1La filiation est longtemps apparue comme un modèle de simplicité : tout enfant est nécessairement né de l’union d’une femme et d’un homme et ne peut avoir, même s’il peut parfois exister un doute sur l’identité de son concepteur, voire, plus rarement, de sa génitrice, qu’un seul père et qu’une seule mère.
2Il a fallu que les sociétés nouvellement découvertes soient étudiées par les anthropologues pour qu’on prenne conscience du moindre intérêt que présentait la filiation réduite à sa dimension biologique par rapport à la filiation instituée, c’est-à-dire attestée par la société. Sans système de parenté établi par une société, les liens de sang ne renvoient qu’à l’animalité… C’est donc bien l’ensemble des règles culturelles et juridiques retenues par une société pour définir ce qui permet aux groupes sociaux de se constituer en transmettant la qualité de membre qui se révèle fondateur, plus que le seul succès d’un rapport fécondant. Le droit distingue, on le sait, la filiation légitime, la filiation naturelle, la filiation adultérine et la filiation adoptive en fonction du statut établi soit entre les parents, soit entre l’un des parents et l’enfant, cette différence ayant surtout servi à fonder la transmission des principaux éléments juridiques et politiques du statut des personnes relevant des groupes, d’où l’intérêt porté aux lignes patrilinéaire et matrilinéaire de filiation, tout enfant devant, du fait du principe d’exogamie, appartenir soit au groupe de son père soit à celui de sa mère, mais pas aux deux.
3Le terme de parenté, dont le sens commun suggère un principe de proximité, revêt le statut très particulier d’un système symbolique. Il s’agit en effet ici d’une pure construction intellectuelle qui, selon les termes de Claude Lévi-Strauss, ”ne consiste pas dans des liens objectifs de filiation ou de consanguinité donnés entre les individus [mais] n’existe que dans la conscience des hommes, [et] est un système arbitraire de représentations”. En anthropologie sociale, l’étude de la parenté vise essentiellement les phénomènes sociaux qui marquent les relations de consanguinité aussi bien que d’affinité (alliance, mariage).
4Le terme de lignage implique toujours entre tous ceux qui en font partie un lien de parenté par le sang qui remonte à un ancêtre commun plus ou moins éloigné. Mais son sens varie considérablement, selon qu’il reconnaît indifféremment toutes les lignes généalogiques qui descendent de l’ancêtre commun ou qu’il privilégie au contraire l’une d’entre elles : patrilinéaire ou matrilinéaire. Enfin, certains auteurs appellent encore lignage un ensemble de personnes qui se réclament d’un même ancêtre par règle de filiation indifférenciée, c’est-à-dire en descendant de lui aussi bien par les hommes que par les femmes.
5Plus récemment, on a opposé le lignage à la parentèle, qui réunit, à partir d’un individu, l’ensemble de ses consanguins. Si le lignage est un groupe distinct, qui porte un nom et peut agir en relation avec d’autres lignages, la parentèle est seulement une classe d’individus tous parents d’une personne donnée. Les parentèles se recouvrent souvent les unes les autres et ne sont ni perpétuelles ni détentrices de droits distincts et transmissibles.