1Depuis le 1er janvier 2005, les enfants issus d’un couple, marié ou pas, peuvent porter soit le nom de famille de leur père, soit celui de leur mère, soit l’un et l’autre, dans l’ordre choisi par leurs parents. À noter cependant qu’ils ne pourront transmettre, en devenant eux-mêmes parents, qu’un seul de ces deux noms. Cette novation est l’effet d’une loi votée en juin 2003 qui répond en grande partie à la volonté d’harmoniser le droit français de la famille avec le droit européen, seules désormais, au sein des membres fondateurs de la communauté, la Belgique et l’Italie conservant l’attribution obligatoire et unique du nom du père à l’enfant légitime.
2Si la mesure [1], en rendant possible la transmission du nom de la mère, permet d’enrayer le mouvement de ”disparition des noms de famille” qui est quelquefois dénoncée par les généalogistes, elle ne concerne cependant pas, malgré la souplesse qu’a voulu lui conférer le législateur, les enfants qui n’auraient été reconnus que par un seul de leurs géniteurs, ni, pour des raisons évidentes, ceux qui ont des frères ou sœurs nés avant le 1er janvier 2005, à qui l’ancien système continue de s’appliquer.
3Soucieuse de ne pas créer de situations ambiguës, la loi précise en effet que la solution qui aura été retenue pour le premier enfant vaudra également pour tous ceux qui naîtraient par la suite du même couple, afin de ne pas créer de différences artificielles, au sein d’une fratrie légitime.
4Les débats parfois vifs qui ont accompagné la présentation puis la discussion des modalités de cette loi n’ont pas manqué de surprendre dans un pays où la multiplication des ”familles recomposées” transforme certaines boîtes aux lettres en véritables listes d’appel.
5C’est que les enjeux qui sont engagés sur cette question ne sont pas anodins. Élément constitutif de l’identité individuelle et collective, le nom patronymique a fait l’objet, au cours des dernières années, d’études principalement juridiques. Approche nécessaire mais insuffisante compte tenu de la nature très particulière du problème.
6Les neuf études qui sont rassemblées dans un récent ouvrage dirigé par Agnès Fine et Françoise Ouellette [2] éclairent d’une lumière à la fois pluridisciplinaire et interculturelle les débats. L’anthropologie et la sociologie apportent en effet de riches enseignements sur les soutènements psychologiques, sociaux et culturels du débat sur le statut juridique du nom. Qu’il s’agisse du nom de famille ou du prénom, qui sont considérés l’un et l’autre dans ce travail, des pratiques de nomination en France ou au Québec, voire au Brésil puisque des différents champs géographiques sont concernés par l’ouvrage, les analyses présentées soulignent avec vigueur les enjeux qui sont attachés à la gestion des identités nominales.