L’ambivalence est certainement ce qui caractérise le mieux le rapport de la Chine aux organisations non gouvernementales (ONG), qu’elles soient proprement chinoises ou qu’elles s’articulent dans le cadre de mouvements plus internationaux.
Ambivalence parce que la Chine est gouvernée depuis maintenant plus de 70 ans par un Parti communiste peu enclin à voir s’autonomiser ce que l’on a coutume d’appeler la société civile. Également parce que le Parti s’est lui-même doté dès le départ d’« organisations de masse », les plus importantes étant la Fédération nationale des femmes, la Ligue de la jeunesse communiste et la Fédération nationale des syndicats, dont le rôle est précisément de mobiliser la société au service du politique, et non l’inverse. Mais avec la politique « d’ouverture et de réforme » lancée par Deng Xiaoping fin 1978, les rapports à la société vont se transformer, abandonnant « la lutte des classes » au profit de relations plus apaisées qui culmineront dans les années 2000 avec l’idée de « société harmonieuse ». Plus encore, aux « quatre modernisations » qui sous-tendent les transformations des années 1980 – dans l’agriculture, l’industrie, les sciences et technologies et la défense nationale – est venue s’adjoindre le rêve d’une cinquième, largement popularisée par le dissident chinois Wei Jingsheng, celle de la « démocratisation » du régime, ou tout du moins d’une plus grande séparation de l’État et du Parti.
Avec le massacre des étudiants aux abords de la place Tian’anmen le 4 juin 1989, cette première trajectoire « modernisatrice » va connaître un temps d’arrêt et ne reprendre qu’avec la relance des réformes en 1992-93…