CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Les règles applicables en France en matière d’adoption répondent au souci de “donner des parents aux enfants et non de fournir un enfant à des parents”. Pour savoir comment ce principe se traduit dans les faits, la démographe Catherine Villeneuve[1] a analysé les données de dossiers administratifs soumis à l’aide sociale du département des Yvelines entre 1998 et 2000, et conduit des entretiens avec environ un sur trois des candidats à l’adoption qui les avaient déposés.

2Les données recueillies permettent de dégager un certain nombre de caractéristiques qui semblent accompagner, chez les parents, le succès de la démarche, et définir chez les enfants, même si on ne peut pas dire qu’ils font l’objet d’un “choix”, les critères d’une plus grande attractivité.

3Du côté des parents, les facteurs les plus importants sont le statut conjugal, la taille de la famille, l’âge et la situation sociale ; de celui des enfants, le pays de naissance, l’âge, l’existence d’une fratrie et l’état de santé.

4Être marié constitue sans aucun doute un atout essentiel pour les candidats à l’adoption, puisque 93 % des agréments délivrés dans le cadre de l’étude ont été accordés à des couples conjugaux, contre 7 % à des célibataires. Mais il convient d’observer que lorsque l’agrément a été obtenu, les femmes célibataires mènent leur projet à terme dans 90 % des cas, alors que seulement 20 % des couples le concrétisent.

5Par ailleurs, le désir d’adopter des candidats qui sont déjà parents d’un enfant biologique aboutit moins souvent, principalement du fait d’un renoncement, que celui des parents qui ont uniquement des enfants adoptés ou qui n’ont pas encore d’enfant.

6Enfin, même si le terrain de l’étude, le département des Yvelines, n’est pas représentatif, l’étude souligne que “l’adoption apparaît comme un « privilège » des classes supérieures et moyennes”, sans que la sous-représentation des catégories sociales les moins favorisées – qui semble se fonder plutôt sur des facteurs culturels – puisse être imputée à une quelconque mauvaise volonté administrative.

7Les enfants “souhaités”, eux, doivent plutôt répondre à des critères de statut, parmi lesquels le lieu de naissance, la France – ou à défaut l’Europe – et l’Asie se trouvant au premier rang des préférences. La deuxième condition importante est le fait d’être seul adoptable dans sa fratrie (la loi impose l’adoption concomitante des éventuels frères et sœurs adoptables afin d’éviter les séparations). Trois autres “conditions” paraissent encore discriminantes : l’âge de l’enfant (il est majoritairement souhaité “le plus jeune possible”), son sexe (les filles sont trois fois plus espérées que les garçons) et son état de santé qu’on attend bon, 2 % seulement des personnes interrogées se déclarant prêtes à accueillir un enfant handicapé.

Notes

  • [1]
    Catherine Villeneuve-Gokalp, “Quand les parents sont choisis « dans l’intérêt supérieur de l’enfant »”, communication faite au colloque de Dakar (10-13 décembre 2002) “Enfants d’aujourd’hui. Diversité des contextes, pluralité des parcours”, publiée dans la Revue de l’AIDELF, n° 11, tome 1, 2006 (diffusion PUF).
Mis en ligne sur Cairn.info le 12/05/2008
https://doi.org/10.3917/inso.146.0011
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