1Alors que, chaque année, 10 000 foyers font une demande d’agrément pour adopter un enfant, l’INED a réalisé une enquête, en 2001-2002, dans dix départements pour mieux connaître le profil des candidats à l’adoption [1]. Neuf fois sur dix, il s’agit d’un couple, et quand la demande émane d’une personne seule, c’est quasiment toujours une femme : seulement 5 des 1 857 dossiers étudiés dans le cadre de cette étude (soit 0,3 %) avaient été déposés par un homme seul – dont aucun, par la suite, n’a vu sa requête satisfaite.
2Attente d’une conception qui ne vient pas, essais de traitements médicaux et durée de la procédure (trois ans en moyenne) : ces différents délais se cumulent, expliquant que les mères adoptives ont, en moyenne, 38,5 ans lorsque leur couple accueille un premier enfant (contre 27,5 ans, âge moyen des femmes à leur première maternité en 2001-2002). De leur côté, les femmes seules, déposant leur demande environ quatre ans plus tard que celles qui vivent en couple, sont également plus âgées à l’arrivée de l’enfant. Si tant est, bien sûr, que leur démarche ait abouti : alors qu’elles constituent 11 % des candidats, les femmes seules ne représentent plus que 7 % des adoptants.
3D’une catégorie sociale à l’autre, les chances d’accueillir un enfant sont, aussi, très inégalement réparties. Ces inégalités résultent essentiellement d’un phénomène d’auto-sélection des candidats, en amont de la procédure. Ainsi, chez les couples dont l’homme est âgé de 30 à 49 ans, il y a seulement 19 % d’ouvriers parmi les postulants – et 17 % chez les adoptants –, alors que dans les départements de l’enquête, les ouvriers constituent 35 % de la population masculine. Les cadres, en revanche, représentent 25 % des candidats – et 28 % des adoptants –, alors qu’ils ne comptent que pour 16 % dans la population de référence. Quant aux couples dont l’homme appartient à une catégorie moyenne (employés ou professions intermédiaires), ils sont également sur-représentés parmi les candidats (46 % contre 34 % pour l’ensemble des hommes de 30-49 ans vivant en couple), et ils voient quasiment toujours leur demande satisfaite (45 %).
4Chez les femmes qui vivent seules, la propension à l’auto-élimination est encore plus accentuée. Parmi elles, on ne compte quasiment pas d’ouvrières candidates à l’adoption – et aucune adoptante –, alors qu’il y a 11 % d’ouvrières dans la population féminine considérée. Les employées sont aussi nettement sous-représentées : elles constituent 45 % de l’ensemble des femmes seules, mais seulement 24 % des postulantes et 18 % des lauréates. En revanche, 49 % des candidates et 48 % des adoptantes appartiennent à la catégorie des professions intermédiaires, dont relèvent seulement 22 % des femmes seules. Quant aux femmes cadres, qui comptent pour 8 % dans la population féminine de référence, elles représentent 24 % des candidates à entreprendre, seules, une démarche d’adoption, et 34 % de celles dont la demande est couronnée de succès.
Notes
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[1]
Cf. “L’adoption en France : qui sont les adoptés, qui sont les adoptants ?”, par Juliette Halifax et Catherine Villeneuve-Gokalp, INED, Population et sociétés, n° 417, novembre 2005.