1Quel impact un divorce peut-il avoir sur le devenir et, en particulier, sur la carrière scolaire des enfants ?
2Si elle n’est plus d’une actualité brûlante, la question n’est pourtant pas sans pertinence et les nombreuses réponses qu’elle a reçues au fil du temps n’ont cependant pas épuisé la curiosité qu’elle suscite et inspirent encore à des chercheurs le souci d’apporter des données nouvelles au débat. La démarche socio-démographique entreprise par Paul Archambault [1] dans le cadre de la thèse qu’il a soutenue en octobre 2002 à l’Université Paris-V sur “le devenir des enfants de familles dissociées” relève à l’évidence de cette intention.
3Le parti qui a été retenu par l’auteur est double : s’appuyer uniquement sur des données de type statistique et démographique et s’attacher à neutraliser les variables “parasites” qui nuisent trop souvent à la lisibilité des travaux sociologiques.
4Les données quantitatives ont été, pour l’essentiel, empruntées à une étude biographique menée par l’INED avec le concours de la CNAF et à deux enquêtes de l’INSEE portant sur l’emploi des jeunes. Quant aux facteurs susceptibles de brouiller l’interprétation, ce sont ceux que pourraient constituer l’appartenance à un milieu social ou culturel privilégié ou, au contraire, défavorisé. Il est en effet établi, par exemple, qu’à milieu social identique, les enfants des mères les plus diplômées font des études plus longues et obtiennent eux-mêmes plus de diplômes.
5Les conclusions sont nettes : “Quel que soit le milieu social, la rupture du couple parental est associée à une réussite scolaire plus faible chez l’enfant.” Ce déficit se traduit non seulement par une durée réduite de la scolarité (six mois à un an en moyenne pour les séparations intervenant avant la majorité des enfants ) mais également et presque mécaniquement, par une moindre importance du diplôme obtenu à la fin des études.
6Pour les enfants appartenant aux catégories socialement et culturellement favorisées, la séparation des parents agit comme un “correctif” puissant de l’avantage initialement possédé : les chances d’obtenir un diplôme universitaire de deuxième cycle chutant de 45% à 25%.
7Pour les enfants des classes défavorisées, souligne encore Paul Archambault, une sortie sans diplôme du système scolaire s’observe dans 50 % des cas lorsque les parents sont séparés alors qu’elle n’est que de 37 % si le couple n’est pas dissocié.
8La séparation des parents constitue-t-elle la cause des difficultés rencontrées par les enfants au cours de leur scolarité ou n’est elle que le révélateur d’un dysfonctionnement familial lui-même générateur d’obstacles à la réussite scolaire des enfants ? La question reste posée et si l’investigation conduite par Paul Archambault n’y répond pas, ce à quoi elle n’était d’ailleurs pas destinée, elle invite à reconsidérer avec prudence quelques-unes des réponses rassurantes mais aussi partielles qui lui ont été apportées depuis une trentaine d’années.
Notes
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[1]
Paul Archambault, “Séparation et divorce : quelles conséquences sur la réussite scolaire des enfants ?” in Population et Société, n? 379, mai 2002.