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Pour saisir la place qu’occupe l’Europe dans la conscience présente, voire dans l’imaginaire des jeunes générations, sans doute faudrait-il traiter de la façon dont on se résout à une évidence. Depuis près de soixante-dix ans, donc bien antérieurement à leur présence au monde, la construction européenne est une réalité. Les jeunes sont nés avec l’Europe, dans l’Europe. Nombre d’entre eux se sentent européens, même si leur appartenance première reste nationale. L’Europe est ce « quelque chose » qu’ils ont en plus, qui leur a été attribué, qui va de soi, sans que cela ait nécessité de leur part un investissement particulier. Leur appartenance à l’Europe reste abstraite, vécue en extériorité. Ils ne s’en saisissent pas, la faisant vivre dans une relation de familiarité mais à distance. Comment l’expliquer ?
L’Europe ne fut pas leur combat. Ce sont les générations d’avant, celles de leurs grands-parents d’aujourd’hui, celles de la guerre qui l’ont désirée, voulue, imposée. Les pères fondateurs de la dynamique européenne sont des hommes pétris par les drames de la seconde guerre mondiale (Robert Schuman, Alcide De Gasperi, Paul Henri Spaak, Konrad Adenauer) et l’affaire européenne a été portée sur les fonts baptismaux par des élites politiques et économiques ayant fondé, dans les années 1950‑60, les institutions européennes en dehors de toute mobilisation populaire. Ce n’est que beaucoup plus tard, avec les élections européennes de 1979, que les électeurs seront convoqués pour entrer dans le processus européen et, sauf exception, ce scrutin ne mobilisera jamais vraiment les ardeurs civiques…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 27/10/2022

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