonction d’assistance et de contre-pouvoir, elles sont aussi, au fil du temps, devenues les partenaires de politiques publiques dont les responsables reconnaissent le rôle positif [*].

2Bien que leur périmètre de compétence, l’intérêt général, soit évidemment beaucoup plus large que celui des associations classiques, les associations d’usagers souffrent cependant d’une moindre fréquentation que leurs homologues « culturelles et sociales » auxquelles adhéreraient, selon une étude du CNRS [1], près de la moitié de nos concitoyens.

3Il aura fallu attendre assez longtemps pour que le citoyen n’accepte plus passivement le statut d’administré et qu’il commence à s’organiser pour faire prendre sa voix en considération dans l’organisation des services qui lui sont destinés. L’un des groupes pionniers de la lignée, l’Association des usagers de l’administration (Adua), fondée en 1985, se présente selon ses statuts comme « une association d’entraide des victimes d’excès, de carences, d’erreurs ou de retards dont sont responsables des administrations et des services publics », n’intégrant alors dans sa mission qu’une dimension défensive, dans une représentation antagonique des rapports entre l’État et le citoyen.

4Les associations d’usagers des services publics se distinguent des autres par les moyens et les méthodes qu’elles mettent en œuvre autant que par la nature et la portée de l’objet qu’elles se donnent. Qu’elles soient permanentes ou constituées pour un objectif ponctuel, hiérarchisées ou non, institutionnellement reconnues ou pas, leur finalité est de permettre à l’individu-sujet de jouer un rôle utile en l’aidant à compenser, outre les effets de son isolement, le déficit de connaissance du droit et des procédures qui fonde sa faiblesse face aux initiatives publiques.

5Les modes de relation entre les usagers et les services publics s’exercent selon une amplitude/échelle qui va crescendo de l’information à la participation, en empruntant les voies de la consultation et de la concertation ; mais ils font également, de plus en plus souvent, appel à des techniques de gestion qui sont inspirées par celles du service public, quand elles n’en sont pas l’exacte réplique, et qui supposent dans leur domaine l’acquisition d’une expertise qui est généralement l’apanage des agents de l’administration. Rien d’étonnant donc si l’on considère le nombre de ceux-ci qui jouent un rôle actif dans ces associations, après avoir servi dans l’administration ou parallèlement à leur carrière de fonctionnaire.

6L’examen des rôles assignés à l’administration et aux associations d’usagers révèle une évolution conduisant d’une certaine rivalité à l’établissement d’un partenariat qui va parfois jusqu’à l’acceptation d’une subvention, signe d’une relation partenariale assumée.

Notes

  • [*]
    Voir Brachet P., 1994, Le partenariat de service public avec usagers, élus, professionnels, Paris, L’Harmattan.
  • [1]
    Enquête CNRS - Matisse/Centre d’économie de la Sorbonne, 2005-2006.
Pierre Grelley
Collaborateur de la revue depuis de longues années (rubrique « Contrepoints »), Pierre Grelley est sociologue et linguiste de formation. Ingénieur d’études au CNRS, il a exercé des fonctions de documentaliste dans le secteur social. Il est actuellement chargé des questions de valorisation des recherches au sein du GIP Mission de recherche « Droit et Justice ».
Mis en ligne sur Cairn.info le 18/05/2010
https://doi.org/10.3917/inso.158.0059
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