1Allier les savoirs de l’expérience et ceux de la connaissance théorique pour former des professionnels constitue un projet éducatif idéal. C’est sans doute chez le travailleur social, qui est confronté à des problèmes très généraux par le truchement d’interventions sur des individus tous particuliers qu’une telle conjonction s’impose avec le plus d’évidence, le savoir-faire même talentueux étant inopérant sans de solides références intellectuelles, lesquelles, en retour se révèlent vite stériles si elles ne s’appuient pas sur une pratique éprouvée.

2La mise en place, en France, d’un système de cette nature repose sur une série de propositions, développées au cours des années soixante-dix, par des spécialistes des sciences de l’éducation soucieux de moderniser les méthodes pédagogiques des “professionnels de la relation”. Parmi celles-ci, la conviction qu’un apprentissage n’est pas terminé par l’obtention d’un diplôme ni définitivement validé par une pratique, même si celle-ci est assurée.

3Faute de pouvoir créer l’alchimie dès la formation initiale des futurs travailleurs sociaux, le parti a été pris d’enrichir leur expérience dès qu’elle aura pu se constituer. À l’origine de cette initiative, un enseignant à l’École pratique des hautes études, Henri Desroche (disparu en 1994), théoricien de la formation par alternance et de la construction d’alternatives universitaires par la mise en place de formes coopératives de recherche, de formation et d’intervention.

4Un diplôme original, situé au niveau d’une première année de master et permettant d’accéder au stade supérieur, est né de ce mouvement. Sous des noms différents (DHEPS, DUEPS…), il est actuellement proposé dans un réseau d’une vingtaine d’établissements d’enseignement supérieur, universités et collèges coopératifs, partageant la dénomination de Réseau des hautes études en pratiques sociales (RHEPS) [1], constitué en 1982. Les modalités d’accès à cette formation et de sa validation sont déterminées par le réseau en fonction des exigences académiques puisqu’il s’agit d’un diplôme. Ce dernier consiste dans tous les cas en un cursus sur deux années au terme desquelles le candidat soutiendra un mémoire de recherche-action lui permettant de faire la preuve de sa capacité à intégrer des éléments théoriques pertinents dans l’analyse de sa pratique professionnelle. L’une des originalités de la formation est de s’ouvrir largement à des acteurs du social possédant un niveau licence (soit direct, soit par validation des acquis professionnels) et une pratique professionnelle d’au moins cinq ans, à quoi il convient d’ajouter une très forte motivation car malgré la qualité de l’accompagnement offert aux candidats, un tel retour aux études sous la forme d’une activité de recherche est loin d’avoir le rythme tranquille d’une année sabbatique.