Elian Djaoui, Intervenir au domicile, Rennes, ENSP, coll. “Politiques et interventions sociales”, 2004, 227 p., 27 euros
1En psychosociologue averti, Elian Djaoui sait bien que le domicile n’est pas seulement ce territoire privé qui échappe aux regards – souvent considérés comme inquisiteurs – des “autres” mais une réalité complexe dont la pluralité des dimensions, économique, politique, socioculturelle et psychoaffective, rend l’analyse délicate. En effet, le domicile est aussi, dit l’auteur, “une donnée dynamique, interactionniste, le produit d’influences réciproques entre l’habitant et son cadre de vie”. Comprenons par là qu’il n’est ni un cadre rigide totalement contraignant pour ceux qui s’inscrivent en lui ni, à l’inverse, une enveloppe passive qui serait soumise aux seules initiatives de ceux-ci.
2Pour le travailleur social, opérer au domicile n’est donc pas agir en milieu neutre mais, au contraire, s’aventurer dans un espace très profondément investi par ses habitants. Cette particularité comporte à la fois des avantages et des inconvénients. Du côté des inconvénients, il y a le caractère intrusif de l’intervention, le professionnel pouvant d’autant plus être perçu comme un “contrôleur” qu’il est souvent mandaté par l’administration ou par la justice. Du côté des avantages, il y a l’opportunité d’une observation in situ et en profondeur du sujet, l’acuité de la vision du visiteur pouvant lui permettre de remarquer le détail éclairant qui donnera un sens aux constatations de routine.
3“Aller à la rencontre de l’intimité de l’autre, affronter le malheur à vivre […] dans ce lieu très spécifique stimulent l’imaginaire des différents protagonistes – professionnels, usagers, familles, élus, « décideurs », employeurs – même si souvent, il demeure nié ou tu”, écrit encore très justement Elian Djaoui.
4On songe évidemment en lisant ces pages au Visiteur du pauvre du baron de Gérando. Cet ouvrage sera en effet, lui aussi, d’une grande utilité pour tous les intervenants sociaux, mais il faut savoir gré à Elian Djaoui d’avoir su élargir la perspective un peu trop théorique de son prédécesseur en intégrant dans son propos les acquis de recherches récentes et de les avoir mis en perspective avec les véritables préoccupations des acteurs.