CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1De quelle façon les clubs de réflexion appelés think thanks participent-ils à l’élaboration des politiques publiques ? Par la diffusion dans le débat public d’une idéologie qui légitime la « réforme » des droits sociaux au nom de l’économie. Telle est l’hypothèse forte développée par cet article.

2Comment évaluer l’influence des think tanks en matière de conception des politiques sociales ? Celle-ci paraît difficilement assimilable à l’application directe et visible par les pouvoirs publics de mesures précises conçues dans des laboratoires d’idées. Rares sont en effet les clubs de réflexion qui, comme l’Institut Montaigne, peuvent prétendre que près de 20 % de leurs propositions ont été discutées au Parlement, et se désigner ainsi avec certitude comme l’inspirateur direct de nombreux projets de lois [1].

3Notre hypothèse est que leur influence tient essentiellement à leur contribution au travail lent, diffus et continu de construction idéologique du débat économique et social, et en particulier à l’imposition collective dans le débat public d’un agenda de « réforme » des droits sociaux. Les conceptions dont ils sont le vecteur ne sauraient, par conséquent, être appréhendées en faisant abstraction des stratégies et des enjeux des groupes sociaux dont elles expriment les vues et les intérêts. Dans cet univers, tous les points de vue ne sauraient avoir la même force symbolique. Les orientations qui dominent sont en effet celles qui tendent à investir le « social » sous le seul angle de l’économie – et des économies à réaliser à ses dépens.

Les think tanks en France?

4Le terme think tank désigne un type d’institutions propre au monde anglo-saxon. Les critères qui visent à le définir sont relativement flous?(Boucher et Royo, 2009). Centre de recherche à but non lucratif, indépendant de l’Université, le think tank propose diverses formes d’expertise destinées à peser dans le débat public, à influer sur les décideurs publics. Aux États-Unis, leur évocation renvoie à ces grandes machines qui, telles la Brookings Institution, l’Heritage Foundation ou le Cato Institute, disposent de budgets très importants (jusqu’à plusieurs dizaines de millions de dollars) et d’équipes de chercheurs fournies. L’essentiel de leur financement provient des entreprises. Cette proximité avec le monde des affaires explique en grande partie pourquoi les plus visibles d’entre eux sont associés au camp des conservateurs. De nombreux travaux ont ainsi attesté le rôle essentiel que les think tanks ont joué dans la rénovation de la pensée conservatrice, dans le basculement à droite de la vie politique américaine (par exemple Smith, 1993), ainsi que dans l’imposition de mesures de politiques publiques orientées vers un accroissement du rôle du marché et vers une restriction du périmètre de l’État social (Stefancic et Delgado, 1996).

5Produit de l’histoire américaine, le modèle du think tank anglo-saxon n’a pas d’équivalent direct en France [2]. Néanmoins, le terme apparaît commode pour désigner toute une série de « groupes d’influence et de réflexion » (Moog, 2008) qui revendiquent cette fonction d’intervention dans le débat public français. Une certaine diversité idéologique est observable dans un espace structuré entre un pôle « libéral » et un pôle « social-libéral ». À droite ou au centre droit, on compte, par exemple, l’Institut Montaigne, créé par Claude Bébéar, le fondateur du groupe d’assurances Axa, et dont le mot d’ordre est « Réfléchir / Proposer / Influencer » ; l’Institut de l’entreprise, que dirige Michel Pébereau, le président du conseil d’administration de BNP Paribas ; ou bien la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol), imaginée par Jérôme Monod, ancien dirigeant de la Lyonnaise des eaux et ancien conseiller de Jacques Chirac. À gauche ou au centre-gauche, la Fondation Jean Jaurès a été lancée par le socialiste Pierre Mauroy ; la République des idées est présidée par l’universitaire Pierre Rosanvallon ; la Fondation Terra Nova est dirigée par le haut fonctionnaire Olivier Ferrand. Les laboratoires d’idées qui s’écartent de ce périmètre idéologique « centriste » sont plus rares, surtout s’ils contestent les lois du marché, telle la Fondation Copernic, animée par des militants de gauche qui souhaitent « remettre à l’endroit tout ce que le libéralisme fait fonctionner à l’envers ».

6La majorité des membres actifs des think tanks « classiques » sont des hauts fonctionnaires, souvent très « ouverts » au privé, qui cherchent à influer sur l’élaboration des politiques publiques, indirectement par ce biais ou plus directement par le passage dans les ministères. Ils se composent également d’universitaires – ou de docteurs et de doctorants ayant suivi cette voie – qui trouvent, par ce biais, le moyen de s’engager dans le débat public. Les méthodes d’action utilisées correspondent au savoir-faire de ces membres : diffusion de notes de synthèse, organisation de colloques, publication d’ouvrages, interventions dans la presse – avec toutefois des variantes significatives. En effet, les publics visés ou les canaux de diffusion ne sont pas identiques : très peu, par exemple, utilisent les voies du militantisme populaire, tandis que beaucoup organisent des déjeuners avec les décideurs publics. L’Institut Montaigne, qui privilégie l’envoi des notes de réflexion aux « leaders d’opinion », a également eu recours à des spots publicitaires à la télévision lors de la campagne électorale de 2007.
Tous ne bénéficient pas, en effet, d’un même accès à l’oreille des dirigeants politiques ni d’une forte visibilité médiatique. Le Cercle des économistes, animé par Jean-Hervé Lorenzi, a, par exemple, établi un partenariat avec Le Monde (pour le prix du meilleur jeune économiste), avec Les Échos (pour des tribunes régulières) et avec Radio classique (pour une émission quotidienne). La République des idées dispose, de son côté, d’une collection au Seuil et des colonnes ouvertes dans la presse de centre-gauche, à Libération ou au Nouvel Observateur. De son côté, Fondapol peut compter sur l’aura médiatique de son directeur général, le politologue Dominique Reynié. Les médias généralistes, dans le cadre de tribunes de presse ou de débats télévisés, font très souvent appel à ces experts, qu’ils présentent comme « neutres » car réputés porter un regard sur l’actualité non partisan ou dénué d’idéologie. La sélection des agents habilités à émettre un « point de vue » obéit toutefois à des censures puissances qui tiennent autant aux contraintes journalistiques (en termes de format notamment) qu’aux préjugés idéologiques en vigueur parmi les responsables de presse [3].

Les ressources mobilisées par les think tanks

7Les moyens disponibles sont également loin d’être équivalents (cf. Moog, 2008). Ainsi, l’Institut Montaigne affiche, en 2007, un budget de plus de trois millions d’euros, financé à 90 % par des entreprises?(parmi lesquelles : BNP Paris, Bouygues, Bolloré, Carrefour, EADS, HSBC France, LVMH, Suez, Total ou Vivendi) et rétribue neuf salariés. L’Institut de l’entreprise compte, parmi ses cotisants, les trois quarts des entreprises du Cac 40. Terra Nova, porte-parole d’une gauche qui se veut « moderne » et « réformiste », affiche, en 2009, un budget prévisionnel d’un million d’euros financés à 80 % par le mécénat d’entreprises. En face, les 30 000 euros de budget de la Fondation Copernic, qui proviennent uniquement des adhérents, pèsent peu. La structure n’emploie d’ailleurs aucun permanent. Les organismes liés aux mouvements sociaux doivent donc souvent s’appuyer sur le soutien d’un parti et sur le bénévolat des militants. De ce point de vue, l’opposé du think tank « à l’américaine », incarné par l’Institut Montaigne, serait l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’aide au citoyen (Attac), qui s’appuie sur un réseau de plusieurs milliers d’adhérents et se présente comme « un mouvement d’éducation populaire ».

8Les inégalités observables reflètent en fait les ressources sociales des réseaux dont le think tank se veut le porte-voix. Or, la majorité des laboratoires d’idées sont en fait des outils de mobilisation de groupes appartenant aux classes dominantes. Ces institutions fonctionnent ainsi comme des lieux d’échanges – de pensées, de services, d’amabilités, etc., à la manière d’un club social, dont le plus emblématique reste Le Siècle, fondé en 1944 – entre les membres des différents univers sociaux qu’elles parviennent à rassembler. S’y côtoient principalement des hauts fonctionnaires, des intellectuels, souvent affiliés à des établissements proches du pouvoir (notamment Sciences-Po et les écoles de commerce), des chefs d’entreprise et des élites du journalisme. La composition sociale des membres n’est pas sans rapport avec l’horizon idéologique qui est le leur, et qui a pour fondement l’acceptation du libéralisme économique ainsi qu’un certain tropisme conservateur. De ce point de vue, le recours au mécénat d’entreprise manifeste sans doute moins une dépendance directe qu’une frontière idéologique invisible – les analyses proposées « en toute indépendance » par les think tanks libéraux ne sauraient remettre en cause les intérêts des milieux d’affaires.

Le « social » au prisme de la raison économique

9Les idées promues par les think tanks qui dominent cet univers s’inscrivent dans une histoire longue et complexe, celle du triomphe progressif des doctrines économiques néolibérales, et conjointement de la répudiation des doctrines interventionnistes d’après-guerre – qui valorisaient un État planificateur, des politiques économiques tournées vers la recherche du plein-emploi et de la cohésion sociale (Lebaron, 2000 ; Denord, 2007). En matière de discours sur la protection sociale, les opinions patronales vont progressivement devenir la vision dominante, surtout à partir des années 1980. Les thinks tanks jouent un certain rôle dans ce revirement.

10À droite, c’est notamment l’époque où les clubs politiques diffusent un libéralisme made in USA, tandis que les clubs de réflexion cherchent à « briser les tabous » : au moment où s’affirment les études importées des États-Unis concernant l’« économie de la santé », l’Institut La Boétie, fondé en 1979 par le comte Bernard de La Rochefoucauld, introduit dans le débat public l’idée des « réseaux de soins coordonnés », c’est-à-dire la création d’« entreprises de santé » destinées à renforcer, dans le secteur, les logiques de concurrence (Benamouzig, 2005). À l’autre bord de l’échiquier politique, depuis le « tournant de la rigueur » de la gauche de gouvernement, le travail idéologique de réhabilitation du libéralisme se révèle, lui aussi, en plein essor. La Fondation Saint-Simon est en l’incarnation. Créée en 1982, sous l’impulsion de deux universitaires (François Furet et P. Rosanvallon) et de deux hauts fonctionnaires proches des milieux patronaux (Roger Fauroux et Alain Minc), l’association va rassembler, jusqu’à sa dissolution, en 1999 [4], un nombre important de gens d’influence issus des secteurs de l’entreprise, de la presse, de l’administration et de l’Université, dans le but de les faire dialoguer « au-delà des barrières du clivage gauche/droite ».

11Une des fameuses « notes » de la fondation est particulièrement révélatrice de cette entreprise de brouillage des repères idéologiques. En février 1994, Denis Olivennes, haut fonctionnaire chargé des questions d’emploi au cabinet du Premier ministre en 1992-1993, s’alarme de ce qu’il nomme « la préférence française pour le chômage ». Selon lui, le fort taux de chômage dont souffre la société française résulterait, en fait, d’un « choix collectif inavoué », celui de privilégier les transferts sociaux plutôt que les créations d’emploi. Accusé d’accroître le coût du travail et donc de dissuader les entreprises d’embaucher, l’État-providence est ainsi tenu pour responsable de cette situation. La solution proposée est celle d’une baisse des cotisations sociales des employeurs concernant les emplois non qualifiés. Plus largement, le futur patron de la Fnac et futur directeur du Nouvel Observateur en appelle à une réforme profonde de l’État-providence dans le but de limiter « la progression fulgurante des dépenses d’assurances sociales » et d’améliorer son « efficacité redistributive ». « La fiscalisation du prélèvement social » ainsi que la réorientation des dépenses sociales vers les plus démunis sont vivement recommandées pour parvenir à ces objectifs (Olivennes, 1994, p. 28-31).
À la même époque, le rapport de la commission présidée par A. Minc, commandé par le Premier ministre Édouard Balladur, rend visible les nouveaux consensus de la classe dirigeante en matière de politiques sociales. Celle-ci rassemble des personnalités influentes associées aussi bien à la gauche qu’à la droite (dont C. Bébéar, M. Pébereau et P. Rosanvallon), dans l’objectif de définir un programme commun de réformes visant à rendre « acceptable pour tous la course à l’efficacité et ses sacrifices » (Minc, 1994). Sur fond d’adhésion à l’Europe de Maastricht, il est – notamment – proposé de baisser les cotisations sociales sur l’ensemble des salaires et de « consolider la réforme des retraites » en développant la capitalisation. La recherche de « l’équité » est appelée à se substituer à la poursuite de l’égalité (Burgi-Golub, 1996). Une dizaine d’années plus tard, le rapport d’une autre commission, présidée cette fois par Michel Camdessus, en appelle à un « sursaut » (Camdessus, 2004), et développe une même conception visant à imposer sur l’agenda politique une série de réformes des droits sociaux. On peut la résumer en ces termes : le diagnostic est celui d’un pays qui rechignerait à s’adapter à la compétition économique mondiale ; pour dynamiser la croissance, les gouvernements sont appelés à dynamiter certains « archaïsmes » et certaines « rigidités » dans le domaine de la protection sociale et du Code du travail ; les solutions proposées sont, par conséquent, destinées à libéraliser l’économie et à renforcer les logiques du marché.

Le consensus sur la « réforme » de l’État social

12Le travail de légitimation de réformes trouve parfaitement son langage dans l’économie, discours d’autorité et faussement apolitique qui, sous l’apparence de lois « naturelles » et « scientifiques », tend à masquer les options idéologiques défendues. Cette vision du monde tire sa force symbolique du pouvoir social des acteurs qui le promeuvent, mais aussi des effets de légitimation que produit sa répétition dans différents espaces sociaux (dans la presse, dans les écoles du pouvoir ainsi que dans les commissions gouvernementales). Elle imprègne, en effet, tout particulièrement les lieux communs que promeuvent les intellectuels prisés des médias (Pinto, 2009) et les éditorialistes en vue (Halimi, 2005). Si les formulations diffèrent, le noyau des croyances (rejet de la « vieille gauche », de l’« étatisme », etc.) qui la nourrit ne change guère. Cette vision irrigue la littérature des think tanks libéraux.

13La campagne présidentielle de 2007, marquée par un investissement important des économistes associés à des laboratoires d’idées, en a fourni une nouvelle démonstration (Lebaron, 2007). L’Institut de l’entreprise a publié un ouvrage au titre choc C’est possible ! Voici comment… (Pébereau et Spitz, 2007), au contenu explicite. Tandis qu’un chapitre s’écrie « toujours la préférence pour le chômage ! », un autre appelle à « donner un nouveau départ à l’assurance maladie ». Fondé sur un constat alarmiste, ce « nouveau départ » consiste en une série de solutions prétendument techniques visant, notamment, à accroître la fiscalisation?(« plus de CSG et moins de cotisations sociales ») ou à renforcer la participation financière des patients (pour les « responsabiliser »). Certes, les think tanks qui se situent au pôle « social-libéral » se démarquent des propositions les plus rudes et développent plus fréquemment des discours appelant à contenir les forces du marché. Néanmoins, leurs analyses considèrent pour acquises les grandes orientations qui fondent le nouveau consensus idéologique et privent l’État de ses moyens de contrôle sur l’économie (l’Europe néolibérale, la dérégulation de la finance, le libre-échange, etc.). En témoigne l’ouvrage exemplaire du Cercle des économistes, Politique économique de droite, politique économique de gauche (Cercle, 2006). Ce dernier se propose de faire dialoguer les propositions de la gauche « moderne » et celles de la droite « libérale », afin de déterminer la marge de manœuvre d’un futur gouvernement, mais considère comme impossible la révision des traités européens (qui imposent la rigueur) et inéluctable la baisse du coût du travail (afin de « s’adapter » à la concurrence).

14Cette domination de la raison économique enferme le « social » dans une logique à la fois financière et marchande. La protection sociale se trouve appréhendée dans l’optique comptable de dépenses à contenir, et le monde du travail comme un simple marché qu’il s’agirait de fluidifier. Pourtant, ni la Sécurité sociale ni le Code du travail ne trouvent leur raison d’être dans des logiques économiques. Comme le rappellent les travaux de sociologues (Duval, 2007 ; Pierru, 2007), les fausses évidences sur les « déficits » de la Sécurité sociale font oublier les modes de pensée très différents qui ont présidé à sa création (le refus de l’assistance, la protection des travailleurs, le choix d’un système de protection public et universel, le principe de la solidarité nationale, etc.). Braquées sur les questions des déficits, elles détournent le regard du problème essentiel des manques de financement et des facteurs qui ont conduit à la situation financière dénoncée (tels que l’abandon des politiques de plein-emploi ou la part croissante du capital dans la répartition de la richesse). Enfin, la vision dominante relègue dans l’ombre les effets sociaux des réformes engagées, qui conduisent au renforcement des inégalités sociales et à la précarisation croissante des travailleurs.

15***
La fonction d’un think tank est sans doute moins de produire des idées nouvelles que de faire circuler un ensemble de croyances partagées par les élites en matière de régulation publique. Si tous les think tanks revendiquent une « indépendance d’esprit » et une contribution désintéressée au débat d’idées, tous ne disposent pas d’un même pouvoir d’influence, et la majorité d’entre eux servent essentiellement de relais aux préoccupations de groupes appartenant aux classes dominantes. Ces laboratoires d’idées qui dominent le débat public jouent ainsi un rôle essentiel dans l’élaboration d’une « doxa intellectuelle », que le sociologue Louis Pinto définit comme un « ensemble de mots, d’expressions, de slogans, de questions et de débats dont les évidences partagées délimitent ce qui est donné à penser aux contemporains » (Pinto, 2009). Cette doxa répudie les conceptions associées à une forte intervention de l’État dans l’économie au nom de la justice sociale.

Notes

  • [1]
    Cf. « Les essais de Montaigne », Libération, 8 mars 2007. Les modalités de construction de ce chiffre ne sont pas précisées. Il va de soi qu’il est dans l’intérêt de l’institution d’exagérer son influence supposée.
  • [2]
    Remarquons que les centres de recherche français dont le modèle d’expertise s’en rapproche le plus sont spécialisés dans les relations internationales, notamment l’Institut français des relations internationales (Ifri) et l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris). Toutefois, notre propos se réfère aux think tanks à vocation généraliste ou spécialisés dans les questions économiques et sociales.
  • [3]
    Pour de nombreux exemples en ce sens, on renverra au site de critique des médias Acrimed (Action-critique-média), http://www.acrimed.org
  • [4]
    Selon Pierre Rosanvallon, cofondateur de la Fondation Saint Simon, son histoire était alors « accomplie », notamment parce que le Parti socialiste était désormais « réconcilié » avec l’exercice du pouvoir et le libéralisme. Cf. Rosanvallon P., « La Fondation Saint-Simon, une histoire accomplie », Le Monde, 23 juin 1999.
Français

Résumé

Les think tanks – ou laboratoires d’idées – sont des institutions de caractère privé qui proposent des formes d’expertise destinées à influer sur la conception des politiques publiques. Cet article fait l’hypothèse que leur influence tient essentiellement au travail lent, diffus et continu de construction idéologique du débat économique et social. Une première partie présente brièvement l’univers des think tanks et rappelle qu’il est structuré par de fortes inégalités. La seconde décrit les orientations idéologiques qui dominent cet univers et évoque les mécanismes sociaux qui les produisent. La conclusion suggère que le triomphe d’une vision économique libérale heurte fortement la logique propre du « social ».

Bibliographie

  • Benamouzig D., 2005, La santé au miroir de l’économie. Une histoire de l’économie de la santé en France, Presses universitaires de France.
  • Boucher S. et Royo M., 2009, Les think tanks. Cerveaux de la guerre des idées, éd. du Félin.
  • Burgi-Golub N., 1996, « Égalité, équité. Les catégories idéologiques des politiques publiques », Politix, n° 34.
  • Camdessus M., 2004, Le sursaut. Vers une nouvelle croissance pour la France, La Documentation française.
  • Cercle des économistes, 2006, Politique économique de droite, politique économique de gauche, Perrin.
  • Denord F., 2007, Néolibéralisme version française. Histoire d’une idéologie politique, éd. Demopolis.
  • Duval J., 2007, Le mythe du « trou de la sécu », Raisons d’agir.
  • Halimi S., 2005, Les nouveaux chiens de garde, Raisons d’agir.
  • Lebaron F., 2000, La croyance économique. Les économistes entre science et politique, Le Seuil ; 2007, « Économie : retour sur une campagne américaine », Savoir/Agir, n° 1.
  • Minc A., 1994, La France de l’an 2000. Rapport au Premier ministre, Odile Jacob/La Documentation française.
  • Moog P.-E., 2008, Les groupes de réflexion et d’influence en Europe, L’Express.
  • Olivennes D., 1994, « La préférence française pour le chômage », note de la Fondation Saint-Simon, n°?60.
  • Pébereau M. et Spitz B. (coord.), 2007, C’est possible?! Voici comment…, Institut de l’entreprise, Robert Laffont.
  • Pierru F., 2007, Hippocrate malade de ses réformes, Le Croquant.
  • Pinto L., 2009, Le café du commerce des penseurs. À propos de la doxa intellectuelle, Le Croquant.
  • Smith J. A., 1993, The Idea Brokers. Think Tanks and the Rise of the New Policy Elite, Free Press.
  • Stefancic J. et Delgado R., 1996, No Mercy. How Conservative Think Tanks and Foundations Changed America’s Social Agenda, Temple University Press.
Antoine Schwartz
Politiste
Chercheur en science politique à l’Université Paris-Ouest-Nanterre, il achève une thèse de doctorat consacrée aux libéraux français du Second Empire. Ses recherches, centrées sur l’analyse des idéologies, portent également sur la sociologie des médias et la construction européenne. Il a notamment publié (avec F. Denord) L’Europe sociale n’aura pas lieu, Paris, Raisons d’agir, 2009 ; « Bonne Europe et mauvaise France. Les éditorialistes français interprètent le vote ‘‘non’’ au traité constitutionnel européen (mai 2005) », Politique et société, vol. 27, 2, 2008 ; « La publication du Rappel à l’ordre et la polémique sur les ‘‘nouveaux réactionnaires’’ », in D. Buxton, F. James (dir.), Les intellectuels de médias en France, Paris, L’Harmattan-INA, 2006.
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/02/2010
https://doi.org/10.3917/inso.157.0060
Pour citer cet article
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