L’article 17 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), en instituant un dialogue entre les institutions européennes et les organisations tant religieuses que non-confessionnelles, consacre ainsi leur contribution spécifique au fonctionnement de l’Union. Insérée en droit primaire européen par le traité de Lisbonne, entré en vigueur en 2009, la disposition confère dès lors une base juridique à un mécanisme existant en réalité, quoique dans un cadre informel, depuis plusieurs décennies. Effectivement, le dispositif voit le jour dans le contexte du projet « Une âme pour l’Europe », initié en 1994 par Jacques Delors, alors président de la Commission européenne. Il fait suite à des rapprochements entamés dès les années 1980, nourris par les efforts mutuels des dirigeants européens et des représentants religieux (Pasikowska-Schnass, 2020). L’idée d’inclure les communautés convictionnelles à la vie politique de l’Union vise à ôter à cette dernière son image d’entité désincarnée, de machine bureaucratique éloignée des citoyens européens et de leurs réalités sociales. En d’autres termes, à insuffler une âme à la construction européenne, une identité qui la rapproche de ses citoyens et de leurs croyances (Nelsen et Guth, 2016). Pour autant, le fondement même du dialogue, en érigeant les communautés religieuses et philosophiques au rang d’interlocuteurs dont l’avis est susceptible de guider l’orientation des politiques supranationales, peut aussi bien susciter la division que l’unité parmi les États membres…